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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/4455/2021

AARP/240/2025 du 23.06.2025 sur JTDP/209/2024 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : ABUS DE CONFIANCE
Normes : CP.138
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/4455/2021 AARP/240/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 23 juin 2025

 

Entre

A______, domicilié ______ [GE], comparant par Me B______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/209/2024 rendu le 15 février 2024 par le Tribunal de police,

 

et

C______, partie plaignante, comparant par Me D______, avocat,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/209/2024 du 15 février 2024, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a acquitté des chefs d'escroquerie (art. 146 al. 1 du Code pénal [CP]) et de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP) mais l'a déclaré coupable d'abus de confiance (art. 138 ch. 1 al. 2 CP) et de violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 de la Loi sur la circulation routière [LCR]) et l'a condamné à une peine pécuniaire de 150 jours-amende, à CHF 40.- l'unité, avec un sursis de trois ans. Le TP l'a également condamné à payer à C______ CHF 21'000.-, avec intérêts à 5% dès le 14 juin 2022, en réparation du dommage matériel, ainsi que CHF 2'650.- pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure. L'État de Genève a par ailleurs été condamné à verser CHF 1'510.20 à A______ à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure, les conclusions en indemnisation de l'intéressé étant pour le surplus rejetées. Les frais de la procédure ont été mis à sa charge à concurrence de CHF 998.40.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement du chef d'abus de confiance, au déboutement de C______ de ses conclusions en indemnisation pour ses frais de défense et à être lui-même pleinement indemnisé pour ses propres frais de défense. Il conteste en outre sa condamnation aux frais de la procédure et la communication du jugement aux "autorités tierces".

b.a. Selon l'acte d'accusation du 12 mai 2023, complété le 12 février 2024, il est encore reproché à A______ ce qui suit :

Il a intentionnellement employé sans droit, à son profit ou au profit de tiers, la somme de CHF 35'000.- qui lui avait été confiée, en ne l'utilisant pas aux fins stipulées dans la convention de crédit COVID-19 signée le 31 mars 2020 (ci-après : la convention de crédit) avec la banque E______ pour les besoins courants en liquidités de l'entreprise A______/F______, mais pour satisfaire ses besoins personnels ou ceux de tiers, en effectuant des dépenses et retraits en espèces sans lien avec les charges courantes de l'entreprise, soit en procédant aux retraits et versements suivants :

-        le 7 avril 2020, CHF 19'953.- ont été transférés en faveur de son compte épargne privé 1______ ouvert auprès de E______ (ci-après : compte épargne), pour rembourser un prêt octroyé par un ami ;

-        le 26 avril 2020, CHF 4'000.- ont été transférés en faveur de son compte privé 2______ ouvert auprès de E______ (ci-après : compte courant privé), pour payer des factures personnelles (assurance maladie, assurance ménage, abonnement de fitness de son épouse, leasing "M______" et loyer personnel) ;

-        le 29 mai 2020, CHF 4'000.- ont été transférés en faveur de son compte courant privé, pour payer son loyer du mois de mai 2020 ;

-        le 2 juin 2020, CHF 2'000.- ont été transférés en faveur de son compte courant privé, pour payer des factures personnelles (assurance maladie, téléphonie mobile, abonnement de fitness de son épouse, achats sur G______), un retrait en espèces de CHF 760.- ayant par ailleurs été effectué ;

-        le 1er juillet 2020, CHF 10'000.- ont été transférés en faveur de son compte courant privé, pour payer des factures personnelles.

b.b. Il a également, faits pour lesquels il a été condamné et qui ne sont pas contestés en appel, à H______ [GE], le 16 février 2022, vers 06h55, tandis qu'il circulait au volant de son véhicule de livraison sur la rue 3______ en direction du 4______, été inattentif et, ce faisant, a omis d'accorder la priorité à un piéton I______, lequel traversait la chaussée, à l'intersection avec la rue 5______, le percutant avec l'avant droit de son véhicule, et le faisant de la sorte chuter, ce qui l'a légèrement blessé.

b.c. Il lui était enfin reproché de s'être rendu coupable d'escroquerie et de faux dans les titres, infractions dont il a été acquitté, pour avoir le 31 mars 2020, dans le contexte de faits décrit ci-dessus (consid. b.a.).

B. Les faits encore pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______/F______ était une entreprise en raison individuelle, active dans les transports nationaux et internationaux, créée en 2018. A______ en était le détenteur et disposait, seul, de la signature sur la relation bancaire ouverte au nom de la société auprès de E______.

Plusieurs relations bancaires ont été établies avec cette banque :

-        A______ est titulaire d'une relation bancaire 6______ sous laquelle sont abrités deux comptes, soit un compte courant, ainsi qu'un compte épargne ;

-        A______/F______ était cocontractant (ayant droit économique : A______) d'une relation bancaire 7______ sous laquelle était abrité le compte courant entreprise (8______), ainsi qu'un crédit "J______" (9______, dont le solde, au 24 février 2021, était débiteur de CHF 35'000.-).

A______ disposait également d'un compte privé, ainsi que d'un compte professionnel au nom de son entreprise individuelle auprès de [la banque] K______.

Les avoirs bancaires détenus par A______ et par A______/F______ auprès des banques E______ et K______ s'élevaient, le 7 avril 2020 à CHF 71'291.25, puis le 30 avril 2020 à CHF 73'775.48 (bordereau de pièces TP).

b. Le 31 mars 2020, A______ a, au nom de A______/F______, conclu un contrat de prêt COVID auprès de E______ à hauteur de CHF 35'000.-, somme prêtée pour un usage précis, soit pour couvrir les frais de fonctionnement courant de l'entreprise (clause 5 de la convention de crédit : C-196). Le refinancement de prêts privés n'était notamment pas autorisé (clause 4 de la convention de crédit).

Le crédit était garanti par un cautionnement solidaire de C______ (clause 9 de la convention de crédit).

Le 7 avril 2020, A______/F______ a ainsi reçu CHF 35'000.- sur son compte J______, montant ensuite transféré sur son compte courant entreprise. Le solde de ce dernier compte, avant transfert de la somme susmentionnée, était de CHF 19'953.30 (A-19 ; C-137 ; C-188).

c.a. Le 7 avril 2020, un montant de CHF 19'953.- a été transféré du compte courant entreprise vers le compte épargne de A______ (A-112 ; C-88 ; C 137). Le solde du compte courant entreprise était dès lors ramené à CHF 35'000.30.

Le compte épargne a ensuite été débité, les 20 et 25 août 2020, de CHF 18'466.- et CHF 15'216.- en faveur de "L______ LTD" (A-112 ; C 88), qui est une société de transfert d'argent en ligne peer-to-peer.

c.b. Le 27 avril 2020, CHF 4'000.- ont été virés du compte courant entreprise vers le compte courant privé de A______ (A-49 ; A-101 ; C-54 ; C-137), qui présentait alors un solde de CHF 0.95. Le compte courant privé a ensuite été débité pour des dépenses personnelles (primes d'assurance maladie et d'assurance ménage, abonnement fitness de son épouse, mensualités d'un leasing "M______" et loyer privé [A-100 ; C 54 – C 55]).

c.c. Le 29 mai 2020, CHF 4'000.- ont été transférés du compte courant entreprise vers le compte courant privé de A______ (A-46 ; A-100 ; C-57 ; C-142), qui présentait alors un solde négatif de CHF 460.-. Le même jour, le prévenu a payé son loyer privé au moyen desdits fonds (A-99 ; C-57).

c.d. Le 2 juin 2020, CHF 2'000.- ont été transférés du compte courant entreprise vers le compte privé de A______ (A-46 ; A-99 ; C-59 ; C-144), qui présentait alors un solde de CHF 895.-. Les actifs transférés ont ensuite servi à financer les dépenses personnelles du prévenu (primes d'assurance-maladie, abonnement de fitness de son épouse, frais d'habillement et d'alimentation, une facture des SIG). Il a en outre retiré, en espèces, CHF 760.- le 8 juin 2020 (C-59 ss).

c.e. Le 18 juin 2020, le compte courant entreprise a fait l'objet de deux retraits en espèces au bancomat de H______, à hauteur de CHF 1'000.- et CHF 8'000.- (A-44 ; C-146), ramenant le solde en compte à CHF 927.64 (A-44).

d.a.a. En sus de ces transferts ou retraits litigieux visés dans l'acte d'accusation, le compte courant entreprise a été débité, entre les 7 avril et 30 juin 2020, de différents montants correspondant à des dépenses apparemment liées à l'activité de l'entreprise (État de Genève, entreprise de téléphonie mobile, leasings de véhicules et loyers notamment), pour un total d'environ CHF 18'700.-.

d.a.b. Le compte courant entreprise a en outre été débité à cinq reprises en faveur du compte privé de A______, pour un total de CHF 20'960.-, entre les 13 juillet 2020 et 31 décembre 2020.

Le relevé bancaire pour l'année 2019 (à partir du 27 mai 2019, date de l'ouverture du compte ; A-56 ss) du compte courant entreprise ne laisse apparaître aucun débit en faveur du compte privé de A______, ce que le relevé dudit compte privé confirme (C-86 ss). Aucun crédit n'apparaît non plus en 2019 sur le compte épargne de A______ depuis le compte courant entreprise (A-113). Ce dernier compte a cependant été débité, en faveur d'une carte de crédit "A______", à hauteur de CHF 5'000.- le 17 octobre 2019 (A-66) et de deux montants de CHF 3'000.- les 11 et 14 novembre 2019 (A-63). Quelques retraits en espèces apparaissent également, notamment CHF 3'050.- le 3 juin 2019 (A-80).

Selon le compte de pertes et profits transmis à l'administration fiscale, les charges de l'entreprise pour 2019 s'étaient élevées à CHF 205'387.64, tandis que le bénéfice était de CHF 68'622.26 (C-276).

d.b.a. En 2020, le compte courant entreprise a par ailleurs été crédité pour un montant total de CHF 112'300.- de la part de "A______/F______" (sans indication de compte), à raison de :

-        CHF 30'000.- le 28 février 2020 (A-54 ; C-131) ;

-        deux fois CHF 11'000.- les 1er et 28 juillet 2020 (A-42/44 ; C-148/150) ;

-        CHF 15'000.- le 25 août 2020 (A-39 ; C-160) ;

-        CHF 15'000.- le 16 septembre 2020 (A-36 ; C-165) ;

-        CHF 2'000.- le 28 septembre 2020 (A-35 ; C-166) ;

-        CHF 15'000.- le 30 octobre 2020, le solde du compte avant crédit étant alors de CHF 70.08 (A-31 ; C-173) ;

-        CHF 8'000.- le 30 novembre 2020, le solde du compte avant crédit étant alors de CHF 261.39 (A-27 ; C-178) ;

-        CHF 5'300.- le 28 décembre 2020, alors que le solde du compte avant crédit étant alors CHF 22'934.48 (une entrée de CHF 21'000.- du 24 décembre 2020 de la part de N______ : C-182) (A-24 ; C-183).

d.b.b. En 2019, les crédits de "A______/F______" (sans indication de compte) sur le compte courant entreprise se sont élevés à CHF 54'340.-, à raison de CHF 10'000.- le 27 mai 2019 (A-81), CHF 14'740.- le 3 septembre 2019 (A-72 ; C-105), CHF 10'000.- et CHF 12'600.- le 28 novembre 2019 (A-63 ; C-117) et CHF 7'000.- le 20 décembre 2019 (A-59).

d.c. En 2020, le compte privé de A______ a également été crédité de divers montants supplémentaires, totalisant CHF 23'000.-, les transferts y relatifs étant intitulés "payment A______/F______", sans mention du compte de provenance, étant précisé qu'il est possible d'exclure, à teneur de la documentation bancaire, qu'il s'agisse du compte courant entreprise. C'est ainsi que le compte privé de A______ a reçu les sommes suivantes : CHF 10'000.- le 1er juillet 2020 (A-98 ; C-62), montant qui a ensuite servi au paiement de frais privés (frais médicaux divers, primes d'assurances maladie, loyer privé [A-97 ; C-62 ss]), CHF 6'000.- le 2 novembre 2020 (A-92 ;
C-78), CHF 6'000.- et CHF 1'000.- le 2 décembre 2020 (A-90 ; A-91 ; C-81).

e. Le compte courant privé de A______ a été débité le 2 août 2019 de CHF 22'455.45 avec l'indication "achat monte meub O______ AG, paiement monte meuble" (A-108). L'acquisition de cette machine apparaît dans les amortissements mentionnés dans la déclaration fiscale 2019 ayant servi à l'établissement de la taxation 2019 définitive de A______ (C-237).

f. Le dossier de la procédure contient une facture du 3 décembre 2020 de "P______" de CHF 33'000.- adressée à "A______/F______, A______" pour la vente d'un monte-meubles O______ (C-39).

f.a. Le 1er février 2021, E______ a effectué une communication au Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent (MROS), soupçonnant que le crédit accordé aurait été obtenu et/ou utilisé d'une manière non conforme à son but. Sur cette base, le MROS a, le 24 février 2021, informé le MP qu'il existait des soupçons quant à l'utilisation de fonds prêtés (A-1 ss).

f.b. À teneur de la documentation bancaire produite par E______ le 25 janvier 2022 (C-195 ss), plusieurs échanges ont eu lieu entre A______ et E______ dès le constat par le premier du blocage de son compte, mesure consécutive aux soupçons de la banque. Le dossier de la procédure ne permet pas de comprendre sur quels éléments E______ a fondé ses soupçons.

Il ressort des échanges entre E______ et A______ que, le 8 juin 2021, ce dernier a expressément demandé à la banque de quelle manière il pouvait débuter le remboursement de son prêt COVID (C-200). Il a requis à plusieurs reprises, par téléphone et par courriel, des explications sur les raisons du blocage de son compte, ainsi que sollicité un rendez-vous avec son conseiller, démarches auxquelles aucune suite n'a apparemment été donnée (C-198 [recto et verso] ; C-199 ; C-200 [recto et verso], C-202).

g. Le 9 avril 2021, interpellé par le MP, C______ s'est déclaré partie plaignante au civil et au pénal, réservant ses conclusions civiles la banque n'ayant pas encore fait appel à la caution (C-208).

Le 22 mars 2022, E______ a résilié, avec effet immédiat, le contrat de prêt COVID et exigé le remboursement du solde du crédit, avec un ultime délai au 16 mai 2022 (courrier du C______ du 16 juin 2022 [classeur TP]). Le dossier ne contient aucune indication de ce qu'un remboursement aurait été préalablement demandé ou convenu.

E______ a fait appel à la caution le 16 mai 2022, date à laquelle C______ a donc versé CHF 35'000.- à la banque (courrier du C______ du 24 mai 2023 et annexes [classeur TP]).

Le 16 juin 2022, un plan de remboursement a été conclu entre C______ et A______/F______ SARL (qui a succédé à A______/F______), A______ étant porte-fort. L'arrangement prévoyait le paiement de 70 mensualités de CHF 500.-. La première tranche a été payée en juillet 2022 et les suivantes semblent l'avoir été régulièrement [classeur TP].

h. À teneur de l'extrait du registre des poursuites du 4 mars 2021, A______ ne fait l'objet d'aucune poursuite ni acte de défaut de biens auprès de l'Office des poursuites de Genève (C-206).

i.a. Devant le MP (C-328ss), A______ a expliqué que les virements effectués en faveur de L______ avaient été ordonnés pour rembourser une somme de CHF 33'000.- qu'un ami ayant déménagé au Brésil lui avait prêtée, en janvier 2020, pour l'acquisition d'un camion, dont il estimait qu'il entrait dans les besoins courants de l'entreprise.

Il considérait en outre normal d'avoir utilisé l'argent pour subvenir à ses besoins, les montants qu'il s'était versés constituant en partie son salaire. Il ne percevait pas de revenu fixe et prélevait de l'argent sur le compte de l'entreprise en fonction de ses frais privés (C-329 ss).

Il avait ouvert une relation bancaire auprès de E______ pour faciliter les retraits en espèces, lesquels étaient parfois compliqués avec K______, étant précisé qu'il lui arrivait de payer des employés en espèces.

Il a enfin indiqué être en mesure de rembourser le crédit à la date de mise en demeure de E______ (soit le 16 mai 2022), relevant qu'une convention prévoyant des paiements échelonnés l'arrangerait beaucoup (C-333).

i.b. Devant le TP, A______ a contesté avoir utilisé le prêt contrairement à sa destination. Les virements en faveur de son compte épargne avaient été effectués pour couvrir d'éventuels besoins futurs, faute de nécessité immédiate de disposer desdits montants. Les versements par L______ avaient été ordonnés en faveur de comptes bancaires brésiliens ouverts à son propre nom et à celui de sa mère, pour rembourser une dette envers un prénommé Q______, en lien avec l'achat d'un camion en Suisse. Le contrat de prêt, contracté au bénéfice de la société, avait été conclu oralement et l'argent du prêt lui avait été remis en espèces. Le véhicule acheté grâce à ce prêt n'était pas le monte-meuble acquis pour CHF 33'000.- en décembre 2020 (C-39). Il n'avait pas sollicité l'octroi du crédit COVID pour pouvoir rembourser cette dette. En 2019, le revenu qu'il percevait, qui n'était pas fixe, ascendait mensuellement à environ CHF 4'000.-. Il ne se souvenait plus de ce qu'il avait fait des montants en espèces retirés le 18 juin 2020.

j. En première instance, A______ a déposé une requête en indemnisation sollicitant le versement d'un montant total de CHF 6'755.05 pour ses frais de défense, état de frais à l'appui.

C______ a produit un décompte faisant état d'une activité de 15h00, à un tarif de CHF 150.- pour l'avocat-stagiaire, et de 1h00, à un tarif de CHF 400.- d'avocat-associé, pour un total de CHF 2'650.-.

C______ a en outre pris, le 12 février 2021, des conclusions civiles en CHF 21'000.-, avec 5% d'intérêt l'an dès le 14 juin 2022.

C. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

a. Selon son mémoire d'appel et sa réplique, A______ persiste dans ses conclusions.

Il avait proposé à E______ un remboursement intégral du crédit mais n'avait jamais obtenu de réponse. Le TP avait retenu à tort qu'il aurait dû laisser l'argent du prêt sur le compte dit "COVID". Il contestait enfin avoir utilisé la somme de CHF 19'953.- à des fins privées comme l'avait retenu le TP.

En droit, il contestait l'infraction d'abus de confiance en ce que les éléments constitutifs objectifs de l'infraction n'étaient pas réalisés. En effet, lorsqu'il avait reçu les CHF 35'000.- accordés, il disposait, respectivement son entreprise, sur ses divers comptes auprès de E______ et de K______, d'une fortune totale de CHF 36'291.25. Or, dès réception du prêt COVID, la distinction entre l'argent issu du prêt et ses propres deniers était devenue impossible, les patrimoines se confondant.

En particulier, le versement des CHF 19'953.- sur son compte épargne n'était pas critiquable puisque l'argent de son entreprise et le sien se confondaient, indépendamment du libellé des comptes concernés. Il était par exemple parfaitement licite, pour un indépendant, d'encaisser des factures professionnelles sur un compte intitulé "épargne" ou "privé", tant que les mouvements étaient comptabilisés correctement. Il était dès lors faux de dire qu'il aurait dû laisser cette somme en attente sur un compte dit "COVID". La faillite d'un indépendant concernait tant le patrimoine commercial que le patrimoine privé de l'intéressé, de sorte que l'argument de la ségrégation ne tenait pas. La fortune commerciale devait elle aussi apparaître dans la déclaration fiscale privée de son titulaire. D'ailleurs, A______ n'était pas soumis à l'obligation de tenir une comptabilité.

Ensuite, il n'était pas possible de déterminer si les deux transferts vers le Brésil concernaient des actifs provenant du patrimoine de A______ antérieurs au prêt COVID ou issus de ce prêt. En tout état, il disposait d'un patrimoine de CHF 36'291.25, dont il était en droit de disposer, lors de la réception du prêt COVID. Les conventions de prêt COVID avaient été pensées pour des sociétés de capitaux et non pour des indépendants. Ainsi, il eût fallu prévoir des dispositions particulières pour ces derniers.

Subsidiairement, l'élément constitutif subjectif n'était pas réalisé, faute de dessein d'enrichissement illégitime. A______ disposait, au moment de l'utilisation du prêt, de fonds suffisants pour le rembourser et avait toujours versé les mensualités exigées par C______, la résiliation du prêt par E______ étant, sous cet angle, incompréhensible, en l'absence de défaut de paiement. Le crédit initialement accordé était remboursable en 2025, échéance ensuite reportée à 2028 voire 2030 par le Conseil fédéral. Il était ainsi injuste de lui reprocher de ne pas avoir pas procédé au remboursement dans le délai de quelques jours subitement imposé par E______, d'autant que cette demande de remboursement découlait d'une analyse erronée faite par la banque, reposant le soupçon infondé d'un mésusage des fonds prêtés.

En outre, la procédure pénale avait tué sa motivation entrepreneuriale et lui avait causé des insomnies, le conduisant à renoncer à son entreprise florissante pour un emploi de salarié. Alors que le prêt serait in fine entièrement remboursé, la plainte parfaitement infondée avait causé la fin d'une entreprise et le seul intérêt de C______ à ce stade était d'obtenir une indemnisation pour ses frais dans la procédure inutile qu'il avait menée.

Compte tenu de son acquittement des charges principales, les frais de la procédure de première instance et d'appel devaient être laissés à charge de l'État. Par identité de motifs, ses demandes d'indemnisation (première instance et appel), devaient être intégralement admises.

Il a produit une note d'honoraire de CHF 3'941.55 (TVA comprise) (correspondant à 526 minutes d'activité au tarif horaire de CHF 400.- et 10 minutes au tarif de CHF 200.-/h).

b. Dans ses déterminations du 27 août 2024, C______ conclut à la confirmation du jugement entrepris.

Il était faux de soutenir que les fortunes privée et commerciale d'un titulaire d'une raison individuelle n'étaient pas juridiquement séparées. A______ disposait de plusieurs comptes auprès de E______, soit un compte "entreprise" ainsi que deux comptes personnels, de sorte que la fortune commerciale et celle privée étaient ségréguées. Le titulaire d'une raison individuelle avait au demeurant l'obligation (art. 957 CO) de tenir une comptabilité s'agissant de sa fortune commerciale, alors que tel n'était pas le cas de ses avoirs privés. Les deux types de fortunes étaient en outre soumises à des règles différentes en matière fiscale.

On peinait à comprendre pourquoi, si A______ avait toujours eu la volonté et la capacité de rembourser son prêt, celui-ci avait été résilié par E______ pour n'avoir pas été amorti dans les délais.

En tout état, les prêts COVID étaient destinés à soutenir les entreprises durant la période de confinement et non à régler des dépenses privées telles que cela avait été le cas. Une telle utilisation constituait un détournement du but dans lequel le crédit avait été octroyé, le fait que le montant du prêt se soit mélangé à la fortune commerciale de l'appelant n'y changeant rien.

Le remboursement partiel du prêt après la commission de l'infraction n'ôtait pas à cette dernière son caractère pénal.

La créance résiduelle du C______ s'élevait, compte tenu des remboursements intervenus, à CHF 18'000.-, avec intérêt à 5% l'an dès le 14 juin 2022.

C______ ne sollicitait pas de dépens pour la procédure d'appel.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel.

A______ avait bien utilisé sans droit les valeurs patrimoniales confiées : CHF 19'953.- avaient été transférés du compte de l'entreprise à son compte personnel dès réception du prêt, puis retransférés au Brésil en août 2020, sur son compte et sur celui de sa mère. L'utilisation alléguée (et aucunement étayée) de ce montant pour rembourser un prêt lié à l'achat d'un camion (pour CHF 33'000.- en janvier 2020) n'était pas autorisée par la convention de prêt COVID. Il en allait de même des retraits de CHF 8'000.- et 1'000.- effectués le 18 juin 2020, dont l'appelant n'avait pas pu justifier l'usage.

L'élément subjectif de l'enrichissement illégitime était également réalisé. A______ n'avait ni la capacité ni la volonté de rembourser en tout temps le montant du prêt, au vu de ses frais et charges courantes, ainsi que des mensualités convenues, en CHF 500.-.

d. Le TP se réfère intégralement à son jugement.

D. A______ est né le ______ 1981 au Brésil. Il est de nationalité italienne et est au bénéfice d'un permis C. Il est marié et père de trois enfants mineurs qui sont encore à sa charge et à celle de son épouse. Depuis janvier 2021, il travaille en qualité de responsable de dépôt auprès de R______ pour un salaire mensuel net d'environ CHF 6'334.-. Ses charges s'élèvent à CHF 2'645.- pour le loyer et CHF 1'500.- pour l'assurance-maladie de la famille dont CHF 1'350.- d'assurance de base. Son épouse réalisait, jusqu'à la fin du mois de mars 2024, un revenu mensuel d'environ CHF 1'200.-. Il a des dettes de leasing et auprès du C______.

L'extrait de son casier judiciaire fait état d'une condamnation, le 6 août 2019, par le Ministère public du canton du Valais, à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 160.-, avec un sursis de deux ans, ainsi qu'à une amende de CHF 1'200.-, pour emploi d'étranger sans autorisation au sens de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI). Il n'a jamais été condamné à l'étranger.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. 2.1.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 ; 127 I 38 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_86/2019 du 8 février 2019 consid. 1.1).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation ; le principe est violé lorsqu'il résulte du jugement que, pour être parti de la fausse prémisse qu'il incombait à l'accusé de prouver son innocence, le juge l'a condamné parce qu'il n'avait pas apporté cette preuve (ATF 127 I 38 consid. 2a ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_47/2018 du 20 septembre 2018 consid. 1.1 ; 6B_61/2015 du 14 mars 2016 consid. 3).

Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe de la présomption d'innocence interdit cependant au juge de se déclarer convaincu d'un fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve recueillis laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence d'un tel fait ; des doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent en revanche pas à exclure une condamnation (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 ; 144 IV 345 consid. 2.2.3.2 et 2.2.3.3 ; 138 V 74 consid. 7 ; 127 I 38 consid. 2a).

2.1.2. Commet un abus de confiance au sens de l'art. 138 ch. 1 al. 2 CP quiconque, sans droit, aura employé à son profit ou au profit d'un tiers, des valeurs patrimoniales qui lui avaient été confiées.

L'infraction suppose qu'une valeur ait été confiée, autrement dit que l'auteur ait acquis la possibilité d'en disposer, mais que, conformément à un accord (exprès ou tacite) ou un autre rapport juridique, il ne puisse en faire qu'un usage déterminé, en d'autres termes, qu'il l'ait reçue à charge pour lui d'en disposer au gré d'un tiers, notamment de la conserver, la gérer ou de la remettre (ATF 133 IV 21 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_613/2016 et 6B_627/2016 du 1er décembre 2016 consid. 4). Les valeurs patrimoniales sont ainsi confiées si le lésé a volontairement transféré à l'auteur le pouvoir matériel et juridique d'en disposer, moyennant l'engagement exprès ou tacite d'en faire un usage déterminé dans l'intérêt du lésé ou d'un tiers. Un rapport de confiance particulier doit donc exister entre le lésé et l'auteur, qui est concrétisé par le transfert du pouvoir de disposer des valeurs patrimoniales. L'existence et le contenu du rapport de confiance peuvent être définis de manière exprès ou tacite (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ [éd.], Commentaire romand, Code pénal II, Bâle 2017, N 33 ad art. 138). Le comportement délictueux consiste à utiliser la valeur patrimoniale contrairement aux instructions reçues, en s'écartant de la destination fixée (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1).

L'alinéa 2 de l'art. 138 ch. 1 CP ne protège pas la propriété, mais le droit de celui qui a confié la valeur patrimoniale à ce que celle-ci soit utilisée dans le but qu'il a assigné et conformément aux instructions qu'il a données ; est ainsi caractéristique de l'abus de confiance le comportement par lequel l'auteur démontre clairement sa volonté de ne pas respecter les droits de celui qui lui fait confiance (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1 ; 121 IV 23 consid. 1c).

Du point de vue subjectif, l'auteur doit avoir agi intentionnellement et dans un dessein d'enrichissement illégitime ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime (ATF 118 IV 27 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_356/2016 du 6 mars 2017 consid. 2.1). Par enrichissement, il faut entendre tout avantage économique, notamment l'amélioration de la situation patrimoniale, soit une augmentation de l'actif, une diminution du passif, une non-diminution de l'actif ou une non-augmentation du passif. Il peut être provisoire ou temporaire (B. CORBOZ, Les Infractions en droit suisse, Berne 2010, vol. I., N 14-15 ad art. 138).

2.2. En l'espèce, après réception du prêt COVID de CHF 35'000.- le 7 avril 2020, le compte courant entreprise n'a plus été alimenté jusqu'au 1er juillet 2020. Le 30 juin 2020, ce compte présentait un solde de CHF 241.19. Le crédit COVID a ainsi été intégralement dépensé entre les 7 avril et 30 juin 2020. Les principaux débits opérés du compte courant entreprise au cours de cette période peuvent être classés en quatre catégories :

-        débit au profit du compte épargne (un transfert de CHF 19'953.- le 7 avril 2020) ;

-        débits en paiement de factures professionnelles (environ CHF 18'700.- entre les 7 avril et 30 juin 2020) ;

-        débits au profit du compte courant privé (trois transferts pour un total de CHF 10'000.- les 27 avril, 29 mai et 2 juin 2020), fonds ensuite été utilisés pour acquitter des factures privées ;

-        retraits au bancomat (deux retraits le 18 juin 2020 pour un total de CHF 9'000.-).

Ces débits s'élèvent à près de CHF 54'600.-, ce qui représente la quasi-totalité du montant qui était disponible sur le compte courant entreprise suite au versement du prêt COVID (solde de compte de CHF 54'953.30 [19'953.30 + 35'000.-]).

2.3. Il convient donc de déterminer si le prévenu a fait un usage de sa trésorerie conforme à la convention de crédit, en particulier si les fonds COVID mis à disposition ont été utilisés pour couvrir les besoins courants de A______/F______.

Le prévenu ne saurait en effet invoquer la confusion des patrimoines pour éviter de justifier de l'utilisation des fonds. Les termes de la convention de crédit, bien que succincts, sont clairs et ne laissent aucun doute quant à une utilisation des fonds limitée au fonctionnement courant de l'entreprise, peu importe la forme juridique de celle-ci, ce qui impacte l'utilisation de la trésorerie globale de l'entreprise jusqu'au remboursement complet du prêt.

2.4. À réception du crédit COVID, le prévenu a transféré CHF 19'953.- sur son compte épargne, soit l'équivalent du solde de son compte courant entreprise avant l'arrivée des fonds reçus de la Confédération. Du compte épargne, CHF 18'466.50 et CHF 15'216.- ont été transférés, les 20 et 25 août 2020, via un système de transfert peer-to-peer de l'entreprise L______, à destination du compte de l'appelant et de celui de sa mère au Brésil, pour permettre le remboursement d'une dette liée à l'achat d'un véhicule destiné à l'entreprise selon les explications de ce dernier. Or, l'appelant n'a produit ni contrat de prêt, expliquant à cet égard qu'il était oral, ni facture d'achat dudit véhicule, dont il n'a au demeurant pas prouvé l'existence, laquelle ne ressort pas des autres documents figurant à la procédure. Il ne démontre pas davantage la réception des fonds au Brésil ou le remboursement du prétendu prêteur. Aussi, rien n'objective l'acquisition, en janvier 2020, d'un véhicule de transport. Le transfert peer-to-peer apparaît par ailleurs particulièrement incongru s'agissant du remboursement d'un prêt, à l'instar de l'absence d'éléments matériels attestant dudit prêt, vu le montant concerné.

Partant, les déclarations de l'appelant sur ce point ne sont pas crédibles et aucun élément ne permet de relier cette dépense au fonctionnement de son entreprise.

Il en découle que ces CHF 19'953.- ont manifestement été dépensés de manière non conformes à la convention de crédit.

2.5. Le prévenu ne conteste pas que les trois montants transférés sur son compte courant privé pour un total de CHF 10'000.- ont servi à régler des factures privées sans lien avec les activités de l'entreprise (loyer, assurances, alimentation, fitness, etc.).

En 2020, excepté pendant la période de semi-confinement, le prévenu a alimenté son compte courant entreprise, quand cela était nécessaire, à hauteur de CHF 112'300.- (CHF 30'000.- le 28 février 2020 et CHF 82'300.- entre les 1er juillet et 31 décembre 2020). Ces fonds proviennent a priori d'un autre compte professionnel, vu l'intitulé des transferts ("A______/F______").

Il s'ensuit que le prévenu a puisé sur son compte courant entreprise de quoi vivre et payer ses factures personnelles quand cela était possible, sans excès, procédant de la même manière que ce qu'il avait fait en 2019.

Ainsi, il apparaît qu'il n'a pas asséché son entreprise, laquelle n'avait été créée que récemment (2018), mais qu'il l'a, bien au contraire, maintenue à flot, tout en prélevant le nécessaire pour assurer ses besoins personnels.

Partant, ces débits au profit de son compte privé ne sauraient constituer une violation de la convention de crédit. Le prévenu sera acquitté du chef d'abus de confiance concernant ce complexe de faits.

2.6. L'acte d'accusation ne fait pas spécifiquement mention des deux retraits pour un total de CHF 9'000.- effectués le 18 juin 2020, de sorte que ceux-ci ne sauraient fonder une condamnation pour abus de confiance, selon le principe de la maxime d'accusation des art. 9 et 325 al. 1 let. f CPP. Les faits reprochés se limitent donc aux transferts mentionnés dans l'acte d'accusation.

2.7. Contrairement à ce qui est reproché dans l'acte d'accusation, le montant de CHF 10'000.- crédité sur le compte courant privé du prévenu le 1er juillet 2020 ne provient pas de son compte courant entreprise auprès de E______, mais vraisemblablement du compte professionnel détenu dans un autre établissement bancaire (a priori auprès de K______), lequel a également servi à renflouer son compte d'entreprise auprès de E______ à hauteur de CHF 112'300.- en 2020. Ces fonds n'ont ainsi pas été prélevés sur le crédit COVID alloués et ont été utilisés pour des besoins courants privés. En conséquence, le prévenu sera également acquitté du chef d'abus de confiance concernant ce reproche.

2.8. Compte tenu de ce qui précède, les éléments objectifs de l'infraction d'abus de confiance sont réalisés s'agissant du transfert de CHF 19'953.- sur le compte épargne de l'appelant. L'utilisation de ces fonds est contraire aux instructions d'utilisation contenues dans la convention de crédit. Le dommage pécuniaire résultant de l'infraction n'est pas contesté, l'appelant se conformant au plan de remboursement du prêt COVID conclu avec le C______

Sur le plan subjectif, l'appelant a agi intentionnellement. Il avait connaissance des termes de la convention de crédit, qu'il avait signée, de sorte qu'il n'a pu qu'envisager et accepter que l'utilisation faite des CHF 19'953.- ne respectait pas les termes de l'affectation des fonds, de sorte que le dessein d'enrichissement illégitime est rempli, ne serait-ce que sous l'angle du dol éventuel.

2.9. En conséquence, le prévenu sera reconnu coupable d'abus de confiance au sens de l'art. 138 ch.1 al. 2 CP s'agissant du transfert de CHF 19'953.- du crédit COVID sur son compte épargne, montant qui a ensuite été viré, apparemment au Brésil, via un transfert peer-to-peer.

3. 3.1.1. La peine menace de l'art. 90 al. 2 LCR est une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire. Celle de l'art. 138 ch. 1 al. 2 CP est une peine privative de liberté cinq ans ou une peine pécuniaire.

3.1.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

3.1.3. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

Lorsque les peines envisagées concrètement sont de même genre, l'art. 49 al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement – d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner – la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2).

3.2. En l'espèce, il sera renvoyé aux considérants du jugement entrepris (art. 82 al. 4 CPP), l'appelant n'ayant pris aucune conclusion spécifique en lien avec la peine, qu'il ne discute pas non plus dans son mémoire d'appel.

Le genre de peine est acquis et au demeurant justifié, de même que l'octroi du sursis et la fixation du délai d'épreuve à trois ans (cf. art. 391 al. 2 CPP).

La quotité de la peine pécuniaire sera réduite pour tenir compte d'un préjudice de CHF 19'953.- en lien avec l'abus de confiance (et non de CHF 28'000.- comme retenu en première instance). Partant, une peine pécuniaire de 45 jours-amende sanctionne adéquatement l'abus de confiance (art. 138 al. 1 ch. 2 CP), infraction abstraitement la plus grave, auquel il convient d'ajouter 45 jours-amende (peine hypothétique : 60 jours-amende) pour la violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR), soit une peine globale de 90 jours-amende.

L'appel sera dès lors partiellement admis quant à la quotité de la peine.

4. L'appelant n'a pas repris dans son mémoire d'appel, ni n'y consacre aucun développement, sa conclusion portant sur la communication aux autorités tierces, de sorte que celle-ci est considérée comme ayant été retirée.

5. L'appelant ne conteste pas les conclusions civiles prises par le C______. Elles ascendent à CHF 18'000.- selon les dernières écritures produites, de sorte qu'il sera fait droit à cette conclusion, sous déduction de toutes sommes qui auraient été versées depuis le 27 août 2024.

6. 6.1. L'appelant, qui succombe partiellement, supportera 60% des frais de la procédure envers l'État (art. 428 CPP), lesquels comprennent un émolument de décision de CHF 1'000.-.

Compte tenu de l'admission partielle de l'appel quant à la quotité de la peine, 40% de l'émolument complémentaire de jugement de première instance sera laissé à la charge de l'État. Il n'y a en revanche pas lieu de revoir la répartition des autres frais de la procédure préliminaire et de première instance, les verdicts de culpabilité étant confirmés.

La décision sur les frais préjugeant de la question de l'indemnisation (ATF 147 IV 47 consid. 4.1), l'appelant se verra allouer 40% de ses conclusions en indemnisation (art. 429 al. 1 let. a et art. 436 al. 1 CPP) pour la procédure d'appel, soit CHF 1'576.60 (40% de CHF 3'941.55), TVA comprise.

Par identité de motifs, les indemnisations pour les frais de défense du prévenu et de l'intimé lors de la procédure préliminaire et de première instance telles qu'allouées par le premier juge ne seront pas revues.

6.2. L'intimé a renoncé à prendre des conclusions en indemnisation pour la procédure d'appel.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/209/2024 rendu le 15 février 2024 par le Tribunal de police dans la procédure P/4455/2021.

L'admet partiellement.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP) et de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP).

Déclare A______ coupable d'abus de confiance (art. 138 ch. 1 al. 2 CP) et de violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 90 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 40.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne A______ à payer CHF 18'000.-, avec intérêts à 5% dès le 14 juin 2022 à C______, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, à concurrence de CHF 998.40 (art. 426 al. 1 CPP), ainsi qu'au paiement de CHF 600.- correspondant à 60% de l'émolument complémentaire de jugement de première instance.

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'195.-, lesquels comprennent un émolument de décision de CHF 1'000.-.

Met 60% de ces frais, soit CHF 717.- à la charge de A______.

Laisse le solde des frais de la procédure à la charge de l'État (art. 423 al. 1 CPP).

Prend acte de ce que le Tribunal de police a condamné A______ à verser à C______ CHF 2'650.- à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure préliminaire et de première instance (art. 433 al. 1 CPP).

Prend acte de ce que le Tribunal de police a condamné l'État de Genève à verser CHF 1'510.20 à A______ à titre d'indemnité pour ses frais de défense encourus lors de la procédure préliminaire et de première instance (art. 429 al. 1 let. a CPP).

Alloue à A______, à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure en appel, CHF 1'576.60 (40% ; art. 429 al. 1 let. a CPP).

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, à l'Office cantonal de la population et des migrations et au Service cantonal des véhicules.

 

La greffière :

Aurélie MELIN ABDOU

 

La présidente :

Delphine GONSETH

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

2'248.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

120.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

État de frais

CHF

75.00

Émolument de décision

CHF

1'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'195.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'443.00