Décisions | Tribunal pénal
JTDP/978/2024 du 13.08.2024 ( PENAL ) , JUGE
En droit
Par ces motifs
république et | canton de genève | |
pouvoir judiciaire | ||
JUGEMENT DU TRIBUNAL DE POLICE
Chambre 8
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MINISTÈRE PUBLIC
A______, partie plaignante
contre
Monsieur X______, né le ______1987, actuellement détenu à la Prison de Champ-Dollon, prévenu, assisté de Me B______
CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :
Le Ministère public conclut à ce que le Tribunal :
- déclare X______ coupable de vol (art. 139 ch. 1 CP), de non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI) et d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI),
- révoque les sursis prononcés les 9 mars 2024 et 9 mai 2024,
- condamne X______ à une peine privative de liberté d'ensemble de 12 mois (ce type de peine et son caractère ferme étant nécessaire pour le détourner d'autres crimes ou délits et une peine pécuniaire n'apparaissant de surcroît pas exécutable), sous déduction des jours de détention avant jugement,
- ordonne l'expulsion de Suisse de X______ (art. 66 abis al. 1 CP), pour une durée de 5 ans, avec inscription au SIS (art. 20 de l'ordonnance N-SIS et art. 24 du règlement (UE) SIS; ATF 146 IV 172).
Le Ministère public sollicite également le maintien du prévenu en détention et sa condamnation au paiement des frais de procédure.
X______, par la voix de son conseil, ne s'oppose pas à un verdict de culpabilité s'agissant des infractions de vol et de non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée. Il conclut à son acquittement s'agissant de l'infraction d'entrée illégale. Il conclut à l'octroi d'une peine clémente ne dépassant pas la peine déjà subie par son mandant et à ce que les sursis prononcés les 9 mars 2024 et 9 mai 2024 ne soient pas révoqués, même si les délais d'épreuve peuvent être prolongés. Il s'en rapporte sur le principe de l'expulsion de Suisse. Si toutefois cette expulsion devait être prononcée, il conclut à ce qu'elle le soit pour une durée de 3 ans. Il conclut à ce qu'il soit renoncé à ce que cette expulsion soit inscrite au système SIS et s'oppose sur le principe à sa détention des motifs de sûreté. Enfin, il s'en rapporte sur les frais de la procédure.
A. Par acte d'accusation du 4 juillet 2024, il est reproché à X______ d'avoir :
1.1.1. le 22 juin 2024, vers 14h40, dans le magasin A______ sis ______[GE], en coactivité avec C______, dérobé des parfums pour un montant total de CHF 2'065.-, dans le but de se les approprier et de se procurer ou de procurer à son comparse un enrichissement illégitime, A______, représenté par D______, ayant déposé plainte pénale le 22 juin 2024,
faits qualifiés de vol (art. 139 ch. 1 CP);
1.1.2. le 22 juin 2024, à Genève, enfreint l'interdiction de pénétrer dans l'ensemble du canton de Genève, qui était valable du 9 mars 2024 au 9 mars 2025 et qui lui a été valablement notifiée le 9 mars 2024, en pénétrant sur le territoire de ce canton et, plus particulièrement, en s'étant trouvé, à la ______[GE],
faits qualifiés de non-respect d’une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI);
1.1.3. le 22 juin 2024, à Genève, pénétré sur le territoire suisse, alors qu'il n'était pas au bénéfice des autorisations nécessaires, qu'il était démuni de moyens financiers légaux suffisants permettant d'assurer sa subsistance durant son séjour et ses frais de retour et qu'il n'était pas en possession de papiers d'identité (carte d'identité ou passeport) valables indiquant sa nationalité,
faits qualifiés d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI).
B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :
a. Selon les rapports d'arrestation et d'interpellation du 22 juin 2024, ce jour-là, vers 14h55, la Centrale d'engagement, de coordination et d'alarme (CECAL) a demandé l'intervention d'une patrouille de gendarmerie dans le commerce A______, sis ______[GE], pour deux voleurs qui venaient de dérober des parfums, pour un montant total de CHF 2'065.-. Le premier individu a été identifié comme étant C______ et le second, démuni de pièce d'identité, a indiqué s'appeler E______. Après examen, il est apparu que la véritable identité de la seconde personne interpelée était X______ et que celui-ci faisait l'objet d'une mesure d'interdiction d'entrée sur le territoire genevois, pour une durée de douze mois, valable depuis le 9 mars 2024, qui lui avait été notifiée à cette date. En outre, il était titulaire d'un permis de séjour français, mais celui-ci était échu depuis le 5 juillet 2023. Selon le résultat de l'éthylotest, à 15h56, X______ présentait un taux d'éthanol dans l'air expiré de 0,47 mg/l.
b. Le 22 juin 2024, A______, représentée par D______, directeur-adjoint, a déposé plainte pour ces faits.
c. Par décision prise par les Commissaires de police le mars 2024, suite à des vols à l'étalage au magasin F______, X______ s'était vu notifier une interdiction de pénétrer dans le canton de Genève pour une durée de 12 mois, contre laquelle il n'avait pas fait opposition.
c. Le 22 juin 2024 devant la police, C______ a expliqué qu'il connaissait X______ depuis deux à trois ans. Ils s'étaient rendus ensemble à A______ pour "faire un tour", avant de se perdre dans leurs pensées et de "faire n'importe quoi". Il avait eu l'idée de mettre des parfums dans son sac à dos, dans le but de les revendre, alors que X______ se trouvait à côté de lui.
d.a. Le 22 juin 2024 devant la police, X______ a reconnu avoir dérobé des parfums. Il les avait volés sur les présentoirs et placés dans un sac à dos. C______ était un ami et il ne dénoncerait jamais qui que ce soit. Lors de son interpellation, il s'était "pris la tête" avec le gendarme qui était venu le chercher, raison pour laquelle il n'avait pas voulu lui donner sa vraie identité. Il se souvenait de l'interdiction d'entrée qui lui avait été notifiée le 9 mars 2024, mais avait fait appel contre cette décision. Il n'avait aucun lien avec la Suisse et ne bénéficiait pas d'autorisation de séjour dans ce pays. Il était entré en Suisse le jour-même, en voiture. Il était désolé pour ce qu'il avait fait.
d.b. Le 23 juin 2024 devant le Ministère public, X______ a admis les faits, tout en expliquant que, la veille, il s'était trouvé "dans un état second", car il avait bu une bouteille de whisky depuis le matin. Il ne pouvait pas dire exactement ce qui s'était passé. Il a en revanche contesté être arrivé en Suisse sans moyen de subsistance, puisqu'il possédait une centaine d'euros en passant la frontière et que son ami détenait une carte de retrait. Son titre de séjour en France était en attente de renouvellement et une copie du récépissé de sa demande se trouvait dans son téléphone, resté dans le véhicule. Il savait qu'il n'avait pas le droit de venir en France, mais comme il avait participé à la fête de la musique, il ne s'en était pas rendu compte.
Sa compagne et lui avaient perdu une fille à la naissance en 2022 et il connaissait des problèmes d'alcool depuis lors. Il voyait régulièrement un spécialiste des addictions. Sa dernière fille était née en 2024 et sa compagne, experte comptable, se trouvait en congé maternité. Il devait reprendre un emploi de livreur le 25 juin 2024. Ses enfants étaient tout pour lui. Il s'est excusé envers la police et les personnes du magasin.
d.c. Le 23 juin 2024 devant le Tribunal des mesures de contrainte, X______ a affirmé qu'il était détenteur d'un titre de séjour français et d'une autorisation de franchir les frontières de l'espace Schengen.
Il a notamment produit :
- une copie de son titre de séjour français, valable jusqu'au 5 juillet 2023;
- une "attestation de prolongation d'instruction de sa demande de renouvellement du titre de séjour", établie par le Ministère de l'intérieur français, valable du 21 juin au 20 septembre 2024;
- une attestation selon laquelle il a été employé de juin 2023 à mars 2024 et un contrat de mission temporaire, prévue du 25 juin au 20 septembre 2024;
- une copie de son livret de famille;
- des documents attestant d'un suivi d'addictologie;
- un rapport d'échographie cardiaque et un rapport d'échographie obstétricale fœtale des 23 et 24 janvier 2024, réalisée sur G______.
e. Par courrier de son mandataire du 29 juillet 2024, X______ a produit notamment :
- une attestation d'C______, selon laquelle il avait été en possession de la carte bancaire de la compagne de X______ au moment des faits;
- une attestation de G______, sa compagne, attestant du rôle joué par X______ au sein de leur famille et des difficultés rencontrées par ce dernier, suite au décès de leur fille et à la découverte de la malformation cardiaque de leur cadette. X______ avait pris conscience de ses erreurs et avait la perspective de pouvoir être engagé par son ancien employeur et de reprendre son suivi en addictologie;
- une lettre d'intention d'embauche établie par la société H______, à ______[FR].
C. A l'audience de jugement, X______ a admis les faits, précisant que, s'il avait été sobre, il ne se serait jamais permis de venir en Suisse. Il était désolé, car il était venu pour profiter des fêtes et du lac et il s'était retrouvé à faire n'importe quoi en buvant.
Il avait utilisé l'argent qu'il détenait avant son interpellation, mais avait la carte bancaire de sa compagne.
La découverte d'une maladie cardiaque chez sa fille cadette avait été difficile à vivre après la perte de leur fille en 2021. Cela avait énormément influencé sa consommation d'alcool. Ses enfants étaient le centre de sa vie.
A sa sortie de prison, il comptait poursuivre son suivi en addictologie et le renforcer. La promesse d'embauche dont il bénéficiait était une aubaine. Il avait énormément de regrets et était désolé de ce qu'il avait fait. Le fait que sa femme et ses enfants aient besoin de lui était le gage d'une absence de récidive.
Il a indiqué comprendre qu'une expulsion de Suisse soit requise, mais s'est fermement opposé à son inscription au SIS, ses enfants étant français et vivant en France. Il n'avait plus aucune famille, ni plus aucun lien avec l'Algérie, n'ayant en particulier plus aucun lien avec ses parents depuis l'âge de 3 ans.
D. X______ est né le ______ 1987 à ______, en Algérie, pays dont il est ressortissant. Ses parents sont I______ et J______. Il a quitté l'Algérie à l'âge de 3 ans pour se rendre en France, à Lyon, et y a suivi l'école obligatoire. Il a obtenu le diplôme du collège de 3ème année. Il a ensuite obtenu des diplômes en qualité de carreleur et dans l'agro-alimentaire, respectivement à 19 et 22 ans. Sa carte de résident français est en cours de renouvellement depuis 2023.
Il est célibataire, mais vit en concubinage avec G______, de nationalité française, depuis 2018, avec laquelle il a trois enfants, soit K_____, né le ______ 2019, L______, née le ______ 2020, et M______, née le ______ 2024. Le 3 novembre 2021, N______ est née sans vie.
Il a travaillé en tant que carreleur durant 3 ans et a vécu de petits emplois en tant qu'employé intérimaire, travaillant notamment comme livreur pour un revenu mensuel de EUR 1'800.- à EUR 2'300.-.
Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, X______ a été condamné :
- le 9 mars 2024 par le Ministère public du canton de Genève, à une peine privative de liberté de 90 jours, un jour de détention étant imputable sur la peine, avec sursis pendant 3 ans, ainsi qu'à une amende de CHF 300.-, pour vol simple commis les 7 février 2024, 4 et 8 mars 2024, et entrée illégale par négligence commise le 8 mars 2024;
- le 9 mai 2024 par la Ministère public du canton de Genève, à une peine privative de liberté de 100 jours, un jour de détention étant imputable sur la peine, avec sursis pendant 3 ans, partiellement complémentaire au jugement du 9 mars 2024, pour vol commis le 8 mars 2024 et non-respect d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée commis le 8 mai 2024.
Culpabilité
1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence garantie par l'art. 6 § 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH; RS 0.101) et, sur le plan interne, par l'art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst ; RS 101) et l'art. 10 du code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP; RS 312.0), concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 138 V 74 consid. 7; ATF 127 I 38 consid. 2a; ATF 124 IV 86 consid. 2a).
2.1. Selon l'art. 139 ch. 1 CP, quiconque, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l’approprier est puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
L'auteur réalise cette appropriation par une soustraction c'est-à-dire par le bris de la possession (au sens allemand de Gewahrsam) et par la constitution d'une nouvelle possession d'autrui sur la chose (ATF 132 IV 110 consid. 2.1 ; ATF 115 IV 104 consid. 1c/aa).
2.2. En l'espèce, il est établi par les éléments du dossier et admis par le prévenu que celui-ci a volé des parfums dans l'enseigne A______ le 22 juin 2024.
Partant, il sera reconnu coupable de vol.
3.1. L'art. 115 al. 1 let. a LEI punit d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire quiconque contrevient aux dispositions sur l’entrée en Suisse (art. 5).
Conformément à l'art. 5 LEI, tout étranger doit, pour entrer en Suisse, remplir les conditions suivantes : avoir une pièce de légitimation reconnue pour le passage de la frontière et être muni d'un visa si ce dernier est requis (let. a), disposer des moyens financiers nécessaires à son séjour (let. b), ne représenter aucune menace pour la sécurité et l'ordre publics ni pour les relations internationales de la Suisse (let. c) et ne faire l'objet d'aucune mesure d'éloignement (let. d).
Ces prescriptions sont cumulatives (AARP/323/2017 consid. 3.3.2 et 3.3.3). Les étrangers ne séjournent légalement que lorsqu'ils sont entrés dans le pays conformément aux dispositions légales y relatives et qu'ils disposent des autorisations nécessaires. Ces conditions doivent être réunies durant l'entier du séjour (art. 9 al. 2 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 [OASA; RS 142.201] et ATF 131 IV 174).
3.2. En l'espèce, il est établi et admis par le prévenu que celui-ci est entré en Suisse le 22 juin 2024.
Le prévenu a expliqué avoir toujours été porteur des papiers nécessaires sur son téléphone et avoir l'autorisation d'entrer en Suisse sur la base de l'attestation de prolongation d'instruction de sa demande de renouvellement du titre de séjour établie par le Ministère de l'intérieur, valable du 21 juin au 20 septembre 2024, qui lui octroyait les mêmes droits que son titre de séjour français échu.
Le Tribunal constate que, même si le prévenu avait possédé des moyens de subsistance suffisants et avait été en possession de documents d'identité valable, il ne remplissait pas toutes les conditions de l'art. 5 LEI, notamment celle de ne représenter aucune menace pour la sécurité et l'ordre public de la Suisse. En effet, le prévenu est venu en Suisse dans le but de commettre des infractions, ce qu'il a fait le jour même et ce qu'il avait déjà fait à deux reprises auparavant, ce qui est établi par ses précédentes condamnations.
Ainsi le prévenu aurait dû être reconnu coupable d'entrée illégale en lien avec ces faits, mais l'acte d'accusation ne décrit pas la menace qu'il représente pour la sécurité et l'ordre public de la Suisse, si bien qu'il sera acquitté de ce chef d'infraction.
3.1.2. Selon l'art. 119 al. 1 LEI, quiconque enfreint une assignation à un lieu de résidence ou une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 74) est puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.
3.2. En l'espèce, il est établi par le dossier que le prévenu faisait l'objet d'une décision d'interdiction d'entrée dans le canton de Genève.
Le prévenu a admis avoir eu connaissance de cette décision, mais a affirmé qu'il avait recouru contre cette décision. Or, les éléments du dossier démontrent que tel n'a pas été le cas et que la décision en question était en force le 22 juin 2024.
Les explications du prévenu selon lesquelles il aurait été trop ivre pour se rendre compte qu'il venait en Suisse malgré cette interdiction ne sont pas recevables. Si un taux d'alcoolémie a été constaté lors de son interpellation, celle-ci n'était pas d'une ampleur suffisante pour entamer sa capacité de discernement.
Partant, le prévenu sera reconnu coupable de non-respect d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée.
Peine
4.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).
4.1.2. La durée minimale de la peine privative de liberté est de trois jours; elle peut être plus courte si la peine privative de liberté est prononcée par conversion d'une peine pécuniaire ou d'une amende non payées. La durée de la peine privative de liberté est de 20 ans au plus. Lorsque la loi le prévoit expressément, la peine privative de liberté est prononcée à vie (art. 40 CP).
4.1.3. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP).
Le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. Le sursis est la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain (ATF 134 IV 1 consid. 4.2.2 p. 5). En d'autres termes, la loi présume l'existence d'un pronostic favorable et cette présomption doit être renversée par le juge pour exclure le sursis (arrêt du Tribunal fédéral 6B_978/2017 consid.3.2).
Pour formuler un pronostic sur l'amendement de l'auteur, le juge doit se livrer à une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Il doit tenir compte de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement. Il ne peut accorder un poids particulier à certains critères et en négliger d'autres qui sont pertinents (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 185 s.; ATF 134 IV 1 consid. 4.2.1 p. 5). Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans l'émission du pronostic (arrêt du Tribunal fédéral 6B_978/2017 consid.3.2).
4.1.2. Si, en raison d’un ou de plusieurs actes, l’auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l’infraction la plus grave et l’augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine (art. 49 al. 1 CP).
4.1.3. S'agissant du sursis, l'art. 46 al. 1 CP prévoit que si, durant le délai d’épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu’il y a dès lors lieu de prévoir qu’il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel. Si la peine révoquée et la nouvelle peine sont du même genre, il fixe une peine d’ensemble en appliquant par analogie l’art. 49 CP.
4.1.4. La Directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (ci-après: Directive sur le retour) a été reprise par la Suisse. La LEI a été adaptée en conséquence et les juridictions suisses doivent faire leur possible pour mettre en œuvre la jurisprudence européenne relative à cette directive (ATF 143 IV 264 consid. 2.1 p. 266).
La Directive sur le retour n'est pas applicable aux ressortissants des pays tiers ayant commis, outre le séjour irrégulier, un ou plusieurs autres délits en dehors du droit pénal des étrangers (art. 2 ch. 2 de la Directive sur le retour; ATF 143 IV 264 consid. 2.6; arrêt 6B_66/2024 du 5 juin 2024 consid. 1.2.3.).
4.1.5. Le juge impute sur la peine la détention avant jugement subie par l'auteur dans le cadre de l'affaire qui vient d'être jugée ou d'une autre procédure. Un jour de détention correspond à un jour-amende (art. 51 CP).
4.2. En l'espèce, la faute du prévenu n'est pas négligeable. Il s'en est pris au patrimoine d'autrui et n'a pas respecté les décisions rendues à son encontre.
Il a agi pour des motifs futiles et par appât du gain facilement gagné.
Il a agi à une reprise pour chaque infraction commise, soit le 22 juin 2024.
Il y a concours d'infractions.
Sa situation personnelle n'explique et ne justifie en rien ses agissements. Il a certes perdu un enfant et semble avoir rencontré des difficultés en lien avec la consommation d'alcool, mais cela n'excuse pas ses actes.
Sa collaboration a été globalement bonne.
Sa prise de conscience semble amorcée puisqu'il dit avoir entamé un travail en lien avec son addiction. Il est également soutenu par sa compagne de longue date dans sa démarche et produit une attestation de promesse d'embauche. Il a immédiatement présenté des excuses.
Ses antécédents pénaux interpellent. Il a ainsi commis exactement le même genre d'infractions en mars 2024 et en mai 2024. Les deux peines ont été assorties du sursis.
Compte tenu de ces éléments, son pronostic est défavorable, le prévenu ayant démontré par ses agissements que le risque de récidive, toujours pour les mêmes infractions, était grand. Les conditions du sursis ne sont ainsi pas réalisées et la peine prononcée sera ferme.
Pour ces mêmes motifs, les deux sursis de mars et mai 2024 seront révoqués.
Seule une peine privative de liberté d'ensemble trouvera application.
En application des règles sur le concours, la peine privative de liberté sera fixée à 8 mois pour sanctionner l'infraction la plus grave, soit le vol. Elle sera augmentée dans une juste proportion pour tenir compte de l'infraction à la LEI et des peines privatives de liberté pour lesquelles le sursis a été révoqué, portant ainsi la peine privative de liberté d'ensemble à 15 mois.
Expulsion
5.1.1. Selon l'art. 66abis CP, le juge peut expulser un étranger du territoire suisse pour une durée de trois à quinze ans si, pour un crime ou un délit non visé à l’art. 66a, celui-ci a été condamné à une peine ou a fait l’objet d’une mesure au sens des art. 59 à 61 ou 64.
Comme toute décision étatique, le prononcé d'une expulsion non obligatoire doit respecter le principe de la proportionnalité ancré aux art. 5 al. 2 et 36 al. 2 et 3 Cst. Il convient ainsi d'examiner si l'intérêt public à l'expulsion l'emporte sur l'intérêt privé de la personne à demeurer en Suisse. Une telle pesée des intérêts répond également aux exigences découlant de l'art. 8 par. 2 CEDH concernant les ingérences dans la vie privée et familiale (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1314/2019 du 29 janvier 2019 consid. 5.1; 6B_607/2018 du 10 octobre 2018 consid. 1.4.1; 6B_371/2018 du 21 août 2018 consid. 3.2).
5.1.2. D'après l'art. 21 du règlement (CE) N.1987/2006 du 20 décembre 2006 (ci-après : règlement SIS II), avant d'introduire un signalement, l'État membre signalant vérifie si le cas est suffisamment approprié, pertinent et important pour justifier l'introduction du signalement dans le SIS II.
5.2. En l'espèce, Les infractions pour lesquelles le prévenu est condamné ne relèvent pas de l'expulsion obligatoire. En revanche, il convient d'examiner le cas de l'expulsion facultative.
Le prévenu n'a jamais vécu en Suisse et ne présente aucun lien avec notre pays, alors que, compte tenu de sa propension à commettre des infractions dans notre pays, l'intérêt public à son expulsion est évident.
Partant l'expulsion du territoire suisse sera prononcée à l'encontre du prévenu pour la durée minimale de trois ans.
Il sera en revanche renoncé à ordonner le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS), pour des motifs de proportionnalité, le prévenu vivant en France depuis de nombreuses années et tous ses liens étant établi avec ce pays, sa femme et ses enfants étant en particulier de nationalité française.
Frais et indemnité
6. Le défenseur d'office du prévenu sera indemnisé (art. 135 al. 1 et 2 CPP).
7. Vu le verdict de culpabilité, les frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'134.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.-, seront mis à la charge du prévenu (art. 426 al. 1 CPP).
LE TRIBUNAL DE POLICE
statuant contradictoirement :
Acquitte X______ d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI).
Déclare X______ coupable de vol (art. 139 ch. 1 CP) et de non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI).
Révoque les sursis prononcés le 9 mars 2024 par le Ministère public de Genève à la peine privative de liberté de 90 jours et le 9 mai 2024 à la peine privative de liberté de 100 jours (art. 46 al. 1 CP).
Condamne X______ à une peine privative de liberté d'ensemble de 15 mois, sous déduction de 55 jours de détention avant jugement (53 jours pour la peine de ce jour et 2 jours pour les peines révoquées) (art. 40 et 51 CP).
***
Ordonne l'expulsion de Suisse de X______ pour une durée de 3 ans (art. 66abis CP).
Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).
Renonce à ordonner le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) (art. 20 de l'ordonnance N-SIS; RS 362.0).
***
Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de X______ (art. 231 al. 1 CPP).
***
Condamne X______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'134.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).
Fixe à CHF 3'091.65 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de X______ (art. 135 CPP).
Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Secrétariat d'Etat aux migrations, Office cantonal de la population et des migrations (art. 81 al. 4 let. f CPP).
Le Greffier | La Présidente |
Vu l'annonce d'appel formée par X______, laquelle entraîne la motivation écrite du jugement (art. 82 al. 2 lit. b CPP),
LE TRIBUNAL DE POLICE
Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 600.-.
Condamne X______ à payer à l'Etat de Genève l'émolument complémentaire fixé à CHF 600.-.
Le Greffier | La Présidente |
Voies de recours
Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.
Le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit peut également contester son indemnisation en usant du moyen de droit permettant d'attaquer la décision finale, la présente décision étant motivée à cet égard (art. 135 al. 3 et 138 al. 1 CPP).
L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).
Etat de frais
Frais du Ministère public | CHF | 696.00 |
Convocations devant le Tribunal | CHF | 60.00 |
Frais postaux (convocation) | CHF | 14.00 |
Emolument de jugement | CHF | 300.00 |
Etat de frais | CHF | 50.00 |
Frais postaux (notification) | CHF | 14.00 |
Total | CHF | 1134.00 |
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Emolument de jugement complémentaire | CHF | 600.00 |
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Total des frais | CHF | 1'734.00 |
Indemnisation du défenseur d'office
Vu les art. 135 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;
Bénéficiaire : | X______ |
Avocat : | B______ |
Etat de frais reçu le : | 29 juillet 2024 |
Indemnité : | CHF | 2'300.00 |
Forfait 20 % : | CHF | 460.00 |
Déplacements : | CHF | 100.00 |
Sous-total : | CHF | 2'860.00 |
TVA : | CHF | 231.65 |
Débours : | CHF | 0 |
Total : | CHF | 3'091.65 |
Observations :
- 10h à CHF 200.00/h = CHF 2'000.–.
- 1h30 Audience de jugement à CHF 200.00/h = CHF 300.–.
- Total : CHF 2'300.– + forfait courriers/téléphones 20 % = CHF 2'760.–
- 1 déplacement A/R à CHF 100.– = CHF 100.–
- TVA 8.1 % CHF 231.65
* Temps d'audience augmenté à 90 minutes.
Restitution de valeurs patrimoniales et/ou d'objets
Lorsque le présent jugement sera devenu définitif et exécutoire, il appartiendra à l'ayant-droit de s'adresser aux Services financiers du pouvoir judiciaire (finances.palais@justice.ge.ch et +41 22 327 63 20) afin d'obtenir la restitution de valeurs patrimoniales ou le paiement de l'indemnité allouée, ainsi que, sur rendez-vous, au Greffe des pièces à conviction (gpc@justice.ge.ch et +41 22 327 60 75) pour la restitution d'objets.
Notification à X______, chez son conseil, Me B______, à A______ et au Ministère public
(par voie postale)