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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3255/2023

JTAPI/566/2024 du 10.06.2024 ( ICCIFD ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3255/2023 ICCIFD

JTAPI/566/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 10 juin 2024

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______, représentés par Société fiduciaire FIDIAL SA, avec élection de domicile

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Domiciliés en France voisine, Madame A______ et Monsieur B______ (ci-après : les contribuables ou les recourants) exercent une activité salariée à Genève et y sont soumis à l'impôt à la source en tant que frontaliers.

2.             Par un courrier recommandé de leur fiduciaire du 14 mars 2022, les contribuables ont demandé une rectification de leur imposition à la source 2021 et à être taxés au régime ordinaire en tant que quasi-résidents.

3.             Le 21 mars 2023, ils ont établi leur déclaration fiscale 2021, dans laquelle ils faisaient notamment valoir des frais d'entretien de leur bien immobilier situé en France à hauteur de CHF 534'693.-. Leur revenu net global était ainsi négatif.

4.             Répondant à une demande de renseignements de l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) du 8 février 2023, les contribuables ont indiqué que tous les justificatifs des frais d'entretien de leur immeuble étaient annexés à la déclaration téléversée, dont ils renvoyaient la feuille de synthèse.

5.             Par des décisions du 14 avril 2023, l'AFC-GE a informé les contribuables qu'ils n'étaient pas taxables en 2021. L'impôt à la source prélevé sur leurs salaires leur était restitué en intégralité. Les avis de taxation mentionnent que les frais d'entretien de l'immeuble ont été retenus à hauteur de CHF 92'858.-.

6.             Contre ces bordereaux, les contribuables ont formé une réclamation par un courrier recommandé de leur fiduciaire du 15 mai 2023. Ils se plaignaient notamment du fait que certains montants, versés en 2020 sur la base de factures intermédiaires, n'avaient pas été déduits au moment de l'établissement de la facture finale en 2021. Les contribuables demandaient que les taxations soient annulées et que des bordereaux soient réémis.

7.             Par des décisions du 5 septembre 2023, l'AFC-GE a écarté cette réclamation au motif que seule l'année au cours de laquelle les dépenses ont été facturées est déterminante et que seules peuvent être déduites du revenu brut de la période fiscale les dépenses facturées au cours de celle-ci. Dès lors, seules les factures établies en 2021 peuvent être déduites.

8.             Contre ces décisions, notifiées le 11 septembre 2023, un recours a été déposé par un pli porté de la fiduciaire des contribuables du 5 octobre 2023 devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal).

9.             Rappelant le déroulement des faits, les recourants indiquent s'être basés sur l'information de l'AFC-GE N° 1/2021 et que seule la date d'émission des factures doit être retenue comme déterminante et non pas celle de situations intermédiaires. Elle considère que l'AFC-GE a fait preuve de formalisme excessif en refusant la déduction de l'entier des montants.

10.         Dans sa réponse du 11 décembre 2023, l'AFC-GE conclut à l'irrecevabilité du recours en raison de l'absence d'un intérêt actuel à obtenir l'annulation de taxations portant sur un montant nul. Subsidiairement, et après avoir relevé que la réclamation qui avait été déposée par les contribuables contre leur imposition à la source 2020 avait été déclarée irrecevable pour cause de tardivité, elle souligne que les factures "de situation" datées 2019 et 2020 ne mentionnent pas en détail la nature des travaux et ceux-ci ne peuvent pas être reportés en 2021, faute d'avoir fait l'objet d'une déduction pendant les périodes considérées.

11.         Dans leur réplique du 1er février 2024, les recourants estiment que l'AFC-GE se trompe en disant que les factures 2019 et 2020 auraient dû être déduites en 2020. Pour eux, le report de frais destiné à économiser l'énergie doit être accordé et celui-ci justifie l'existence d'un intérêt actuel digne de protection.

12.         Dans sa duplique du 16 février 2024, l'AFC-GE a rappelé que, si les contribuables n'avaient pas pu faire valoir la déduction des frais effectifs en 2020, c'est parce qu'ils avaient tardé à demander la rectification de l'impôt à la source.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             L'AFC-GE conclut à l'irrecevabilité du recours en raison de l'absence d'intérêt actuel.

3.             Selon l'art. 2 al. 2 LPFisc, la LPA est applicable pour autant que la LPFisc n'y déroge pas. À teneur de l'art. 60 let. a et b LPA, les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée et toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée, sont titulaires de la qualité pour recourir. "Cette notion de l'intérêt digne de protection est identique à celle qui a été développée par le Tribunal fédéral sur la base de l'art. 103 let. a de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 et qui était, jusqu'à son abrogation le 1er janvier 2007, applicable aux juridictions administratives des cantons, conformément à l'art. 98a de la même loi. Elle correspond aux critères exposés à l'art. 89 al. 1 let. c de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005, en vigueur depuis le 1er janvier 2007 (LTF - RS 173.110) que les cantons sont tenus de respecter, en application de la règle d'unité de procédure qui figure à l'art. 111 al. 1 LTF" (ATA/1642/2017 du 19.12.2017 et réf.)".

4.             En matière fiscale, est sans intérêt actuel le recours du contribuable dont les conclusions, bien que tendant à l'annulation d'une décision de taxation, n'impliquent pas une diminution de l'impôt dû (ATA/1333/2017 précité ; ATA/647/2014 du 19 août 2014 ; ATA/101/2014 du 18 février 2014 ; RDAF 2003 II p. 47). Dans la mesure où l'autorité matérielle de la chose jugée se rapporte en principe au seul dispositif, le contribuable n'a ainsi pas un intérêt actuel digne de protection à contester le calcul de report de pertes contenu dans les motifs lorsque le bénéfice imposable demeure nul, sauf l'autorité fiscale entre en matière et procède à un nouveau calcul (ATF/140/144 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_973/2012 du 4 octobre 2013 ; ATA/1642/2017 précité).

5.             En l'espèce, les conclusions des recourants en rectification des bordereaux émis par l'AFC-GE n'impliquent la diminution d'aucun impôt, puisque celui-ci a été fixé à CHF 0.-. Dès lors, le recours sera déclaré irrecevable.

6.             Le tribunal estime enfin qu'il s'agit d'appliquer par analogie à l'excédent de dépenses pour économiser l'énergie reportable sur les périodes ultérieures la jurisprudence développée en matière de report de pertes pour les indépendants et les sociétés. D'après celle-ci, "lorsqu'un contribuable reçoit une taxation sur un bénéfice nul et qu'il n'a en conséquence pas d'impôt à payer, le montant des pertes qui ont conduit à la taxation sur un bénéfice nul constitue uniquement un motif de la décision de taxation, de sorte que ce montant ne bénéficie pas de la force de chose jugée matérielle. (...). Cela signifie que le report de pertes doit être examiné au moment où il est demandé, en particulier pour les périodes fiscales ultérieures." (ATF 2C_973/2012 du 04.10.2013 consid. 4.2).

7.             En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare irrecevable le recours interjeté le 5 octobre 2023 par Madame A______ et Monsieur B______ contre les décisions sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 5 septembre 2023 ;

2.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

3.             ordonne la restitution aux recourants du solde de l’avance de frais de CHF 200.- ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Antoine BERTHOUD, président suppléant, Laurence DEMATRAZ et Jean-Marc WASEM, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

Le président suppléant

Antoine BERTHOUD

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière