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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/1177/2024

DCSO/180/2024 du 02.05.2024 ( PLAINT ) , REJETE

Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1177/2024-CS DCSO/180/24

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 2 MAI 2024

 

Plainte 17 LP (A/1177/2024-CS) formée en date du 9 avril 2024 par A______ SA.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 2 mai 2024
à :

-       A______ SA

______

______.

- B______ et C______

c/o Me D______

[Étude] E______

______

______.

- Office cantonal des poursuites.


Attendu, EN FAIT, que C______ et B______ ont fait notifier le 7 mars 2024 à A______ SA un commandement de payer, poursuite n° 1______, pour un montant de 61'796 fr. plus intérêt à 5 % l'an dès le 27 février 2024, à titre de dommages-intérêts suite à des violations de devoirs contractuels.

Que A______ SA a fait opposition au commandement de payer.

Que A______ SA a déposé une demande de non-divulgation de la poursuite auprès de l'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office).

Que par décision du 27 mars 2024, reçue par l'intéressée le 2 avril 2024, l'Office a refusé d'entrer en matière, la demande étant prématurée.

Que par acte expédié le 9 avril 2024 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance), A______ SA a formé une plainte contre cette décision au motif que la créance en poursuite était injustifiée et que la poursuite lui portait un préjudice commercial.

Qu'elle expose, en substance, qu'elle était en charge du nettoyage des locaux de l'Etude d'avocats [E______] de MMes C______ et B______. Que la commission paritaire du nettoyage a effectué un contrôle de l'activité de A______ SA dans les locaux de l'Etude de MMes C______ et B______. Que ces derniers ont déposé une plainte pénale pour violation de domicile contre le contrôleur intervenu au sein de leur Etude. Qu'ils ont par ailleurs tenu A______ SA pour responsable de l'intervention de la commission paritaire et des frais encourus dans la procédure pénale consécutive. Que A______ SA conteste toute responsabilité. Qu'elle estime que MMes C______ et B______ ont entrepris la procédure pénale à leur propre initiative, alors que cette démarche lui semblait inutile.

Considérant, EN DROIT, que, déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie potentiellement lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.

Que la plainte étant manifestement mal fondée, elle sera écartée par une décision sommairement motivée, sans instruction préalable, conformément à l'art. 72 LPA applicable par renvoi de l'article 9 al. 4 LaLP.

Qu'en application de l'art. 8a al. 1 LP, toute personne peut consulter les procès-verbaux et les registres des offices des poursuites et des offices des faillites et s’en faire délivrer des extraits à condition qu’elle rende son intérêt vraisemblable. Toutefois, aux termes de l'art. 8a al. 3 let. d LP, les Offices ne doivent pas porter à la connaissance de tiers :
(…) d. les poursuites pour lesquelles une demande du débiteur dans ce sens est faite à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la notification du commandement de payer, à moins que le créancier ne prouve, dans le délai de 20 jours imparti par l'Office, qu'une procédure en annulation de l'opposition (art. 79 à 84 LP) a été engagée à temps; lorsque la preuve est apportées par la suite, ou lorsque la poursuite est continuée, celle-ci est à nouveau portée à la connaissance de tiers.

Qu'en l'espèce, le délai de trois mois prévu par l'art. 8a al 3 let. d LP n'est pas encore échu et c'est par conséquent à raison que l'Office a rejeté la demande de non-divulgation.

Que la plaignante invoquant également que la poursuite était injustifiée lui causait un préjudice, la question d'une poursuite abusive se pose, ce qui entraînerait la nullité de la poursuite, laquelle peut être constatée en tout temps et indépendamment de toute plainte (art. 22 al. 1 LP; ATF 140 III 481 consid. 2.3.1).

Que la nullité d'une poursuite pour abus de droit ne peut être admise par les autorités de surveillance que dans des cas exceptionnels, notamment lorsqu'il est manifeste que le poursuivant agit dans un but n'ayant pas le moindre rapport avec la procédure de poursuite ou pour tourmenter délibérément le poursuivi; qu'une telle éventualité est, par exemple, réalisée lorsque le poursuivant fait notifier plusieurs commandements de payer fondés sur la même cause et pour des sommes importantes, sans jamais requérir la mainlevée de l'opposition, ni la reconnaissance judiciaire de sa prétention, lorsqu'il procède par voie de poursuite contre une personne dans l'unique but de détruire sa bonne réputation, lorsque par esprit de chicane il requiert une poursuite pour un montant manifestement trop élevé, lorsqu'il reconnaît, devant l'Office des poursuites ou le poursuivi lui-même, qu'il n'agit pas envers le véritable débiteur, ou encore lorsqu'il requiert la poursuite en contradiction avec des attentes suscitées chez l'autre partie, par exemple en introduisant un nouvelle poursuite alors que des pourparlers sont sur le point d'aboutir en vue du retrait d'une poursuite précédente portant sur la même créance (venire contra factum proprium). Que l'existence d'un abus ne peut donc être reconnue que sur la base d'éléments ou d'un ensemble d'indices démontrant de façon patente que l'institution du droit de l'exécution forcée est détournée de sa finalité (ATF 140 III 481 consid. 2.3.1, JdT 2015 II 298; 130 II 270 consid. 3.2.2; 115 III 18 consid. 3b, JdT 1991 II 76; arrêts du Tribunal fédéral 5A_1020/2018 du 11 février 2019, 5A_317/2015 du 13 octobre 2015 consid. 2.1, 5A_218/2015 du 30 novembre 2015 consid. 3; décision de la Chambre de surveillance DCSO/321/10 du 8 juillet 2010 consid. 3.b).

Que la procédure de plainte des art. 17 ss LP ne permet en revanche pas d'obtenir l'annulation de la poursuite en se prévalant de l'art. 2 al. 2 CC, dans la mesure où le grief pris de l'abus de droit est invoqué à l'encontre de la créance litigieuse. Que l'autorité de surveillance – tout comme l'office – n'est en effet pas compétente pour statuer sur le bienfondé matériel des prétentions du créancier déduites en poursuite qui relèvent de la compétence du juge ordinaire. Que l'Office ne peut ainsi pas exiger des explications sur la nature de la prétention ni refuser d'émettre un commandement de payer, même si la cause de la créance semble peu plausible voire imaginaire. Qu'il est donc pratiquement exclu que le créancier obtienne de manière abusive l'émission d'un commandement de payer (ATF 136 III 365 consid. 2.1, avec la jurisprudence citée; 115 III 18 consid. 3b, JdT 1991 II 76; 113 III 2 consid. 2b, JdT 1989 II 120; arrêts du Tribunal fédéral 5A_250-252/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1, 5A_76/2013 du 15 mars 2013 consid. 3.1, 5A_890/2012 du 5 mars 2013 consid. 5.3, 5A_595/2012 du 24 octobre 2012 consid. 5).

Qu'en l'occurrence, la poursuite est fondée sur une créance que la plaignante conteste, mais qui n'est pas totalement absurde et n'est pas articulée uniquement dans le but de nuire à la débitrice.

Qu'aucune autre circonstance n'est alléguée permettant de soutenir que la poursuite aurait pour seul but de tourmenter la plaignante.

Que les conditions d'une poursuite abusive ne sont donc pas réunies en l'état à teneur des griefs exposés dans la plainte et la poursuite est par conséquent valable sous cet angle.

Que la plainte est en conclusion infondée dans la mesure où elle vise à faire annuler la décision du 27 mars 2024 de l'Office et également dans la mesure où elle peut être interprétée comme une demande de constatation de la nullité d'une poursuite abusive.

Qu'elle sera rejetée.

Que la procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte du 9 avril 2024 de A______ SA contre la décision de rejet d'une demande de non-divulgation du 27 mars 2024 de l'Office dans le cadre de la poursuite n° 1______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Natalie OPPATJA et Monsieur
Denis KELLER, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.