Décisions | Tribunal pénal
JTDP/687/2024 du 03.06.2024 sur OPMP/1024/2023 ( OPOP ) , JUGE
En droit
Par ces motifs
république et | canton de genève | |
pouvoir judiciaire | ||
JUGEMENT DU TRIBUNAL DE POLICE Chambre 8
|
MINISTÈRE PUBLIC
Monsieur A______, domicilié ______[GE], partie plaignante
contre
Monsieur X______, né le ______ 1971, domicilié ______[GE], prévenu, assisté de Me Jean REIMANN
CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :
Le Ministère public conclut au maintien de son ordonnance pénale et à ce que le Tribunal:
1. Déclare X______ coupable d'injure (art. 177 al. 1 CP) et de menaces (art. 180 al. 1 CP).
2. Le condamne à une peine pécuniaire de 50 jours-amende à CHF 30.-.
3. Renonce à révoquer le sursis accordé le 23 juillet 2019 par la Chambre pénale d'appel et de révision à Genève et en prolonge le délai d'épreuve d'un an.
4. Adresse un avertissement formel à X______.
5. Renvoie A______ à agir par la voie civile s'agissant de ses éventuelles prétentions civiles.
6. Condamne X______ aux frais de la procédure.
X______, par la voix de son Conseil, conclut principalement au classement de la procédure, subsidiairement à ce qu’il soit condamné à une peine n’excédant pas celle prévue dans l’ordonnance pénale mais à CHF 20.- le jour, avec sursis complet. Il conclut à une indemnité pour ses frais de défense de CHF 6'132.74.
*****
Vu l'opposition formée le 9 février 2023 par X______ à l'ordonnance pénale rendue par le Ministère public le 2 février 2023;
Vu la décision de maintien de l'ordonnance pénale du Ministère public du 31 mai 2023;
Vu l'art. 356 al. 2 et 357 al. 2 CPP selon lequel le tribunal de première instance statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition;
Attendu que l'ordonnance pénale et l'opposition sont conformes aux prescriptions des art. 352, 353 et 354 CPP;
LE TRIBUNAL DE POLICE
statuant sur opposition :
Déclare valables l'ordonnance pénale du 2 février 2023 et l'opposition formée contre celle-ci par X______ le 9 février 2023.
et statuant à nouveau :
A. Il est reproché à X______ d'avoir, à Genève, le 1er juillet 2022, vers 15h30, sur la terrasse de l'établissement le B______, sis rue ______[GE], porté atteinte à l'honneur de A______ en le traitant de "connard" et d'"enculé", ainsi que de l'avoir menacé à deux reprises, en faisant mine de lui donner un coup de poing au visage, de sorte à l'effrayer, faits qualifiés d'injure (art. 177 al. 1 CP) et de menaces (art. 180 al. 1 CP).
B. Les faits pertinents suivant ressortent de la procédure :
a.a. Par courrier du 5 juillet 2022, A______ a déposé plainte pénale, en expliquant qu'en date du 1er juillet 2022, alors qu'il se trouvait sur la terrasse du B______, sis à la rue ______[GE], avec des amis, un individu, dont la voiture était visiblement en panne, était arrivé près de la terrasse en hurlant : "Bordel, à qui est le scooter garé sur la case bleue". Pour plaisanter, il lui avait répondu que le véhicule lui appartenait, alors que tel n'était pas le cas. L'homme, furieux, s'était approché de lui en hurlant "espèce de connard, tu vas le déplacer ton scooter" et avait armé son poing, feignant de lui donner un coup à hauteur de son visage. Même si une barrière séparait la rue de la terrasse, il avait eu peur et avait reculé, tout en essayant de calmer l'individu, sans succès. Celui-ci était retourné près de son véhicule en continuant de crier, avant de revenir d'un air menaçant vers un autre membre du groupe. A______ lui avait demandé de se calmer et l'homme avait à nouveau armé son poing, en faisant mine de le frapper, ce qui l'avait effrayé. Pour se défendre, il lui avait tenu ses deux bras avec ses mains et l'avait accompagné vers le capot de son véhicule, en lui disant de se calmer et sans le violenter. Il était ensuite retourné s'asseoir avec ses amis. Le prévenu avait alors hurlé qu'il allait appeler la police, laquelle était ensuite arrivée sur les lieux.
a.b. Le 19 décembre 2022 devant la police, entendu comme prévenu, A______ a contesté les accusations portées contre lui par X______ et s'est référé au contenu de sa plainte. X______ l'avait traité de "connard" et avait armé son poing, en feignant de lui donner un coup. Il l'avait saisi au niveau des coudes et l'avait immobilisé contre le capot de sa voiture en réaction à ce comportement agressif. Il était possible que X______ se soit tapé la tête contre le capot, car il s'était débattu "comme un fou".
a.c. Le 25 mai 2023 devant le Ministère public, A______ a confirmé le contenu de sa plainte. Il ne se souvenait plus précisément des termes utilisés par X______, mais celui-ci avait été excité et en colère dès qu'il était arrivé vers la terrasse. Lorsque X______ était reparti vers son véhicule, celui-ci l'avait insulté en disant "fuck yourself", "enculé", avant de revenir soudainement vers la terrasse, en le traitant une seconde fois d'"enculé" et en lui demandant de "dégager [s]on scooter de merde". Il ne se souvenait pas précisément ce qu'il avait indiqué dans sa plainte et avait peut-être oublié de mentionner que X______ l'avait traité d'"enculé". L'insulte n'avait pas été aussi marquante pour lui que la réaction et le geste de X______. Celui-ci avait armé son poing en sa direction, ce qui l'avait fait reculer. Entre un temps, un ami s'était dirigé vers le capot de la voiture de X______ pour essayer de le calmer. Ces deux individus avaient commencé à se bousculer et il était intervenu en faisant le tour de la terrasse pour se positionner devant le capot du véhicule. X______ avait armé son poing une seconde fois, si bien qu'il lui avait saisi les bras et l'avait accompagné sur le capot pour le maintenir et le calmer, jusqu'au moment où des employés de l'établissement étaient intervenus
b. Selon le rapport de police du 7 janvier 2023, l'intervention d'une patrouille avait été sollicitée le 1er juillet 2002, vers 16h15, à la rue ______[GE], pour une agression. X______ avait expliqué que son véhicule était tombé en panne et que des passant l'avaient aidé à le pousser sur des places de stationnement, mais qu'un scooter gênait. Il s'était rendu sur la terrasse de l'établissement "B______", pour demander si le propriétaire du scooter était présent. A______ lui avait répondu qu'il s'agissait de son scooter et qu'il allait le déplacer, ensuite de quoi celui-ci l'avait bousculé contre son véhicule. C______, témoin de la scène, avait expliqué que X______ était arrivé hystérique vers la terrasse, en demandant de déplacer "ce putain de scooter de merde". A______ lui avait répondu qu'il fallait demander plus poliment afin qu'il déplace le scooter de son ami. X______ avait alors armé un coup de poing en direction de son interlocuteur. A______ avait bousculé X______ de peur qu'il s'en prenne à lui. Cette version coïncidait avec celle de A______.
L'exploitant de l'établissement avait établi une interdiction d'entrée d'une durée de deux ans à l'encontre de X______, pour le scandale occasionné.
Aucune blessure ou marque n'a été constatée sur les deux individus. Les éthylotests pratiqués ont permis d'établir un résultat négatif pour X______ et un taux de 0,76 mg/l pour A______, à 17h04.
c. Le 21 août 2022 devant la police, C______, a expliqué que, le jour en question, il se trouvait dans l'angle de la terrasse du B______, à proximité de la rue. Le conducteur d'un véhicule en panne, très agité, avait voulu pousser sa voiture sur une place bleue, où se trouvait un scooter. Il avait alors surgi sur la terrasse du bar en hurlant "qui est le connard qui a stationné son scooter de merde à cet endroit". Un client du bar avait rétorqué ironiquement qu'il s'agissait de son scooter. Le conducteur du véhicule l'avait injurié à plusieurs reprises, en le traitant de "connard" et d'"enculé", en lui disant d'"enlever sa merde de scooter". Un conflit verbal avait éclaté entre les deux individus. A un moment donné, l'automobiliste s'était approché du client du bar en armant son poing en direction de sa tête et en lui disant "je vais te péter la gueule", afin de l'effrayer. Le client du bar l'avait alors "empoigné (…) afin de ne pas recevoir de coup" et l'avait maîtrisé contre le capot de son véhicule en panne. Aucun coup n'avait été échangé. Les clients de la terrasse avaient essayé de les calmer. Des agents de sécurité, puis la police, étaient ensuite arrivés sur place.
d.a. Le 30 septembre 2022 devant la police, entendu comme personne appelée à fournir des renseignements, X______ a expliqué que, le 1er juillet 2022, vers 15h00, son véhicule était tombé en panne au milieu de la rue ______[GE], ce qui avait créé une situation de panique et l'avait stressé. Quinze minutes plus tard, un petit véhicule avait quitté son stationnement et il avait voulu utiliser cette place, mais un scooter l'occupait partiellement. Il s'était adressé aux clients présents sur la terrasse du pub attenant, en leur demandant calmement si le propriétaire du scooter était présent. Un individu lui avait alors répondu "mais tu te prends pour qui". Il s'apprêtait à retourner vers son véhicule, lorsque la même personne l'avait traité d'"enculé". Il s'était arrêté et, s'étant senti nargué, lui avait répondu à deux reprises "fuck yourself". Il était resté calme et était retourné vers son véhicule. Des automobilistes l'avaient alors aidé à déplacer sa voiture sur le côté. Alors qu'il s'était accroupi pour estimer la distance entre la roue de son véhicule et le trottoir, un individu lui avait donné un violent coup de poing derrière la tête. Malgré la violence du choc, il était resté debout. Il avait ensuite été plaqué contre le capot par le même individu, qui s'était couché sur lui. Sa tête avait heurté la carrosserie. L'homme avait alors commencé à se frotter contre ses fesses, avec son sexe en érection, en faisant des mouvements de va-et-vient durant une trentaine de secondes. Plusieurs personnes avaient réussi à le libérer de son agresseur. En état de choc, il avait ensuite appelé la police. A l'issue de son audition, il a déposé plainte contre A______.
d.b. Le 13 octobre 2022 devant la police, X______ a contesté les faits reprochés, se référant à ses explications du 30 septembre 2022.
d.c. Le 25 mai 2023 devant le Ministère public, X______ a confirmé ses déclarations à la police. Il a contesté les faits reprochés, admettant uniquement avoir dit "fuck yourself" à deux reprises, après avoir été traité d'"enculé". C______ avait été auteur d'un faux témoignage. Le gérant du B______ ne l'aimait pas, à cause du fait qu'il garait régulièrement son véhicule, équipé d'un moteur diesel, à proximité de la terrasse, ce qui dérangeait les clients. Celui-ci n'avait pas été présent lors de l'altercation et avait décidé arbitrairement qu'il avait fait un scandale.
e. Selon le constat médical établi le 4 juillet 2022 par le service des urgences de l'Hôpital de la tour, X______ s'est plaint de céphalées occipitales, de nausées et de vomissements, de douleurs cervicales également lors de la mobilisation de la tête, sans limitation de la mobilité. L'examen physique était dans la norme. Des traumatismes, crânien et cervical, simples ont été diagnostiqués.
C. A l'audience de jugement, le Tribunal a entendu le prévenu, qui a confirmé ses précédentes déclarations et contesté les infractions reprochées, admettant uniquement avoir répondu "fuck yourself". Il ne connaissait pas le plaignant avant les faits et supposait que celui-ci avait pu influencer les déclarations du témoin C______, qui était un client habituel du B______.
Au moment des faits, il était en pleine séparation, était déprimé et avait très mal vécu cet "incident" et son état s'était empiré depuis lors. Il évitait toutes les situations qui pouvaient lui rappeler cet événement, qui lui avait gâché la vie depuis deux ans. Il ne comprenait pas pourquoi la justice ne tenait pas compte de l'agression qu'il avait subie, alors qu'un certificat médical attestait qu'il avait "été tapé sur le capot" et avait reçu un coup sur la nuque.
Un diagnostic de bipolarité de type 2 venait d'être posé et il suivait un traitement de stabilisation de son humeur. Il espérait être en mesure de travailler à 50%. Avant les faits, il travaillait dans le domaine de l’informatique bancaire.
D. X______, né le ______ 1971, à Genève, est de nationalité suisse. Il est divorcé et n'a pas d’enfants. Il bénéficie de l'aide de l’Hospice General, percevant une indemnité de CHF 1'665.95. Son loyer représente CHF 670.05 et sa prime d'assurance-maladie, subside déduit, atteint CHF 288.85. Il a déposé une demande de prestation AI en 2020 et demeure dans l'attente d'une décision, une contre-expertise étant en cours. Son épargne atteint un peu plus de CHF 4'900.- et il n'annonce pas de dettes.
Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, X______ a été condamné le 23 juillet 2019 par la Chambre pénale d'appel et de révision de Genève, à une peine pécuniaire de 75 jours-amende à CHF 80.-, avec sursis pendant 3 ans, ainsi qu'à une amende de CHF 300.-, pour utilisation frauduleuse d'un ordinateur et vol d'importance mineure.
1.1.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 § 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH; RS 0.101) et, sur le plan interne, par l'art. 32 Cst. ainsi que par l'art. 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.
En tant que règle sur le fardeau de la preuve, ce principe signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé, et non à ce dernier de démontrer son innocence. Il est violé lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que l'accusé n'a pas prouvé son innocence mais aussi lorsqu'il résulte du jugement que, pour être parti de la fausse prémisse qu'il incombait à l'accusé de prouver son innocence, le juge l'a condamné parce qu'il n'avait pas apporté cette preuve (ATF 127 I 38 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 2c et d).
Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo signifie que le juge ne peut se déclarer convaincu d'un état de fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence de cet état de fait (ATF 127 I 38 consid. 2a; ATF 124 IV 86 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 2c).
1.1.2. Selon l'art. 177 al. 1 CP, quiconque, de toute autre manière, attaque autrui dans son honneur par la parole, l’écriture, l’image, le geste ou par des voies de fait, est, sur plainte, puni d’une peine pécuniaire de 90 jours-amende au plus (al. 1). Le juge peut renoncer à prononcer une peine si l'injurié provoque directement l'injure par une conduite répréhensible (al. 2). Si l'injurié riposte immédiatement par une injure ou par des voies de fait, le juge peut renoncer à prononcer une peine contre les deux auteurs ou l'un d'eux (al. 3).
L'injure peut consister dans la formulation d'un jugement de valeur offensant, mettant en doute l'honnêteté, la loyauté ou la moralité d'une personne de manière à la rendre méprisable en tant qu'être humain ou entité juridique, ou celui d'une injure formelle, lorsque l'auteur a, en une forme répréhensible, témoigné de son mépris à l'égard de la personne visée et l'a attaquée dans le sentiment qu'elle a de sa propre dignité. La marque de mépris doit revêtir une certaine gravité, excédant ce qui est acceptable (arrêt du Tribunal fédéral 6B_229/2016 du 8 juin 2016 consid. 2.1.2). Sont notamment considérées comme des injures formelles les termes : "petit con" (arrêt du Tribunal fédéral 6B_602/2009 du 29 septembre 2009), "fils de pute" (arrêt du Tribunal fédéral 6B_763/2014 du 6 janvier 2015), "pute", "salope", "connard" ou encore "pédé" (AARP/79/2017 du 8 mars 2017 consid. 2.3).
Du point de vue subjectif, il suffit que l'auteur ait eu conscience du caractère attentatoire à l'honneur de ses propos et qu'il les ait proférés néanmoins; il n'est pas nécessaire qu'il ait eu la volonté de blesser la personne visée (ATF 119 IV 44 consid. 2a).
1.1.3. A teneur de l'art. 180 al. 1 CP, quiconque, par une menace grave, alarme ou effraie une personne est, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
La menace suppose que l'auteur ait volontairement fait redouter à sa victime la survenance d'un préjudice, au sens large (ATF 122 IV 97 consid. 2b p. 100). Elle constitue un moyen de pression psychologique consistant à annoncer un dommage futur dont la réalisation est présentée comme dépendante de la volonté de l'auteur, sans toutefois qu'il soit nécessaire que cette dépendance soit affective (ATF 117 IV 445 consid. 2b p. 448; 106 IV 125 consid. 2a p. 128), ni que l'auteur ait réellement la volonté de réaliser sa menace (ATF 105 IV 120 consid. 2a p. 122). Toute menace ne tombe pas sous le coup de l'art. 180 CP. La loi exige en effet que la menace soit grave. C'est le cas si elle est objectivement de nature à alarmer ou à effrayer la victime. Il convient à cet égard de tenir compte de la réaction qu'aurait une personne raisonnable face à une situation identique (ATF 122 IV 97 consid. 2b p. 100). Les menaces de lésions corporelles graves ou de mort doivent être considérées comme des menaces graves au sens de l'art. 180 CP (arrêt 6B_1428/2016 du 3 octobre 2017 consid. 2.1 et la référence citée). Il faut en outre que la victime ait été effectivement alarmée ou effrayée. Celle-ci doit craindre que le préjudice annoncé se réalise. Cela implique, d'une part, qu'elle le considère comme possible et, d'autre part, que ce préjudice soit d'une telle gravité qu'il suscite de la peur (ATF 135 IV 152 consid. 2.3.2
Subjectivement, l'auteur doit avoir l'intention non seulement de proférer des menaces graves, mais aussi d'alarmer ou d'effrayer le destinataire. Le dol éventuel suffit (arrêt du Tribunal fédéral 6B_508/2021 du 14 janvier 2022 consid. 2.1).
1.2. En l'espèce, il est reproché au prévenu d'avoir traité le plaignant de "connard" et d'"enculé" et de l'avoir menacé, en faisant mine de le frapper au visage.
Le prévenu a contesté de manière constante avoir utilisé ces termes. Il s'était rendu calmement vers la terrasse et avait été traité d'"enculé" par le plaignant, ce qu'il l'avait conduit à répondre "fuck yourself". Il avait lui-même été frappé et n'avait pas menacé le plaignant.
Selon le courrier de plainte du 5 juillet 2022 et les déclarations du plaignant du 19 décembre 2022, le prévenu l'avait traité de "connard". Ce n'est que le 25 mai 2023 que le plaignant a également indiqué avoir été traité d'"enculé". Il a toutefois affirmé de manière constante que le prévenu s'est comporté de manière agressive dès son arrivée sur vers la terrasse, qu'il l'a injurié et qu'il a armé deux coups de poing, sans les porter.
Les déclarations des deux protagonistes étant contradictoires, il s'agit d'examiner les autres éléments du dossier pour établir leurs crédibilités respectives.
Le témoin C______ a confirmé, dès le 22 août 2022, que le prévenu était intervenu de manière agressive, qu'il avait traité le plaignant de "connard" et d'"enculé" et qu'il avait fait le geste de le frapper, en le menaçant de lui "casser la gueule". Le plaignant avait réagi en l'"empoign[ant]", afin de ne pas recevoir des coups. Il ne ressort pas du dossier que le témoin aurait un lien particulier avec l'une ou l'autre des parties, ni qu'il aurait eu un quelconque intérêt à faire des fausses déclarations.
Selon le rapport de police, le prévenu s'est comporté de manière agressive, sans que celui-ci n'ait été injurié au préalable. Celui-ci avait armé un coup de poing et, par peur d'être frappé, le plaignant l'avait bousculé. Il est également mentionné que le gérant de l'établissement B______ lui a signifié une interdiction d'entrer dans l'établissement en raison du "scandale" occasionné, ce qui atteste du fait que c'est bien le prévenu qui a été à l'origine des faits.
Le rapport médical produit par le prévenu n'amène aucun élément utile à la détermination des faits, dans la mesure où son contenu est compatible avec les deux versions, le plaignant admettant avoir immobilisé le prévenu contre le capot de sa voiture et que la tête de celui-ci pouvait avoir tapé contre la carrosserie.
Compte tenu de tous ces éléments, les déclarations du plaignant apparaissent plus crédibles que celles-du prévenu. Tous les éléments du dossier convergent en effet dans le sens que le prévenu a adopté un comportement agressif envers le plaignant au sujet du scooter et non l'inverse, ce qui contredit les déclarations du prévenu, qui n'apparaissent dès lors pas crédibles. Le Tribunal a ainsi acquis la conviction, au-delà de tout doute raisonnable, que le prévenu a bien été l'auteur des faits qui lui sont reprochés.
Il apparait ainsi que le prévenu a utilisé des termes injurieux, à tout le moins celui de "connard". S'agissant du terme "enculé", le plaignant n'en a pas fait état immédiatement, mais il ressort des déclarations du témoin, qui ont pris place un mois et demi après les faits, soit avec une certaine proximité. Le plaignant a par la suite confirmé avoir été injurié par ce terme et il apparait ainsi établi qu'il a été prononcé.
Les termes "connard" et "enculé" étant des injures formelles, le prévenu sera reconnu coupable d'injure au sens de l'art. 177 CP.
En armant à deux reprises son poing et en faisant mine de frapper le plaignant, le prévenu a menacé de s'en prendre à son intégrité corporelle. Le plaignant a eu peur de cette conséquence, puisqu'après le premier geste, il a reculé et qu'après le second, il a immobilisé l'intéressé pour éviter d'être frappé.
Le prévenu sera ainsi reconnu coupable de menaces au sens de l'art. 180 CP.
3.1.1. Selon l’art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l’acte et son mode d’exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l’intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l’auteur. A ces composantes de culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l’auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l’acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1, JdT 2016 IV 169; ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1).
3.1.2. A teneur de l'art. 34 al. 1 CP, sauf disposition contraire, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur.
En règle générale, le jour-amende est de CHF 30.- au moins et de CHF 3000.- au plus. Il peut exceptionnellement, si la situation personnelle et économique de l'auteur l'exige, être réduit jusqu'à CHF 10.-. Le juge en fixe le montant selon la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d'assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (art. 34 al. 2 CP).
3.1.3. L'art. 49 CP prescrit que si, en raison d’un ou de plusieurs actes, l’auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l’infraction la plus grave et l’augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine (al. 1). Si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l’auteur a commise avant d’avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l’auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l’objet d’un seul jugement (al. 2).
3.1.4. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP). Si, durant les cinq ans qui précèdent l'infraction, l'auteur a été condamné à une peine privative de liberté ferme ou avec sursis de plus de six mois, il ne peut y avoir de sursis à l'exécution de la peine qu'en cas de circonstances particulièrement favorables (art. 42 al. 2 CP).
Le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit prononcer le sursis. Celui-ci est ainsi la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain (ATF 135 IV 180 consid. 2.1; 134 IV 1 consid. 4.2.2).
3.1.5. Si le juge suspend totalement ou partiellement l'exécution d'une peine, il impartit au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans (art. 44 al. 1 CP).
3.1.6. A teneur de l'art. 46 CP, si, durant le délai d’épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu’il y a dès lors lieu de prévoir qu’il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel. Si la peine révoquée et la nouvelle peine sont du même genre, il fixe une peine d’ensemble en appliquant par analogie l’art. 49 (al. 1). S’il n’y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation. Il peut adresser au condamné un avertissement et prolonger le délai d’épreuve de la moitié au plus de la durée fixée dans le jugement. Il peut ordonner une assistance de probation et imposer des règles de conduite pour le délai d’épreuve ainsi prolongé. Si la prolongation intervient après l’expiration du délai d’épreuve, elle court dès le jour où elle est ordonnée (al. 2). Le juge appelé à connaître du nouveau crime ou du nouveau délit est également compétent pour statuer sur la révocation (al. 3).
3.2. En l'espèce, la faute du prévenu n'est pas négligeable. Il s'en est pris à la liberté et à l'honneur du plaignant.
Il s'agit d'un épisode isolé.
Le prévenu a agi pour des motifs égoïstes et sous le coup d'une colère mal maitrisée.
Sa situation personnelle est sans particularité et ne justifie en rien ses agissements.
La collaboration du prévenu à la procédure a été mauvaise, tout comme sa prise de conscience.
Il a un antécédent, qui n'est toutefois pas spécifique.
Une peine pécuniaire de 50 jours-amende, à CHF 30.- le jour, sera prononcée à l'encontre du prévenu en lien avec les infractions de menaces et d'injure.
Un pronostic particulièrement défavorable ne pouvant pas être posé, la peine prononcée sera assortie du sursis.
Le risque que le prévenu commette de nouvelles infractions n'apparaissant pas particulièrement marqué, le sursis prononcé le 23 juillet 2019 par la Chambre pénale d'appel et de révision à Genève ne sera pas révoqué. Un avertissement formel sera toutefois adressé à X______ et le délai d'épreuve sera prolongé d'un an.
4. Compte tenu de la condamnation prononcée, le prévenu sera condamné aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'085.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP) et sa requête en indemnité sera rejetée (art. 429 al. 1 CPP).
LE TRIBUNAL DE POLICE
statuant contradictoirement :
Déclare X______ coupable d'injure (art. 177 al. 1 CP) et de menaces (art. 180 al. 1 CP).
Condamne X______ à une peine pécuniaire de 50 jours-amende (art. 34 CP).
Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-
Met X______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).
Avertit X______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).
Renonce à révoquer le sursis octroyé le 23 juillet 2019 par la Chambre pénale d'appel et de révision à Genève, mais adresse un avertissement formel à X______ (art. 46 al. 2 CP).
Renvoie la partie plaignante A______ à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 CPP).
Rejette les conclusions en indemnisation de X______ (art. 429 CPP).
Condamne X______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'085.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).
Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).
Informe les parties que, dans l'hypothèse où elles forment un recours à l'encontre du présent jugement ou en demandent la motivation écrite dans les dix jours qui suivent la notification du dispositif (art. 82 al. 2 CPP), l'émolument de jugement fixé sera en principe triplé, conformément à l'art. 9 al. 2 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale (RTFMP; E 4.10.03).
La Greffière | La Présidente |
Vu l'annonce d'appel formée par X______, entraînant la motivation écrite du jugement (art. 82 al. 2 let. b CPP) ;
Considérant que selon l'art. 9 al. 2 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale prévoyant, dans un tel cas, que l'émolument de jugement fixé est en principe triplé ;
Attendu qu'il se justifie de mettre à la charge du prévenu un émolument complémentaire ;
LE TRIBUNAL DE POLICE
Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 600.-.
Met cet émolument complémentaire, à la charge de X______.
La Greffière | La Présidente |
Voies de recours
Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.
L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).
Etat de frais
Frais du Ministère public | CHF | 640.00 |
Convocations devant le Tribunal | CHF | 60.00 |
Frais postaux (convocation) | CHF | 21.00 |
Emolument de jugement | CHF | 300.00 |
Etat de frais | CHF | 50.00 |
Frais postaux (notification) | CHF | 14.00 |
Total | CHF | 1'085.- |
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Emolument complémentaire | CHF | 600.00 |
Total | CHF | 1'685.00 |
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Notification à X______, A______ et Ministère public
par voie postale