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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/11588/2022

ACPR/50/2023 du 19.01.2023 sur ONMMP/3495/2022 ( MP ) , REJETE

Recours TF déposé le 21.02.2023, rendu le 17.11.2023, REJETE, 7B_27/2023
Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;ESCROQUERIE;VIOLATION D'UNE OBLIGATION D'ENTRETIEN;VIOLATION DU DEVOIR D'ASSISTANCE OU D'ÉDUCATION
Normes : CPP.310; CP.217; CP.219; CP.146

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/11588/2022 ACPR/50/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 19 janvier 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, comparant par Me Diane BROTO, avocate, CG Partners, rue du Rhône 100, 1204 Genève,

recourante,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 10 octobre 2022 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte déposé le 24 octobre 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 10 octobre 2022, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur les faits visés par sa plainte et refusé le séquestre sollicité.

La recourante conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de cette ordonnance et à ce qu'il soit ordonné au Ministère public d'ouvrir une instruction et de donner suite à sa demande de séquestre.

b. La recourante a versé les sûretés en CHF 1'200.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ et B______ se sont mariés le ______ 1998. De leur union sont nés cinq enfants: C______ (née le ______ 2002); D______ (née le ______ 2005); E______ (né le ______ 2005); F______ (née le ______ 2009) et G______ (né le ______ 2014).

b. Ils se sont séparés en janvier 2017 et ont initié les démarches en vue de divorcer au mois d'octobre suivant, par l'introduction, dans un premier temps, d'une requête commune de divorce avec accord complet auprès du Tribunal de première instance de Genève (ci-après: TPI).

Cet accord a ensuite été annulé par B______ le 20 novembre 2017, sans que A______ ne s'y oppose, ce qui a entrainé l'ouverture d'une procédure de divorce contradictoire.

c. Le 1er novembre 2018, B______ a versé à A______ la somme de CHF 2'057'829.-, censée correspondre à la capitalisation de l'entretien mensuel de chaque membre de la famille depuis le 1er septembre 2017 jusqu'à la majorité des enfants, respectivement jusqu'au 31 octobre 2021 pour leur mère.

d. Par ordonnance sur mesures superprovisionnelles du 11 juin 2020, le TPI a ordonné le blocage, en mains du notaire, du produit net de la vente, par B______, de l'ancien domicile conjugal, afin de préserver les droits de A______ jusqu'au jugement de divorce.

e. Le 16 octobre 2020, le TPI a tenu une audience de comparution personnelle. À teneur du procès-verbal, A______ et B______ se sont entretenus avec le juge, leurs avocats respectifs ont ensuite quitté la salle, l'entretien a continué en leur absence, puis ceux-ci sont revenus.

À l'occasion de cette audience, les parties sont parvenues à un accord global quant aux effets accessoires du divorce. Dans le dispositif, ainsi convenu, figurait l'obligation pour B______:

- de verser à A______, d'ici au 30 novembre 2020, un montant net d'EUR 28.5 millions, en sus des sommes bloquées en mains du notaire;

- de transférer à A______ la pleine propriété de toutes ses parts de la "SCI H______", libres de toute dette.

Moyennant la bonne et fidèle exécution de ces obligations, A______ renonçait à faire valoir toute autre prétention contre B______ sur la base de la liquidation du régime matrimonial. En outre, il était acté que ce dernier avait d'ores et déjà avancé les contributions d'entretien dues aux enfants jusqu'à leur majorité; les frais ultérieurs nécessaires à l'entretien de ceux-ci leurs seraient versés directement.

Au terme de cette audience, les parties ont sollicité – et obtenu – un délai, avant la ratification par le TPI du dispositif, pour mettre en œuvre certains aspects de la liquidation de leur régime matrimonial, soit notamment le paiement de la créance en liquidation de celui-ci.

f. S'est ensuivi le dépôt, de part et d'autre, de conclusions nouvelles relatives à la mise en œuvre du dispositif du 16 octobre 2020, les parties ne s'accordant pas sur la manière de procéder; de même que des échanges entre avocats dans le cadre desquels B______ a réitéré son intention d'exécuter cet accord, par le biais de l'ouverture d'un compte de dépôt-séquestre où la soulte due à A______ serait versée, puis libérée en faveur de cette dernière sur présentation d'un jugement de divorce entré en force.

g. Par jugement du 19 avril 2021 (JTPI/4956/2021), le TPI, après s'être assuré que le dispositif convenu entre les parties lors de l'audience du 16 octobre 2020 avait été conclu "après mûre réflexion", "de plein gré" et qu'il n'était pas "manifestement inéquitable", l'a ratifié et rejeté les nouvelles mesures provisionnelles sollicitées par A______ visant à obtenir une exécution anticipée de cet accord ou le dépôt de sûretés.

Ledit jugement est entré en force le 21 mai 2021.

h. Entre les mois de mai et octobre 2021, A______ a exigé, en s'adressant directement à B______ par messages, ou sous la plume de son conseil, le versement du solde dû en sa faveur.

En particulier, par missive du 20 juillet 2021, elle l'a formellement mis en demeure de s'exécuter d'ici au 30 suivant.

Ces demandes sont restées sans réponse, ni réaction, de la part de B______.

i. Le 29 novembre 2021, A______ a entamé, à Singapour, où B______ était parti s'installer depuis le mois de septembre 2018, une procédure en reconnaissance du jugement de divorce.

Dans le cadre de celle-ci, l'intéressé a, par acte du 3 janvier 2022, admis l'existence dudit jugement mais nié devoir une quelconque somme d'argent à son ex-épouse.

Dans une écriture du 15 mars 2022, il a justifié sa position aux autorités singapouriennes, expliquant, notamment, avoir déjà versé plus de EUR 2 millions à A______, qui avait reçu en sus, le 16 juillet 2021, une somme équivalente, correspondant au produit de la vente de l'ancien domicile conjugal. En outre, il accusait son ex-épouse de s'interposer dans les relations avec ses enfants.

j. Par courrier du 27 mai 2022, A______ a déposé plainte contre B______ pour escroquerie (art. 146 CP), violation d'une obligation d'entretien (art. 217 CP) et violation du devoir d'assistance (art. 219 CP).

Le précité n'avait toujours pas procédé au versement des EUR 28.5 millions, ni transféré la pleine propriété des parts de la "SCI H______". Si elle avait renoncé, le 16 octobre 2020, au versement d'une contribution d'entretien, c'était en contrepartie des "revenus confortables" à percevoir à titre de créance matrimoniale. Or, en l'absence du versement de celle-ci, ses besoins personnels n'étaient plus couverts par B______ depuis le paiement des EUR 2'057'829.-, correspondant à son entretien mensuel capitalisé jusqu'au 31 octobre 2021. Ce dernier avait ainsi usé de subterfuges, de mensonges et de machination pour la convaincre d'accepter une solution amiable et rapide au litige, le tout en sachant qu'au bout du compte, il n'exécuterait pas l'accord convenu. D'ailleurs, B______ prétendait ne plus vivre à Singapour depuis septembre 2021, sans fournir de nouvelle adresse, rendant toute communication compliquée, voire impossible. Ce faisant, il l'avait "trompée de manière vile" et "astucieusement spoliée de créances de plusieurs dizaines de millions découlant de la procédure de divorce, afin de s'enrichir illégitimement à [s]es dépens, [la] privant non seulement de [s]es droits découlant de la liquidation du régime matrimonial de la participation aux acquêts mais également de pouvoir subvenir à [s]on entretien convenable post-divorce". En outre, B______ interférait auprès des enfants, de manière à "saper" son autorité et favorisant l'aliénation parentale. Leur fille D______ – mineure – vivait mal cette situation et sa santé s'en trouvait fragilisée. Elle avait ainsi déposé pour sa fille, le 5 mai 2022, une requête en mesures de protection auprès du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: TPAE).

Dans un courrier de son conseil accompagnant la plainte, A______ a requis "la mise sous séquestre de l'ensemble des avoirs, biens mobiliers et immobiliers" que B______ détiendrait sur le territoire suisse.

k. À teneur des pièces au dossier, le TPAE a sollicité un rapport d'évaluation auprès du Service de protection des mineurs (ci-après: SPMi) et nommé une curatrice de représentation pour D______. Aucune autre décision n'a été prise, hormis une exhortation à un travail de thérapie mère-fille.

l. Invitée par le Ministère public à fournir tous renseignements utiles sur les actifs et les biens éventuellement détenus par B______ en Suisse, A______ a répondu ignorer leur(s) lieu(x) de situation. Les seules informations dont elle disposait dataient de 2017-2018, sans savoir si elles étaient toujours d'actualité. Du fait notamment qu'il versait régulièrement de l'argent à une de leur fille, il devait vraisemblablement avoir conservé ou ouvert un compte en Suisse. B______ détenait en outre des actions d'une société suisse dont il était l'associé gérant et avait probablement "toujours un pied dans les affaires" d'une autre. Il était toutefois "hautement probable" que B______ "[eût] toujours un pied dans les affaires d'une société en Suisse et qu'il y [détînt] des participations et/ou des actions à ce titre".

m. Le 23 septembre 2022, A______ a transmis au Ministère public une ordonnance de la Cour suprême de Singapour du 16 précédent.

Pour ne pas s'être présenté à deux audiences devant cette autorité, visant à l'interroger sur le lieu de situation de ses biens, B______ a été condamné à une peine privative de liberté de sept jours et un mandat d'arrêt a été émis à son encontre.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public retient que A______ devait – ou à tout le moins, pouvait – savoir, dès le 3 janvier 2022, que B______ estimait ne lui devoir aucune somme d'argent. Dès lors, sa plainte pour violation d'une obligation d'entretien, déposée le 27 mai 2022, était tardive. Subsidiairement, de l'aveu même de A______, celle-ci avait renoncé à toute contribution d'entretien. Ainsi, la somme réclamée à B______ constituait une créance liée à la liquidation du régime matrimonial, ne fondant pas une obligation d'entretien au sens de l'art. 217 CP. Concernant l'escroquerie alléguée, l'accord du 16 octobre 2020 avait été ratifié par le TPI, lequel s'était préalablement assuré de son équité et de l'adhésion pleine et éclairée des parties, assistées de conseil, à son contenu. Par la suite, B______ avait proposé, à plusieurs reprises, un mécanisme de dépôt-séquestre pour procéder au versement des sommes dues, solution refusée par A______. Aucun élément ne permettait ainsi de retenir une tromperie astucieuse de B______, ni quant à l'accord, ni quant à son intention de l'exécuter. Le litige avait en réalité trait au recouvrement d'une créance de nature civile exclusivement. Les enfants des parties, et en particulier D______, étaient manifestement confrontés au contexte conflictuel du divorce de leurs parents, qui les plaçaient dans un conflit de loyauté. Cela étant, rien ne permettait d'établir que D______ présenterait des troubles durables de son développement psychique et physique pour cette raison. Les conditions de l'infraction réprimée par l'art. 219 CP n'étaient dès lors pas réunies. Enfin, le séquestre sollicité par A______ ne remplissait pas les conditions légales, à défaut de soupçons suffisants laissant présumer la commission d'une infraction pénale.

D. a. Dans son recours, A______ se plaint d'une "constatation inexacte et erronée" des faits sur plusieurs points. Notamment, le Ministère public n'avait pas considéré que l'accord du 16 octobre 2020 avait été discuté hors présence des avocats. B______ avait ainsi profité du "climat intimiste et de confiance" pour la convaincre, "sous l'égide de la représentation de la Justice qu'[était] le Juge civil", de concilier et, par-là même, de renoncer à des sommes importantes à titre de liquidation du régime matrimonial et de contributions d'entretien. En outre, la finalité donnée au versement de CHF 2'057'829.-, à savoir le paiement de l'entretien mensuel – capitalisé – dû pour les enfants jusqu'à leur majorité, et pour elle, jusqu'au 31 octobre 2021, découlait d'une interprétation unilatérale. En réalité, elle n'avait pas, à l'époque, renoncé à toute contribution d'entretien, ni pour les enfants, ni pour elle-même. Plus généralement, il n'était mentionné nulle part qu'elle avait explicitement renoncé à une telle contribution, sa renonciation était au contraire implicite et liée au fait que son entretien faisait partie intégrante de la créance matrimoniale qu'elle était censée recevoir. Enfin, s'agissant des enfants, elle allègue que B______ avait "vraisemblablement" encouragé E______ à quitter le domicile conjugal en lui louant une chambre et que, plus globalement, il cherchait à placer les enfants au centre du conflit, en "favorisant et en laissant fuser" les insultes tenues par ceux-ci à son encontre [à elle].

L'ordonnance querellée consacrait en outre une violation du droit, en lien avec les art. 146, 217 et 219 CP. Préalablement, le Ministère public semblait considérer "sans aucune nuance" que B______ était exempt de tout reproche et que ses comportements étaient "acceptables", alors que les multiples procédures, en Suisse et à l'étranger, les condamnations et le non-respect de décisions judiciaires par ce dernier constituaient des "indices concrets qui, en corrélation avec les faits dénoncés [ ], mérit[ai]ent instruction de la part des Autorités pénales".

L'argumentaire du Ministère public s'agissant de l'infraction d'escroquerie n'était pas soutenable au regard des faits dénoncés, en particulier à la lumière de ceux exposés ci-avant. Pour la violation d'une obligation d'entretien, le Ministère public ne pouvait soutenir la tardiveté de la plainte, dès lors que de jurisprudence constante, il s'agissait d'une infraction continue, dont le délai de plainte ne commençait à courir qu'après la dernière omission coupable. En outre, l'autorité intimée jugeait prématurément son for intérieur pour déterminer à quelle date elle devait savoir que B______ n'avait pas l'intention de s'acquitter de sa créance. La nature de celle-ci, liée à la liquidation du régime matrimonial, n'était pas non plus de nature à écarter toute application de la norme visée, en particulier en raison du fait qu'elle n'avait jamais renoncé stricto sensu à une contribution d'entretien et que la créance matrimoniale servait "le double postulat de remplir la destination de créance de liquidation et d'entretien". À titre subsidiaire, s'il devait être retenu qu'elle avait renoncé à une contribution d'entretien, ce refus devait être examiné sous l'angle d'une éventuelle escroquerie. Pour la violation du devoir d'assistance ou d'éducation, il ressortait des messages échangés entre B______ et les enfants que celui-ci incitait ceux-ci à "la haine". En outre, il favorisait l'éloignement avec leur mère, même pour ceux mineurs, risquant de la sorte leur développement physique et psychique. D______ faisait déjà l'objet d'une mesure de curatelle sur décision urgente, notamment pour des comportements autodestructeurs, et il convenait d'attendre – si nécessaire, en suspendant la procédure – le rapport d'évaluation du SPMi.

Une prévention pénale suffisante justifiant l'ouverture d'une instruction et les conditions de la mesure étant réalisées, le séquestre sollicité devait être prononcé.

À l'appui de son recours, A______ produit des pièces nouvelles, parmi lesquelles figurent:

- la page de garde d'une demande de révision du jugement de divorce JTPI/4956/2021 adressée par elle le 3 juin 2022 au TPI;

- divers documents liés à la procédure par-devant le TPAE, d'où il ressort notamment que D______ aurait été victime, durant son enfance, d'abus sexuels de la part d'un proche. C'est notamment dans ce contexte que le SPMi a sollicité la mise en place d'une curatelle ad hoc de soins pour D______;

- des captures d'écran de conversations dans un groupe incluant B______, C______, D______, E______ et F______, dans le cadre desquelles B______ les informe que leur mère veut "annuler les vacances d'octobre" car il ne veut pas rester en Suisse, ce qui provoque l'incompréhension et l'indignation des enfants.

b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger, sans échange d'écritures ni débats.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et – faute de notification conforme à l'art. 85 al. 2 CPP – dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

1.2. Les faits nouveaux et les pièces nouvelles produites par la recourante sont également recevables, la jurisprudence admettant leur production en deuxième instance (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2022 du 17 novembre 2022 consid. 2.1).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             La recourante reproche au Ministère public une constatation "inexacte et erronée" des faits. Dès lors que la Chambre de céans jouit d'un plein pouvoir de cognition en droit et en fait (art. 393 al. 2 CPP; ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 p. 198; arrêt du Tribunal fédéral 1B_524/2012 du 15 novembre 2012 consid. 2.1.), les éventuelles constatations incomplètes ou inexactes du Ministère public auront été corrigées dans l'état de fait établi ci-devant.

Partant, ce grief sera rejeté.

4.             La recourante reproche au Ministère public de ne pas avoir donné suite à sa plainte.

4.1. Selon l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Cette disposition doit être appliquée conformément à l'adage "in dubio pro duriore" (arrêt 6B_1456/2017 du 14 mai 2018 consid. 4.1 et les références citées). Celui-ci découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et 2 al. 1 CPP en relation avec les art. 309 al. 1, 319 al. 1 et 324 CPP; ATF 138 IV 86 consid. 4.2 p. 91) et signifie qu'en principe, un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés par le Ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies. Le Ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un certain pouvoir d'appréciation (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 p. 243).

4.2. À teneur de l'art. 217 al. 1 CP, celui qui n'aura pas fourni les aliments ou les subsides qu'il doit en vertu du droit de la famille, quoiqu'il en eût les moyens ou pût les avoir, sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

Par obligation d'entretien, on entend l'obligation de subvenir ou de contribuer à l'entretien d'une autre personne (B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, Volume I, 3ème éd., n. 2 ad art. 217). Cette obligation doit découler du droit de la famille (ATF 122 IV 207 consid. 3.d p. 209).

Tout ce qui tend à la conservation des biens, à assurer ou opérer la liquidation du régime matrimonial, des autres rapports patrimoniaux ou contractuels entre époux ne fonde pas une obligation d'entretien (B. CORBOZ, op. cit., n. 7 ad art. 217).

Le juge pénal est lié par la contribution d'entretien fixée par le juge civil (arrêt 6B_1017/2016 du 10 juillet 2017 consid. 2.2), de sorte que la présence d'un prononcé judiciaire ou d'une convention a l'avantage de faciliter l'établissement des faits et la preuve de l'intention (ATF 128 IV 86 consid. 2 p. 88 s.).

4.3. Selon l'art. 146 al. 1 CP, se rend coupable d'escroquerie quiconque, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l'aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.

4.4. Aux termes de l'art. 219 CP, est punissable celui qui aura violé son devoir d'assister ou d'élever une personne mineure dont il aura ainsi mis en danger le développement physique ou psychique, ou qui aura manqué à ce devoir.

Le comportement délictueux peut donc consister en une action (par exemple l'auteur maltraite le mineur) ou en une omission (par exemple l'auteur abandonne l'enfant, en négligeant de lui donner des soins ou en ne prenant pas, face à un danger, les mesures de sécurité qui s'imposent). Cette obligation incombe notamment aux parents en raison de leur position de garant. Le contenu de l'obligation ne peut être défini de manière abstraite. Il appartient au juge de le déterminer, de cas en cas, en fonction des circonstances, compte tenu notamment du bien à protéger dans le cas concret, du sujet de la protection et du rapport entre le garant et la victime (ATF
125 IV 64 consid. 1a p. 68).

Ces actes doivent mettre en danger le développement physique ou psychique du mineur. Définissant un délit de mise en danger concrète, l'art. 219 CP n'exige pas une atteinte à l'intégrité corporelle ou psychique du mineur ; une mise en danger suffit, celle-ci devant toutefois être concrète, c'est-à-dire qu'elle doit apparaître vraisemblable dans le cas concret (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1100/2016 du 25 octobre 2017 consid. 3.2; 6B_539/2010 du 30 mai 2011 consid. 4.2).

4.5. En l'espèce, les faits dénoncés ne réunissent manifestement les conditions d'aucune des infractions précitées.

Concernant la violation d'une obligation d'entretien, la question du délai pour déposer plainte peut souffrir de rester indécise compte tenu de ce qui suit.

En l'état, il existe un jugement de divorce définitif et exécutoire. À teneur de celui-ci, le mis en cause est tenu de verser EUR 28.5 millions à la recourante et de lui transférer la pleine propriété de toutes les parts de la "SCI H______", ceci, à titre de liquidation du régime matrimonial. Pour le surplus, il est acté que le mis en cause a d'ores et déjà avancé la totalité de la contribution d'entretien due aux enfants jusqu'à leur majorité, ce qui exclut la possibilité que la recourante puisse agir en recouvrement de celle-ci.

En revanche, l'intéressé n'y est nullement condamné à verser une quelconque contribution, de quelque nature qui soit, visant à l'entretien de son ex-épouse. À cet égard, cette dernière allègue en vain n'avoir qu'implicitement (et non pas expressément) renoncé à une contribution d'entretien dans la mesure où ses besoins devaient être couverts par la créance en liquidation du régime matrimonial. Cette interprétation ne trouve pas d'assise juridique dans les décisions en vigueur. Ainsi, les prestations financières découlant du jugement de divorce dont la recourante cherche à obtenir l'exécution relèvent de créances matrimoniales exclusivement. Partant, elles ne sont pas visées, ni – a fortiori – protégée par l'art. 217 CP.

Il n'y avait donc pas lieu d'entrer en matière sur cette infraction et l'inexécution du mis en cause sur ces obligations revêt un caractère purement civil.

La recourante fait ensuite part de ses craintes pour le développement psychique et physique des enfants face aux comportements qu'elle attribue à leur père. Toutefois, hormis ces appréhensions, aucun indice concret ne permet, en l'état, de soupçonner le mis en cause de contrevenir à ses devoirs parentaux au sens de l'art. 219 CP. La situation de D______ fait office d'exception puisqu'une curatelle de soins a été mise en place. Toutefois, la détérioration de sa santé semble trouver sa source dans un évènement extérieur aux faits dénoncés, sans lien direct avec son père.

L'établissement prochain d'un rapport d'évaluation du SPMi s'explique aisément par le contexte hautement conflictuel qui oppose les parents, sans que cela ne désigne – encore – une responsabilité pénale de l'un ou l'autre. Plus généralement, un tel contexte est forcément propice à faire naître un conflit de loyauté chez les enfants, lequel peut, selon les circonstances, parfois être plus ou moins nourri par les parents. Cela étant, les éléments au dossier en l'occurrence ne permettent pas de justifier une répression pénale contre le mis en cause du chef de violation du devoir d'assistance ou d'éduction, les messages produits à l'appui du recours n'étant pas probants pour retenir l'inverse.

La décision querellée est, là également, exempte de reproche.

La recourante estime avoir été trompée sur les termes de l'accord conclu à l'audience du 16 octobre 2020.

Ledit accord a été conclu en présence d'un juge et des avocats des parties, même si ceux-ci se sont absentés durant une partie de l'audience. Son contenu n'a fait l'objet d'aucune réserve de fond, ni sur le siège, ni jusqu'au jugement de divorce, rendu plus de six mois après et qui n'a, par ailleurs, pas fait l'objet d'un appel.

Dans ces circonstances, on ne voit pas que la recourante ait été victime d'une tromperie astucieuse, même si elle tente d'argumenter – a posteriori – que l'accord, conjointement trouvé et accepté, était en réalité inique et contraire à ses intérêts.

En outre, il ne serait pas arbitraire de retenir que le mis en cause envisageait, dans un premier temps, d'exécuter ses obligations. À cette fin, il a proposé des modalités de mise en œuvre, refusées par la recourante. La question de savoir si le premier était en droit d'exiger des conditions supplémentaires pour le paiement de ses créances et si la seconde avait raison de s'y opposer n'est pas pertinente en l'occurrence. Ces considérations permettent uniquement d'envisager que les désaccords autour du paiement des montants en question ont vraisemblablement décidé le mis en cause, dans un second temps, à se soustraire à ses obligations.

En résumé, rien ne permet d'établir qu'en acceptant la convention de divorce, la recourante aurait accompli un acte préjudiciable à ses intérêts comme l'exige l'infraction d'escroquerie, la contrariété subséquente d'avoir renoncé – de manière libre et éclairée – à certains montants et de n'avoir pas encore perçu les autres ne suffisant pas à soutenir l'inverse.

L'ordonnance entreprise est également fondée sur ce point.

5.             Faute d'une quelconque infraction pénale, aucune mesure de séquestre ne saurait être ordonnée.

6.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

7.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en intégralité à CHF 1'200.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'200.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à la recourante, soit pour elle son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Daniela CHIABUDINI, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/11588/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

1'115.00

-

CHF

Total

CHF

1'200.00