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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/5405/2021

AARP/387/2025 du 03.11.2025 sur JTDP/1046/2024 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : VIOLATION DU DEVOIR D'ASSISTANCE OU D'ÉDUCATION
Normes : CP.219.al1
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/5405/2021 AARP/387/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 3 novembre 2025

 

Entre

A______, domiciliée ______, comparant par Me Robert ASSAEL, avocat, Mentha Avocats, rue de l'Athénée 4, case postale 330, 1211 Genève 12,

appelante,

 

contre le jugement JTDP/1046/2024 rendu le 29 août 2024 par le Tribunal de police,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A.           a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/1046/2024 du 29 août 2024, par lequel le Tribunal de police (TP) a classé la procédure s'agissant de l'insoumission à une décision de l'autorité (art. 292 du Code pénal [CP]), mais l'a reconnue coupable de violation du devoir d'assistance ou d'éducation (art. 219 al. 1 CP), l'a condamnée à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 50.- le jour, avec sursis pendant trois ans, et mis les frais de la procédure à sa charge.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant, sous suite de dépens, à son acquittement du chef de violation du devoir d'assistance ou d'éducation.

b. Selon l'ordonnance pénale du 10 août 2021, il est reproché à A______ d'avoir, entre octobre 2020 et avril 2021, à Genève, violé son devoir d'assistance et d'éducation envers sa fille B______, née le ______ 2016, notamment en la présentant à sept reprises et sans raisons particulières à divers médecins et pédiatres entre le 1er et le 22 février 2021, ainsi qu'en entravant à réitérées reprises les relations personnelles entre sa fille et le père de cette dernière, C______, mettant de la sorte en danger le développement psychique de sa fille.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a.        A______ et C______ sont les parents de B______, née le ______ 2016. Après leur séparation en janvier 2017, la garde de B______ a été confiée à sa mère, tandis que le père ne bénéficiait que d'un droit de visite restreint.

En mai 2017, A______ a déposé une requête d'extrême urgence visant à modifier le droit de visite de C______, invoquant des soupçons d'attouchements sexuels commis par ce dernier sur leur fille, sans porter plainte. Le droit de visite de C______ a alors été suspendu, avant d'être partiellement rétabli dès janvier 2018 sous la forme de visites encadrées, dans le cadre du dispositif Point Rencontre (pièce A-397). Parallèlement, une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles entre B______ et son père a été instaurée (pièce A-397).

b.        Dans le cadre d'une expertise familiale ordonnée par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (TPAE), le Centre universitaire romand de médecine légale (CURML) a rendu un rapport le 11 mai 2020.

Selon ce rapport, A______ souffrait du syndrome de Münchhausen par procuration, caractérisé par un parent qui simule ou produit une maladie chez son enfant, et le présente fréquemment à un médecin, dans le but d'obtenir des examens complémentaires et traitements médicaux à même de prouver ses dires. Ce syndrome se manifestait notamment par des consultations fréquentes, principalement aux urgences, où l'effet de surprise favorisait la crédibilité des allégations parentales (pièce A-432). Or, entre le 17 novembre 2018 et le 18 octobre 2019, B______ avait été amenée 40 fois aux urgences pédiatriques des HUG, parfois plusieurs jours consécutifs, pour divers motifs (otites, angines, rhinites, bronchites obstructives légères, toux, scarlatine, douleurs abdominales, dermite du siège, lésion vulvaire, faux croup) (pièce A-418). Lorsqu'un médecin n'adhérait pas à ses hypothèses, A______ avait tendance à en consulter un autre (pièce A-432). B______ apparaissait ainsi comme le porte-symptômes des angoisses archaïques de sa mère, celle-ci semblant davantage intéressée par les pathologies qu'elle attribuait à sa fille que par la souffrance réelle de cette dernière (pièce A-433).

L'expertise décrivait un mauvais scénario à tiroirs, où B______ était à la fois victime et otage de la déraison de sa mère. Elle représentait le symptôme que sa mère exhibait au corps médical, en la coupant de la continuité des activités à la crèche (B______ avait cumulé 40 jours d'absence à la crèche depuis août 2019), et en mettant à mal la régularité des visites père-fille (pièce A-433). Les passages répétés aux urgences pédiatriques avaient également pour but d'accuser C______, ou d'empêcher les visites au Point Rencontre, contribuant à un conditionnement émotionnel négatif et à un rejet de la figure paternelle (pièce A-433). A______ conditionnait par ailleurs sa fille à intégrer un récit dans lequel elle se percevait comme victime d'abus sexuels de la part de son père (pièce A-440). Concluant à un "autre trouble émotionnel de l'enfance", les experts jugeaient indispensable qu'B______ ne développe pas un syndrome d'adaptation, fondé sur le mimétisme des attentes maternelles (pièce A-439).

A______ se montrait passablement envahissante et agissante à l'égard des professionnels de santé, sollicitant massivement les urgences pour faire reconnaître des maladies supposées, ou faire valider des allégations d'abus sexuels, sans que la symptomatologie observée ne les confirme. Réelles, exagérées ou inventées, ces allégations avaient exposé B______ à un grand nombre d'examens médicaux, qui n'auraient pas été nécessaires si sa mère avait pu canaliser ses angoisses archaïques en investissant un lieu unique de soutien thérapeutique. Ce besoin d'exposer pareillement sa fille était extrêmement délétère pour son développement (pièce A-434).

En raison de son comportement, A______ était incapable de prendre suffisamment soin de sa fille et lui offrir les conditions d'un développement harmonieux, l'enfermant dans un lien d'attachement symptomatique mère-enfant malade (pièce A-445). L'expertise recommandait que B______ réside chez son père, et que sa mère bénéficie d'un droit de visite (pièce A-445). Elle précisait qu'en cas de nouvelles allégations de la mère, le droit de visite de A______ devrait être suspendu (pièce A-441).

c.         Dans une attestation du 5 juin 2020, la Dre D______, pédiatre de B______, a relevé que la fillette avait certes fait l'objet de nombreuses consultations en urgence à son cabinet jusqu'à ce jour, mais que celles-ci étaient la plupart du temps justifiées pour des raisons médicales, et occasionnellement motivées par l'inquiétude maternelle, jugée dans la norme (pièce C-12, 7e réponse). Elle s'est déclarée surprise du diagnostic de syndrome de Münchhausen par procuration retenu par le CURML, n'ayant jamais eu de suspicion en ce sens (pièce C-15 ; voir également pièce C-12). Elle a ensuite examiné B______ le 20 juillet 2020 pour un problème de constipation sans complication, constatant une perte de poids de 1.5 kilos en un mois, sans explication médicale (pièce C-16).

d.        Le 23 juin 2020, les experts du CURML ont été entendus par le TPAE. Ils ont souligné qu'indépendamment de ce qu'elle avait effectivement vécu, B______ subissait un traumatisme lié au contexte dans lequel elle grandissait, (pièce A-5, recto, dernier paragraphe). Le principal risque identifié était celui d'une adaptation de l'enfant aux discours et attentes de sa mère, pouvant la conduire à un refus de voir son père et à une forme de psychose, soit qu'elle ne pourrait plus penser par elle-même et se couperait de la réalité (pièce A-6, 1er paragraphe).

Les experts n'avaient relevé chez B______ aucun symptôme ni rituel sexualisé évocateurs d'abus. Le Groupe de protection de l'enfance des HUG n'avait, de son côté, formulé aucune inquiétude ni retenu de diagnostic d'éventuels abus sexuels (pièce A-6, recto, 4e paragraphe). Les problèmes de santé ORL chroniques de B______ étaient réels, mais c'était la fréquence excessive des consultations qui interrogeait. La plupart de ces visites se concluaient soit sans diagnostic, soit la conduite à tenir restait identique aux directives médicales précédemment données. Aussi, lors de certaines d'entre elles, A______ avait sollicité un examen gynécologique de l'enfant, sans lien avec le motif médical initial (bronchite) (pièce A-7).

e.         Le 20 septembre 2020, le Dr E______, pédopsychiatre de B______, a été entendu par le TPAE. Il a exprimé une analyse divergente de celle des experts, estimant que la fillette souffrait d'un conflit réactionnel lié au différend parental, sans aucun conflit de loyauté, puisqu'elle aimait ses deux parents. Il avait rapidement écarté l'hypothèse d'une suspicion d'abus (pièces A-749, 5e paragraphe ; A-1'097), dès lors que C______ n'était "pas du tout" un abuseur, qu'il aimait énormément sa fille et qu'il devait pouvoir s'en occuper (pièce A-750, 8e paragraphe). S'agissant du syndrome identifié, il a relevé que la littérature décrivait généralement, chez les enfants concernés, des signes d'hyper-anxiété, une dépression et une difficulté majeure à la séparation (pièces A-750, 1er paragraphe ; A-1'097). Or, B______ ne présentait aucun de ces troubles. Il était par ailleurs étonné que l'expertise ait retenu chez l'enfant un "autre trouble émotionnel", un tel trouble impliquant notamment de l'hyper-anxiété et des troubles identitaires, lesquels étaient incompatibles avec ses propres observations cliniques menées depuis un an (pièce A-1'097). Il ne lui appartenait pas de poser un diagnostic concernant les adultes, et relevait que le syndrome de Münchhausen supposait que le parent prenne possession de l'enfant, ce qui lui paraissait aller au-delà de ce qu'il observait chez A______ (pièce A-751, 11e paragraphe). Il a encore indiqué avoir revu B______ à trois reprises la semaine suivant son premier séjour chez son père, en juillet 2020 : le lundi, l'enfant n'avait rien dit de la visite et paraissait très à l'aise ; le mercredi, après que sa mère avait relevé qu'elle allait mal, elle s'était montrée réticente à entrer dans son bureau ; et le vendredi, la séance s'était déroulée normalement, et il avait pensé que tout était rentré dans l'ordre (pièce A-751, 6e-7e paragraphes). Il ne l'a ensuite plus jamais revue (pièce A-1'201, 2e page, 4e paragraphe).

f.          Dans ses observations du 5 octobre 2020, le CURML a constaté qu'après un premier séjour bien vécu chez son père, B______ avait rapidement développé un sentiment d'insécurité, avec angoisses d'abandon, état dépressif et refus de tout contact en dehors de sa mère. Cette symptomatologie ne provenait pas du père ni des visites, mais directement du discours de la mère et de son désir sous-jacent d'annihilation de la fonction paternelle. L'enfant, contrainte d'exhiber les angoisses de sa mère, avait ainsi développé une modalité d'attachement désorganisée, marquée par de l'hypervigilance, des agrippements, de l'agressivité et une hypersensibilité à toute séparation avec sa mère (pièce A-711 et ss).

g.        Le 8 décembre 2020, le Service de pédiatrie générale des HUG a confirmé que B______ avait été présentée à 42 reprises aux urgences entre le 17 novembre 2018 et le 20 février 2020, dont deux fois (10 décembre 2018 et 9 février 2019) sur la base d'allégations d'attouchements sexuels formulées par A______. Le 29 janvier 2019, à la demande de sa mère, un examen somatique réalisé par le Groupe de Protection de l'Enfant avait été jugé dans les limites de la norme (pièce A-1'363).

h.        Dans un courrier du 10 décembre 2020, le CURML a indiqué que le "scénario à tiroirs" relevé dans son expertise se poursuivait et que la littérature sur les fausses allégations d'abus sexuels sur mineurs en contexte de syndrome de Münchhausen et d'aliénation parentale relevait que des enfants placés dans un tel environnement pouvaient néanmoins présenter une adaptation apparente et un fonctionnement psychique relativement équilibré (pièces A-913 et A-914).

i.          Lors d'une audience du 12 janvier 2021 devant le TPAE, le Service de protection des mineures (SPMi) a relevé que deux visites père-fille n'avaient pas pu avoir lieu depuis le 12 octobre 2020, en raison de motifs médicaux invoqués par A______. Celle de fin octobre n'avait pas pu avoir lieu car B______ était fiévreuse à ce moment-là. La seconde avait été manquée du fait qu'une éducatrice de la crèche avait été testée positive au COVID, impliquant qu'B______ fasse un test. Dès que celui-ci s'était révélé négatif, elle avait aussitôt envoyé un email au père pour lui dire de venir la chercher, mais celui-ci n'avait pas vu l'email à temps. Cette visite avait été compensée le week-end suivant. La pédiatre avait par la suite affirmé au SPMi que B______ était tout à fait apte à être transportée et que les visites pouvaient se dérouler malgré les problèmes de santé décrits (cf. pièce C-17). Le SPMi avait rappelé aux parents que la production d'un certificat médical n'équivalait pas à une décision de justice (pièce A-887 et 888).

j.          Le 3 février 2021, C______ a fait valoir au TPAE qu'à teneur de la procédure, son droit de visite s'exerçait de manière erratique, sans faute de sa part (pièce A-863, 4e paragraphe).

k.        Deux certificats médicaux (2 décembre 2019 et 29 avril 2020) ont confirmé que B______ souffrait de pathologies respiratoires chroniques (bronchites obstructives, faux croups), d'otites et d'angines à répétition depuis décembre 2018, avec un épisode de pneumonie en février 2020 (pièces C-10 ; C-13 ; cf. également pièce C-12, 5e question).

l.          Entre le 29 janvier et le 13 mars 2021, B______ a fait l'objet de plusieurs consultations médicales, soit :

-            le 29 janvier 2021, aux urgences pédiatriques (Dre F______). A______ signale une odynophagie depuis le jour même et rhume depuis trois jours. Diagnostic d'angine virale. Température mesurée : 37,1 °C. Prescription d'Algifor en réserve (pièce C-25) ;

-            le 1er février 2021, aux urgences pédiatriques (Dre G______). A______ consulte en raison de soupçons d'attouchements sexuels après un week-end chez le père, après avoir remarqué une zone bleutée sur la partie postérieure de l'anus (comme une veine plus visible). L'enfant ne rapporte aucun événement particulier. Examen uro-génital sans particularité : pas de vulvite, pas de lésion. Constatations limitées à un léger érythème autour de l'anus, dont la dilatation est jugée normale, avec une zone légèrement bleutée sous cutanée sur la zone postérieure. Bon état général. La Dre G______ a expliqué à la mère qu'elle n'objectivait rien de particulier, mais que selon la suspicion de celle-ci, il faudrait un examen gynécologique spécialisé aux HUG. Elle proposait à la pédiatre de revoir B______ le lendemain, en l'absence de signe d'urgence ce soir (pièces C-18 ; C-19) ;

-            le 2 février 2021, chez la pédiatre habituelle (Dre D______), en présence de la mère et de la grand-mère maternelle. L'examen a confirmé l'absence d'élément inquiétant et l'absence de lésion. La pédiatre a expliqué que la coloration bleutée de l'anus pouvait s'expliquer par une dilation des veines hémorroïdales et que la dilatation rapportée la veille n'était pas compatible avec un abus anal, faute de fissures ou lésions. Elle a donné des explications détaillées sur la physiologie de la dilatation anale (pièce A-1'201, 1ère page, dernier paragraphe, et 2e page,
1er-3e paragraphes) ;

-          le 7 février 2021, aux urgences pédiatriques (Dr H______). A______ rapporte un état fébrile depuis 24 heures, toux avec rhinite au décours depuis 3-4 jours, et une plus grande fatigue ce jour. Diagnostic : infection des voies respiratoires supérieures. Température à l'arrivée : 36,8 °C. Bon état général, fond de gorge légèrement érythémateux, prescription symptomatique (pièce C-20) ;

-          le 8 février 2021, aux urgences pédiatriques (Dre G______). A______ consulte pour rhinite et toux depuis 48 heures, dyspnée ce jour, expliquant que B______ a un traitement de Ventolin et qu'elle a pris deux push hier soir, mais pas ce jour. Diagnostic : infection des voies respiratoires supérieures. Très bon état général, fond de gorge avec légère hyperémie. Prescription : sérum physiologique et Ventolin en réserve seulement en cas de "wheezing", avec explications des signes devant faire consulter en urgence (pièce C-21) ;

-          le 9 février 2021, aux urgences pédiatriques (Dr I______). A______ rapporte une toux aboyante et un stridor depuis la veille. Diagnostic : faux croup. Bon état général, pas de détresse respiratoire, hyperémie du fond de gorge. Prescription de Dexaméthasone et contrôle par la pédiatre recommandé (pièce C-26) ;

-          le 11 février 2021, aux urgences pédiatriques (Dre F______). A______ décrit une fièvre à 38,5 °C max qui baisse bien, congestion nasale importante malgré la toilette nasale et toux grasse. Diagnostic : infection des voies respiratoires au décours avec écoulement postérieur. Température à l'arrivée : 37,4 °C. Bon état général et active. Écoulement postérieur, tympans calmes mais bombés. Prescription d'un sirop, explications et conseils d'usage (pièce C-23) ;

-            le 22 février 2021, chez la pédiatre habituelle (Dre D______) (pièce A-18) ;

-          le 9 mars 2021, chez la pédiatre habituelle (Dre D______). A______ consulte pour fièvre et rhume important. Diagnostic : probable bronchite asthmatiforme. Prescription d'Axotide (pièce C-29) ;

-          le 10 mars 2021, aux urgences pédiatriques (Dr I______). A______ rapporte une toux sifflante depuis le jour même et rhume depuis cinq jours. Bon état général, pas de détresse respiratoire, fond de gorge calme. Diagnostic : infection des voies respiratoires supérieures. Prescription symptomatique (Ventolin et Nasivine, cf. pièce C-29), avec contrôle chez la pédiatre recommandé (pièce C-27) ;

-          le 13 mars 2021, visite à domicile (Dr J______, K______ [consultations à domicile]). A______ appelle en raison d'une difficulté à respirer le matin même au réveil. Diagnostic : bronchite obstructive au décours. Toux très grasse, peine à cracher. L'enfant était déjà sous traitement complet (Ventolin, Axotide, Algifor), Ventolin que la mère n'avait pas encore administré le matin même. Le médecin confirme l'absence d'indication à une hospitalisation et recommande un suivi par la pédiatre (pièce C-29) ;

m.      Le 12 février 2021, A______ a demandé au TPAE, par le biais de mesures superprovisionnelles et provisionnelles, la suspension de l'exercice du droit de visite de C______, au motif que B______ présentait tous les symptômes évocateurs d'une victime d'abus sexuel de la part de son père. Elle a invoqué des propos à connotation sexuelle tenus par B______, ainsi que diverses affections médicales ou lésions constatées au retour des visites chez son père, depuis l'élargissement du droit de visite le 1er juillet 2020, notamment une irritation de l'anus, sous forme de marques rouges et bleutées et d'un élargissement de l'orifice après la dernière visite chez son père à la fin du mois de janvier 2021 (pièces A-816 et ss).

n.        Le 16 février 2021, A______ a déposé plainte pénale contre C______ pour actes d'ordre sexuels avec mineur (art. 187 CP) et contrainte sexuelle (art. 189 CP), pour les mêmes motifs.

Cette plainte a fait l'objet d'une ordonnance de non-entrée en matière par le Ministère public (MP) le 5 mars 2021.

o.        Dans son courrier du 16 février 2021, le SPMi a informé le TPAE qu'il ne disposait d'aucun élément objectif justifiant la suspension du droit de visite de C______. Les dires rapportés par l'enfant et la consultation du 1er février 2021 n'avaient rien objectivé. Alors qu'il était en étroite collaboration avec la pédiatre, le SPMi n'avait reçu aucun signalement médical et les consultations pédiatriques restaient passablement fréquentes, tout comme les allégations maternelles, malgré l'absence d'objectivité des professionnels de la santé (pièce A-811).

p.        Le 5 mars 2021, le SPMi a dénoncé au MP les consultations médicales jugées excessives ainsi que les pressions psychologiques exercées par A______ sur B______ (pièce A-2).

q.        Dans un courrier du 10 mars 2021, le SPMi a fait part de ses vives inquiétudes concernant l'impact comportemental de A______ sur le développement de sa fille (pièce A-1'202, 2e paragraphe). Il a relevé que la fillette avait subi, les 1er et 2 février 2021, deux auscultations intrusives de ses parties intimes, consécutives à des allégations de la mère non confirmées, et que de telles auscultations avaient déjà eu lieu par le passé (pièce A-1'201, 1ère page, dernier paragraphe, et 2e page,
1er-3paragraphes). Il a noté que malgré l'absence de signalement médical et d'éléments objectifs, A______ persistait dans ses inquiétudes et accusations. La situation de B______ était donc à nouveau paralysée, l'empêchant d'appréhender son propre et réel vécu, autrement que sur les bases des conceptions maternelles (pièce A-1'201, 2e page. 5e-7e paragraphes). Il a estimé que l'expertise du 16 mai 2020 restait pleinement actuelle et recommandait de retirer la garde à la mère, avec un placement en foyer d'urgence, dans l'attente d'une installation durable chez le père (pièce A-1'201, 2e page. 5e-7e paragraphes).

r.         Par décision sur mesures superprovisionnelles du 11 mars 2021, confirmée sur mesures provisionnelles le 1er avril 2021, le TPAE a retiré à A______ la garde de sa fille et ordonné le placement de cette dernière en foyer d'urgence (pièce A-1'2901, p. 4).

s.         Il ressort du rapport de police du 4 mai 2021, qu'à teneur de son audition EVIG, B______ était en bonne santé, consciente de son environnement et entretenait de bonnes relations avec ses deux parents. Elle aimait passer du temps avec sa mère. Compte tenu de son jeune âge, elle n'était pas en mesure de s'exprimer sur le conflit parental, ni sur la multiplication des consultations médicales de février 2021. Elle n'avait formulé aucune allusion à d'éventuels attouchements sexuels, n'a rapporté aucune douleur, y compris au niveau des parties génitales, et n'avait rien de particulier à communiquer (pièce B-18).

t.          A______ contestait souffrir du syndrome de Münchhausen par procuration, tout comme ses psychiatres, ancien et actuel, le pédopsychiatre ainsi que la pédiatre de sa fille (pièce B-10). Elle rejetait l'idée que ses actes aient pu entraver le bon développement de son enfant (pièce PV TP, p. 4), le pédopsychiatre ayant d'ailleurs affirmé que celle-ci se développait très bien en sa présence (pièce PV TP, p. 4). Elle avait été surprise et choquée par les conclusions de l'expertise, dont elle peinait à comprendre le raisonnement. Convaincue d'avoir donné à sa fille tout l'amour possible depuis sa naissance, elle considérait "complètement injuste" la décision de retrait de garde (pièce PV TP, pp. 3 et 4).

Elle a reconnu avoir consulté à sept reprises des professionnels de la santé pour sa fille au cours du mois de février 2021. Elle a expliqué que B______ souffrait de bronchites obstructives chroniques nécessitant un traitement à chaque épisode infectieux (pièce B-9) et que chaque consultation du mois de février 2021 avait conduit à un diagnostic et la prescription de médicaments (pièce C-6). La pandémie renforçait son inquiétude, d'autant que sa fille avait déjà été hospitalisée en 2018 pour une bronchite obstructive (pièce C-6). Selon elle, B______ était peu consciente de son état de santé et ne se plaignait jamais, même en cas de gêne respiratoire (pièces B-9 ; B-12).

Elle a justifié le recours répété aux urgences par l'indisponibilité temporaire de sa pédiatre, la Dre D______, durant les vacances scolaires (pièces B-11 ; PV TP, p. 4). Elle a reconnu que les consultations des 1er et 2 février 2021 avaient été déclenchées par une "grosse inquiétude", après avoir constaté une coloration bleue et une dilatation anormale de l'anus de sa fille à son retour du week-end chez son père. Choquée, elle avait contacté son avocate, qui lui avait conseillé une consultation en urgence. Elle a varié dans ses explications sur les raisons pour lesquelles elle ne s'était pas rendue aux HUG le lendemain pour faire un examen gynécologique spécialisé (pièces B-9 ; PV TP, p. 5), en invoquant d'abord les problèmes de santé de sa fille et la période difficile induite par ceux-ci (pièce C-6), puis en affirmant y avoir renoncé pour ne pas exposer sa fille à un examen intrusif (pièce PV TP, p. 5). La consultation du lendemain avec la Dre D______ l'avait rassurée (pièce PV TP, p. 5). Les cinq autres consultations concernaient les problèmes respiratoires de B______. Il ne s'agissait pas d'un syndrome de Münchhausen par procuration, mais d'une réelle inquiétude face à l'état de santé de sa fille (pièce C-6). Elle admettait être une mère inquiète et justifiait son attitude par le fait qu'il était stressant de voir un enfant peinant à respirer (pièce C-6).

Concernant les suspicions d'abus sexuels, elle avait déposé plainte contre C______ le 16 février 2021, malgré les consultations rassurantes des 1er et 2 février 2021, sur conseil de son avocate. Elle avait nourri des doutes depuis la naissance de leur fille, fondés sur ses propres observations (pièces B-9 ; PV TP, p. 5). Elle a relaté notamment deux épisodes en 2016 qu'elle avait interprétés comme étant à connotation sexuelle, mais sans porter plainte à l'époque, par crainte de représailles dans un contexte de violences conjugales (pièce B-10). Elle avait observé, depuis l'été 2020, des propos ou comportements sexualisés chez l'enfant (tentative d'embrasser sa grand-mère avec la langue ; elle indiquait : "papa a le droit de toucher son zizi, moi je sais"), ainsi que des griffures à son retour de visites chez son père (pièce B-10).

Elle affirmait ne jamais avoir parlé à B______ des soupçons d'abus sexuels ni dénigré son père devant elle, consciente des effets délétères que de tels propos pouvaient avoir sur le bon développement de l'enfant et les risques de conflit de loyauté (pièce PV TP, pp. 6 et 7).

Elle reconnaissait toutefois avoir empêché l'exercice de certains droits de visite entre octobre 2020 et avril 2021 (pièces B-11, dernière question ; C-7). Les explications qu'elle a fournies à ce sujet ont varié au fil de la procédure. Elle a d'abord invoqué la suspension provisoire du droit de visite qu'elle avait sollicitée en raison des soupçons d'abus sexuels, le refus ponctuel de B______ de se rendre chez son père "par peur", ou encore des annulations initiées par C______ lui-même (pièce B-11, dernière question). Elle a ensuite allégué des motifs médicaux (otite en octobre 2020, exigence d'un test COVID en raison d'un cas positif à la crèche, épisode de faux croup en novembre 2020), des problèmes d'organisation résultant de deux changements intervenus dans le calendrier d'été, qui l'avait désemparée, puis d'un changement dans le comportement de B______ après les premières vacances chez son père (perte de poids, constipation, repli, tristesse), faits qui, d'après elle, avaient alarmé la pédiatre, le pédopsychiatre et la crèche et justifiaient sa vigilance. Elle a maintenu qu'elle avait agi exclusivement dans le but de protéger sa fille. Elle n'aurait "pas pu faire autrement", mais était consciente de ne pas avoir respecté la loi (pièce C-7).

u.        Plusieurs médecins ayant suivi A______ n'ont pas retenu le diagnostic de syndrome de Münchhausen par procuration. Sa psychiatre actuelle, la Dre L______, a attesté en 2021 et 2023 d'un suivi régulier depuis juillet 2020 et d'une évolution favorable, marquée par une réduction notable de l'anxiété (pièces C-30 ; C-31). Son ancien psychiatre (2014-2019), le Dr. M______, a également exclu ce diagnostic dans une attestation de 2023, estimant qu'elle souffrait plutôt d'un trouble anxieux chronique. Selon lui, même si cette anxiété pouvait amplifier le mal être ou les symptômes de B______, ceux-ci n'étaient ni inventés ni induits de façon délibérée (pièce C-33). Il a toutefois admis ne pas avoir "véritablement d'expérience de ce trouble" (pièce A-884, 9e paragraphe). Enfin, son médecin traitant, le Dr N______, a affirmé en 2020 n'avoir décelé aucun trouble du comportement chez elle (pièce C-34).

v.        Le 6 janvier 2022, la Dre D______ a rapporté que B______, en bonne santé générale, avait été examinée à sept reprises entre les 14 et 29 décembre 2021, soit :

-          le 14 décembre, à son cabinet. Diagnostic : infection des voies respiratoires supérieures, sans signe de bronchite obstructive, avec toux. Test COVID-19 négatif. Contrôle à une semaine en cas de persistance de la toux ;

-          le 15 décembre, lors d'une visite à domicile (O______ [consultations à domicile]). Diagnostic : petite bronchite avec otite, sans signe de bronchite obstructive. Prescription d'Augmentin ;

-          le 22 décembre, à son cabinet. Diagnostic : toux persistante, bronchite modérée, légèrement obstructive, et otite parfaitement guérie. Poursuite de l'antibiotique et traitement modéré de Ventolin ;

-          le 23 décembre, aux urgences pédiatriques. Diagnostic : infection des voies respiratoires supérieures bénigne. Poursuite du Ventolin ;

-          les 24 et 25 décembre, aux urgences pédiatriques. Diagnostic : infection des voies respiratoires supérieures bénigne, sans gravité, infection au Covid, sans complication ;

-          le 29 décembre, lors d'une visite à domicile (K______). Diagnostic : forme très légère du Covid-19. Aucun traitement prescrit.

À trois reprises, la mère avait sollicité ces consultations en raison de supposées désaturations d'oxygène constatées à domicile à l'aide d'un appareil personnel. Or, ces épisodes n'avaient jamais été confirmés par les services d'urgence ou les médecins consultés.

C.           a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions, contestant toute violation de l'art. 219 CP.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris.

d. La cause a été gardée à juger. Les arguments plaidés seront discutés, dans la mesure de leur pertinence, au fil des considérants qui suivent.

D.           a. A______, née le ______ 1978, est de nationalité suisse. Elle est séparée de C______, avec lequel elle a une fille de 9 ans. Elle ne verse pas de contribution pour cette dernière.

Infirmière de formation, elle a exercé cette profession pendant cinq ans avant de devoir envisager une reconversion pour des raisons de santé, qu'elle ne précise pas. Elle a ainsi entamé une formation de bibliothécaire à la [haute école] P______ de Genève, financée par l'AI (pièce A-434), qu'elle n'a toutefois pas achevée en raison des maladies fréquentes de sa fille et des difficultés de trouver des solutions de garde dans l'urgence. En août 2024, elle était en recherche d'emploi, percevait une aide financière mensuelle de CHF 2'700.- de l'Hospice général, bénéficiait d'un subside complet pour son assurance-maladie et supportait un loyer mensuel de CHF 1'395.-. Elle était par ailleurs endettée à hauteur de CHF 20'000.- et ne disposait d'aucune fortune.

b. Aucune inscription ne figure à son casier judiciaire suisse.

EN DROIT :

1.             L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2.             2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; 127 I 28 consid. 2a).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. La présomption d'innocence est violée lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que le prévenu n'a pas prouvé son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 40) ou encore lorsque le juge condamne le prévenu au seul motif que sa culpabilité est plus vraisemblable que son innocence. En revanche, l'absence de doute à l'issue de l'appréciation des preuves exclut la violation de la présomption d'innocence en tant que règle sur le fardeau de la preuve (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).

2.2. Selon l'art. 219 al. 1 CP, quiconque viole son devoir d'assister ou d'élever une personne mineure dont il met ainsi en danger le développement physique ou psychique, ou qui manque à ce devoir, est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

Pour que cette disposition soit applicable, il faut d'abord que l'auteur ait eu envers une personne mineure un devoir d'assistance, c'est-à-dire de protection, ou un devoir d'éducation, c'est-à-dire d'assurer son développement, sur le plan corporel, spirituel et psychique. Sont notamment considérés comme des garants les parents naturels (ATF 149 IV 240 consid. 2.1).

L'auteur doit avoir violé son devoir d'assistance ou d'éducation ou manqué à ce devoir. Le comportement délictueux peut donc consister en une action ou en une omission. Dans le premier cas, l'auteur viole positivement son devoir, par exemple en maltraitant le mineur ou en l'exploitant par un travail excessif ou épuisant. Dans le second cas, il manque passivement à son obligation, par exemple en abandonnant l'enfant, en négligeant de lui donner des soins ou en ne prenant pas, face à un danger, les mesures de sécurité qui s'imposent (ATF 149 IV 240 consid. 2.1 ; 125 IV 64 consid. 1a).

Il faut encore, sur le plan objectif, que la violation du devoir d'assistance ou d'éducation ou le manquement à ce devoir ait eu pour effet de mettre en danger le développement physique ou psychique du mineur. Définissant un délit de mise en danger concrète, l'art. 219 CP n'exige pas une atteinte à l'intégrité corporelle ou psychique du mineur. Une mise en danger suffit ; celle-ci doit toutefois être concrète, c'est-à-dire qu'elle doit apparaître vraisemblable dans le cas concret (ATF 149 IV 240 consid. 2.1 ; 126 IV 136 consid. 1b ; 125 IV 64 consid. 1a). La limite entre une mise en danger punissable selon l'art. 219 CP et les traumatismes faisant partie de la vie de tout enfant peut être difficile à tracer ; il faut donc réserver l'application de cette norme pénale aux cas manifestes d'atteinte (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1307/2023 du 8 janvier 2025 consid. 1.6 ; 6B_1220/2020 du 1er juillet 2021 consid. 1.2). Des séquelles durables, d'ordre physique ou psychique, doivent apparaître vraisemblables, de telle sorte que le développement du mineur est mis en danger (CORBOZ, Les infractions en droit suisse, Vol. I, 3e éd., n° 17 in fine ad art. 219 CP). Il faut normalement que l'auteur agisse de façon répétée ou qu'il viole durablement son devoir d'éducation ; il n'est cependant pas exclu qu'un seul acte grave suffise pour que des séquelles durables risquent d'affecter le développement du mineur (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1307/2023 du 8 janvier 2025 consid. 2.2 ; 6B_582/2023 du 12 septembre 2023 consid. 1.2).

Sur le plan subjectif, l'infraction de l'art. 219 al. 1 CP peut être commise intentionnellement, y compris par dol éventuel, ou par négligence (ATF 149 IV 240 consid. 2.2).

2.3.1. En l'espèce, il ressort du dossier qu'entre les 29 janvier et 13 mars 2021, l'appelante a présenté sa fille à de très nombreuses reprises à divers médecins et pédiatres, sur la base d'anamnèses systématiquement alarmistes (suspicions d'abus sexuels, troubles respiratoires aigus, fièvre persistante). Or, à chacune de ces consultations, les constats médicaux se sont révélés rassurants, concluant à des affections bénignes et courantes à l'enfance (angine virale, infections des voies respiratoires supérieures, faux croup), évoluant normalement et ne nécessitant ni hospitalisation ni consultations médicales à répétition.

L'appelante tente de justifier ces consultations en invoquant les maladies ORL avérées de sa fille et ses soupçons persistants d'abus sexuels. Ces explications ne résistent toutefois pas à l'examen du dossier.

S'agissant des soupçons d'abus sexuels, l'appelante affirme avoir agi à raison, en se fondant sur certains propos et comportements de sa fille, et sur des attitudes qu'elle prêtait au père. Pourtant, l'expertise du CURML – certes antérieure à la période pénale, mais pleinement pertinente – a expressément écarté toute suspicion d'abus sexuel, en concluant que l'enfant ne présentait ni symptôme, ni comportement, ni discours évocateur. L'audition EVIG de B______ du 24 avril 2021 a confirmé cette analyse, tout comme le SPMi, qui, dans son rapport du 10 mars 2021, a constaté qu'aucun indice d'abus n'était établi et a exprimé sa vive préoccupation quant à l'attitude de la mère. Aucun médecin consulté n'a par ailleurs retenu la moindre suspicion ou lésion, et le père n'a jamais été considéré comme un abuseur, ni par les soignants, ni par le MP, saisi d'une plainte dans ce sens. Malgré ces évaluations claires et concordantes, l'appelante a maintenu ses soupçons et provoqué des examens médicaux répétés et intrusifs, plongeant sa fille dans un climat de suspicions infondées et anxiogènes. L'épisode de "l'anus bleu" illustre bien ce mécanisme. Alors qu'une première consultation médicale du 1er février 2021 avait déjà exclu tout signe suspect, l'appelante a sollicité un second avis le 2 février 2021, identique au premier, affirmant ensuite que cette seconde consultation l'avait enfin rassurée. Or, dans le même temps, elle a, entre autres, pris appui précisément sur ce même épisode pour déposer une plainte pénale contre le père le 16 février 2021. Cette quête de confirmations successives révèle que ses démarches ne visaient pas uniquement la recherche objective du bien-être de son enfant, mais aussi à alimenter ses soupçons infondés portant sur le père et nourrir ainsi le conflit parental. L'argument selon lequel certaines démarches auraient été entreprises sur conseil de son avocate ou sur recommandation médicale ne saurait la dédouaner, ces avis ne faisant en réalité que répondre aux inquiétudes subjectives et alarmistes qu'elle exprimait, dont elle était l'unique instigatrice.

Les pathologies ORL et respiratoires de l'enfant (otites, angines, bronchites obstructives) sont effectivement établies. Celle-ci a toutefois été présentée à maintes reprises à divers médecins de permanence des urgences pédiatriques, qui ne la connaissaient pas, sur plusieurs jours d'affilée pour des symptômes en cours de résolution, sans complication particulière. Les diagnostics posés étaient d'ailleurs identiques d'une consultation à l'autre, d'un médecin à l'autre (infections des voies respiratoires supérieures entre le 7 et le 11 février 2021, le faux croup relevant également d'une infection des voies respiratoires supérieures ; bronchite les 9 et 13 mars 2021). Ainsi, si certaines consultations pouvaient se justifier, d'autres étaient clairement évitables et excessives, dès lors qu'elles ne reposaient sur aucune aggravation clinique, mais uniquement sur l'inquiétude disproportionnée de la mère.

Deux épisodes révèlent un comportement particulièrement préoccupant. Dans deux situations de gêne respiratoire (8 février et 13 mars 2021), l'appelante a choisi de conduire sa fille aux urgences ou de faire venir un médecin à domicile, sans administrer le Ventolin prescrit, dont l'usage lui avait été clairement expliqué. Elle avait elle-même indiqué que sa fille était sous Ventolin et reconnu combien il était stressant de voir un enfant peinant à respirer. Ces faits montrent qu'elle n'a pas agi par ignorance, mais consciemment, préférant laisser sa fille souffrir et solliciter une consultation inutile plutôt que d'appliquer le traitement immédiatement disponible et d'attendre que les effets médicinaux se produisent. Ce comportement ne traduit non pas une vigilance parentale, mais une incapacité à répondre aux besoins immédiats de l'enfant, témoignant d'une attitude excessive et insécure.

Le schéma de janvier à mars 2021 ne constitue d'ailleurs pas une nouveauté, puisque ce n'était pas la première fois que l'appelante soumettait sa fille à un parcours médical intensif et intrusif. La répétition de ces démarches atteste d'un fonctionnement pathologique persistant, identifié par l'expertise, où l'enfant continue d'être instrumentalisée comme vecteur d'angoisses. B______ a ainsi été régulièrement exposée à des soins inutiles, ainsi qu'à des thématiques anxiogènes inadaptées à son âge, compromettant son bon développement psychique. Le fait qu'aucun autre médecin ou pédopsychiatre n'ait décrit de traumatisme chez cette enfant ne contredit pas l'expertise, mais s'explique par la nature diffuse et insidieuse du syndrome identifié, qui ne se révèle pas par des symptômes cliniques immédiats et isolés, mais par l'analyse globale du contexte et du fonctionnement psychique de la mère. À cet égard, les attestations ou avis contraires soulevés par l'appelante, notamment celui du Dr E______, ne saurait remettre en cause les conclusions des experts. Ce praticien n'a plus revu l'enfant après juillet 2020, soit avant la période pénale, et ses observations ne portaient alors que sur des effets transitoires à très court terme, sans suivi ultérieur. Le CURML, seul à avoir appréhendé la dynamique familiale dans sa globalité, y compris à la lumière du dossier judiciaire, a au contraire mis en évidence une symptomatologie évolutive dès cette période (notamment la dépression), directement corrélée aux projections maternelles, et qui n'avait pas pu être observée par le Dr E______, en raison, entre autres, de l'arrêt de son suivi.

2.3.2. Quant à l'entrave au droit de visites, il ressort du dossier et des propres aveux de l'appelante qu'elle a, à plusieurs reprises, empêché ou restreint les contacts de sa fille avec le père, invoquant successivement des motifs organisationnels, médicaux ou liés à ses soupçons d'abus sexuels. Ses explications variables jettent un doute sur leur crédibilité. En tout état, aucune de ces raisons ne pouvait objectivement justifier de faire obstacle à l'exercice d'un droit de visite, fixé judiciairement. Les maladies bénignes de l'enfant n'empêchaient pas le maintien des contacts, comme l'a rappelé la pédiatre, et les soupçons d'abus sexuels, infondés, ne permettaient en aucun cas une restriction unilatérale du droit de visite.

En agissant ainsi, l'appelante a, volontairement et en pleine connaissance de cause, privé sa fille et le père de la possibilité d'entretenir des relations personnelles, pourtant ordonnées par une décision judiciaire. Elle a empêché sa fille de jouir pleinement d'une ressource affective et d'une stabilité relationnelle essentielles, la plaçant au cœur du conflit parental et compromettant son bon développement affectif et psychique. Elle ne pouvait se retrancher ni derrière ses propres inquiétudes, ni derrière le prétendu refus de l'enfant de voir son père, dès lors qu'elle avait l'obligation légale de favoriser activement ces relations. À cet égard, il est d'ailleurs significatif que l'expertise a mis en garde contre le risque que B______ finisse par rejeter son père, si les comportements délétères maternels persistaient.

Contrairement à ce que soutient l'appelante, son refus de confier B______ à son père ne constitue pas un simple comportement "critiquable", mais une violation intentionnelle de ses devoirs parentaux. L'art. 274 al. 1 CC rappelle à cet égard expressément que chaque parent doit veiller à ne pas perturber les relations de l'enfant avec l'autre parent. Le comportement de l'appelante tombe ainsi sous le coup de l'art. 219 CP, comme le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de le confirmer (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1307/2023 du 8 janvier 2025 consid. 1.7 ; 6B_586/2021 du 26 janvier 2022 consid. 1.6).

2.3.3. L'ensemble des éléments du dossier démontre ainsi que les consultations médicales répétées et les entraves au droit de visite ne répondaient pas à une véritable nécessité médicale ou protectrice, mais procédaient de l'inquiétude subjective et disproportionnée de l'appelante. Celle-ci a agi intentionnellement, à tout le moins sous la forme du dol éventuel. Elle avait pleinement connaissance des conclusions des experts, des décisions de justice et des recommandations des autorités, et devait tenir pour possible que ses agissements – multiplication des consultations médicales sur plusieurs jours d'affilée par des médecins différents (dont certains ne connaissaient pas l'historique médicale de l'enfant) et entrave au droit de visite – mettent concrètement en danger le développement psychique de sa fille. Ce comportement persistant, loin de protéger son enfant, l'a exposée à un climat d'angoisse, à des soins intrusifs et à une instabilité affective, constituant une violation manifeste du devoir d'assistance et d'éducation au sens de l'art. 219 CP.

Partant, le verdict de culpabilité de l'appelante doit être confirmé et son appel rejeté.

3.             3.1. L'infraction à l'art. 219 al. 1 CP est passible d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

3.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

3.3. Conformément à l'art. 34 CP, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende, le juge fixant leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur (al. 1). Un jour-amende est de CHF 30.- au moins et de CHF 3'000.- au plus. Exceptionnellement, si la situation personnelle et économique de l'auteur l'exige, il peut être réduit à CHF 10.-. Le juge en arrête le montant selon la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d'assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (al. 2).

3.4. Au terme de l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits.

Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. Le sursis est la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain. Il prime en cas d'incertitude (ATF 134 IV 1 consid. 4.2.2). En d'autres termes, la loi présume l'existence d'un pronostic favorable et cette présomption doit être renversée par le juge pour exclure le sursis (arrêt du Tribunal fédéral 6B_978/2017 du 8 mars 2018 consid. 3.2). Pour formuler un pronostic sur l'amendement de l'auteur au sens de l'art. 42 CP, le juge doit se livrer à une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment l'état d'esprit qu'il manifeste. Il doit tenir compte de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement. Il ne peut accorder un poids particulier à certains critères et en négliger d'autres qui sont pertinents (ATF
135 IV 180 consid. 2.1 ; 134 IV I consid. 4.2.1). Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans l'émission du pronostic (arrêt du Tribunal fédéral 6B_978/2017 du 8 mars 2018 consid. 3.2).

3.5. Selon l'art. 44 CP, si le juge suspend totalement ou partiellement l'exécution d'une peine, il impartit au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans (al. 1). Le juge explique au condamné la portée et les conséquences du sursis ou du sursis partiel à l'exécution de la peine (al. 3).

3.6. En l'espèce, la faute de l'appelante apparaît sérieuse. En multipliant les consultations médicales injustifiées et en entravant les droits de visite du père, elle a exposé sa fille à un climat d'angoisse et d'instabilité, portant atteinte à son intégrité psychique et à son droit à une éducation équilibrée. Ses démarches répétées ont suscité l'inquiétude du SPMi, au point de lui retirer la garde de sa fille et placer celle-ci en foyer d'urgence. La persistance de ces comportements, malgré les décisions judiciaires, les avis des professionnels de santé, les recommandations des autorités de protection et l'expertise familiale du CURML, traduit une volonté délibérée et entêtée d'imposer sa propre vision, sans considération pour l'intérêt supérieur de son enfant.

Les motivations de l'appelante sont essentiellement égoïstes. Bien qu'elle prétende avoir agi par amour et dans l'unique but de protéger sa fille, il ressort du dossier qu'elle a avant tout cherché à apaiser ses propres angoisses pathologiques, sans égard pour les conséquences psychiques et relationnelles infligées à son enfant. Ses démarches ne résultent pas d'une attitude isolée et ponctuelle, mais d'actes répétés, construits et assumés, destinés à conforter ses soupçons et inquiétudes infondés.

La procédure met en lumière une absence de réelle prise de conscience. L'appelante n'a exprimé ni regrets, ni reconnaissance de la gravité des faits. Elle persiste à rejeter les conclusions de l'expertise, à se présenter comme une mère protectrice et à croire à des soupçons d'abus pourtant écartés par l'ensemble des professionnels et autorités concernés. Bien qu'un suivi thérapeutique soit engagé depuis plusieurs années et ait permis une amélioration de son état anxieux, elle a continué à multiplier les consultations intrusives et à instrumentaliser sa fille. Cela démontre que ses ressources thérapeutiques n'ont, pour l'heure, pas suffi à corriger ses attitudes et qu'elle n'a pas véritablement remis en question la portée de ses actes.

Pour le surplus, sa situation personnelle ne permet pas d'expliquer ses agissements et l'absence d'antécédent spécifique a un effet neutre sur la fixation de la peine.

Compte tenu de la gravité des faits et de leurs conséquences, il se justifie de prononcer une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 50.- le jour. Cette peine sera assortie du sursis, dont les conditions d'octroi sont réalisées, et la durée du délai d'épreuve fixée à trois ans.

Partant, l'appel sera intégralement rejeté et le jugement entrepris confirmé.

4.             L'appelante, qui succombe, supportera les frais de la procédure d'appel envers l'État (art. 428 CPP).

Le verdict de culpabilité étant confirmé, il n'y a pas lieu de modifier la répartition des frais de la procédure préliminaire et de première instance.

5.             L'appelante, qui échoue à faire modifier le jugement entrepris, sera déboutée de ses conclusions en indemnisation (art. 429 CPP).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1046/2024 rendu le 29 août 2024 par le Tribunal de police dans la procédure P/5405/2021.

Le rejette.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 1'635.-, qui comprennent un émolument d'arrêt de CHF 1'500.-.

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 CPP).

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

« Classe la procédure s'agissant de l'insoumission à une décision de l'autorité (art. 292 CP) (art. 329 al. 5 CPP).

Déclare A______ coupable de violation du devoir d'assistance ou d'éducation (art. 219 al. 1 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 50.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure arrêtés à CHF 700.- (art. 426 al. 1 CPP).

[…]

Fixe l'émolument de jugement complémentaire à CHF 300.-.


 

Met cet émolument complémentaire à la charge de A______ ».

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant et au Service de protection des mineurs.

 

La greffière :

Aurélie MELIN ABDOU

 

La présidente :

Sara GARBARSKI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète
(art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'000.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

60.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'635.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

2'635.00