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Décisions | Chambre de surveillance

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C/27028/2014

DAS/85/2025 du 05.05.2025 sur DTAE/8082/2024 ( PAE ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/27028/2014-CS DAS/85/2025

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU LUNDI 5 MAI 2025

 

Recours (C/27028/2014-CS) formé en date du 9 décembre 2025 par Monsieur A______, domicilié ______ (Genève), représenté par Me Magda KULIK, avocat.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 8 mai 2025 à :

- Monsieur A______
c/o Me Magda KULIK, avocate.
Rue du Rhône 116, 1204 Genève.

- Madame B______
c/o Me Vincent LATAPIE, avocat.
Boulevard Helvétique 4, 1205 Genève.

- Maître C______
______, ______.

- Mesdames D______ et E______
SERVICE D'ÉVALUATION ET D'ACCOMPAGNEMENT DE LA SÉPARATION PARENTALE (SEASP)
Route des Jeunes 1C, case postale 107, 1211 Genève 8.

- Mesdames F______ et G______
SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Route des Jeunes 1E, case postale 75,1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.


EN FAIT

A.           a) L'enfant H______ est née le ______ 2010 de la relation hors mariage entretenue par B______ et A______, lequel l'a reconnue devant l'état civil.

Les parents sont titulaires de l'autorité parentale conjointe sur leur fille. Le 15 décembre 2014, ils ont adressé au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection), pour ratification, une convention d'entretien qui faisait état de l'exercice d'une garde partagée sur la mineure.

b) Le 29 avril 2021, A______ a saisi le Tribunal de protection d'une requête portant sur l'organisation des vacances d'été 2021, sur lesquelles les parties ne parvenaient pas à s'entendre.

Le Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (SEASP) a été saisi et a relevé que la communication parentale devenait de plus en plus difficile; des différends étaient également nés autour de la scolarité de l'enfant et une médiation avait été tentée.

Les parties sont toutefois parvenues à trouver un terrain d'entente pour l'organisation des vacances d'été 2021.

c) Par courrier du 12 novembre 2021, B______ a sollicité l'octroi de la garde exclusive de la mineure H______. Elle a exposé que le couple parental s'était séparé en février 2020. Depuis lors, des conflits étaient apparus, notamment au sujet de la scolarité de l'enfant et de l'organisation de la garde partagée. La mineure H______ avait exprimé le fait qu'elle ne pouvait pas parler avec son père, ni montrer ses émotions, en particulier lorsqu'elle se sentait triste; son père la rabaissait parfois et critiquait ses amis et elle pleurait lorsqu'elle devait se rendre chez lui. B______ avait par ailleurs pris la décision d'initier un suivi thérapeutique pour H______, afin de l'accompagner dans une période douloureuse pour elle.

d) Un rapport d'évaluation a été rendu par le SEASP le 17 juin 2022, recommandant le maintien de la prise en charge alternée de H______, devant s'exercer d'entente entre les parents ou, à défaut, toutes les semaines du mercredi au mercredi, ainsi que durant la moitié des vacances scolaires. Le SEASP avait pris l'option d'encourager les parents à continuer de travailler sur leur coparentalité, le père ayant été invité à améliorer sa relation avec sa fille.

Le Tribunal de protection a approuvé ces recommandations le 18 juillet 2022.

e) Le 22 février 2024, B______ s'est à nouveau adressée au Tribunal de protection. Elle a exposé que la mineure H______ s'était fortement opposée à son départ en vacances avec son père à Noël 2023. Elle était finalement partie, contre son gré. Alors qu'elle devait se rendre chez son père pour les vacances de février, elle s'y était à nouveau opposée et avait quitté le domicile maternel en courant. Le soir, elle avait envoyé un message à sa mère, en disant qu'elle se trouvait chez des personnes de confiance; elle était toutefois demeurée introuvable et la police avait été contactée. Elle était rentrée spontanément deux jours plus tard, un message selon lequel elle ne devrait pas se rendre chez son père pour les vacances lui ayant été transmis. Elle avait exprimé le fait qu'elle ne souhaitait ni le voir, ni lui parler et elle craignait qu'il ne vienne l'attendre à la sortie de l'école. D'une manière générale, la mineure H______ était très souvent triste, ne se sentait pas entendue et pleurait beaucoup. Elle était suivie depuis plus d'un an par une psychologue à raison d'une fois par semaine. Le père venait de demander à ce que H______ vienne chez lui pour y passer un mois, en raison des semaines "à compenser", ce qui paraissait inconcevable compte tenu de l'état psychologique de l'enfant. B______ craignait que la mineure ne se mette à nouveau en danger, en fuguant une seconde fois.

f) Par ordonnance du 23 février 2024, le Tribunal de protection a désigné C______, avocat, en qualité de curateur de la mineure H______, son mandat étant limité à sa représentation dans la procédure pendante devant ce même Tribunal.

g) Dans ses observations adressées le 28 mars 2024 au Tribunal de protection, A______ a indiqué avoir constaté un changement d'attitude chez sa fille H______, notamment une baisse d'attention et de niveau scolaire, ce qui lui avait été confirmé par le maître de classe. Les carnets de H______ mentionnaient en outre, à compter de janvier 2024, des oublis, des arrivées tardives, des absences injustifiées, des devoirs non faits, du travail insatisfaisant, ainsi qu'un comportement inadapté, le tout pouvant s'expliquer par les mauvaises fréquentations de la mineure. Celle-ci côtoyait en effet des adolescents qui s'affichaient sur les réseaux sociaux en consommant du cannabis; elle utilisait en outre son téléphone portable de manière excessive et avait délaissé toutes ses activités extrascolaires. A______ souhaitait collaborer avec B______ afin de trouver une solution commune; il n'entendait pas obliger sa fille à entretenir des contacts avec lui, mais estimait qu'il était dans l'intérêt de la mineure d'en avoir.

h) Le 24 mai 2024, B______ a formé auprès du Tribunal de protection une action en attribution de la garde et en fixation des relations personnelles. Elle a conclu au maintien de l'autorité parentale conjointe sur la mineure H______, à l'attribution à elle-même de la garde exclusive, un droit de visite devant s'exercer d'entente avec la mineure pouvant être réservé au père.

Elle a notamment exposé que malgré des déclarations d'intention faites devant les intervenants en protection de l'enfant, A______ ne proposait rien pour améliorer la communication avec la mineure et avec elle-même. Les tentatives de médiation, de même que le suivi sur plusieurs mois auprès de la Dre I______ n'avaient pas permis de rétablir une communication et une collaboration efficientes entre les parents. Les modalités de prise en charge de la mineure H______ ne lui convenaient plus et impactaient négativement sa santé et son équilibre. Depuis le 16 février 2024, la mineure n'était pas retournée chez son père; elle souhaitait mettre un terme à la garde partagée et demeurer auprès de sa mère. L'adolescente exprimait le fait que son père lui manquait, mais elle craignait sa réaction et s'opposait en l'état à toute proposition de reprise des contacts. Ses résultats scolaires demeuraient bons.

i) Dans ses observations du 9 juillet 2024, A______ a conclu au maintien de l'autorité parentale conjointe et de la garde partagée et à ce qu'il soit ordonné aux deux parents d'entreprendre un travail de coparentalité; préalablement, il a également conclu à ce qu'une expertise psychiatrique du groupe familial soit ordonnée.

Il a allégué être un père présent pour sa fille; il l'avait constamment encouragée à s'exprimer ouvertement, y compris sur les points de désaccord entre eux. Selon lui, la souffrance de la mineure devait avoir des causes multiples. Il a contesté, contrairement à ce qu'avait soutenu B______, avoir interdit à la mineure de contacter sa mère lorsqu'elle était chez lui. Il a persisté à soutenir avoir toujours entretenu de bonnes relations avec sa fille. Selon lui, toutes les tentatives de communication et de collaboration avaient été sabotées par B______. A______ a précisé s'être entretenu avec les professeurs de mathématiques et de français de sa fille, lesquels lui avaient fait part d'une baisse significative de ses résultats, ainsi que de problèmes de comportement en classe; elle cumulait en outre des absences non excusées. L'adolescente avait besoin du soutien de ses deux parents et il était nécessaire que ses relations avec lui reprennent afin d'éviter un enlisement de la situation.

j) Le SEASP a rendu un rapport d'évaluation le 4 juillet 2024, préconisant l'attribution de la garde de la mineure H______ à sa mère, la mise en œuvre d'un travail thérapeutique père-fille, l'instauration d'une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles et un travail de coparentalité.

En substance, le SEASP a relevé que malgré les différentes opportunités de travailler les désaccords, la communication et la coparentalité avec le soutien de professionnels, le conflit parental demeurait aigu. Pourtant les parties avaient pu constater les effets bénéfiques sur leur fille lorsqu'ils parvenaient à rétablir un dialogue et à s'entendre sur les décisions à prendre dans son intérêt. Le conflit entre ses parents était probablement en partie responsable du mal-être de la mineure. Celle-ci n'avait revu son père qu'une fois à la fin du mois de mai 2024, lors d'une promenade en forêt avec le chien. L'adolescente était attachée à son père, mais s'était retrouvée en difficulté pour rétablir le contact avec lui et elle avait plus que jamais besoin du soutien de ses deux parents pour parvenir à surpasser sa prise de position drastique ayant conduit à l'annulation du voyage en Grèce et à la fin de la garde alternée. La mineure était en outre confrontée à une polarisation de deux modèles éducatifs, sa mère étant permissive et son père rigide. La première avait su maintenir un bon lien avec sa fille, dans la confiance et la communication, mais semblait toutefois lui laisser beaucoup de liberté et de pouvoir décisionnel, ce qui ne servait pas forcément l'intérêt de l'adolescente. Quant au second au contraire, il se montrait peu à l'écoute, inflexible et contrôlant, ce qui mettait à mal sa relation avec la mineure et était une source de souffrance pour celle-ci; la capacité du père à se remettre en cause demeurait faible. La demande de la mineure de pouvoir vivre auprès de sa mère était également une manière de se protéger du dysfonctionnement parental, malgré des compétences certaines chez chacun. Au jour de la reddition du rapport, les conditions au maintien de la garde alternée n'étaient plus réunies et il convenait d'entendre les besoins de la mineure. Une expertise du groupe familial n'apparaissait pas nécessaire. Pour le surplus, il n'était pas dans l'intérêt de l'adolescente de la laisser décider seule de la fréquence des relations avec son père. La mise en œuvre d'un travail thérapeutique père-enfant auprès de J______ [centre de consultations familiales] afin de travailler la reprise des relations personnelles était recommandée.

La mineure H______ a été entendue par le SEASP. Elle a expliqué s'être sentie très déprimée avant les vacances de février 2024; elle avait déjà ressenti cela auparavant, son mal-être étant en lien avec sa relation avec son père. L'adolescente a toutefois reconnu que ce mal-être apparaissait également lorsqu'elle était chez sa mère, mais ce n'était "pas du tout pareil". Elle ne se sentait pas bien chez son père. Bien qu'il ne s'énerve pas, son attitude n'était, selon la mineure, pas "normale". Ainsi, après l'avoir autorisée à aller dormir chez des amis, il l'avait appelée quatre ou cinq fois durant la soirée pour lui parler de choses insignifiantes. Elle avait fini par lui parler un peu sèchement et il l'avait rappelée pour lui signifier qu'il aller venir la chercher. Elle ne pouvait pas exprimer ses émotions devant lui et d'une manière générale ne se sentait pas à l'aise avec lui. Ainsi, elle lui avait dit plusieurs fois ne plus vouloir se rendre en Grèce pour les vacances, mais il ne l'avait pas écoutée. En Grèce (toujours au même endroit), elle restait seule pendant que son père partait pêcher pendant plusieurs heures; elle craignait qu'il lui arrive quelque chose en mer et de se retrouver seule, isolée de tous, à l'étranger. Elle ressentait également beaucoup de pression de la part de son père sur le plan scolaire. Ses principes éducatifs n'évoluaient pas, alors qu'elle grandissait. Avec sa mère, c'était parfois également compliqué, mais les conflits étaient plus faciles à vivre. Son père et son chien lui manquaient, mais elle ne voulait pas être contrainte de retourner vivre chez lui; elle ne souhaitait pas non plus le revoir en présence d'un tiers.

k) Le curateur de représentation de la mineure a formulé ses observations au Tribunal de protection. Depuis plus d'un an, la mineure était suivie par une psychologue. Elle était d'accord de "désamorcer" la situation avec son père avec l'aide de cette même psychologue lors d'un rendez-vous. Elle aurait aimé pouvoir retirer à son père son côté étouffant et contrôlant. Elle l'avait revu au mois de mai avec son demi-frère K______, lors d'une promenade avec le chien. La rencontre s'était bien passée, mais il y avait eu peu de dialogue, car tous deux étaient gênés. La mineure admettait que ses notes avaient baissé durant le troisième trimestre. Elle était toutefois promue en 10ème avec une moyenne supérieure à 5. Elle était moins allée aux cours et avait été punie par sa mère (privation de sorties et de téléphone). Elle désirait vivre chez sa mère, s'y sentant mieux et était opposée à une reprise de la garde partagée. Elle souhaitait voir son père "à petites doses", uniquement quand elle en aurait envie. Elle a fait état d'un "huis clos" avec son père et d'une forme d'étouffement. Avec lui, elle ne voyait jamais d'amis ou d'adolescents du même âge qu'elle et n'amenait pas d'amis chez lui.

A______ a déclaré au curateur ne pas se reconnaître dans les déclarations de sa fille. Il était une personne attentive et ouverte au dialogue. Il n'avait jamais rien imposé à la mineure; la seule contrainte était le fait qu'il refusait qu'elle dorme chez des amis durant la semaine. Lorsque sa fille lui avait dit ne pas vouloir se rendre en Grèce en février 2024, il lui avait répondu qu'elle ne pouvait décider de certaines choses à son âge. Il essayait toujours de l'occuper durant les séjours en Grèce. Il reconnaissait imposer à la mineure un cadre plus strict que celui auquel elle était habituée chez sa mère et pouvait se montrer intransigeant sur certaines choses. Il a contesté "l'étouffement" relaté par sa fille à son domicile, avec la précision qu'il s'absentait trois soirs par semaine pour faire de la musique, ce qui permettait à l'enfant d'être seule à ces occasions. Il lui arrivait également de sortir pour d'autres motifs et de recevoir des amis; sa fille sortait également régulièrement pour une soirée ou une nuit. Selon le curateur, il convenait de réduire rapidement la distance qui s'était créée entre la mineure et son père, la gêne existant entre les deux devant être dissipée. Un travail en ce sens devait être entrepris rapidement. La reprise des contacts devait être progressive pour aboutir à un retour à une prise en charge alternée.

l) Le Tribunal de protection a tenu une audience le 16 septembre 2024.

B______ s'est déclarée d'accord avec l'ensemble du préavis du SEASP. La mineure H______ avait passé l'été avec elle et avait repris le cycle à la rentrée, avec de bons résultats. Elle voyait sa psychologue une fois par semaine et avait repris le skate-board. Elle-même avait toujours rappelé à sa fille l'importance de maintenir des relations avec son père. H______ appréhendait toutefois la reprise du lien avec lui et refusait de le voir seule. B______ soutenait l'idée d'une reprise accompagnée, dans un espace tel que J______. Selon elle, les problèmes existaient bien avant les vacances de février et la mineure n'avait pas juste fait un caprice au sujet desdites vacances. Elle était opposée à la mise en œuvre d'une expertise du groupe familial et d'accord d'entreprendre un travail de coparentalité.

A______ pour sa part a persisté à solliciter une expertise du groupe familial. Sa fille semblait avoir peur de lui et il avait besoin de comprendre pourquoi. Il s'inquiétait également de l'effet que le conflit parental pouvait avoir sur elle. Il craignait de passer à côté d'un problème important que rencontrerait sa fille, laquelle souffrait. Il était d'accord, dans l'immédiat, avec la reprise d'un lien sous forme médiatisée.

Le curateur de représentation de la mineure avait constaté que cette dernière ne reprochait au final pas grand-chose de concret à son père. L'épisode des vacances en Grèce revenait souvent. Il soutenait l'idée de repartir sur une relation saine entre H______ et son père et rappelait qu'avant la cassure de février 2024 la relation entre eux existait et semblait solide.

Selon la représentante du SEASP, il était important de ne pas laisser la mineure décider seule de ses relations avec son père.

Au terme de l'audience, le Tribunal de protection a gardé la cause à juger.

B.            Par ordonnance DTAE/8082/2024 du 16 septembre 2024, le Tribunal de protection a confié la garde de la mineure H______ à B______ (ch. 1 du dispositif), réservé à A______ un droit aux relations personnelles avec la mineure devant s'exercer par le biais de J______, au travers d'un travail thérapeutique parent-enfant, charge aux curateurs de préaviser la progression des relations personnelles (ch. 2), instauré une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles (ch. 3), désigné deux intervenantes en protection de l'enfant auprès du Service de protection des mineurs (SPMi) en qualité de curatrices (ch. 4), donné acte aux parents de ce qu'ils allaient entreprendre un travail de coparentalité (ch. 5), donné acte à la mineure H______ de la poursuite de sa thérapie (ch. 6), attribué la totalité de la bonification pour tâches éducatives de l'AVS à la mère, tout en rappelant que les parties pouvaient modifier librement et en tout temps, par accord écrit, la répartition ainsi prévue (ch. 7) et arrêté les frais judiciaires à 600 fr., mis à la charge des parties par moitié chacune (ch. 8).

En substance, le Tribunal de protection a considéré disposer de suffisamment d'éléments pour statuer, sans nécessité de solliciter une expertise du groupe familial. Il a retenu que le mode de garde alternée avait déjà été remis en question plus de deux ans auparavant, des difficultés de communication entre les parents ayant alors été mises en exergue. A la faveur d'un travail sur cette question, la garde partagée avait toutefois été maintenue. Ce travail de coparentalité ne s'était pas poursuivi et la situation s'était à nouveau dégradée. La mineure s'était sentie de moins en moins bien dans cette organisation de vie, ce qu'elle avait manifesté par une fugue au mois de février 2024, mettant de fait un terme au partage de sa garde. Le conflit parental perdurait depuis un certain temps, les parents ne communiquant pas et n'étant pas parvenus à maintenir la cohérence et la complémentarité de leurs postures éducatives divergentes. En campant sur leurs positions respectives, ils avaient peu à peu laissé reposer sur les épaules de leur fille le poids de leur conflit et conduit celle-ci à prendre position entre eux. Assez naturellement, l'enfant avait opté pour le parent, certes peut-être plus permissif, mais auprès duquel elle s'était sentie plus rassurée, mieux écoutée et soutenue dans ses questionnements propres à l'adolescence. Les circonstances ainsi décrites ne permettaient pas la poursuite de la garde alternée. Avant qu'une telle option redevienne envisageable, du temps et de l'énergie allaient devoir être consacrés à la restauration du dialogue entre les parents et de la relation père-fille. Chaque membre de la famille devait en outre questionner son propre fonctionnement, notamment ses rigidités pour le père, sa capacité de contrôle et de cadrage pour la mère, et la conciliation de son statut d'enfant et de future jeune adulte pour la mineure. D'ici là, il y avait lieu d'entendre les besoins actuels de l'enfant et de reconnaître l'aptitude de la mère à la prendre en charge à plein temps, tout en permettant la reconstitution de bases solides dans la relation père-fille, ce dans des conditions plus favorables que celles d'une garde alternée.

C.           a) Le 9 décembre 2024, A______ a formé recours contre cette ordonnance, reçue le 9 novembre 2024, concluant, préalablement, à ce qu'une expertise du groupe familial soit effectuée et principalement à l'annulation des chiffres 1 et 2 du dispositif et cela fait à ce que la garde de la mineure soit attribuée à la mère jusqu'au 18 août 2025 (rentrée scolaire), à ce qu'un droit de visite devant s'exercer à raison d'un week-end sur deux du vendredi soir après l'école au lundi matin retour à l'école, un jour par semaine du mardi 18h00 au mercredi 18h00 ainsi que durant la moitié des vacances scolaires et des jours fériés lui soit réservé jusqu'au 18 août 2025, à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement de continuer, en parallèle de la reprise du droit de visite, le travail thérapeutique parent-enfant auprès de J______, à ce qu'il soit pris acte du fait que les rencontres entre lui-même et la mineure H______ avaient repris dans le cadre privé, à l'initiative de l'enfant, et qu'elles se passaient bien; pour le surplus, le recourant a conclu à ce qu'il soit dit que la garde de la mineure s'exercera de manière alternée, à raison d'une semaine sur deux du lundi au lundi suivant, ainsi que durant la moitié des vacances scolaires et des jours fériés et ce dès le 18 août 2025, et enfin à ce que soit rappelé à B______ son accord d'entreprendre un travail de coparentalité avec le recourant.

En substance, le recourant a fait grief au Tribunal de protection d'avoir constaté les faits de manière inexacte et incomplète en refusant d'ordonner une expertise familiale, alors que les besoins de la mineure n'étaient pas suffisamment connus. Il n'y avait par ailleurs pas de conflit parental à proprement parler, mais de simples désaccords ponctuels, aggravés et transformés en conflits juridiques par B______, laquelle avait "fait feu de tout bois" pour obtenir la garde exclusive de la mineure. Elle avait également mis en échec le travail de coparentalité. Le recourant a par ailleurs contesté faire preuve de rigidité et se montrer contrôlant, contrairement à ce qu'avait retenu le SEASP et seule une expertise familiale serait à même d'objectiver les propos de l'intervenante dudit service. La mineure était, depuis le mois de février 2024, sous l'influence de sa mère, laquelle avait tout loisir d'influencer sa pensée et ses prises de position. Les propos successifs de l'enfant étaient au demeurant contradictoires, voire contraires à la réalité. Le recourant a également fait grief au Tribunal de protection d'avoir restreint ses relations personnelles avec sa fille de manière disproportionnée. Or, la mineure avait demandé à le revoir, requêtes qui n'avaient pas été relayées par B______. Le recourant a également soutenu que son propre comportement avait été irréprochable et qu'il était principalement axé sur l'intérêt de sa fille. Enfin, l'avis du curateur de la mineure n'avait pas été suffisamment pris en considération.

b) Le Tribunal de protection a persisté dans les termes de l'ordonnance attaquée.

c) Le SPMi a maintenu son préavis du 4 juillet 2024, tout en indiquant ne pas avoir été informé de l'évolution des relations personnelles entre l'enfant et son père.

d) Le curateur de la mineure s'en est rapporté à ses observations du 10 juillet 2024.

e) B______ a conclu au rejet du recours.

Elle a affirmé que les désaccords entre elle-même et le recourant n'étaient pas de simples désaccords ponctuels; il s'agissait de désaccords profonds s'agissant de l'éducation de leur fille, du respect de ses choix, de ses besoins et de ses émotions. Durant l'été 2024, la mineure n'avait pas souhaité partir en vacances avec son père. Elle était désormais une adolescente qui s'affirmait et qui nécessitait certaines adaptations de la dynamique familiale; elle avait besoin d'autonomie, de liberté et d'intimité et que son avis soit pris en considération.

f) A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions.

Il a affirmé avoir rencontré sa fille aussi bien dans le cadre du suivi J______ que de manière libre, à l'initiative de l'un ou de l'autre, ainsi en novembre 2024 et en janvier 2024 (sic). Chaque rencontre s'était déroulée dans la bonne entente et la bonne humeur. Le recourant a également versé à la procédure des messages échangés avec la mineure, dont la plupart portaient sur l'organisation de rencontres autour d'une activité.

g) B______ a dupliqué, persistant dans ses conclusions.

Elle a allégué qu'en l'état la mineure H______ ne souhaitait pas avoir de contact avec son père, ce qu'elle avait encore confirmé à une intervenante en protection de l'enfant le 12 février 2025. Elle avait effectivement rencontré son père à trois reprises depuis le prononcé de l'ordonnance attaquée; il avait toutefois été décidé de suspendre ces rencontres et de se concentrer sur la thérapie père-fille jusqu'à nouvel avis.

h) A______ a répliqué à nouveau, cette écriture n'ayant pas suscité d'observations supplémentaires de B______.

i) Par avis du greffe de la Chambre de surveillance du 26 mars 2025, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1. Les dispositions de la procédure devant l'autorité de protection de l'adulte sont applicables par analogie pour les mesures de protection de l'enfant (art. 314 al. 1 CC).

Les décisions de l'autorité de protection peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 CC et 53 al. 1 LaCC).

Interjeté par une personne ayant qualité pour recourir, dans le délai utile de trente jours et suivant la forme prescrite, le recours est recevable (art. 450 al. 2 et 3 et 450b CC).

1.2. Compte tenu de la matière, soumise aux maximes inquisitoire et d'office illimitée, la cognition de la Chambre de surveillance est complète. Elle n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 CC).

2. Le recourant fait grief au Tribunal de protection de ne pas avoir ordonné une expertise du groupe familial.

2.1 L'autorité de protection de l'adulte établit les faits d'office (art. 446 al. 1 CC). Elle procède à la recherche et à l'administration des preuves nécessaires. Elle peut charger une tierce personne ou un service d'effectuer une enquête. Si nécessaire, elle ordonne un rapport d'expertise (art. 446 al. 2 CC).

2.2 En l'espèce, c'est à juste titre que le Tribunal de protection a considéré qu'il n'était pas nécessaire de solliciter une expertise du groupe familial. Une telle mesure est en effet particulièrement longue, les rapports d'expertise étant généralement déposés dans un délai supérieur à six mois, coûteuse (honoraires des experts compris entre 15'000 fr. et 20'000 fr., voire davantage) et particulièrement incisive, les experts procédant à une analyse complète du fonctionnement des différents membres du groupe familial. Compte tenu des caractéristiques qui viennent d'être rappelées, une telle mesure d'instruction doit être réservée aux situations extrêmes, en particulier lorsque des doutes sérieux existent sur la capacité de l'un ou l'autre des parents, voire des deux, à prendre en charge leurs enfants de manière adéquate. Or, tel n'est pas le cas dans la présente procédure, les capacités parentales, y compris celles du recourant, n'étant pas remises en cause en tant que telles. La mineure vit par ailleurs depuis de nombreuses années au centre de la mésentente parentale, laquelle a des répercussions négatives sur son bien-être; elle est suivie par une thérapeute et a été entendue par le SEASP. Ordonner une expertise du groupe familial aurait pour conséquence de nécessiter à nouveau son audition et de générer ainsi un stress supplémentaire, qu'il y a lieu d'éviter. Enfin et contrairement à ce que semble penser le recourant, il n'apparaît pas nécessaire de déterminer s'il est, ou pas, un père rigide et contrôlant. L'essentiel n'est pas de définir précisément la personnalité du recourant, mais de faire en sorte qu'en dépit de la manière dont sa fille le perçoit, tous deux puissent renouer puis entretenir des relations régulières et bénéfiques pour l'adolescente.

Au vu de ce qui précède, le recourant sera débouté de ses conclusions sur ce point.

3. Le recourant conteste par ailleurs les mesures prises par le Tribunal de protection s'agissant de la garde de la mineure et des relations personnelles.

3.1 L'instauration d'une garde alternée s'inscrit dans le cadre de l'exercice conjoint de l'autorité parentale; la garde alternée est la situation dans laquelle les parents exercent en commun l'autorité parentale, mais prennent en charge l'enfant de manière alternée pour des périodes plus ou moins égales (arrêts 5A_928/2014 du 26 février 2015 consid. 4.2; 5A_345/2014 du 4 août 2014 consid. 4.2; 5A_866/2013 du 16 avril 2014 consid. 5.2). Un parent ne peut pas déduire du principe de l'autorité parentale conjointe le droit de pouvoir effectivement s'occuper de l'enfant pendant la moitié du temps. On ne décidera donc d'une garde alternée ou partagée que si celle-ci est la meilleure solution pour le bien de l'enfant (cf. Message du Conseil fédéral concernant la modification du Code civil du 16 novembre 2011, in: FF 2011 8315 p. 8331).

3.1.2 Le père ou la mère qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde ainsi que l'enfant mineur ont réciproquement le droit d'entretenir les relations personnelles indiquées par les circonstances (art. 273 al. 1 CC).

Autrefois considéré comme un droit naturel des parents, le droit aux relations personnelles est désormais conçu à la fois comme un droit et un devoir de ceux-ci (art. 273 al. 2 CC), mais aussi comme un droit de la personnalité de l'enfant; il doit servir en premier lieu l'intérêt de celui-ci (ATF 127 III 295 consid. 4a;
123 III 445 consid. 3b). C'est pourquoi le critère déterminant pour l'octroi, le refus et la fixation des modalités du droit de visite est le bien de l'enfant, et non une éventuelle faute commise par le titulaire du droit (Vez, Le droit de visite – Problèmes récurrents, in Enfant et divorce, 2006, p. 101 ss, 105). Le rapport de l'enfant avec ses deux parents est essentiel et peut jouer un rôle décisif dans le processus de sa recherche d'identité (ATF 127 III 295 consid. 4a; 123 III 445 consid. 3c; 122 III 404 consid. 3a et les références citées).

3.2.1 Les parties ont exercé une garde partagée sur leur fille à compter de leur séparation, intervenue en février 2020. Cette modalité de garde a pris fin en février 2024, date à laquelle la mineure a refusé de partir en vacances en Grèce avec son père, qu'elle n'a revu, depuis lors, qu'à quelques reprises seulement. Les relations entre la mineure et son père sont par conséquent presque inexistantes depuis plus d'une année désormais.

Si aucun fait grave n'est survenu entre le recourant et sa fille, cette dernière a décrit une forme de mal-être lorsqu'elle se trouvait chez lui, considérant qu'il n'était pas suffisamment à l'écoute de ses émotions et qu'il se montrait rigide et contrôlant. Le recourant a certes contesté le portrait dressé de lui par la mineure, considérant avoir toujours rempli son rôle de manière adéquate et que certains faits relatés par sa fille, notamment les vacances en Grèce, n'étaient pas conformes à la réalité. Il convient toutefois de ne pas perdre de vue le fait que la mineure est désormais une adolescente, dont les besoins et les attentes se sont modifiés et dont le mal-être peut avoir des causes multiples. Le contenu du recours atteste toutefois du fait que le recourant n'entend en aucune manière se remettre en cause et rejette sur B______ l'entière responsabilité de leurs difficultés de communication et de la rupture de ses relations avec sa fille, ce qui est sans doute excessif, B______ ne semblant notamment pas s'être opposée au fait que la mineure H______ entretienne des relations régulières avec le recourant.

Ce dernier omet par ailleurs de tenir compte du fait que sa fille aura 15 ans au mois d'août 2025. Si elle ne saurait certes décider seule de l'organisation de sa prise en charge, il n'en demeure pas moins qu'il serait contreproductif de lui imposer un mode de garde et des relations personnelles auxquels elle serait fermement opposée. Ainsi, décider, conformément aux conclusions prises par le recourant, que le système de la garde alternée devra reprendre à compter de la prochaine rentrée des classes le 18 août 2025 et que d'ici là le droit de visite devra s'exercer à raison d'un week-end sur deux, d'un jour par semaine et de la moitié des vacances scolaires, n'apparaîtrait pas réaliste et ferait totalement fi des difficultés rencontrées par le recourant et la mineure ainsi que de la longue période d'interruption quasi-totale des relations personnelles entre eux. Or, il n'est pas possible de prédire à ce jour quel sera l'état des relations père-fille en août prochain, de sorte qu'il serait pour le moins prématuré de réinstaurer une garde alternée sans avoir pu s'assurer au préalable qu'elle correspondra à l'intérêt de la mineure.

Il semble que des séances au sein de J______ aient pu avoir lieu en dépit du recours déposé et que le recourant et la mineure aient également entretenu quelques contacts en dehors de cette institution. Lesdits contacts sont certes encourageants. Ils ne sauraient toutefois suffire pour que le droit de visite souhaité par le recourant puisse être instauré. En l'état, il paraît nécessaire que les relations personnelles s'exercent un temps au travers de J______, qui devrait être en mesure d'aider le recourant et la mineure à renouer un dialogue apaisé et constructif, afin de leur permettre de repartir sur des bases saines. Une fois ce dialogue renoué, une évolution vers un élargissement des relations personnelles, voire la reprise d'une garde alternée, pourra être envisagée. Une telle évolution ne saurait toutefois être décrétée de manière abstraite, contrairement à ce que souhaiterait le recourant.

Au vu de ce qui précède, le recours, infondé, sera rejeté.

3.2.2 Pour le surplus, il ne sera donné aucune suite, faute d'intérêt, aux conclusions du recourant portant sur le constat que les relations personnelles avec sa fille avaient repris à l'initiative de celle-ci et sur le rappel à B______ de son accord à entreprendre un travail de coparentalité.

4. La procédure de recours, qui concerne les relations personnelles entre le recourant et sa fille, n'est pas gratuite (art. 77 et 81 al. 1 a contrario LaCC; art. 67A et 67B RTFMC).

L'émolument de décision sera arrêté à 400 fr., mis à la charge du recourant, qui succombe et compensé avec l'avance de frais versée, acquise à l'Etat de Genève.

Vu la nature familiale du litige, il ne sera pas alloué de dépens (art. 107 al. 1 let. C CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre l'ordonnance DTAE/8082/2024 du 16 septembre 2024, rendue par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/27028/2014.

Au fond :

Le rejette.

Déboute le recourant de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 400 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame Paola CAMPOMAGNANI et Madame Stéphanie MUSY, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.