Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/10/2025 du 07.01.2025 ( LCR ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 7 janvier 2025
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dans la cause
Monsieur A______
contre
OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES
1. Monsieur A______, né le ______ 1986, est titulaire d’un permis de conduire depuis le ______ 2006.
2. Par décision du 13 mai 2024, envoyée par « courrier A Plus » à M. A______, l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) a retiré le permis de conduire de l’intéressé, pour une durée d’un mois, pour dépassement de la vitesse maximale autorisée de 31 km/h marge de sécurité déduite, le 30 septembre 2023 à 15h33 sur l'autoroute A1, à Domdidier.
Selon le courrier d'accompagnement de l'OCV du même jour, M. A______ était invité à déposer obligatoirement son permis de conduire et ses éventuels permis d'élève conducteur au plus tard le 8 juillet 2024, date à laquelle le retrait était effectif. La mesure de retrait prendrait ainsi effet jusqu'au 7 août 2024, date incluse.
Cette décision n'a pas été contestée de sorte qu'elle est en force.
3. Par « courrier A Plus » du 23 juillet 2024, l'OCV a adressé une sommation à l'intéressé. Faute de dépôt du permis de conduire dans les cinq jours, les faits seraient dénoncés au Ministère public.
4. Par décision du 28 août 2024, envoyée par « courrier A Plus » à M. A______, l'OCV lui a retiré le permis de conduire en application de l'art. 16c de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01) pour une durée de six mois. Cette décision était exécutoire nonobstant recours. Il lui était reproché d'avoir conduit un véhicule automobile malgré une mesure de retrait du permis de conduire, le 14 juillet 2024 à 1h30 à la rue de Lyon, à Genève.
Son permis avait été saisi par la police le 24 juillet 2024.
Il ne pouvait pas justifier d'une bonne réputation, le système d'information relatif à l'admission à la circulation (SIAC) faisant apparaître un retrait du permis de conduire prononcé par décision du 13 mai 2024 pour une durée d'un mois, en raison d'une infraction moyennement grave, mesure dont l'exécution aurait dû prendre fin le 7 août 2024.
Il était pris note de ses observations du 11 août 2024 et retenu qu’il ne pouvait justifier d'un besoin professionnel de conduire des véhicules automobiles au sens défini par la jurisprudence.
Compte tenu de l'ensemble des circonstances, l'autorité prononçait une mesure qui ne s'écartait pas du minimum légal.
Selon le courrier d'accompagnement de cette décision, la durée du retrait était fixée du 17 juillet 2024 au 13 janvier 2025.
5. Par acte du 17 septembre 2024, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) à l'encontre de cette décision. Il ne s'opposait pas au principe du retrait de permis mais sollicitait une réduction de sa durée à trois mois. Invoquant son statut d'indépendant et de gérant d'un garage, un retrait de son permis durant six mois aurait des conséquences désastreuses sur sa situation professionnelle et financière. Son activité impliquait en effet des déplacements pour tester les véhicules et répondre aux urgences de ses clients. Un tel retrait affecterait également sa vie de famille dès lors qu'il était le seul à conduire.
6. Dans ses observations du 18 novembre 2024, l'OCV a conclu au rejet du recours. Malgré les besoins professionnels invoqués par le recourant, il ne pouvait s'écarter de la durée minimale prévue par la loi.
7. Le recourant n'a pas répliqué dans le délai imparti par le tribunal.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal des véhicules (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
3. Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a) ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi, non réalisée en l'espèce (art. 61 al. 2 LPA).
Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de proportionnalité (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).
4. Lorsque la procédure prévue par la loi fédérale sur les amendes d'ordre du 24 juin 1970 (LAO - RS 741.03) n'est pas applicable, une infraction aux prescriptions sur la circulation routière entraîne le retrait du permis de conduire ou un avertissement (art. 16 al. 2 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 - LCR - RS 741.01).
5. Pour déterminer la durée et s'il y a lieu de prononcer un retrait d'admonestation, la LCR distingue les infractions légères, moyennement graves et graves (art. 16a à 16e LCR).
6. Selon l'art. 16c al. 1 let. f LCR, commet une infraction grave la personne qui conduit un véhicule automobile alors que le permis de conduire lui a été retiré.
7. L'art. 16c al. 2 let. b LCR prévoit qu'après une infraction grave, le permis de conduire est retiré pour six mois au minimum si, au cours des cinq années précédentes, le permis a été retiré une fois en raison d’une infraction moyennement grave.
Selon l'alinéa 3 de cette disposition, la durée du retrait du permis en raison d'une infraction visée à l'al. 1 let. f, se substitue à la durée restante du retrait en cours.
8. Cette disposition, issue du projet du Conseil fédéral (Message du Conseil fédéral du 31 mars 1999 concernant la modification de la loi fédérale sur la circulation routière, in FF 1999 4106), concède à la personne concernée l'avantage de n'avoir à exécuter entièrement que la seconde mesure. D'après les travaux préparatoires, cet avantage est toutefois relativisé par le fait que la personne est menacée plus rapidement d'un retrait définitif en cas de nouvelles infractions, étant donné qu'elle a déjà franchi une étape supplémentaire selon le système dit des mesures « en cascade » (Message, p. 4136; voir également RÜTSCHE/WEBER, op. cit., n. 63 ad art. 16c LCR; Cédric MIZEL, Droit et pratique illustrée du retrait du permis de conduire, 2015, p. 512 ss n. 71.6). A titre d'exemple, le Message mentionne le cas d'un automobiliste sous le coup d'un retrait du permis de conduire pour une durée de trois mois à la suite d'une infraction grave, qui, en cas de conduite durant ce premier retrait, doit faire l'objet d'une mesure d'une durée minimale de douze mois (Message, p. 4136). En d'autres termes, la durée minimale du nouveau retrait dépend donc de la qualification de la première. Si par exemple, celle-ci était moyennement grave, le retrait minimal sera de six mois en vertu de l'art. 16c a. 2 let. b LCR (BUSSY /RUSCONI/ JEANNERET/ KUHN/ MIZEL/ MULLER, Code suisse de la circulation routière commenté, 2015, n. 11 ad art. 16c LCR).
9. Ainsi, contrairement au principe prévoyant qu'en droit de la circulation routière un conducteur ne se trouve en état de récidive qu'après la fin de l'exécution d'un précédent retrait, la loi aménage, pour l'infraction de conduite sans permis (art. 16c let. f LCR), un antécédent immédiatement aggravant dans le système des cascades des sanctions prévu par les art. 16 ss LCR (cf. MIZEL, op. cit., n. 79.8 p. 608 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_32/2015 du 18 juin 2015 consid .6.1;1C_579/2014 du 15 juillet 2015 consid. 3.1).
10. À teneur de l'art. 16 al. 3 LCR, les circonstances doivent être prises en considération pour fixer la durée du retrait du permis de conduire, notamment l'atteinte à la sécurité routière, la gravité de la faute, les antécédents en tant que conducteur, ainsi que la nécessité professionnelle de conduire un véhicule automobile. La durée minimale du retrait ne peut toutefois être réduite.
11. Ces éléments doivent faire l'objet d'une appréciation d'ensemble, de manière à atteindre autant que possible l'effet éducatif et préventif auquel tend la mesure. Dans ce contexte, l'autorité cantonale dispose d'un large pouvoir d'appréciation et l'autorité de recours n'intervient que si celle-ci a abusé de ce pouvoir, par exemple en ne prenant pas en compte certains éléments pertinents ou encore en appréciant leur portée de manière insoutenable (ATF 128 II 173 consid. 4b ; JdT 2002 I 593 et la jurisprudence citée). Il y a lieu ainsi de rechercher si des circonstances particulières ne justifient pas de considérer le cas comme plus grave ou, inversement, comme de moindre gravité (arrêt 1C_125/2016 du 25 octobre 2016).
12. La proximité temporelle d'un antécédent (généralement constitutif d'une récidive) est une circonstance aggravante (arrêts 1C_366/2011 consid. 3.5 ; 1C_293/2009 consid. 2.2).
13. La règle qui rend incompressibles les durées minimales de retrait des permis, s'impose à l'autorité et aux tribunaux sans dérogation possible, même pour tenir compte des besoins professionnels particulier du conducteur (ATF 135 II 334 consid. 2.2 et les arrêts cités).
14. En l'espèce, une première décision de retrait du permis de conduire a été prononcée à l'encontre du recourant pour une durée d'un mois en raison de l'infraction moyennement grave commise le 30 septembre 2023 dont l'exécution courait du 8 juillet 2024 au 7 août 2024 inclus.
En conduisant un véhicule automobile alors qu'il faisait l'objet d'une mesure de retrait de permis de conduire, le 14 juillet 2024, ce qu'il ne conteste plus, le recourant a commis une infraction grave au sens de l'art. 16c al. 1 let. f LCR précité.
Dans ces conditions, compte tenu de l'antécédent du recourant, la mesure prononcée par l'OCV, qui correspond à la durée minimale incompressible prescrite par l'art. 16c al. 2 let. b LCR (six mois), ne prête pas le flanc à la critique. Étant liée par cette durée, l'autorité intimée qui ne pouvait tenir compte des besoins professionnels invoqués, a correctement appliqué la loi et n'a pas excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation.
Dès lors, sa décision ne peut qu'être confirmée et le recours rejeté.
15. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 18 septembre 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 28 août 2024 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge du recourant, un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.
Genève, le |
| La greffière |