Décisions | Chambre des prud'hommes
CAPH/103/2024 du 09.12.2024 sur JTPH/353/2023 ( OS ) , IRRECEVABLE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/619/2023 CAPH/103/2024 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre des prud'hommes DU LUNDI 9 DECEMBRE 2024 |
Entre
Monsieur A______, domicilié ______ [GE], appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 26 octobre 2023 (JTPH/353/2023),
et
B______, sise ______ [ZH], intimée, représentée par Me Kevin GUILLET, avocat, Proxima Legal Sàrl, rue des Terreaux 10, 1003 Lausanne.
A. Par jugement JTPH/353/2023 du 26 octobre 2023, le Tribunal des prud’hommes a, statuant par voie de procédure simplifiée, à la forme, déclaré irrecevable la demande formée le 6 mars 2023 par A______ en tant qu’elle est dirigée contre [la banque] C______ (SUISSE) et l’a déclarée recevable pour le surplus (chiffre 1 du dispositif), l’a invité à mieux agir s’il s’y estime fondé (ch. 2) et, au fond, a débouté A______ des fins de sa demande en tant qu’elle est dirigée contre C______ (ch. 4), dit que la procédure est gratuite et qu’il n’est pas alloué de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 5).
B. a. Par acte expédié le 27 novembre 2023 au greffe de la Chambre des prud’hommes de la Cour de justice, A______, agissant en personne, a formé appel contre ce jugement.
Son acte est composé d’une partie « conclusions » comportant des sous-rubriques « à la forme » et « au fond ».
Les conclusions à la forme sont libellés de la façon suivante ; « Conteste la décision du Tribunal des Prud’hommes dans la mesure où une rectification des parties devait être proposé dès la séance de conciliation soit le début de la procédure. Demande la rectification des parties dans le cadre du litige opposant Mr A______ à C______. Déclarer bon et recevable la demande en procédure simplifiée (article 244 CPC) formée le 06.03.2023. Afin de répondre aux accusations de défaut de partie, dans le seul et unique but qu’un jugement de fond ne soit pas appliqué, Mr A______ a ajouté à C______, C______ (Suisse). Renvoyer la cause au Tribunal des Prud’hommes pour nouvelle décision afin que la demande de rectification des parties soit acceptée. Demande en constatation de droit afin que le licenciement abusif et le tort moral soient confirmés et que les indemnités de licenciement abusif et de tort moral soient versées à la partie demanderesse, Mr A______ ».
La partie « Au fond » « principalement » fait abondamment référence à la procédure de conciliation, puis reprend les conclusions financières de première instance de A______, soit que « C______ » soit condamnée à lui verser au total 29'999 fr. 99, comprenant la somme de 23'000 fr. pour résiliation abusive et de 6'999 fr. pour tort moral, atteinte à la personnalité et harcèlement moral.
Son acte comprend ensuite un « préambule », une partie : « Faits » et une partie « Droit ».
b. Par réponse du 15 janvier 2024, C______ a conclu, principalement, à l’irrecevabilité de l’appel, subsidiairement, à son rejet et plus subsidiairement au renvoi de la cause au Tribunal des prud’hommes pour instruction du fond du dossier et qu’un délai lui soit imparti pour répondre à la demande, le tout sous suite de frais et dépens.
c. A______ a répliqué le 19 février 2024, persistant dans ses conclusions.
d. C______ a dupliqué le 22 mars 2024.
e. La cause a été gardée à juger à l’issue de ces échanges.
f. Par courrier du 15 août 2024, le conseil de C______ a indiqué à la Cour que l’intégralité des actifs et des passifs de C______ avaient été repris par B______, qui succédait à C______ dans le cadre de la procédure.
C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :
a. C______ est une société de droit suisse, inscrite au Registre du commerce de Zurich, dont le but est l’exploitation d’une banque ainsi que tous les types d’opérations bancaires, financières, de conseil, de services et de commerce qui y sont liés, en Suisse et à l’étranger. La société peut fonder des banques, des sociétés financières et d’autres entreprises de toutes sortes, participer à de telles entreprises, en assumer la direction et, en collaboration avec elles, fournir des prestations de gestion à des tiers dans le cadre d’entreprises communes. La société peut acquérir, grever et vendre des biens immobiliers.
C______ (SUISSE) est une société de droit suisse, inscrite au Registre du commerce de Zurich, dont le but est l'exploitation d’une banque ainsi que tous les types d’opérations bancaires, de financement, de conseil et de prestations de services qui y sont liés pour des clients enregistrés par contrat en Suisse, ainsi que l’activité de banque dépositaire conformément à la loi sur les placements collectifs. La société peut fonder des banques, des sociétés financières et d’autres entreprises de toutes sortes, participer à de telles entreprises, prendre en charge leur gestion, fournir avec elles des prestations de gestion à des tiers dans le cadre d’entreprises communes et effectuer des traitements de données pour des tiers. La société peut accorder des prêts, des garanties et d’autres types de financement et de prestations de sécurité pour des sociétés du groupe et promouvoir les intérêts des sociétés du groupe. La société peut établir des bureaux et des représentations en Suisse et à l’étranger ainsi que des filiales et des succursales en Suisse. La société peut acquérir, grever et vendre des biens immobiliers en Suisse.
b. A______ a été engagé par C______ (SUISSE) par contrat de travail à durée indéterminée, signé les 15 et 17 mars 2022, avec entrée en fonction le 18 avril 2022, pour un salaire annuel de 92'000 fr. bruts. Le temps d’essai était fixé à trois mois.
c. Le 14 juillet 2022, C______ (SUISSE) a résilié le contrat de travail de A______, avec effet au 21 juillet 2022, et l’a libéré de l’obligation de travailler pendant le délai de préavis.
d. Par requête déposée au greffe de l’autorité de conciliation des prud’hommes le 17 janvier 2023, et complétée le 8 février 2023, A______ a assigné C______ en paiement de la somme totale de 29'990 fr.
Suite à l’échec de conciliation du 13 février 2023, une autorisation de procéder a été délivrée à A______.
e. Par demande simplifiée motivée déposée au greffe du Tribunal des prud’hommes le 6 mars 2023, A______ a assigné C______/C______ (SUISSE) en paiement de la somme totale de 29'990 fr., comprenant 23'000 fr. nets, à titre d’indemnité pour résiliation abusive, et 6'999 fr., à titre d’indemnité pour tort moral.
A______ a en outre sollicité des informations sur les échanges le concernant au sein de l’entreprise, conformément à la loi sur la protection des données.
A l’appui de ses conclusions, il a, en substance, allégué que son licenciement était abusif, dès lors que son poste avait été repris par un employé de la même équipe et que son droit d’être entendu n’avait pas été respecté dans la mesure où il n’avait fait l’objet d’aucun avertissement officiel durant sa période d’essai. Au surplus, le jour de son licenciement, après une période de trois mois dans la société, il n’avait pas pu saluer ses collègues et avait été, immédiatement après l’annonce de son licenciement, raccompagné à la porte de sortie par un agent de sécurité. Ce procédé constituait une atteinte à sa personnalité.
Son employeur était bien C______ dès lors qu’il était incontestable que des liens de subordination existaient entre le personnel de Zurich, C______ et le personnel de Genève, C______ (SUISSE). L’article 10 de son contrat renvoyait également au règlement du personnel de C______. De plus, il avait envoyé, en lien avec son opposition au licenciement, deux lettres recommandées à Zurich et une à Genève, en précisant que l’adresse des deux sociétés était la même. Ainsi, sa demande était recevable.
f. Par courrier recommandé du 12 avril 2023, C______ a conclu à ce que la demande soit déclarée irrecevable.
La demande était dirigée contre C______ et C______ (SUISSE) alors que l’autorisation de procéder jointe à la demande avait été délivrée dans le cadre du litige opposant A______ à C______. L’autorisation de procéder ne mentionnait aucunement C______ (SUISSE), avec laquelle le contrat de travail avait été conclu. C______ ne disposait pas de la légitimation passive. En outre, faute d’une autorisation de procéder valable délivrée entre les mêmes parties à la procédure, la demande du 6 mars 2023 devait être déclarée irrecevable.
g. Par courrier du 9 mai 2023, A______ a spontanément répondu en indiquant être de bonne foi. Sa demande n’avait pas à être rectifiée, dans la mesure où elle était argumentée, précise et détaillée.
Il contestait le défaut de légitimation passive. Il avait clairement démontré dans sa demande que le litige l’opposait au C______. Le fait d’avoir uniquement mentionné dans l’autorisation de procéder C______ au lieu de C______ (SUISSE) était une étourderie, puisqu’il était évident que le litige l’opposait à C______ (SUISSE). Selon le principe de la bonne foi, il sollicitait la rectification afin que la procédure puisse avancer.
Aucun délai ne devait lui être imposé pour rectifier sa demande, dès lors qu’elle respectait les règles et les conditions de recevabilité.
Il concluait à ce que la décision de licenciement soit annulée, à ce qu’un poste lui soit proposé, à la constatation du licenciement abusif en lien avec un conflit d’intérêts.
h. C______ a, par courrier du 23 août 2023, confirmé ses conclusions en irrecevabilité de la demande. Faute d’autorisation de procéder valable et délivrée entre les mêmes parties, la demande ne respectait pas les conditions de recevabilité de l’art. 59 CPC.
D’autre part, C______ n’avait pas la légitimation passive dès lors que A______ avait été engagé exclusivement par C______ (SUISSE), ce qui était démontré par les pièces, soit la signature de la défenderesse portée sur les documents, l’en-tête figurant sur la lettre de résiliation du contrat de l’employé et les certificats de travail qui lui avaient été remis. Les deux entités juridiques étaient distinctes.
i. Les parties ont plaidé, persistant dans leur position respective, sur les questions de recevabilité de la demande et de légitimation passive de C______, lors de l’audience du 28 août 2023, à l’issue de laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger sur ces deux questions.
D. Dans son jugement, le Tribunal, après avoir rappelé les principes régissant la validité de l’autorisation de procéder, les conditions de recevabilité d’une demande et la notion de légitimation passive, a retenu que A______ avait déposé sa requête en conciliation à l’encontre de C______ et l’autorisation de procéder, qui lui avait été délivrée suite à l’échec de la conciliation, le 14 février 2023, mentionne uniquement C______ comme partie défenderesse. Dans sa demande du 6 mars 2023, A______ avait assigné comme parties défenderesses C______, C______ (SUISSE). Il soutenait que les deux entités appartenaient à C______ et qu’il s’agissait d’une étourderie de ne pas l’avoir mentionné dans l’autorisation de procéder. Il résultait du dossier et des pièces produites que les deux sociétés étaient des entités juridiques distinctes et que le contrat de travail de A______ avait été conclu avec C______ (SUISSE) et non avec C______. Même s’il devait être considéré qu’elles appartenaient au même groupe d’entreprises, ces deux sociétés étaient des personnes morales distinctes et indépendantes. Ainsi, l’autorisation de procéder ne mentionnait pas les mêmes parties que celles actionnées par A______ dans sa demande du 6 mars 2023, de sorte que la demande ne remplissait pas les conditions de recevabilité de l’action en ce qui concernait C______ (SUISSE). La demande devait ainsi être déclarée irrecevable en tant qu’elle était dirigée contre son ancien employeur C______ (SUISSE).
Quant à C______, elle ne disposait pas de la légitimation passive, puisqu’elle n’était pas l’employeur de A______, de sorte que la demande à son encontre devait être rejetée.
1. 1.1 Le conseil de C______ a informé la Cour le 15 août 2024 de ce que les actifs et passifs de la banque avaient été repris par B______ et a joint un extrait du Registre du commerce.
1.2.1 En l’absence d’aliénation de l’objet du litige, la substitution de partie est subordonnée au consentement de la partie adverse ; les dispositions spéciales prévoyant la succession d’un tiers aux droits ou obligations des parties sont réservées (art. 83 al. 4 CPC).
La substitution de partie ex lege intervient lorsque le changement de légitimation survient de façon originaire, c’est-à-dire indépendamment de la volonté de celui qui perd la légitimation, laquelle volonté ne s’exprime pas (décès ou faillite) ou porte sur un acte qui, en lui-même, provoque la succession à titre universel, à l'instar de l'ouverture de la succession d'un plaideur (art. 560 al. 1 CC) ou d'une fusion (art. 22 de la loi fédérale sur la fusion, la scission, la transformation et le transfert de patrimoine [Loi sur la fusion, LFus; RS 221.301]). Selon l'art. 22 LFus, la fusion déploie ses effets dès son inscription au registre du commerce. À cette date, l’ensemble des actifs et passifs de la société transférante sont transférés de par la loi à la société reprenante.
Sous l'angle procédural, la fusion a pour conséquence la substitution de par le droit fédéral. Dans ce cas, la succession légale de l'ayant droit reprenant dans la position de partie au procès civil de l'ayant droit cédant intervient automatiquement (arrêts du Tribunal fédéral 4A_610/2014 du 30 mars 2015 consid. 4.2.2; 5A_256/2016 du 9 juin 2017 consid. 3.2 et 3.6).
1.2.2 En l'espèce, selon publication à la Feuille officielle suisse du commerce du ______ 2024, B______ a repris, suite à une fusion, l'intégralité des actifs et des passifs de C______, laquelle a été radiée du registre du commerce selon publication du même jour.
Même si la fusion a eu lieu après que la cause a été gardée à juger par la Cour, la substitution intervient ex lege, de sorte que B______ se substituera à C______ dans la cadre de la présente procédure.
2. 2.1 L'appel a été interjeté contre une décision finale (308 al. 1 let. a CPC), dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), auprès de l'autorité compétente (art. 124 let. a LOJ), dans le délai utile de trente jours (art. 142 al. 1 et 3, 143 al. 1, 145 al. 1 let. c et 311 CPC). Il est dès lors recevable de ce point de vue.
Sont également recevables la réponse, ainsi que les réplique et duplique respectives, pour avoir été déposées dans les délais légaux, respectivement impartis à cet effet (art. 312 al. 2, 316 al. 1 CPC).
2.2 La valeur litigieuse étant inférieure à 30'000 fr. et le litige portant sur un contrat de travail, la cause est soumise à la procédure simplifiée (art. 243 al. 1 CPC) et à la maxime inquisitoire sociale (art. 247 al. 2 let. b CPC).
La maxime inquisitoire ne dispense cependant pas les parties de collaborer activement à l'établissement des faits. Il leur incombe de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles (arrêts du Tribunal fédéral 5A_925/2016 du 5 septembre 2017 consid. 4.1; 5A_138/2015 du 1er avril 2015, consid. 3.1). Cette maxime ne sert pas non plus à suppléer les carences d'une partie négligente (Dietschy, Droit du travail et procédure civile, 2023, p. 99).
2.3 La Cour examine, en principe, d'office la recevabilité des faits et moyens de preuve nouveaux ainsi que des conclusions nouvelles en appel (Reetz/Hilber,
Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2ème éd., 2013, n. 26 ad art. 317 CPC).
En l’état, l’appelant a formé des conclusions nouvelles en appel ; il a sollicité « la rectification des parties dans le cadre du litige opposant A______ à C______ », sans autre précision.
Il s’agit-là d’une conclusion nouvelle, non fondée sur des faits nouveaux, et partant, irrecevable en appel.
2.4 La Cour revoit le fond du litige avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC) et applique le droit d'office (art. 57 CPC).
Conformément à l'art. 311 al. 1 CPC, elle le fait cependant uniquement sur les points du jugement que l'appelante estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante – et, partant, recevable –, pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_290/2014 du 1er septembre 2014 consid. 5). Hormis les cas de vices manifestes, elle doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.3).
3. L’intimée conclut à l’irrecevabilité de l’appel, celui-ci ne répondant pas aux exigences de l’art. 311 CPC.
3.1 Selon la jurisprudence, pour satisfaire à son obligation de motivation de l'appel prévue par l'art. 311 al. 1 CPC, l'appelant doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1). Même si l'instance d'appel applique le droit d'office (art. 57 CPC), le procès se présente différemment en seconde instance, vu la décision déjà rendue. L'appelant doit donc tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Il ne saurait se borner simplement à reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. Si ces conditions ne sont pas remplies, l'appel est irrecevable. Tel est notamment le cas lorsque la motivation de l'appel est identique aux moyens qui avaient déjà été présentés en première instance, avant la reddition de la décision attaquée, ou si elle ne contient que des critiques toutes générales de la décision attaquée ou encore si elle ne fait que renvoyer aux moyens soulevés en première instance (arrêts du Tribunal fédéral 5A_356/2020 consid. 3.2 ; 4A_218/2017 du 14 juillet 2017 consid. 3.1.2, reproduit in SJ 2018 I p. 21; 4A_376/2016 du 2 décembre 2016 consid. 3.2; 4A_97/2014 du 26 juin 2014 consid. 3.3; 5A_438/2012 du 27 août 2012 consid. 2.2).
L’acte d’appel doit mentionner les parties à la procédure (CR CPC-Jeandin, 2019, ad art. 311 CPC n 2a).
3.2 En l’espèce, l’acte d’appel est dirigé contre C______ (SUISSE), alors que le jugement a été rendu entre l’appelant et C______, de sorte que, pour ce premier motif déjà, l’appel, qui est dirigé contre une partie que l’appelant savait ne pas être partie à la procédure de première instance (puisque c’était-là l’un des points débattus), devrait être déclaré irrecevable. En effet, l’appelant a sciemment dirigé son acte d’appel contre son employeur, qu’il n’avait pas assigné valablement devant les premiers juges, en faisant purement et simplement disparaître de la procédure la partie qui avait été valablement assignée, mais qui ne dispose pas de la légitimation passive, aux termes de la décision rendue, de sorte qu’il ne peut être considéré qu’il s’agit d’une erreur de sa part mais bien d’une volonté de l’appelant, qui persiste à soutenir que les deux entités susmentionnées seraient les mêmes. Le procédé qu’il utilise ne permet pas de corriger son erreur de base.
Au surplus, l’appelant s’est contenté de reproduire, pour l’essentiel, dans son acte d’appel le contenu de sa demande, sans porter de critique sur le raisonnement tenu par les premiers juges. Il n’explique en particulier pas que ces derniers auraient fait une mauvaise application du droit en considérant que sa demande serait irrecevable à l’encontre de C______ (SUISSE), dès lors que l’autorisation de poursuivre la procédure qui lui a été délivrée le 13 février 2023 ne mentionnait que C______, seule entité qu’il a assignée en conciliation, ni qu’ils auraient commis une erreur en considérant que C______ ne disposerait pas de la légitimation passive. Il veut voir imposer sa propre vision des faits, à savoir que ces deux entités sont les mêmes, alors qu’il s’agit d’entités différentes inscrites au Registre du commerce.
L’appelant ne désigne pas quel passage de la décision il critique, ni sur quel élément ou quelle pièce du dossier, il se fonderait pour retenir une solution autre que celle qui a été retenue. Il ne mentionne en particulier pas en quoi le jugement attaqué procèderait d’une constatation erronée des faits ou d’une violation du droit. En se contentant de reprendre sa demande, il ne s'en est pas pris au jugement de première instance d'une manière propre à établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée était entachée d'erreurs. A cet égard, il aurait fallu qu'il reprenne la démarche du premier juge et mette le doigt sur les failles de son raisonnement, ce qu’il n’a pas fait.
L’appel doit ainsi être déclaré irrecevable.
4. A titre subsidiaire, même si l’appel devait être admis, il aurait dû être rejeté, pour les raisons qui suivent.
4.1 Le recourant semble soutenir dans son acte d’appel que l’autorité de conciliation aurait dû proposer de rectifier la qualité des parties à la procédure, voire que l’autorité de jugement aurait dû le faire d’office.
4.1.1 La désignation inexacte d'une partie – que ce soit de son nom ou de son siège – ne vise que l'inexactitude purement formelle, qui affecte sa capacité d'être partie. Même si elle correspond à un tiers qui existe réellement (ATF 131 I 57 consid. 2.2 p. 63), une désignation erronée peut être rectifiée lorsque ne subsiste dans l'esprit du juge et des parties aucun doute raisonnable sur l'identité de la partie, notamment lorsque l'identité résulte de l'objet du litige (en procédure civile, cf. ATF 142 III 782 consid. 3.2.1 p. 787 et les arrêts cités; arrêts 4A_373/2018 du 13 mars 2019 consid. 2.2.1; 4A_635/2016 du 22 janvier 2018 consid. 3.1.1 non publié in ATF 144 III 93; en matière de poursuite pour dettes, cf. ATF 120 III 11 consid. 1b; 114 III 62 consid. 1a). Cela présuppose évidemment que la requête de conciliation, respectivement la demande, aient été effectivement communiquées à la partie qui a la qualité pour défendre, et non à un tiers, en d'autres termes qu'elle en ait eu connaissance, à défaut de quoi il n'est pas possible de lui imputer qu'elle aurait compris ou dû comprendre, selon les règles de la bonne foi, que l'action a été ouverte contre elle (ATF 142 III 782 consid. 3.2.1 p. 787 et l'arrêt cité).
Sous l'empire du CPC, il faut encore, pour que la désignation inexacte soit susceptible d'être rectifiée dans la procédure pendante (par exemple devant le tribunal saisi de la demande), que la partie désignée de manière inexacte ait comparu personnellement à l'audience de conciliation (art. 204 CPC), à défaut de quoi l'autorisation de procéder délivrée n'est pas valable et la demande déposée doit être déclarée irrecevable, une condition de recevabilité faisant défaut (ATF 140 III 79 consid. 5 p. 74; 139 III 273 consid. 2.1).
Lorsqu'il n'est plus possible de rectifier l'inexactitude dans la procédure en cours, il ne restera plus au demandeur que la possibilité d'introduire une nouvelle action (ATF 142 III 782 consid. 3.2.1 p. 787).
4.1.2 En premier lieu, en cas d’échec de la tentative de conciliation, le rôle du juge conciliateur se limite à consigner l’échec au procès-verbal et à délivrer l’autorisation de procéder au demandeur (art. 209 CPC). Il ne lui appartient ainsi pas de modifier la qualité des parties au procès, puisque la désignation exacte des parties est un élément de recevabilité de l’action. L’intimée a, quant à elle, soulevé son défaut de légitimation passive immédiatement – même déjà au stade de la conciliation, selon ce que soutient l’appelant –, ce qui aurait dû amener ce dernier à déposer une nouvelle demande contre son employeur, plutôt que d’insister auprès de la mauvaise entité, en modifiant (en toute connaissance de cause) son acte introductif, en y rajoutant son employeur. Il ne peut soutenir qu’il
aurait commis une "erreur" ou une "étourderie", puisqu’il ressort de la procédure qu’il a au contraire agit sciemment.
En second lieu, la requête en conciliation était dirigée contre C______, tandis que la requête introductive était dirigée contre C______ et C______ (SUISSE), de sorte qu'il régnait une confusion qui faisait obstacle à une rectification d'une erreur qui n'avait rien de purement formel, ce d'autant que l'appelant n'a pas sollicité formellement une rectification devant le Tribunal et que celui-ci n'a pas d'obligation à procéder à une rectification d'office, contrairement à ce que soutient l'appelant. L'insistance de ce dernier, tout au long de la procédure, à considérer que les sociétés C______ et C______ (SUISSE) participant au même groupe, il serait indifférent qu’il assigne l’une ou l’autre, en témoigne. Cette explication est par ailleurs vaine, dès lors que ces sociétés étant inscrites au Registre du commerce de manière distincte, elles constituent des entités juridiques distinctes. Ainsi, au vu de l'existence du doute persistant quant à la société que l'appelant entendait réellement attraire en justice, les conditions de la rectification de la désignation de la partie défenderesse n'étaient pas remplies, cette rectification n'ayant, quoi qu'il en soit pas été sollicitée par l'appelant et les premiers juges n'ayant pas à se saisir d'une question qui ne leur a pas été soumise.
4.1.3 Les documents en possession de l’appelant (contrat de travail, entité désignée sous sa propre signature électronique, lettre de résiliation, lettre le libérant de son obligation de travailler, certificats de travail, etc.) ne prêtaient pas à confusion, puisque tous indiquent clairement comme employeur de l’appelant C______ (SUISSE) et non C______. Le fait que le contrat de travail du recourant renvoie aux Règlement du personnel de C______ n’y change rien. C’est ainsi à raison que le Tribunal a retenu que l’appelant avait été exclusivement engagé par C______ (SUISSE) et non par C______. Aucune constatation inexacte des faits ne saurait être retenue.
4.1.4 Pour le surplus, la Cour ne discerne pas de violation du droit par le Tribunal, sur la base des faits retenus.
4.1.4.1 Le Tribunal n’entre, en effet, en matière que sur les demandes et les requêtes qui satisfont aux conditions de recevabilité de l’action (art. 59 al. 1 CPC). Le fait de disposer d’une autorisation de procéder valable figure parmi ces conditions, lorsque la procédure au fond doit être précédée d’une tentative de conciliation.
Pour être valable, l'autorisation de procéder doit porter sur le même objets et les mêmes parties principales (art. 209 CPC, arrêt du Tribunal fédéral 4A_560/2015 consid. 4.1.3 notamment).
En l'espèce, l'appelant n'a pas assigné en conciliation C______ (SUISSE), laquelle n'a pas comparu à l'audience de conciliation, de sorte que l'autorisation de procéder qu'il a obtenu n'était valable qu'à l'encontre de C______, mais non de C______ (SUISSE), de sorte que c'est à raison que le Tribunal a déclaré irrecevable la demande introduite contre cette seconde société.
4.1.4.2 La légitimation passive est une condition matérielle de la prétention litigieuse; elle se détermine selon le droit de fond et son défaut conduit au rejet de l'action (ATF 125 III 82 consid. 1a) et non pas à l'irrecevabilité de celle-ci (HOHL, Procédure civile, tome I, Berne 2001, p. 100 n. 447).
Selon l'art. 125 let. a CPC, aux fins de simplifier la procédure le tribunal peut notamment limiter la procédure à certaines questions ou à certaines conclusions.
La limitation de la procédure à des questions ou conclusions déterminées recouvre en fait deux hypothèses : celle où il s'agit de trancher une question préjudicielle qui peut permettre de mettre un terme au procès (p. ex. la prescription ou la légitimation), qui débouchera alors sur une décision finale (art. 236 CPC) ou incidente (art. 237 CPC). Cela vise aussi les questions de recevabilité, telles que la compétence, la capacité d'être partie et les autres conditions mentionnées à l'art. 59 CPC (Haldy, in Commentaire romand CPC, 2ème éd. 2019, n. 5 ad art. 125 CPC).
En l’espèce, c’est à raison que le Tribunal a limité, concernant C______, la procédure à la question de la légitimation passive de cette dernière, en gardant à juger la cause sur cette question de fond, laquelle était susceptible de mettre fin au litige.
C’est également à raison qu’il a rejeté la requête dirigée contre cette entité, celle-ci n’étant pas l’employeur de l’appelant, comme vu supra, et ne disposant par conséquent pas de la légitimation passive.
Ainsi, si l'appel avait été déclaré recevable, il aurait dû être rejeté pour l'ensemble des motifs qui précèdent.
5. La valeur litigieuse étant inférieure à 50'000 fr., la procédure est gratuite (art. 71 RTFMC a contrario).
Il n'est pas alloué de dépens (art. 22 al. 2 LaCC).
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :
Déclare irrecevable l'appel interjeté par A______ contre le jugement JTPH/353/2023 rendu le 26 octobre 2023 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/619/2023.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Dit que la procédure est gratuite et qu'il n'est pas alloué de dépens.
Siégeant :
Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Marie-Noëlle FAVARGER SCHMIDT, Monsieur Thierry ZEHNDER, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.
Indication des voies de recours et valeur litigieuse :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.