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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/15744/2024

AARP/132/2025 du 07.04.2025 sur JTDP/1489/2024 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : PLAINTE PÉNALE;RETRAIT(VOIE DE DROIT)
Normes : CP.30; CPP.120
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/15744/2024 AARP/132/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 7 avril 2025

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon, chemin de Champ-Dollon 22, 1241 Puplinge, comparant par Me B______, avocate,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/1489/2024 rendu le 6 décembre 2024 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

C______ et D______, parties plaignantes,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 6 décembre 2024, par lequel le Tribunal de police (TP), après avoir dit que E______ n'avait pas la qualité de partie plaignante, l'a reconnu coupable de vol (art. 139 ch. 1 du Code pénal [CP]), de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), de violation de domicile (art. 186 CP), de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP) et d'infraction à l'art. 19a ch. 1 de la loi fédérale sur les stupéfiants (LStup) et l'a condamné à une peine privative de liberté de 18 mois ainsi qu'à une amende de CHF 500.-. Le TP a également ordonné son expulsion à vie de Suisse et ordonné le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS).

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant au classement des faits qualifiés de dommages à la propriété et de violation de domicile commis au préjudice de E______, subsidiairement à son acquittement pour ces faits, ainsi qu'à son acquittement des faits qualifiés de rupture de ban, et au prononcé d'une peine privative de liberté n'excédant pas sept mois.

Il contestait également son expulsion à vie de Suisse, conclusion qu'il a toutefois retirée aux débats d'appel.

b. Selon l'acte d'accusation du 4 novembre 2024, il était reproché les faits suivants, commis à Genève, à A______ :

Entre le 19 et le 20 avril 2024, il a projeté une pierre contre la vitre d'une porte-fenêtre de l'appartement de E______, la brisant et causant ainsi un dommage à hauteur des coûts de réparation, de CHF 518.90. Il a ensuite pénétré sans droit et contre la volonté de l'ayant droit dans ledit appartement et y a dérobé, dans un dessein d'enrichissement illégitime, CHF 23.- en liquide après avoir fouillé tous les tiroirs et placards. Au moment de commettre ce cambriolage, il visait toutefois des éléments patrimoniaux plus élevés, soit à tout le moins supérieurs à CHF 300.-.

Le 15 octobre 2024, de concert avec G______, il a pénétré par effraction, sans droit, et contre la volonté de l'ayant droit dans l'appartement de D______, alors occupé par C______ à F______ [GE], en endommageant le cylindre de la porte palière, causant ainsi un dommage d'un montant inconnu. Il a complètement fouillé l'appartement et a volé, dans un dessein d'enrichissement illégitime, un sac-à-main et des bijoux et montres d'une valeur indéterminée.

Depuis le 26 mai 2023, lendemain de sa dernière condamnation, jusqu'au 15 octobre 2024, date de son arrestation, A______ a persisté à séjourner en Suisse, en particulier à Genève, en violation de l'expulsion judiciaire d'une durée de 20 ans prononcée à son encontre par jugement du Tribunal de police du 25 mai 2023, définitif et exécutoire, qui lui avait été dûment notifié et dont il avait connaissance.

B. Les faits de la cause ne sont pas contestés par l’appelant et correspondent à la description qui en est faite dans l'acte d'accusation. Il est ainsi renvoyé pour le détail au jugement de première instance (art. 82 al. 4 du Code de procédure pénale suisse [CPP]). Aux fins de traitement de l'appel, les faits encore pertinents suivants sont pour le surplus rappelés ci-après.

a. E______ a déposé plainte le 1er mai 2024 pour le cambriolage de son domicile, en remplissant à la main un formulaire pré-imprimé qu'elle a transmis à la police. Après la description de son identité et les mots "dépose plainte contre inconnu-e-s pour", elle a expressément coché les cases mentionnant les infractions de vol (art. 139 CP), dommages à la propriété (art. 144 CP) et violation de domicile (art. 186 CP ; pièce A-4). Elle a décrit le mode d'introduction par bris de la porte-fenêtre, le montant du vol et précisé le dommage subi ainsi que le coût des réparations. Ensuite, après la rubrique "pour ces faits je dépose plainte pénale", elle a visé, dans la rubrique "Je demande la poursuite et la condamnation de l'auteur (participation à la procédure pénale comme partie plaignante au pénal)", la case "non", tout comme dans la rubrique "Je demande que l'auteur soit condamné à me payer une somme d'argent… (participation à la procédure comme partie plaignante au civil)". Interpellée par la police, elle a confirmé cette renonciation.

b. A______ a été interpellé en flagrant délit, en possession du butin du vol du 15 octobre 2024. Après avoir initialement nié les faits d'avril 2024, il les a intégralement admis.

c. A______ n'a pas quitté la Suisse suite à la décision d'expulsion dont il fait l'objet. Il a expliqué n'avoir pas les moyens de quitter le pays, malgré sa demande en ce sens, affirmant avoir été refoulé lorsqu'il avait cherché à quitter Genève par la frontière française, faute de document valable.

Selon l'extrait du système d’information central sur la migration (SYMIC) figurant au dossier de la procédure, son casier judiciaire et les renseignements de l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM), A______, qui se dit algérien, a fait l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse prononcée en 2014 pour une durée de dix ans et de cinq expulsions pénales prononcées en 2017, 2018, 2019, 2022 et 2023. Il est connu des services de migration depuis 2009 ; en 2013 il a fait l'objet d'une décision de renvoi dans un pays Dublin. Depuis lors, son identification formelle n'a pas été possible, faute pour l'intéressé d'avoir collaboré à l'obtention de documents d'identité, ce que le Secrétariat d'État aux migrations a encore confirmé en juin 2023 à l'OCPM.

Au cours de la procédure d'appel, les services compétents se sont rendus le 26 mars 2025 à la prison de Champ-Dollon pour relancer la procédure d'identification. A______ a refusé de se rendre au parloir pour les rencontrer.

C. a. Aux débats d'appel, A______ a expliqué n'avoir pas compris pourquoi les services de migration s'étaient présentés à la prison, sans l'avertir à l'avance, et affirmé vouloir collaborer avec l'OCPM pour pouvoir quitter la Suisse. Il a également affirmé vouloir trouver un passeur pour se rendre en France.

b. Par la voix de son conseil, A______ a persisté dans ses conclusions. E______ avait renoncé à déposer plainte contre lui et les infractions de dommages à la propriété et de violation de domicile ne pouvaient donc être retenues à son encontre, faute de plainte. Il n'avait pas pu quitter la Suisse et ne pouvait donc se voir reprocher une rupture de ban. Enfin, en tout état de cause, la peine prononcée était trop sévère.

c. Le Ministère public (MP) a conclu à la confirmation du jugement entrepris. En première instance, il avait conclu au prononcé d'une peine privative de liberté de douze mois.

D. a. A______ dit être né le ______ 1976 en Algérie, pays dont il se dit originaire. Il est célibataire et sans enfant. Il est sans emploi et sans revenu. Il n'a pas de dettes.

Selon ses explications, après avoir effectué sa scolarité obligatoire, il a suivi une formation et obtenu un diplôme de soudeur dans son pays, métier qu'il a exercé en France et en Belgique. Il a séjourné dans ces deux pays avant d'arriver en Suisse en 2009. Il n'a jamais travaillé sur le territoire helvétique, faute d'autorisation. Il a néanmoins effectué quelques travaux notamment sur les marchés. Il affirme avoir l'intention de quitter la Suisse et de recommencer une nouvelle vie à Marseille.

b. À teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse, A______ a été condamné à 15 reprises entre le 6 décembre 2012 et le 25 mai 2023, principalement à Genève mais également dans le canton de Fribourg, essentiellement pour des cambriolages et des infractions en matière de séjour (séjour illégal et rupture de ban). Sa dernière condamnation pour vol, dommages à la propriété, violation de domicile et rupture de ban, porte sur une peine privative de liberté ferme de neuf mois.

E. Me B______, défenseure d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 13 heures et 15 minutes d'activité de cheffe d'étude hors débats d'appel (lesquels ont duré 1h25), dont 45 minutes de lecture du jugement motivé, 30 minutes de rédaction de la déclaration d'appel et six heures de préparation des débats.


 

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. 2.1. Une plainte est valable selon l'art. 30 CP si l'ayant droit, avant l'échéance d'un délai de trois mois depuis que l'auteur de l'infraction lui est connu (art. 31 CP), manifeste sa volonté inconditionnelle que l'auteur de l'infraction soit poursuivi et que la procédure pénale se poursuive sans autre déclaration de sa volonté (ATF 141 IV 380 consid. 2.3.4 p. 387 ; 131 IV 97 consid. 3.1 p. 98), dans les formes et auprès des autorités compétentes selon l'art. 304 al. 1 CPP (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1297/2017 du 26 juillet 2018 consid. 1.1.1 ; 6B_942/2017 du 5 mars 2018 consid. 1.1).

Un formulaire de plainte pénale préétabli, signé par l'ayant droit, portant la seule mention de l'infraction pour laquelle la poursuite est demandée (par exemple : menace) à l'exclusion d'autres indications factuelles relatives aux événements, peut remplir les exigences de contenu. C'est le cas lorsque les organes de police, auprès desquels la plainte est déposée, sont au clair sur l'état de fait pour lequel la poursuite est requise ; notamment parce qu'ils sont intervenus pendant les faits reprochés ou lorsque la cause a été documentée à l'interne (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1297/2017 du 26 juillet 2018 consid. 1.1.1 et les références ; 6S.302/2005 du 31 octobre 2005 consid. 4 et 5 = Pra 2006 46 334).

2.2. Aux termes de l'art. 120 al. 1 CPP, le lésé peut en tout temps déclarer par écrit ou par oral qu'il renonce à user des droits qui sont les siens ; la déclaration orale est consignée au procès-verbal. La renonciation est définitive.

Cette renonciation revêt un caractère exclusivement procédural, en ce sens que l'intéressé renonce aux droits conférés par le CPP et qu'il ne peut plus participer à la procédure pénale comme demandeur au pénal ou au civil (art. 118 CPP). La renonciation à la qualité de demandeur au pénal ne vaut pas retrait de plainte (ACPR/108/2013 du 21 mars 2013 ; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 8 ad art. 120).

La renonciation de la partie plaignante à ses droits procéduraux doit être exprimée de façon claire et sans équivoque. D'une manière générale, l'autorité devra donc s'assurer que la partie plaignante entend bel et bien renoncer à ses droits, quitte à utiliser des formulaires préimprimés donnant toutes explications utiles sur les modalités et les conséquences de la renonciation. Le formulaire doit refléter correctement la situation juridique, être suffisamment compréhensible pour pouvoir être rempli par un non-juriste et sans l'aide d'un employé d'une autorité pénale, ainsi que permettre de tirer des conclusions claires sur la volonté de l'intéressé (arrêt du Tribunal fédéral 1B_694/2021 du 8 août 2022 consid. 3.1).

2.3. En l'espèce, la partie plaignante a rempli un formulaire pré-imprimé comportant diverses rubriques. Elle a expressément visé les infractions aux art. 144 et 186 CP, décrit le dommage matériel subi et le mode d'introduction de l'auteur. Elle a ensuite manifesté son intention de ne pas participer à la procédure pénale, ce qui est son droit au sens de l'art. 120 CPP, renonçant ainsi à défendre ses intérêts dans la procédure.

L'intention exprimée par la partie plaignante est ainsi claire : elle a déposé plainte pénale à l'encontre du ou des auteur-s des infractions dénoncées et souhaité ne pas participer à la procédure à son encontre. Dans la mesure où la plaignante a clairement visé les art. 144 et 186 CP et décrit des éléments qui ne ressortent que de ces infractions, la renonciation ensuite exprimée ne peut pas être interprétée comme un retrait de plainte mais bien, ainsi que l'a retenu le premier juge, comme une renonciation à toute participation à la procédure pénale.

2.4. Les conclusions principales de l'appelant en classement de ces faits doivent ainsi être rejetées, une plainte ayant valablement été déposée.

L'appelant n'a en rien expliqué les motifs qui devraient conduire à son acquittement de ces infractions. Il a reconnu les faits, qui sont constitutifs de ces infractions ; sa condamnation pour dommages à la propriété et violation de domicile commis entre le 19 et le 20 avril 2024 doit être confirmée.

3. 3.1. Selon l'art. 291 CP, quiconque contrevient à une décision d'expulsion du territoire de la Confédération ou d'un canton prononcée par une autorité compétente est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (al. 1). La durée de cette peine n'est pas imputée sur celle de l'expulsion (al. 2).

La rupture de ban suppose la réunion de trois conditions : une décision d'expulsion, la transgression de celle-ci et l'intention. Cette infraction est consommée dans deux hypothèses : si l'auteur reste en Suisse après l'entrée en force de la décision d'expulsion alors qu'il a l'obligation de partir ou s'il y entre pendant la durée de validité de l'expulsion. La rupture de ban est un délit continu qui est réalisé aussi longtemps que dure le séjour illicite (ATF 147 IV 253 consid. 2.2.1 p. 256; 147 IV 232 consid. 1.1 p. 234).

La punissabilité du séjour irrégulier suppose que l'étranger ne se trouve pas dans l'impossibilité objective - par exemple en raison d'un refus du pays d'origine d'admettre le retour de ses ressortissants ou de délivrer des papiers d'identité - de quitter la Suisse et de rentrer légalement dans son pays d'origine. En effet, le principe de la faute suppose la liberté de pouvoir agir autrement (ATF 143 IV 249 consid. 1.6.1 p. 256 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_669/2021 du 11 avril 2022 consid. 3.1). Un étranger en situation irrégulière en Suisse ne peut donc pas être condamné en vertu de l'art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI) s'il lui est objectivement impossible de quitter légalement la Suisse, ce qui vaut a fortiori aussi pour l'infraction de rupture de ban au sens de l'art. 291 CP, celle-ci étant également soumise au principe de la faute (arrêt du Tribunal fédéral 6B_669/2021 du 11 avril 2022 consid. 3.1).

3.2. L'Algérie n'accepte pas le retour de ses ressortissants par vols spéciaux (arrêt du Tribunal fédéral 6B_525/2014 du 9 octobre 2014 consid. 1.2). Les renvois sous la contrainte à destination de l'Algérie sont néanmoins possibles, lorsque le rapatriement est effectué sur des vols de ligne (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1072/2015 du 21 décembre 2015 consid. 3.3 ; rapport du Conseil fédéral du 30 octobre 2012 en réponse au postulat du Conseiller national Hugues Hiltpold [11.3689], Migration en provenance de pays nord-africains (et du Yémen) - Situation en Suisse). En outre, les autorités compétentes algériennes établissent régulièrement des laissez-passer pour les personnes dont l'identité et la nationalité algérienne ont été confirmées (arrêts du Tribunal fédéral 6B_106/2016 du 7 décembre 2016 consid. 1.4.1 et 2C_1072/2015 du 21 décembre 2015 consid. 3.3).

Le fait que l'Algérie ne collabore pas avec la Suisse en matière de vols spéciaux ne dispense pas les autorités administratives de toute démarche en vue du renvoi (ATF 147 IV 232 consid. 1.7).

3.3. En l'espèce, les éléments objectifs de l'infraction de rupture de ban sont établis et non contestés.

Contrairement à ce qu'il prétend, il ressort du dossier que l'appelant n'a jamais manifesté sa volonté de quitter la Suisse, au contraire. S'il affirme vouloir de l'aide pour quitter la Suisse, l'appelant a refusé de collaborer avec les autorités administratives en vue de son identification, rendant ainsi plus difficile son renvoi. Il a renouvelé ce comportement d'obstruction pendant la procédure d'appel, refusant de rencontrer les autorités administratives compétentes : les explications fournies à cet égard sont de pure circonstance et n'emportent aucune conviction. À cela s'ajoute que l'appelant, qui a été détenu de façon répétée au cours des dernières années, n'a jamais pris l'initiative de contacter sa famille en Algérie ou les autorités de ce pays, ni de demander aux services sociaux des établissements de détention de le faire pour lui. Or, seule l'obtention de documents permettant une identification formelle permet de progresser dans le renvoi (libre ou sous contrainte) de ressortissants algériens démunis de tels documents. En l'absence de collaboration de l'intéressé, les autorités administratives ne pouvaient pas entreprendre d'autres démarches.

Dans ces circonstances, l'appelant est seul responsable de la poursuite illégale de son séjour en Suisse, alors que les autorités administratives ont entrepris les démarches que l'on pouvait attendre d'elles. Il s'est donc rendu coupable de rupture de ban et le verdict de culpabilité du premier juge sera confirmé.

4. 4.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

Le juge doit d'abord déterminer le genre de la peine devant sanctionner une infraction, puis en fixer la quotité. Pour déterminer le genre de la peine, il doit tenir compte, à côté de la culpabilité de l'auteur, de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 147 IV 241 consid. 3.2 p. 244 ss).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

4.2. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

Lorsque les peines envisagées concrètement sont de même genre, l'art. 49 al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement - d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner - la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2).

Si, dans sa jurisprudence publiée, le Tribunal fédéral a édicté la règle selon laquelle cette disposition ne prévoit aucune exception et que le prononcé d'une peine unique dans le sens d'un examen global de tous les délits à juger n'est pas possible (ATF 145 IV 1 consid. 1.4 ; 144 IV 313 consid. 1.1.2), il est revenu sur cette interprétation stricte dans plusieurs arrêts non publiés ultérieurs. Ainsi, lorsque plusieurs infractions sont étroitement liées entre elles, tant sur le plan temporel que matériel, et qu'une peine pécuniaire n'est envisageable pour aucune de ces infractions, notamment pour des motifs de prévention spéciale, une peine privative de liberté d'ensemble globale (Gesamtfreiheitsstrafe) peut être prononcée (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1135/2023 du 19 février 2025 consid. 3.3.2 ; 6B_246/2024 du 27 février 2025 consid. 2.5.4 ; 6B_432/2020 du 30 septembre 2021 consid. 1.4 ; 6B_141/2021 du 23 juin 2021 consid. 1.3.2).

4.3. En l'espèce, la faute de l'appelant est importante. Il a commis deux cambriolages à quelques mois d'intervalle, dans le but de subvenir de la sorte à ses besoins aux dépens du bien d'autrui ; il a persévéré dans son attitude d'obstruction envers les autorités de migration, jusque pendant la procédure d'appel. Il a été mû par l'appât du gain facile et un manque flagrant de respect du bien d'autrui et des décisions de l'autorité. Certes, sa situation personnelle n'est pas facile ; cela étant, ses difficultés sont principalement imputables à son propre comportement puisqu'il s'obstine à demeurer en Suisse alors qu'il n'a aucun droit de séjour, aucune perspective de régularisation ni aucune source de revenu légal dans ce pays et pourrait rentrer en Algérie en fournissant un effort et en collaborant avec les autorités.

Ses condamnations antérieures ne l'ont manifestement pas dissuadé de récidiver ou de prendre des dispositions pour permettre la mise en œuvre des décisions d'expulsion prononcées à son encontre. Le pronostic quant à son comportement futur ne peut être que défavorable, et seule une peine privative de liberté ferme entre en ligne de compte, ce que l'appelant ne conteste à juste titre pas.

L'infraction objectivement la plus grave est le vol, passible d'une peine privative de liberté allant jusqu'à cinq ans. Les deux vols ont été commis sous la forme de cambriolages : les dommages à la propriété et les violations de domicile commis concomitamment sont intrinsèquement liés et chacun de ces épisodes doit faire l'objet d'une peine globale. Compte tenu de la gravité de la faute de l'appelant et de ses très mauvais antécédents, chaque épisode emporte une peine théorique de six mois ; la peine d'ensemble pour les deux cambriolages doit donc être fixée à dix mois. Cette peine doit encore être aggravée de quatre mois (peine théorique de six mois) pour la rupture de ban, ce qui porte la peine privative de liberté d'ensemble à 14 mois.

L'appel doit donc être partiellement admis sur ce point, et la peine prononcée par le premier juge ramenée à 14 mois.

4.4. Pour le surplus, l'appelant ne conteste pas l'amende et la peine privative de liberté de substitution prononcées pour la contravention à la LStup, qui sont appropriées et seront confirmées.

5. L'appelant ayant retiré son appel sur ce point, son expulsion à vie du territoire suisse sera confirmée, tout comme l'inscription de la mesure au SIS.

6. L'appelant, qui succombe sur le classement et partiellement sur la quotité de la peine, supportera les deux tiers des frais de la procédure envers l'État (art. 428 CPP), comprenant un émolument de décision de CHF 1'500.-.

Il n'y a pas lieu de revoir la répartition des frais de la procédure préliminaire et de première instance. L'émolument complémentaire de jugement du TP sera mis à la charge de l'appelant dans la même proportion que les frais d'appel.

7. 7.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit (cf. art. 138 al. 1 CPP) est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire suivant, débours de l'étude inclus : avocat stagiaire CHF 110.- (let. a) ; collaborateur CHF 150.- (let. b) ; chef d'étude CHF 200.- (let. c). En cas d'assujettissement – l'assujettissement du patron de l'avocat au statut de collaborateur n'entrant pas en considération (arrêts du Tribunal fédéral 6B_486/2013 du 16 juillet 2013 consid. 4 et 6B_638/2012 du 10 décembre 2012 consid. 3.7) – l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont

pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. M. REISER / B. CHAPPUIS / F. BOHNET (éds), Commentaire romand, Loi sur les avocats : commentaire de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats (Loi sur les avocats, LLCA), 2ème éd. Bâle 2022, n. 257 ad art. 12). Dans le cadre des mandats d'office, l'État n'indemnise ainsi que les démarches nécessaires à la bonne conduite de la procédure pour la partie qui jouit d'une défense d'office ou de l'assistance judiciaire. Il ne saurait être question d'indemniser toutes les démarches souhaitables ou envisageables. Le mandataire d'office doit en effet gérer son mandat conformément au principe d'économie de procédure (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.22 du 31 octobre 2013 consid. 5.2.3).

7.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Des exceptions demeurent possibles, charge à l'avocat de justifier l'ampleur d'opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait.

7.3. En l'occurrence le temps consacré par le conseil de l'appelant à la lecture du jugement entrepris et à la rédaction de la déclaration d'appel (qui n'a pas à être motivée) seront écartés, ces activités s'inscrivant dans le forfait pour activités diverses.

Par ailleurs, le temps de préparation facturé (qui s'ajoute aux quatre entretiens avec le prévenu détenu) est manifestement exagéré, pour un dossier connu de la défenseure d'office (nommée dès l'arrestation de l'appelant) pour avoir été plaidé récemment en première instance, peu volumineux (un classeur fédéral peu dense pour la procédure préliminaire et de première instance) et ne présentant au surplus aucune complexité de faits (admis) ou de droit. Il sera dès lors ramené à trois heures, suffisantes pour préparer les débats d'appel, dont la durée sera ajoutée ainsi qu'un forfait de déplacement.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 2'810.60 correspondant à 10h25 d'activité au tarif de CHF 200.-/heure plus la majoration forfaitaire de 20%, un déplacement à CHF 100.- et l'équivalent de la TVA au taux de 8.1% en CHF 210.60.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1489/2024 rendu le 6 décembre 2024 par le Tribunal de police dans la procédure P/15744/2024.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement en ce qui le concerne.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de vol (art. 139 ch. 1 CP), de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), de violation de domicile (art. 186 CP), de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP) et d'infraction à l'art. 19a ch. 1 LStup.

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 14 mois, sous déduction de la détention avant jugement et en exécution anticipée de peine subie depuis le 15 octobre 2024 (art. 40 CP).

Condamne A______ à une amende de CHF 500.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de cinq jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion à vie de Suisse de A______ (art. 66a al. 1 let. d CP et art. 66b al. 1 et 2 CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) (art. 20 de l'ordonnance N-SIS; RS 362.0).

Condamne A______ au paiement de CHF 1'652.25, correspondant aux deux tiers des frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent, émolument complémentaire compris, à CHF 2'478.40 (art. 426 al. 1 CPP).

Prend acte de ce que le Tribunal de police a fixé à CHF 3'591.10 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseure d'office de A______, et arrête à CHF 2'810.60 celle qui lui est due pour la procédure d'appel (art. 135 CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'825.-, comprenant un émolument de jugement de CHF 1'500.-.

Met les deux tiers de ces frais, soit CHF 1'216.65 à la charge de A______ et laisse le solde de ces frais à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Secrétariat d'État aux migrations, à l'Office cantonal de la population et des migrations, à la prison de Champ-Dollon ainsi qu'au Service de la réinsertion et du suivi pénal.

 

La greffière :

Linda TAGHARIST

 

La présidente :

Gaëlle VAN HOVE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète
(art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

2'478.40

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

200.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

50.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'825.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

4'303.40