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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/25408/2021

CAPH/25/2024 du 19.03.2024 sur JTPH/122/2023 ( OO ) , PARTIELMNT CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/25408/2021 CAPH/25/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU MARDI 19 MARS 2024

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ (France), appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 21 avril 2023 (JTPH/122/2023) et intimée, représentée par Me Christian BRUCHEZ, avocat, WAEBER AVOCATS, rue Verdaine 12, case postale 3647, 1211 Genève 3,

et

B______ SA, sise ______ [GE], intimée et appelante, représentée par Me Andreas DEKANY, avocat, SWDS Avocats, rue du Conseil-Général 4, case postale 412, 1211 Genève 4.

 

 


EN FAIT

A.           Par jugement JPTH/122/2023 du 21 avril 2023, reçu par les parties le 24 avril 2023, le Tribunal des prud'hommes (ci-après : le Tribunal) a déclaré recevable la demande formée le 17 mai 2022 par A______ contre B______ SA (ch. 1 du dispositif), déclaré recevable l'amplification de la demande formée le 17 octobre 2022 par A______ (ch. 2), condamné B______ SA à verser à A______ les sommes brutes de 6'481 fr. 65, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er octobre 2021 (ch. 3), 6'440 fr. 50, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er novembre 2021 (ch. 4), 1'854 fr. 85, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er décembre 2021 (ch. 5) et 2'050 fr. 10, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er janvier 2022 (ch. 6), invité la partie qui en avait la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 7), condamné B______ SA à verser à A______ la somme nette de 5'000 fr., avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 23 décembre 2021 (ch. 8), condamné B______ SA à remettre à A______ un certificat de travail complet, conformément au considérant 6 du jugement (ch. 9), dit qu'il n'était pas perçu de frais ni alloué de dépens (ch. 10) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 11).

B.            a. Par acte déposé le 24 mai 2023 au greffe de la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a formé appel de ce jugement dont elle a sollicité l'annulation du chiffre 11 du dispositif avec suite de frais judiciaires.

Cela fait, elle a conclu, principalement, à ce que la Cour condamne B______ SA à lui verser les sommes brutes de 3'261 fr. 75 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 août 2021, 7'778 fr. avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 30 septembre 2021, 1'854 fr. 45 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 janvier 2022, 1'854 fr. 85 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 28 février 2022, 1'854 fr. 85 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 mars 2022, 1'854 fr. 85 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 30 avril 2022, 1'854 fr. 85 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 mai 2022, 1'854 fr. 85 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 30 juin 2022, 11'129 fr. 10 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 15 octobre 2022 (date moyenne), 1'854 fr. 45 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 décembre 2022 et 9'274 fr. 25 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er avril 2023 (date moyenne). Elle a conclu à la confirmation du jugement entrepris pour le surplus.

Subsidiairement, elle a conclu à ce que la Cour condamne B______ SA à lui verser la somme nette de 50'557 fr. avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 30 juin 2021. Plus subsidiairement, elle a conclu au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision au sens des considérants.

b. Par acte déposé le 23 mai 2023 au greffe de la Cour, B______ SA a également formé appel de ce jugement, dont elle a sollicité l'annulation des chiffres 3 à 9 du dispositif, avec suite de frais judiciaires et dépens.

Cela fait, elle a conclu à ce que la Cour déboute A______ de toutes ses conclusions.

c. Dans leurs réponses respectives, les parties ont chacune conclu au déboutement de leur adverse partie.

d. Elles ont répliqué, respectivement dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

e. Elles ont été informées par plis du greffe de la Cour du 6 novembre 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les éléments pertinents suivants résultent de la procédure :

a. B______ SA (ci-après : B______ SA ou l'employeuse), dont le siège est à Genève, est une société de droit suisse dont le but est la représentation patronale, la gestion et l'administration d'associations professionnelles, de leurs caisses de compensation et de leurs fondations, incluant, notamment, secrétariat, organisation de réunions, conférences et assemblées, tenue de comptabilité et conseils aux membres des associations.

A teneur du registre du commerce, C______ était le directeur de la société entre le 14 août 2019 et le 22 juin 2020.

Depuis le 16 mars 2021, D______ et E______ sont les directeurs généraux de la société, avec signature collective à deux. Avant cette date, ils ont assuré la direction de la société ad interim.

b. A partir du 21 août 2017, A______ (ci-après également : l'employée) a été engagée par B______ SA en qualité d'assistante administrative à 100%, par contrat de travail à durée indéterminée signé le 28 juillet 2017, pour un salaire mensuel brut de 7'300 fr. versé treize fois l'an.

En 2021, le salaire mensuel brut de A______ s'élevait à 7'778 fr., versé treize fois l'an.

Selon le "guide du collaborateur" annexé au contrat de travail, toute résiliation du contrat doit être notifiée par écrit entre les parties.

c. Le 4 octobre 2020, A______ a été admise aux services des urgences de l'Hôpital de F______. Opérée d'urgence le jour même, elle a ensuite dû se soumettre à divers examens médicaux.

Entendu comme témoin par le Tribunal, le Dr G______, chirurgien, a déclaré que A______ souffrait d'une occlusion intestinale et qu'il l'avait opérée sans attendre. L'occlusion était provoquée par un retroussement intestinal lié à une tumeur. A la palpation d'une partie de l'intestin grêle, il avait découvert un nodule, raison pour laquelle il avait effectué une ablation de 70 cm de cet organe, lequel en compte entre 3.5 et 5 mètres. L'intervention n'était donc pas bénigne et une hospitalisation d'une semaine à dix jours était prévue. Pour une opération de ce type, il fallait "compter un bon mois" pour se rétablir physiquement, étant précisé qu'une rechute était possible dans le contexte d'une maladie oncologique. Suite à l'intervention du 4 octobre 2020, A______ avait été suivie par la Dre H______, spécialiste en médecine interne générale et en oncologie.

d. A______ a tenu B______ SA informée de l'évolution de son état de santé par courriels des 16 et 19 octobre 2020. Elle a précisé qu'elle était très fatiguée et que "les résultats concernant les tumeurs [étaient] mitigés", de sorte qu'elle allait devoir consulter un oncologue et faire d'autres examens.

e. Durant les mois suivants, A______ a fait l'objet de plusieurs incapacités de travail pour cause de maladie, en raison de l'affection découverte le 4 octobre 2020. Selon les différents certificats médicaux versés au dossier, elle a ainsi été en incapacité de travail à 100% du 5 au 30 octobre 2020, les 5, 9 et 11 novembre 2020, ainsi que du 17 novembre 2020 au 24 février 2021.

Devant le Tribunal, A______ a déclaré - sans être contredite - qu'elle avait pour habitude d'envoyer ses certificats médicaux immédiatement par courriel à son employeuse.

La période d'incapacité de travail entre le 25 novembre 2020 et le 24 décembre 2020 est contestée par B______ SA (cf. infra let. l).

f. Le 24 novembre 2020 à 18h56, A______ a adressé le courrier suivant à B______ SA : "Je reviens de l'hôpital il y a peu de temps et vous donne quelques nouvelles. Pour l'instant, des tumeurs ont été détectées à deux endroits mais le traitement demeure incertain. C'est un type de cancer rare et les spécialistes doivent se mettre d'accord pour le traitement. J'attends encore des résultats d'analyses. J'ai un arrêt jusqu'à vendredi [27 novembre 2020] y compris (…). Il me reste quelques examens et je devrais pouvoir recommencer à travailler lundi [30 novembre 2020] à 100%".

A______ a déclaré qu'elle avait reçu les résultats de ses analyses en date du 23 novembre 2020, lesquelles indiquaient qu'elle souffrait d'un cancer, ce qui lui avait été expliqué le lendemain par la Dre H______.

g. Le 30 novembre 2020, A______ s'est rendue à son travail. Durant la matinée, elle a envoyé trois courriels à D______ et E______, le premier relatif à une facture, le deuxième concernant des cartes de Noël et des propositions de texte, et le troisième portant sur son absence du 20 novembre 2020 (dans ce courriel, elle précisait que cette absence était due à son arrêt maladie et ne devait donc pas être comptabilisée comme un jour de vacances).

A______ a déclaré qu'elle était retournée au travail le 30 novembre 2020 car elle avait "besoin de [se] raccrocher à une autre réalité", ce qui correspondait peut-être à un déni de sa maladie; il lui était difficile de préciser ses sentiments. Elle était très perturbée pendant cette période.

Le témoin G______ a confirmé que le fait de se voir diagnostiquer un cancer pouvait avoir des répercussions sur l'état psychique du patient concerné.

h. Dans un courriel envoyé le 30 novembre 2020 à 10h41, D______ a demandé à A______ de lui remettre son certificat pour la semaine précédente [i.e. du 23 novembre au 27 novembre 2020].

i. Par courriel envoyé le même jour à 10h44, A______ a répondu à D______ qu'elle avait dû oublier son dernier certificat médical à l'hôpital et qu'elle en redemanderait un à son médecin.

j. Toujours le 30 novembre 2020, à 14h, A______ a été convoquée par D______ et E______ qui lui ont signifié oralement son licenciement avec effet au 31 janvier 2021. Ils l'ont par ailleurs informée qu'elle était libérée de son obligation de travailler avec effet immédiat.

Devant le Tribunal, A______ a déclaré que le 30 novembre 2020, elle avait été convoquée par ses supérieurs qui lui avaient présenté sa lettre de licenciement. Ils n'avaient fait preuve d'aucune humanité et ne l'avaient même pas questionnée sur son état de santé, alors qu'elle leur avait dit souffrir d'un cancer. Elle avait explosé de colère et de tristesse et avait refusé de signer cette lettre. D______ et E______ lui avaient demandé de quitter les lieux, ce qu'elle avait dû faire, accompagnée d'un informaticien qui l'avait suivie à son poste de travail afin qu'elle puisse récupérer ses affaires et partir, cela devant ses collègues. Elle trouvait cette situation terriblement injuste.

De son côté, B______ SA - représentée par D______ et E______ - a déclaré que le licenciement de A______ était intervenu car le poste de cette dernière n'avait "plus de sens", dans la mesure où le directeur qu'elle secondait avait quitté l'entreprise. En outre, D______ et E______ géraient leur travail de manière indépendante et n'avaient pas de tâches à lui proposer. Le poste de A______ n'avait d'ailleurs pas été repourvu et seule une de ses tâches avait été confiée à une de ses collègues. B______ SA savait que l'état de santé de l'employée n'était pas bon.

k. Par courrier recommandé du 1er décembre 2020, B______ SA a confirmé à A______ son licenciement avec effet au 31 janvier 2021 ainsi que la libération de son obligation de travailler dès le 30 novembre 2020.

l. Le 1er décembre 2020, A______ a transmis à son employeuse un certificat médical daté du 24 novembre 2020, établi par la Dre H______, qui attestait d'une incapacité de travail de 100% du 25 novembre au 24 décembre 2020 (étant précisé que cette praticienne a également établi les certificats médicaux attestant d'une incapacité de travail de 100% du 17 au 24 novembre 2020 et du 25 décembre 2020 au 24 février 2021; cf. let. e supra).

A______ a déclaré qu'elle était très perturbée à cette période-là et qu'elle n'avait pas retrouvé son certificat médical du 24 novembre 2020. Elle n'y avait pas attaché une trop grande importance et s'était dit qu'elle pourrait cas échéant en solliciter un double auprès de son médecin. Le 30 novembre 2020 au soir, elle était sous le choc et incapable d'agir. Ce n'était que le lendemain, soit le 1er décembre 2020, qu'elle avait fouillé dans ses affaires et retrouvé son certificat médical qu'elle avait aussitôt envoyé à l'employeuse.

B______ SA - représentée par D______ et E______ - a déclaré que, lors de l'entretien du 30 novembre 2020, A______ n'avait pas fait mention d'un certificat médical, ni de sa maladie. Il y avait eu plusieurs échanges de courriels dans la matinée, ce qui indiquait que l'employée avait repris son activité. B______ SA avait reçu le certificat médical du 24 novembre 2020 en date du 1er décembre 2020. L'employeuse n'avait pas contesté la validité de ce certificat médical, étant précisé qu'elle n'avait "pas la capacité de déterminer si un certificat médical était un faux".

Entendue comme témoin par le Tribunal, la Dre H______ a déclaré avoir rencontré A______ pour la première fois en novembre 2020. Son dossier médical lui avait été transmis par le chirurgien qui l'avait opérée le 4 octobre 2020. Lors de la première consultation, elle avait établi l'historique de la maladie et proposé à la patiente différentes options de traitement, étant donné que l'opération susvisée n'avait pas permis d'enlever tous les nodules cancéreux. A______ souffrait encore de douleurs abdominales et le pronostic allait donc dans le sens d'une nouvelle intervention chirurgicale. La patiente était fatiguée physiquement et n'avait pas récupéré de sa première opération. A______ se trouvait dans un état d'anxiété, ce qui était courant lorsqu'un patient découvrait sa maladie tumorale et que des précisions étaient données quant à son évolution. Elle avait pleuré et était triste, pensant à une mort possible. La Dre H______ avait vu A______ le 24 novembre 2020 et établi un certificat médical à cette date. Dans sa pratique, elle ne remettait jamais de certificat médical allant au-delà d'une période d'un mois. Elle fixait un nouveau rendez-vous à l'issue de ce délai pour déterminer l'état du patient. Elle n'établissait pas de certificat médical à la suite d'un simple échange téléphonique. S'agissant de A______, des investigations étaient en cours, ce qui impliquait d'organiser des rendez-vous plus rapprochés. La précitée n'était pas apte à travailler dès le 24 novembre 2020; elle éprouvait encore des douleurs et se trouvait dans un processus d'investigation qui devait déterminer la gravité de son cas; les conclusions de ce processus avaient d'ailleurs abouti à une nouvelle opération qui avait été pratiquée en mars-avril 2021. A______ avait indiqué à la Dre H______ qu'elle était "triste de ne pas pouvoir travailler et ne désirait pas abandonner ses collègues pour sa charge de travail".

Egalement entendu en qualité de témoin, le Pr I______, médecin chirurgien spécialisé dans les domaines viscéraux, a déclaré avoir rencontré A______ en 2021, à la suite d'une opération qu'elle avait subie en octobre 2020. Malgré cette première opération, des tumeurs neuroendocrines avaient formé une récidive ganglionnaire localisée qui devait être traitée. Il avait ainsi opéré A______ en avril 2021, à la suite de quoi celle-ci avait été hospitalisée. Un mois avant cette intervention, A______ avait fait plusieurs examens par scanner. Lorsqu'il l'avait revue deux à trois mois après l'opération, l'état de santé de la patiente était bon, avec une certaine fatigue résiduelle. Il ne pouvait toutefois pas indiquer si son état lui permettait de reprendre son travail.

m. Le 18 février 2021, A______ a consulté le Dr J______, psychiatre et psychothérapeute, qui l'a déclarée en incapacité de travail à 100% du 19 février au 18 août 2021.

L'employée a communiqué cette nouvelle incapacité de travail à l'employeuse par courriel du 20 février 2021, certificat médical à l'appui.

n. Par courrier recommandé du 27 mai 2021 ayant pour objet la "Fin des rapports de travail", B______ SA - sous la plume de D______ et E______ - a confirmé à A______ que son contrat de travail avait été résilié le 30 novembre 2020 pour le 31 janvier 2021. Toutefois, au vu de ses différentes incapacités de travail et de la nouvelle période de protection, les rapports de travail prendraient fin avec effet au 31 mai 2021.

o. Par courrier recommandé du 4 juin 2021, A______ a répondu à B______ SA que le congé qui lui avait été signifié le 30 novembre 2020 était nul dans la mesure où elle se trouvait en incapacité de travail. Les rapports de travail étaient toujours en cours. Si son intention était d'y mettre fin, B______ SA devait lui signifier son congé à l'issue du deuxième délai de protection, soit après le 19 mai 2021.

p. Par lettre de son conseil du 24 juin 2021 adressé à A______, B______ SA a rétorqué que la résiliation du 30 novembre 2020 était bel et bien valable dans la mesure où l'employée avait ce jour-là une capacité de travail pleine et entière. Compte tenu de ses différentes incapacités de travail et des différentes périodes de protection, le délai de congé arriverait à son terme le 30 juin 2021.

q. Par lettre de son conseil du 28 juin 2021, A______ a réaffirmé que le congé était nul. En outre, s'il avait été valable, il aurait été abusif. A toutes fins utiles, elle faisait opposition à ce licenciement.

r. Par courriers des 2, 15 et 28 juillet 2021, B______ SA et A______ ont maintenu leurs positions respectives.

s. Le 2 juillet 2021, B______ SA a établi un certificat de travail en faveur de A______.

t. Le 12 juillet 2021, le Dr J______ a prescrit du Temesta à A______.

u. Les incapacités de travail de l'employée du 4 au 30 octobre 2020, du 5 novembre 2020 ainsi que du 17 novembre 2020 au 18 août 2021 ont été prises en charge à 100% par K______, assurance perte de gain maladie de B______ SA.

v. Par pli du 3 septembre 2021, anticipé par voie électronique, A______ a informé B______ SA qu'elle était désormais apte à travailler, son arrêt de travail ayant pris fin le 18 août 2021, et qu'elle était à sa disposition pour reprendre son activité.

w. A compter du 25 octobre 2021, A______ a retrouvé un emploi à 80% auprès d'une autre entreprise. Elle a perçu à ce titre un salaire mensuel brut de 1'337 fr. 50 en octobre 2021, de 5'923 fr. 15 en novembre 2021 et de 7'021 fr. 80 (dont 1'098 fr. 65 de treizième salaire) en décembre 2021. Depuis le mois de janvier 2022, son salaire mensuel brut est de 5'923 fr. 55.

D.           a.a Par demande déposée en conciliation le 7 janvier 2022, déclarée non conciliée le 3 février 2022, introduite devant le Tribunal le 17 mai 2022 et amplifiée le 17 octobre 2022, A______ a assigné B______ SA – principalement et en dernier lieu, sur les points encore litigieux en appel – en paiement d'une somme totale de 59'126 fr. 10. Elle a également conclu à la remise d'un certificat de travail complet, reprenant la teneur de celui établi le 2 juillet 2021 sous réserve de quelques modifications. La somme susmentionnée se décompose comme suit :

-          3'261 fr. 75 bruts (7'778 fr. / 31 jours x 13 jours), à titre de salaire pour la période du 19 au 31 août 2021, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 août 2021,

-          7'778 fr. bruts, à titre de salaire pour le mois de septembre 2021, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 30 septembre 2021,

-          6'440 fr. 50 bruts (7'778 fr. - 1'337 fr. 50), à titre de salaire pour le mois d'octobre 2021, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 octobre 2021,

-          1'854 fr. 85 bruts (7'778 fr. - 5'923 fr. 15), à titre de salaire pour le mois de novembre 2021, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 30 novembre 2021,

-          1'404 fr. 10 bruts (7'778 fr. + [7'778 fr. x 8.33%] - 7'021 fr. 80), à titre de salaire pour le mois de décembre 2021, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 décembre 2021,

-          1'854 fr. 45 bruts, à titre de salaire pour le mois de janvier 2022, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 janvier 2022,

-          1'854 fr. 85 bruts, à titre de salaire pour le mois de février 2022, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 28 février 2022,

-          1'854 fr. 85 bruts, à titre de salaire pour le mois de mars 2022, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 mars 2022,

-          1'854 fr. 85 bruts, à titre de salaire pour le mois d'avril 2022, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 30 avril 2022,

-          1'854 fr. 85 bruts, à titre de salaire pour le mois de mai 2022, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 mai 2022,

-          1'854 fr. 85 bruts, à titre de salaire pour le mois de juin 2022, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 30 juin 2022,

-          11'129 fr. 10 bruts (1'854 fr. 85 x 6 mois), à titre de salaire pour les mois de juillet à décembre 2022, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 15 octobre 2022,

-          1'854 fr. 85 bruts, à titre de treizième salaire pour l'année 2022, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 31 décembre 2022,

-          9'274 fr. 25 bruts (1'854 fr. 85 x 5 mois), à titre de salaire pour les mois de janvier à mai 2023, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er avril 2023,

-          5'000 fr. nets, à titre d'indemnité pour tort moral, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 23 décembre 2021.

Subsidiairement, elle a conclu à la condamnation de B______ SA au paiement d'un montant net de 50'557 fr. ([7'778 fr. x 13 / 12] x 6), à titre d'indemnité pour licenciement abusif, avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 30 juin 2021.

a.b A l'appui de ses conclusions, A______ a allégué qu'elle travaillait en tant qu'assistante du secrétaire général et du directeur général, C______, jusqu'au départ de ce dernier, lequel avait été licencié par B______ SA le 23 avril 2020 avec effet au 29 avril 2020. Il lui avait néanmoins été annoncé qu'elle pourrait maintenir son poste malgré le départ de C______. Au départ de ce dernier, elle avait été mise à l'écart, notamment par la nouvelle directrice.

Le 4 octobre 2020, une "intussusception grêle sur tumeur" avait été diagnostiquée et elle avait été opérée en urgence par le Dr G______. Ce dernier avait procédé à une invagination de l'intestin grêle et à l'ablation d'environ 70 cm d'intestin nécrosé. A______ avait ensuite été hospitalisée pendant huit jours. Elle avait rencontré la Dre H______ le 5 novembre 2020. Après son opération, elle avait effectué plusieurs examens médicaux et rencontré plusieurs professionnels de la santé.

Bouleversée par les nouvelles sur son état de santé, elle s'était malgré tout rendue au bureau le 30 novembre 2020. Elle était anxieuse du retard pris dans son travail et désirait rattraper le retard accumulé, cela malgré le fait qu'elle était en incapacité de travailler et peu à même d'apprécier ses capacités. A 14h le même jour, elle avait été convoquée et licenciée oralement avec effet au 31 janvier 2021. Le motif avancé pour justifier son licenciement était la réorganisation de B______ SA, ce qu'elle avait contesté. Sous le choc, elle avait rappelé qu'elle était atteinte dans sa santé et avait refusé de contresigner la lettre de licenciement. L'assurance perte de gain de l'employeuse avait pris en charge son incapacité de travail, en particulier la journée du 30 novembre 2020, et elle n'avait pas demandé le remboursement de l'indemnité journalière accordée ce jour-là.

Lorsque son incapacité de travail avait été prolongée par son médecin, allant d'abord du 25 novembre au 24 décembre 2020, puis du 25 décembre 2020 au 24 janvier 2021, B______ SA n'avait pas accusé réception de ces certificats médicaux, ne les avait pas remis en cause et ne lui avait pas demandé de consulter le médecin-conseil de l'entreprise.

Le licenciement du 30 novembre 2020 était donc nul. B______ SA n'ayant jamais renouvelé son licenciement, les rapports de travail étaient toujours en cours. Elle demeurait employée par B______ SA tout en étant libérée de son obligation de travailler. Afin de réduire son dommage, elle avait provisoirement trouvé un emploi chez un autre employeur depuis le 25 octobre 2021 (emploi qu'elle occupait toujours au 17 octobre 2022, date à laquelle elle a amplifié sa demande).

A la suite de son licenciement et de ses problèmes de santé, elle avait régulièrement consulté un psychiatre et suivi un traitement dès le début de l'année 2021. Elle avait suivi divers traitements et fait plusieurs examens après avoir été licenciée, en plus d'une seconde opération intervenue le 23 avril 2021 visant à retirer des métastases. Elle était toujours suivie médicalement.

b.a Dans sa réponse, B______ SA a conclu au déboutement de A______ de ses conclusions, sous suite de frais et dépens.

b.b Elle a notamment allégué que, le 23 octobre 2020, une nouvelle direction avait été nommée pour diriger l'entreprise. Les nouveaux directeurs, D______ et E______, travaillaient de manière autonome et n'avaient pas besoin d'une assistante pour les seconder. A______ avait été licenciée en raison de cette réorganisation interne, ce qui avait conduit à la suppression de son poste. Il n'avait pas été promis à l'employée qu'elle pourrait maintenir son poste de travail suite au départ de C______. A______ n'avait jamais été remplacée; ses tâches avaient été redistribuées à l'interne.

L'employée n'avait pas été mise à l'écart. Elle avait repris son travail le 2 novembre 2020 et effectuait la moitié du temps en présentiel et l'autre moitié en télétravail – en raison de la crise sanitaire et non de son état de santé –, de sorte que même si elle devait subir des examens médicaux, elle était en mesure d'exécuter son travail.

Par courriel du 24 novembre 2020, envoyé à 18h56, A______ avait annoncé à B______ SA qu'elle allait reprendre le travail à 100% dès le lundi 30 novembre 2020, ce qu'elle avait effectivement fait. Le certificat médical de A______ relatif à son arrêt de travail allant du 25 novembre au 24 décembre 2020 n'existait pas à la date du licenciement; la Dre H______ avait établi ce certificat médical rétroactivement, soit après le licenciement. L'employée n'était donc pas au bénéfice d'un certificat médical attestant de son inaptitude au travail à ce moment-là.

A son retour le 30 novembre 2020, A______ avait "badgé" et travaillé normalement. Elle n'avait pas informé ses supérieurs de son incapacité de travail. Elle n'avait subi aucune pression et il ne lui avait pas été demandé de reprendre le travail. Tout dans son comportement indiquait qu'elle était pleinement apte au travail et elle avait ainsi été licenciée après avoir repris son activité salariée. Son licenciement n'était donc pas nul.

Le jour de son licenciement, A______ avait été informée qu'elle était libérée de son obligation de travailler avec effet immédiat et qu'elle pouvait prendre le temps de rassembler ses affaires et saluer ses collègues. Elle n'avait pas démontré avoir subi un tort moral en raison de son licenciement.

A______ n'avait jamais contesté le contenu du courrier du 1er décembre 2020 confirmant son licenciement et elle avait attendu six mois avant d'invoquer la nullité du congé du 30 novembre 2020.

Le certificat de travail établi par B______ SA le 2 juillet 2021 était conforme à l'art. 330a CO et n'avait pas à être modifié.

c. Le Tribunal a entendu les parties et des témoins lors de l'audience du 6 décembre 2022. Leurs déclarations ont été intégrées ci-dessus dans la mesure utile.

d. A l'issue de l'audience de plaidoiries finales du 16 janvier 2023, lors de laquelle les parties ont persisté dans leurs conclusions, le Tribunal a gardé la cause à juger.

E. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a retenu que rien ne permettait de douter de la véracité du certificat médical du 24 novembre 2020. Celui-ci avait été délivré dans le prolongement d'une incapacité de travail déjà certifiée et l'assurance perte de gain maladie avait également pris en charge l'entier de cette incapacité de travail. Dans le contexte de la découverte d'une maladie grave et des perturbations psychologiques que cette nouvelle pouvait provoquer, le fait que l'employée avait adopté un comportement contradictoire, à savoir se rendre sur son lieu de travail nonobstant son incapacité de travail, était compréhensible. Le licenciement notifié le 30 novembre 2020 était dès lors nul.

Au terme d'une interprétation selon le principe de la confiance des courriers adressés par B______ SA à A______ postérieurement au 1er décembre 2020, le Tribunal a considéré que ces courriers ne revêtaient pas les caractéristiques d'un nouveau licenciement. Ils étaient insuffisants à produire cet effet par la seule référence à la résiliation du 30 novembre 2020, celle-ci étant nulle. Il y avait ainsi lieu d'interpréter ces lettres en défaveur de la partie les ayant rédigées, de sorte que les rapports de travail s'étaient poursuivis au-delà du 30 juin 2021. A______ avait été en incapacité de travail jusqu'au 18 août 2021 mais n'avait offert ses services que le vendredi 3 septembre 2021 pour le lundi suivant. Elle ne pouvait dès lors pas prétendre à un salaire pour la période allant du 19 août au 3 septembre 2021. Elle avait ensuite débuté une nouvelle activité professionnelle à compter du 25 octobre 2021, de sorte qu'elle avait résilié, ce jour-là, par actes concluant, le contrat de travail liant les parties. Le délai de congé étant de deux mois pour la fin d'un mois, les rapports de travail avaient pris fin le 31 décembre 2021.

A______ avait droit à son salaire du 6 septembre au 31 décembre 2021, sous déduction des salaires qu'elle avait perçus de son nouvel employeur, treizième salaire compris. A ce titre, elle pouvait donc prétendre au paiement des montants bruts suivants : 6'481 fr. 65 pour la période du 6 au 30 septembre 2021 (7'778 fr. / 30 jours x 25 jours), 6'440 fr. 50 (7'778 fr. - 1'337 fr. 50) pour octobre 2021, 1'854 fr. 85 (7'778 fr. - 5'923 fr. 15) pour novembre 2021, 756 fr. 20 (7'778 fr.
- 7'021 fr. 80) pour décembre 2021 et 1'293 fr. 90 [(6'481 fr. 65 + 6'440 fr. 50 + 1'854 fr. 85 + 756 fr. 20) x 8.33%] à titre de treizième salaire pour la période du 6 septembre au 31 décembre 2021.

Le Tribunal a encore retenu que B______ SA avait fait preuve d'un important manque d'égard et d'empathie vis-à-vis de son employée au moment du licenciement, de sorte qu'une indemnité pour tort moral de 5'000 fr. devait être allouée à A______.

Enfin, le certificat de travail devait contenir les éléments suivants :

"Nous, soussignés B______ SA (B______ SA), attestons que Madame A______, née le ______ 1971, a été employée à 100% dans notre entreprise du 21 août 2017 au 31 décembre 2021, en qualité d'assistante administrative.

Dans ce cadre, Madame A______ a eu pour tâches :

Secrétariat B______ et B______ SA :

-          Assistance au Secrétaire Général et, à compter de mai 2019, du Directeur général dans la gestion de ses affaires courantes (traitement du courrier et des appels, gestion et organisation de l'agenda, classement, suivi des dossiers, facturation, etc.);

-          Préparation, rédaction et diffusion des convocations et des procès-verbaux;

-          Organisation et participation aux évènements B______ (assemblée générale, apéritif de fin d'année, séance d'information, évènement collaborateurs, etc.);

-          Mise en page de divers documents (invitation, brochure, circulaire,…);

-          Mise en forme et diffusion de la revue de presse hebdomadaire, de bulletins d'information et de la documentation professionnelle via L______ [plate-forme de services marketing].

Gestion du site internet B______ et des réseaux sociaux :

-          Participation à la mise à jour du site internet en coordination avec ses collègues;

-          Elaboration et suivi de la page LinkedIn.

Suppléance au sein du Pôle Métiers:

-          Suppléance de la Secrétaire administrative dans le traitement du courrier (ouverture et affranchissement) ainsi que dans la mise en place et le rangement des salles de séances;

-          Participation à la permanence téléphonique et à l'intendance.

Au bénéfice de solides connaissances professionnelles et d'une grande expérience, Madame A______ a accompli ses tâches avec engagement et professionnalisme. Elle a montré une bonne capacité d'adaptation ce qui lui a permis de comprendre notre structure complexe et de collaborer efficacement avec les différents interlocuteurs de nos institutions. Madame A______ a fait preuve de flexibilité face à une charge de travail conséquente ou dans un contexte difficile. Grâce à ses bonnes compétences tant techniques qu'humaines, elle a fourni un travail de qualité à notre entière satisfaction.

Nous tenons à souligner qu'elle a mis à notre profit ses connaissances et son intérêt pour différents outils informatiques digitaux.

Grâce à son amabilité, son esprit d'équipe ainsi que son sens de la collaboration, Madame A______ était très appréciée par l'ensemble de ses interlocuteurs. Elle entretenait de bonnes relations tant avec ses supérieurs qu'avec ses collègues.

Dans le cadre d'une restructuration interne, Madame A______ a quitté notre entreprise au 31 décembre 2021, libre de tout engagement envers nos institutions, excepté celui lié au secret professionnel et au secret AVS. Nous la remercions de sa collaboration et formulons nos meilleurs vœux pour la suite de sa carrière professionnelle.

Ainsi fait à Genève, le 2 juillet 2021."


 

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et incidentes de première instance lorsque, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

En l'espèce, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Déposés dans le délai utile de trente jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1, 131, 142 al. 1 et 3 et 311 al. 1 CPC), les appels sont recevables. Il en va de même des réponses, des répliques et dupliques, déposées dans les délais impartis à cet effet (art. 145 al. 1 let. a, 312 al. 2 et 316 al. 2 CPC).

Par souci de simplification et pour respecter le rôle initial des parties en appel, A______ sera désignée ci-après comme l'appelante et B______ SA comme l'intimée.

1.3 La Cour dispose d'un pouvoir de cognition complet et revoit librement les questions de fait comme les questions de droit (art. 310 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le Tribunal et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).

Dans la mesure où la valeur litigieuse est supérieure à 30'000 fr., les maximes des débats (art. 55 al. 1 et 247 al. 2 let. b ch. 2 a contrario CPC) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC) sont applicables. La présente cause est en outre régie par la procédure ordinaire (art. 243 al. 1 et 2 a contrario CPC).

2.             A juste titre, les parties ne contestent pas la compétence des tribunaux genevois pour connaître du litige (art. 19 ch. 1 CL; art. 1 al. 1 let. a LTPH), ni l'application du droit suisse (art. 121 al. 1 LDIP).

3.             L'intimée reproche au Tribunal d'avoir retenu que le licenciement signifié à l'appelante le 30 novembre 2020 n'était pas valable, alors que, selon elle, le contrat de travail était arrivé à échéance le 30 juin 2021. L'appelante, quant à elle, fait grief au Tribunal d'avoir considéré qu'elle avait résilié les rapports de travail, par actes concluants, en acceptant un nouvel emploi à 80% dès le 25 octobre 2021, alors qu'elle ne faisait que respecter son devoir de réduire le dommage subi.

3.1.1 Selon l'art. 335 al. 1 CO, le contrat de travail conclu pour une durée indéterminée peut être résilié par chacune des parties. Celles-ci sont en principe libres de résilier le contrat sans motif particulier (ATF 132 III 115 consid. 2.1).

A teneur de l'art. 335c CO, le contrat peut être résilié pour la fin d'un mois moyennant un délai de congé d'un mois pendant la première année de service, de deux mois de la deuxième à la neuvième année de service, de trois mois ultérieurement (al. 1). Ces délais peuvent être modifiés par accord écrit, contrat-type de travail ou convention collective (al. 2).

3.1.2 Après le temps d'essai, l'employeur ne peut pas résilier le contrat pendant une incapacité de travail totale ou partielle résultant d'une maladie ou d'un accident non imputables à la faute du travailleur, et cela, durant 30 jours au cours de la première année de service, durant 90 jours de la deuxième à la cinquième année de service et durant 180 jours à partir de la sixième année de service (art. 336c al. 1 let. b CO). Le congé donné pendant cette période est nul (art. 336c al. 2 1ère phrase CO).

L'art. 336c CO traite de la résiliation en temps inopportun lorsque le congé est donné par l'employeur. Cette disposition a été introduite non pas du fait que le travailleur ne peut chercher un emploi à cause de l'empêchement de travailler, mais parce qu'un engagement du travailleur par un nouvel employeur à la fin du délai de congé ordinaire paraît hautement invraisemblable, en raison de l'incertitude quant à la durée et au degré de l'incapacité de travail (ATF 128 III 212 consid. 2c).

La preuve de l'incapacité de travail incombe à l'employé licencié (cf. art. 8 CC). Cette preuve peut être apportée par la présentation d'un certificat médical, lequel ne constitue toutefois pas un moyen de preuve absolu. Il s'agit d'un document officiel contenant des constatations écrites relevant de la science concernée et se rapportant à l'état de santé d'une personne, en particulier à sa capacité de travail. L'évaluation de l'état de santé et de la capacité de travail relève en effet de l'appréciation médicale. Si un certificat médical n'a pas une valeur probatoire absolue, la mise en doute de la véracité d'un tel document suppose toutefois des raisons sérieuses. Le comportement de l'employé (l'intéressé se prévaut d'une incapacité de travail en raison de problèmes dorsaux alors qu'il a été vu en train d'accomplir des travaux physiques, par exemple) ainsi que les circonstances à la suite desquelles l'incapacité de travail a été alléguée (production d'un certificat médical après un licenciement ou un refus de l'employeur d'accorder des vacances au moment désiré par le salarié, ou production de certificats émanant de médecins connus pour leur complaisance, par exemple) constituent à cet égard des éléments à prendre en compte. Le juge peut en particulier écarter les certificats médicaux de complaisance, ainsi que les faux certificats, soit ceux qui dressent un tableau inexact de l'état de santé de la personne. Lorsque les circonstances le font douter de la véracité de l'empêchement de travailler, l'employeur peut, à ses frais, faire contrôler l'incapacité de travail par un médecin-conseil de son choix; cette prérogative se déduit du devoir de fidélité du travailleur (cf. art. 321a CO) (Perrenoud, Commentaire romand, CO I, 3ème éd. 2021, n. 20 ad art. 324a CO et n. 41 ad art. 336c CO et les références citées).

Selon la jurisprudence, un travailleur qui fait acte de présentéisme (cas du travailleur qui produit un certificat d'arrêt de travail, mais qui continue à exercer son activité) bénéficie de la protection de l'art. 336c CO, sauf si l'atteinte à la santé s'avère insignifiante au point de ne pas l'empêcher d'occuper, le cas échéant, un nouvel emploi à la fin du délai de congé ordinaire (arrêts du Tribunal fédéral 4A_227/2009 du 28 juillet 2009 consid. 3.2; 4C.346/2004 du 15 février 2005 consid. 4.2; Perrenoud, op. cit., n. 35 ad art. 336c CO).

En vertu de son devoir de fidélité (cf. art. 321a CO), l'employé doit informer rapidement son employeur d'une incapacité de travail; un retard dans cette annonce ne met cependant pas en échec l'art. 336c al. 1 let. b CO, sous réserve d'un abus de droit manifeste (cf. art. 2 al. 2 CC) (Perrenoud, op. cit., n. 40 ad art. 336c CO et la référence citée).

Un congé notifié durant une période de protection est nul; il ne produit aucun effet juridique et ne peut pas être converti en une résiliation valable. Le moment déterminant est celui où le salarié reçoit le congé. Pour qu'il y ait nullité, il faut que celui-ci se trouve couvert par une période de protection à la réception du licenciement. Le congé donné dans une période de protection ne peut donc pas être converti et l'employeur qui persiste dans son intention de mettre fin au contrat doit renouveler sa manifestation de volonté une fois la période de protection achevée. (AUBRY/GIRARDIN, Commentaire du contrat de travail, 2ème éd. 2022, n. 47 ad art. 336c CO et les références citées). S'il est vrai que l'employeur n'est pas obligé de persister dans son intention, il ne ressort pas de l'art. 336c CO qu'il soit obligé de réexaminer la situation et de prendre une nouvelle décision. Le but de la loi, comme relevé plus haut, est de protéger le travailleur contre le risque de recevoir le congé à un moment où il pourrait difficilement trouver un nouvel emploi pour l'échéance. Il faut donc qu'il reçoive la résiliation à un moment moins défavorable pour lui. Il suffit que le congé soit renouvelé en dehors de la période de protection (ATF 128 III 212 consid. 3a, in SJ 2002 I 581). Une nouvelle communication indiquant clairement la volonté de l'employeur de mettre fin au contrat est suffisante, si elle intervient à l'issue du délai de protection; cela est aussi vrai si elle contient une confirmation de la résiliation lorsque la volonté de mettre fin au contrat y est clairement exprimée (Wyler/Heinzer, Droit du travail, 4ème éd. 2019, p. 870).

Sous réserve d'un abus de droit manifeste (cf. art. 2 al. 2 CC), le travailleur n'est pas tenu d'invoquer la nullité du congé auprès de l'employeur dans un certain délai (Perrenoud, op. cit., n. 68 ad art. 336c CO).

La résiliation est valable lorsqu'elle est donnée pendant une période de maladie ou d'accident après l'écoulement du temps de protection figurant à l'art. 336c al. 1 let. b CO (Wyler/Heinzer, loc.cit.).

3.1.3 La résiliation du contrat de travail est une déclaration unilatérale de volonté sujette à réception, par laquelle une partie communique à l'autre sa volonté de mettre fin au contrat et qui prend effet au moment où elle est parvenue au cocontractant, conformément au principe de la réception (ATF 133 III 517 consid. 3.3). Comme il s'agit d'un acte formateur, elle doit en principe être inconditionnelle et irrévocable (Ordolli/Witzig, Commentaire Romand, CO I, 3ème éd. 2021, n. 2 ad art. 335 CO).

La résiliation n'est soumise à aucune exigence de forme, de sorte qu'une partie peut mettre fin au contrat par voie écrite, orale ou même par actes concluants. Les parties au contrat peuvent cependant décider de réserver une forme particulière (par écrit, par courrier recommandé, etc.) à la résiliation. S'agissant de savoir si la forme réservée est une condition de validité du congé, il conviendra d'interpréter le contrat. En effet, les parties peuvent également avoir eu en tête de faciliter la preuve du congé, uniquement, sans que la validité du congé ne dépende de la forme envisagée. Toutefois, l'art. 16 CO présume que la forme réservée est une condition de validité du congé. Cette présomption peut cependant être détruite par la preuve que la forme volontaire ne visait qu'à faciliter l'administration des preuves (Bonard, Commentaire du contrat de travail, 2ème éd. 2022, n. 6 ad art. 335 CO et les références citées).

La question de savoir si l'employé libéré de l'obligation de travailler qui prend un nouvel emploi résilie de ce fait le premier contrat fait débat : pour certains auteurs, l'employé a l'obligation de rechercher un nouvel emploi et deux contrats de travail pourraient alors coexister (Blesi, Die Freistellung vom Arbeitnehmer, Ein Handbuch für die Praxis, 2ème éd. 2010, pp. 146 ss; Streiff/von Kaenel/Rudolph, Arbeitsvertrag, 7ème éd. 2012, n. 13 ad art. 324 CO; Subilia/Duc, Droit du travail - Eléments de droit suisse, 2010, n. 20 ad art. 324 CO); pour d'autres, l'employé n'a en tout cas pas à rechercher à tout prix un nouvel emploi (Bruchez/Mangold/ Schwaab, Commentaire du contrat de travail, 2019, n. 15, p. 317) et, en cas de prise d'un nouvel emploi, le premier contrat prend fin (Wyler/Heinzer, op. cit., p. 270). Le Tribunal fédéral n'a jamais véritablement pris position sur ces questions sous l'angle du droit du travail (Bonard, op. cit., n. 24 ad art. 335 CO).

3.1.4 Selon l'art. 2 CC, chacun est tenu d'exercer ses droits et d'exécuter ses obligations selon les règles de la bonne foi (al. 1). L'abus manifeste d'un droit n'est pas protégé par la loi (al. 2).

Chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit (art. 8 CC).

3.2 En l'espèce, il convient tout d'abord de déterminer si l'appelante était protégée contre les congés au moment où l'intimée lui a notifié son licenciement, soit le 30 novembre 2020. A cet égard, l'intimée conteste la force probante du certificat médical du 24 novembre 2020 et soutient que l'appelante était pleinement en état de travailler le 30 novembre 2020.

3.2.1 L'appelante a découvert au début du mois d'octobre 2020 qu'elle souffrait d'importants problèmes de santé, qui ont entraîné plusieurs incapacités de travail successives dès cette date - étant relevé qu'elle a régulièrement informé l'intimée de l'évolution de sa maladie, ainsi que cela ressort des courriels échangés entre les parties et des nombreux certificats médicaux versés au dossier. Suite à l'intervention chirurgicale du 4 octobre 2020, l'appelante a subi de nouvelles analyses médicales, dont les résultats (soit la présence de nodules cancéreux dans l'intestin nécessitant une nouvelle opération) lui ont été communiqués le 24 novembre 2020. Ce jour-là, l'appelante a adressé un courriel à l'intimée en fin de journée pour l'informer du diagnostic posé, mais également du fait qu'elle était en arrêt "jusqu'au vendredi [27 novembre 2020] et qu'[elle] devr[ait] pouvoir reprendre son activité dès le lundi [30 novembre 2020]".

Ainsi que le relève l'intimée, les dates susmentionnées ne correspondent pas à celles indiquées dans le certificat médical du 24 novembre 2020, ce qui laisse supposer que l'appelante n'avait pas ce certificat sous les yeux (l'ayant possiblement égaré ainsi qu'elle l'a expliqué devant le Tribunal) lorsqu'elle a envoyé son courriel. Il n'en reste pas moins que la Dre H______, entendue comme témoin, a affirmé que l'appelante n'était pas en état de travailler à partir du 24 novembre 2020. En effet, l'intéressée souffrait encore de douleurs abdominales, des investigations étaient en cours et une seconde opération était probable. Elle était encore fatiguée physiquement et n'avait pas récupéré de la première intervention. Elle se trouvait par ailleurs dans un état d'anxiété et de tristesse lié à l'annonce de sa maladie et de son évolution. La Dre H______ a également confirmé avoir rédigé le certificat médical à la date indiquée dans ce certificat, après avoir vu sa patiente en consultation. Elle a d'ailleurs précisé que, dans la mesure où des investigations étaient en cours, des nodules cancéreux ayant subsisté en dépit de l'opération réalisée en octobre 2020, elle voyait l'appelante à intervalles réguliers. Cette praticienne a encore déclaré que, de manière générale, elle n'établissait jamais de certificat médical à la suite d'un simple échange téléphonique, qu'elle fixait un nouveau rendez-vous à l'issue d'une incapacité attestée par certificat médical pour déterminer l'état de santé de son patient et qu'elle n'établissait pas de certificats médicaux pour une période supérieure à un mois.

Les déclarations de ce témoin, dont rien ne vient remettre en cause la probité, sont cohérentes, précises et convaincantes. L'intimée n'a d'ailleurs pas contesté la validité des autres certificats médicaux établis par la Dre H______, pas plus qu'elle n'a demandé à l'appelante d'être examinée par un médecin-conseil de son choix. A cela s'ajoute que l'assurance perte de gain de l'employeuse a pris en charge l'intégralité de l'incapacité de travail de l'employée du 25 novembre au 24 décembre 2020, ce qui renforce d'autant la force probante du certificat médical litigieux (l'intimée ne prétend du reste pas que l'appelante aurait perçu à tort les prestations d'assurance). Enfin, comme l'a pertinemment relevé le Tribunal, il appert que l'incapacité de travail attestée par le certificat médical du 24 novembre 2020 n'est pas survenue après le licenciement, mais dans le prolongement d'une précédente incapacité - non contestée par l'intimée -, soit celle attestée depuis le 17 novembre 2020, et fondée sur la même cause, à savoir un cancer de l'intestin.

Il résulte des éléments qui précèdent que la validité du certificat médical du 24 novembre 2020, en tant qu'il confirme l'incapacité de travail de l'appelante dès cette date jusqu'au 24 décembre 2020, a été établie à satisfaction de droit.

Au vu des circonstances, en particulier de la gravité de la maladie diagnostiquée et des perturbations psychologiques que la découverte d'un tel diagnostic peut provoquer (comme l'a confirmé le témoin G______), le fait que l'appelante ait annoncé sa reprise du travail le 30 novembre 2020, puis "badgé" et envoyé quelques courriels depuis son poste de travail ce jour-là, ne change rien à ce qui précède. En effet, contrairement à ce que soutient l'intimée, les explications fournies par l'appelante à ce sujet sont crédibles. Ainsi que celle-ci l'a affirmé devant le Tribunal, il est plausible - et compréhensible - qu'une employée ayant enchaîné les examens médicaux et les consultations en quelques semaines, encore bouleversée par l'annonce de sa maladie et par déni de son état, agisse de façon quelque peu confuse et tente de se "raccrocher" à un semblant de normalité en se rendant sur son lieu de travail. La Dre H______ a d'ailleurs précisé que l'appelante était triste et anxieuse, non seulement à cause de cette annonce, mais également du fait de ne pas pouvoir travailler et de reporter sa charge de travail sur ses collègues.

Dans ce contexte particulier, le présentéisme de l'appelante en date du 30 novembre 2020 ne saurait l'empêcher de bénéficier de la protection prévue par l'art. 336c CO, étant souligné que le fait de souffrir d'un cancer (avec la présence de tumeurs nécessitant une deuxième intervention chirurgicale) est une atteinte à la santé ayant, selon l'expérience générale de la vie, une incidence certaine sur les possibilités de la personne concernée d'occuper un nouvel emploi à court ou moyen terme.

Enfin, contrairement à ce que plaide l'intimée, le fait que l'appelante n'a invoqué la nullité du licenciement que par courrier du 4 juin 2021 ne consacre aucun abus de droit, un congé prononcé en temps inopportun étant nul de par la loi, sans que l'employé soit tenu d'observer un éventuel délai pour s'en prévaloir. En particulier, une déchéance du droit par l'écoulement du temps ne saurait être admise en l'espèce, l'appelante n'ayant jamais manifesté qu'elle renonçait à la protection dont elle s'est prévalue le 4 juin 2021.

3.2.2 Il convient ensuite de déterminer si l'employée a respecté son devoir de fidélité en informant rapidement l'intimée de son incapacité de travail.

Eu égard aux circonstances précitées, il ne saurait être reproché à l'appelante d'avoir contrevenu à son devoir de fidélité en remettant le certificat médical du 24 novembre 2020 à l'intimée le 1er décembre 2020, soit quatre jours ouvrables après l'établissement dudit certificat. L'état d'anxiété dans lequel se trouvait l'appelante explique en effet le – très léger – retard pris par cette dernière pour communiquer le certificat médical litigieux à l'intimée (étant rappelé que cette dernière a sollicité la remise d'un certificat médical le 30 novembre 2020 et que l'appelante le lui a transmis le lendemain).

3.2.3 Il résulte des éléments qui précèdent que l'intimée se trouvait en incapacité de travail, sans faute de sa part, à compter du 17 novembre 2020. La période de protection contre les congés s'est ainsi étendue du 17 novembre 2020 jusqu'au 15 février 2021 (90 jours), l'intimée se trouvant dans sa 4ème année de service au début de ladite incapacité.

Partant, les licenciements intervenus oralement le 30 novembre 2020 et par écrit le 1er décembre 2020 sont frappés de nullité.

3.3 Reste à déterminer si une résiliation du contrat de travail est intervenue après le 1er décembre 2020.

En l'occurrence, les parties ont décidé de réserver une forme particulière à la résiliation des rapports de travail. Le "guide du collaborateur" annexé au contrat de travail stipule en effet que le contrat de travail doit être résilié par écrit. Conformément à l'art. 16 CO, la forme écrite est dès lors réputée être une condition de validité du congé, ce que les parties ne contestent du reste pas.

Suite à la lettre de licenciement du 1er décembre 2020, les parties n'ont échangé aucune correspondance pendant plusieurs mois. Toutefois, par pli recommandé du 27 mai 2021, l'intimée a adressé à l'appelante une lettre confirmant la résiliation ordinaire du contrat de travail et exprimant - de façon claire, inconditionnelle et irrévocable - sa volonté de mettre fin aux rapports contractuels (cf. supra EN FAIT, let. C.n). A cette date, l'intimée était, à nouveau, en incapacité de travail, mais pour une cause différente, ce depuis le 19 février jusqu'au 18 août 2021. Cette nouvelle incapacité a fait naître une nouvelle période de protection contre les congés, laquelle s'est étendue du 19 février au 20 mai 2021 (90 jours). Dès lors, en date du 27 mai 2021, l'employée n'était plus protégée contre les congés et le courrier précité de l'employeuse doit être considéré comme une nouvelle résiliation des rapports de travail – cette fois-ci valable – conformément aux principes évoqués plus haut (cf. consid. 3.1.2). Il sera en outre relevé que l'erreur contenue dans ce courrier quant à la date de fin des rapports de travail ne remet nullement en cause la volonté de l'appelante – manifestée sans équivoque – de résilier le contrat de travail pour la prochaine échéance.

Il suit de là que, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal, le contrat de travail a été valablement résilié par l'intimée par pli recommandé du 27 mai 2021. Le délai de congé étant de deux mois pour la fin d'un mois, les rapports de travail ont pris fin le 31 juillet 2021 – étant rappelé que l'appelante a perçu l'entier de son salaire jusqu'au 19 août 2021 (incluant le treizième salaire au pro rata), compte tenu des prestations versées par l'assurance perte de gain maladie.

Partant, point n'est besoin de trancher la question de savoir si l'appelante a résilié le contrat de travail la liant à l'intimée, par actes concluants, en débutant un nouvel emploi à compter du 25 octobre 2021.

3.4 A la lumière des éléments qui précèdent, les chiffres 3 à 7 du dispositif du jugement entrepris seront annulés et l'appelante sera déboutée de ses conclusions tendant au paiement de son salaire pour la période du 19 août 2021 au 31 mai 2023.

4. L'appelante conclut, subsidiairement, à ce que le congé qui lui a été notifié soit considéré comme abusif, non seulement dans la manière dont il lui a été signifié mais aussi en raison du motif invoqué et de la disproportion des intérêts en présence.

4.1 Le contrat de travail conclu pour une durée indéterminée peut être résilié par chacune des parties (art. 335 al. 1 CO). Le droit suisse du contrat de travail repose en effet sur la liberté contractuelle. Le droit fondamental de chaque cocontractant de mettre unilatéralement fin au contrat est cependant limité par les dispositions sur le congé abusif (art. 336 ss CO; ATF 136 III 513 consid. 2.3; 131 III 535 consid. 4.1).

L'abus est en principe retenu lorsque le motif de résiliation invoqué n'est qu'un simple prétexte tandis que le véritable motif n'est pas constatable. Pour dire si un congé est abusif, il faut se fonder sur son motif réel. L'art. 336 CO énonce une liste non exhaustive de cas de résiliation abusive, concrétisant l'interdiction générale de l'abus de droit. Un congé peut ainsi se révéler abusif dans d'autres situations que celles énoncées par la loi; elles doivent toutefois apparaître comparables, par leur gravité, aux hypothèses expressément envisagées (ATF 136 III 513 consid. 2.3; 132 III 115 consid. 2.1 et 2.2; 131 III 535 consid. 4.2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_428/2019 du 16 juin 2020 consid. 4.1; 4A_224/2018 du 28 novembre 2018 consid. 3.1; 4A_485/2016 et 4A_491/2016 du 28 avril 2017, consid. 2.2.2).

4.1.1 Le caractère abusif du congé peut résider dans le motif répréhensible qui le sous-tend, dans la manière dont il est donné, dans la disproportion évidente des intérêts en présence, ou encore dans l'utilisation d'une institution juridique de façon contraire à son but (ATF 136 III 513 consid. 2.3; 132 III 115 consid. 2.2 et 2.4).

Même lorsque la résiliation est légitime, celui qui exerce son droit de mettre fin au contrat doit agir avec des égards. Ainsi, lorsqu'il prononce un licenciement, l'employeur a un devoir de protéger la personnalité de son collaborateur (art. 328 CO). Il doit notamment veiller à ne pas licencier selon des modalités stigmatisantes, avoir cherché à résoudre les conflits de personnalité et avoir procédé à des "aménagements raisonnables" afin de maintenir la relation de travail dans des situations où se présentent des difficultés liées à des aspects de la personnalité tels qu'un handicap, une maladie ou une religion (arrêts du Tribunal fédéral 4A_92/2017 du 26 juin 2017 consid. 2.2.1; 4A_130/2016 du 25 août 2016 consid. 2.1). Le congé doit être considéré comme abusif si l'employeur porte une grave atteinte aux droits de la personnalité du travailleur dans le contexte d'une résiliation ou, de manière plus générale, s'il viole de manière grossière le contrat dans le contexte de la résiliation (Dunand, Commentaire du contrat de travail, 2ème éd. 2022, n. 92 ad art. 336 CO; Wyler/Heinzer, op. cit., p. 813).

Selon la jurisprudence, l'idée au premier plan de la protection contre un congé abusif est d'offrir une protection sociale au salarié licencié abusivement, dès lors que la protection du congé n'a pas de portée pratique pour l'employeur. En raison de la finalité du droit de résiliation, d'une part, et de la disproportion des intérêts en présence, d'autre part, le licenciement peut être tenu pour abusif lorsqu'il répond à un motif de pure convenance personnelle de l'employeur. Cela peut être le cas lorsque l'employeur notifie le congé pour donner l'impression qu'il a pris des mesures adéquates (licenciement "fusible"), en faisant abstraction de l'intérêt légitime de l'employé à conserver un emploi dans lequel il s'est investi pendant de nombreuses années. De même, est abusif le licenciement prononcé par un employeur dont il est avéré qu'il voulait se séparer à tout prix d'un collaborateur et qui a agi par pure convenance personnelle, sans parvenir à démontrer l'existence de manquements professionnels de la part de l'employé. Pour contrecarrer l'intérêt évident de l'employé au maintien du contrat, l'employeur doit ainsi être en mesure de démontrer qu'il peut se prévaloir d'un intérêt digne de protection au licenciement du travailleur concerné (Dunand, op. cit., n. 90 ad art. 336 CO et les arrêts cités; Wyler/Heinzer, op. cit., p. 819).

4.1.2 Un "motif économique" constitue un intérêt digne de protection qui exclut généralement de considérer que le congé est abusif. Des motifs économiques peuvent se définir comme des motifs non inhérents à la personne du salarié, c'est-à-dire des raisons liées à la situation économique de l'entreprise, comme sa fermeture totale ou partielle, sa restructuration ou sa rationalisation, qui rendent nécessaires la suppression ou la modification de postes de travail. Pour être digne de protection, le motif économique doit dépendre d'une certaine gêne de l'employeur, ce qui exclut la seule volonté d'augmenter les profits. En principe, la mauvaise marche des affaires, le manque de travail ou des impératifs stratégiques commerciaux constituent des motifs économiques admissibles (Dunand, op. cit., n. 108 ad art. 336 CO et les références citées).

4.1.3 En application de l'art. 8 CC, c'est en principe à la partie qui a reçu son congé de démontrer que celui-ci est abusif (ATF 130 III 699 consid. 4.1, SJ 2005 I 152; arrêt du Tribunal fédéral 4A_92/2017 du 26 juin 2017 consid. 2.2.2).

En ce domaine, la jurisprudence a tenu compte des difficultés qu'il pouvait y avoir à apporter la preuve d'un élément subjectif, à savoir le motif réel de celui qui a donné le congé. Le juge peut ainsi présumer en fait l'existence d'un congé abusif lorsque l'employé parvient à présenter des indices suffisants pour faire apparaître comme non réel le motif avancé par l'employeur. Si elle facilite la preuve, cette présomption de fait n'a pas pour résultat d'en renverser le fardeau. Elle constitue, en définitive, une forme de "preuve par indices". De son côté, l'employeur ne peut rester inactif; il n'a pas d'autre issue que de fournir des preuves à l'appui de ses propres allégations quant au motif du congé (ATF 130 III 699 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_92/2017 précité consid. 2.2.2).

4.1.4 Selon l'art. 336b CO, la partie qui entend demander l'indemnité fondée sur les art. 336 et 336a CO doit faire opposition au congé par écrit auprès de l'autre partie au plus tard jusqu'à la fin du délai de congé. Si l'opposition est valable et que les parties ne s'entendent pas pour maintenir le rapport de travail, la partie qui a reçu le congé peut faire valoir sa prétention à une indemnité. Elle doit agir par voie d'action en justice dans les 180 jours à compter de la fin du contrat, sous peine de péremption.

4.2 En l'espèce, l'appelante s'est opposée au congé aux termes de son courrier à l'intimée du 28 juin 2021, soit avant l'échéance du délai de congé. Elle a ensuite introduit l'action en conciliation le 7 janvier 2022, soit dans le délai de 180 jours suivants la fin des rapports de travail qui est intervenue le 31 juillet 2021. Ainsi, les délais légaux ont été respectés et il y a lieu d'examiner si le congé est abusif.

4.2.1 L'appelante soutient que le congé serait abusif en raison du manque d'égards dont avait fait preuve l'intimée à son endroit dans le contexte du licenciement. En outre, elle fait valoir que son licenciement serait fondé sur un motif de pure convenance personnelle de l'employeuse et consacrerait une disproportion manifeste entre les intérêts en présence. De son côté, l'intimée soutient avoir licencié l'appelante pour un motif économique, la restructuration de la société ayant eu pour conséquence la suppression du poste qu'elle occupait.

4.2.2 Il y a lieu de déterminer si le motif de congé avancé par l'appelante est le motif réel ou s'il s'agit d'un motif fictif.

En l'occurrence, il apparaît que la réorganisation interne de l'intimée correspond au motif réel du licenciement de l'appelante. En effet, le poste qu'elle occupait était lié au précédent directeur de l'intimée, qui avait quitté l'entreprise au plus tard en juin 2020. Si l'appelante n'a pas été licenciée en même temps que le précédent directeur, il n'a pas été démontré que l'intimée aurait assuré à l'appelante le maintien de son poste sur le long terme. La restructuration a pris un certain temps puisque, suite au départ de C______, la direction a été assurée ad interim par deux personnes distinctes. Ainsi, le fait qu'il se soit écoulé un certain temps entre le départ du précédent directeur et le licenciement de l'appelante ne suffit pas à faire apparaître comme fictif le motif de licenciement invoqué par l'intimée. Par ailleurs, le fait que la direction ait été reprise par deux personnes rend hautement vraisemblable que celles-ci soient parvenues à se répartir, avec l'aide d'un autre collaborateur, les tâches précédemment assumées par l'appelante, ce d'autant qu'il n'a pas été démontré que le poste de cette dernière aurait été repourvu par un tiers après son licenciement.

Le congé notifié à l'appelante n'est ainsi pas abusif quant au motif invoqué.

4.2.3 Il y a encore lieu d'examiner si le licenciement est abusif dans la manière dont il a été donné et/ou dans la disproportion des intérêts en présence.

Il ressort du dossier qu'à compter de la mi-octobre 2020, l'intimée était informée du fait que l'appelante souffrait d'une maladie grave. Dans ses courriels des 16 et 19 octobre 2020, cette dernière a en effet expressément attiré l'attention de son employeuse sur le fait qu'elle devait consulter un oncologue – soit un médecin spécialisé dans l'étude, le diagnostic et le traitement des cancers – en lien avec les tumeurs qui avaient été détectées. Par courriel du 24 octobre 2020, l'appelante a en outre signalé à l'intimée que les dernières analyses avaient révélé la présence de tumeurs à deux endroits, en dépit de sa récente opération, et qu'elle était atteinte d'un "type de cancer rare" dont le traitement demeurait incertain à ce stade.

Alors qu'elle venait d'apprendre que sa maladie – potentiellement incurable – évoluait de façon inquiétante, l'appelante, à peine arrivée sur son lieu de travail (dans les circonstances déjà évoquées ci-avant), a été convoquée par ses supérieurs qui lui ont signifié abruptement qu'elle était licenciée et qu'elle devait de surcroît quitter les lieux avec effet immédiat. Elle a ensuite été escortée par un informaticien à son poste de travail pour récupérer ses affaires, devant ses collègues, alors qu'aucun reproche n'avait été formulé à son endroit quant à la qualité de son travail et/ou sa loyauté envers l'entreprise. Ce faisant, l'intimée a, comme retenu par le Tribunal, fait preuve d'un manque considérable d'égards et d'empathie envers l'appelante. Au mépris de son obligation de protéger la personnalité d'une employée sérieusement atteinte dans sa santé, l'intimée a en effet décidé de la mettre à l'écart dès son retour au travail, sans même s'enquérir de l'évolution de sa maladie et sans lui avoir proposé, en préalable au licenciement, d'aménager ses tâches pour lui faciliter cette période de vie particulièrement difficile; ce manque total d'égard est d'autant plus malvenu que la réorganisation de la société n'avait rien d'urgent, l'appelante ayant continué à exercer ses fonctions plus de sept mois après le départ du précédent directeur. A l'instar des premiers juges, la Cour retiendra que dans ces circonstances, l'intimée, par son attitude désinvolte et inconsidérée, a porté une atteinte illicite à la personnalité de l'appelante et agi de manière fautive, n'ayant pris aucune mesure pour préserver une employée qu'elle savait pourtant fragilisée et vulnérable.

Comme l'a retenu le Tribunal, le comportement de l'intimée a été bien au-delà de la maladresse, puisque le congé a créé une charge psychologique supplémentaire sur l'appelante – déjà éprouvée par sa maladie – qui a subi une nouvelle incapacité de travail, dès le 19 février 2021, attestée par son psychiatre, causée, à tout le moins en partie, par le licenciement. Son état psychologique s'est ainsi progressivement dégradé, l'appelante ayant dû prendre un traitement médicamenteux à compter du 12 juillet 2021, alors qu'elle n'était déjà plus en incapacité de travail en raison de son traitement contre le cancer et ce, depuis la fin du mois de février 2021.

A la lumière de ce qui précède, il appert que l'intimée a porté une atteinte grave aux droits de la personnalité de l'appelante dans le contexte global du licenciement, eu égard à la manière dont celui-ci a été signifié, l'intimée ayant exercé son droit de résilier le contrat sans aucun ménagement en faisant fi de la période de vie critique traversée par l'appelante. Le licenciement revêt dès lors un caractère abusif.

5.             Reste à déterminer le montant de l'indemnité à laquelle l'appelante peut prétendre.

5.1 La partie qui résilie abusivement le contrat doit verser à l'autre une indemnité (art. 336a al. 1 CO). L'indemnité est fixée par le juge, compte tenu de toutes les circonstances; toutefois, elle ne peut dépasser le montant correspondant à six mois de salaire du travailleur. Sont réservés les dommages-intérêts qui pourraient être dus à un autre titre (art. 336a al. 2 CO).

L'indemnité en raison du congé abusif a une double finalité, punitive et réparatrice (ATF 132 II 115 consid. 5.6, in JT 2006 I p. 152; arrêt du Tribunal fédéral 4A_485/2017 du 25 juillet 2018 consid. 4.1). Par sa fonction punitive, elle exerce, ou devrait exercer, un effet préventif, alors que, par sa fonction réparatrice, elle devrait atténuer pour le travailleur l'impact de la résiliation (Bruchez/ Mangold/ Schwaab, op. cit., n. 2 ad art. 336a CO). La finalité en partie réparatrice de l'indemnité résulte des mots mêmes utilisés par le législateur pour la désigner ("indemnité"); elle découle aussi du fait que cette indemnité est versée non pas à l'Etat, comme une amende pénale, mais à la victime elle-même. L'indemnité ne représente pas des dommages-intérêts au sens classique, car elle est due même si la victime ne subit ou ne prouve aucun dommage; revêtant un caractère sui generis, elle s'apparente à la peine conventionnelle (ATF 123 III 391 consid. 3).

Le juge fixe l'indemnité en équité en fonction de toutes les circonstances (art. 4 CC; ATF 136 III 552 consid. 6.5; 123 III 246 consid. 6c, in JT 1998 I 300); il doit notamment tenir compte de la gravité de la faute de l'employeur, de la manière dont le licenciement a été donné, de la gravité de l'atteinte à la personnalité du travailleur, de l'intensité et de la durée des rapports de travail, des effets économiques du licenciement, de l'âge et de la situation personnelle du travailleur, des conditions existantes sur le marché du travail, de la situation économique des parties et d'une éventuelle faute concomitante du travailleur licencié (arrêt du Tribunal fédéral 4A_166/2018 du 20 mars 2019 consid. 4.1; Bruchez/Mangold/Schwaab, op. cit., n. 3 ad art. 336a CO; Dunand, op. cit., n. 14 ad art. 336a CO).

Par mois de salaire, il faut entendre le salaire brut (cf. art. 322 CO), augmenté de toutes les prestations qui ont un caractère salarial, comme la part proportionnelle du treizième salaire, les provisions ou encore le remboursement forfaitaire des frais ayant un caractère salarial (arrêts du Tribunal fédéral 4A_92/2017 du 26 juin 2017 consid. 3.2.1; 4A_571/2008 du 5 mars 2009; Dunand, op. cit., n. 12 ad art. 336a CO). L'indemnité prévue par l'art. 336a al. 2 CO n'étant pas de nature salariale, elle ne fait pas partie du salaire déterminant au sens de l'art. 5 al. 2 LAVS et ne donne pas lieu à la perception des cotisations sociales (ATF 123 V 5 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 9C_43/2018 du 19 octobre 2018 consid. 5.3 et les références citées, WYLER/HEINZER, op. cit., p. 830).

Le Tribunal fédéral a accordé quatre mois de salaire à une infirmière scolaire licenciée en raison de son refus d'accepter un nouveau contrat de travail impliquant une réduction très importante de son taux d'activité. Le Tribunal fédéral a pris en compte dans cette affaire, le fait qu'elle était employée depuis sept ans, qu'elle était gravement atteinte dans sa santé et en arrêt maladie au moment du licenciement ainsi que le fait que le licenciement lui a été annoncé en la prenant par surprise lors d'une réunion à laquelle elle avait été invitée pour d'autres motifs (arrêt du Tribunal fédéral 4A_166/2018 du 20 mars 2019 consid. 4).

5.2 En l'espèce, les éléments déterminants pour fixer la quotité de l'indemnité allouée à l'appelante sont les circonstances du licenciement, à savoir le manque considérable d'égards et d'empathie dont a fait preuve l'intimée le 30 novembre 2022, celle-ci ayant agi sans ménagement vis-à-vis d'une employée qu'elle savait gravement atteinte dans sa santé, ainsi que les conséquences que ce licenciement a eues sur l'état psychique de l'appelante.

Il y a encore lieu de tenir compte du fait que les rapports de travail n'avaient duré que trois ans au moment où le licenciement a été annoncé à l'appelante, que celle-ci était alors âgée de 49 ans et qu'elle a retrouvé un travail assez rapidement, soit en octobre 2021, mais à un taux réduit et pour un salaire inférieur.

Dès lors, la quotité de l'indemnité allouée au vu des circonstances du cas d'espèce sera arrêtée à 33'700 fr., correspondant à environ quatre mois de salaire ([7'778 fr. x 13 mois] / 12 mois x 3 mois). Ce montant portera intérêt à 5% l'an à compter de la fin des rapports de travail, à savoir le 31 juillet 2021.

6. L'intimée fait grief au Tribunal d'avoir alloué une indemnité pour tort moral à l'appelante.

6.1 Celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d'argent à titre de réparation morale, pour autant que la gravité de l'atteinte le justifie et que l'auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement (art. 49 al. 1 CO).

Lorsque le salarié subi une atteinte à sa personnalité qui découle de son licenciement abusif, l'indemnité de l'art. 336a CO comprend en principe la réparation morale. En effet, vu sa finalité réparatrice, cette indemnité embrasse toutes les atteintes du travailleur qui découlent de la résiliation abusive du contrat et ne laisse donc pas de place à l'application cumulative de l'art. 49 CO. Seule est réservée l'hypothèse dans laquelle l'atteinte aux droits de la personnalité du travailleur serait à ce point grave qu'une indemnité correspondant à six mois de salaire du travailleur ne suffirait pas à la réparer (ATF 135 III 405 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_482/2017 du 17 juillet 2018 consid. 4.1; Dunand, op. cit., n. 35 ad art. 336a CO; Wyler/Heinzer, op. cit., p. 832).

6.2 En l'espèce, dans la mesure où une indemnité correspondant à quatre mois de salaire a été allouée à l'appelante pour licenciement abusif, dite indemnité couvre l'atteinte à la personnalité subie par celle-ci. L'appelante ne peut dès lors pas prétendre à une indemnité additionnelle pour tort moral.

Le chiffre 8 du dispositif du jugement entrepris doit ainsi être annulé.

7. L'intimée reproche au Tribunal de ne pas avoir correctement retranscrit la date de la fin des rapports de travail dans le certificat de travail de l'appelante.

7.1 Selon l'art. 330a al. 1 CO, le travailleur peut demander en tout temps à l'employeur un certificat portant sur la nature et la durée des rapports de travail, ainsi que sur la qualité de son travail et sa conduite.

Le certificat doit contenir la description précise et détaillée des activités exercées et des fonctions occupées dans l'entreprise, les dates de début et de fin de l'engagement, l'appréciation de la qualité du travail effectué ainsi que de l'attitude du travailleur (arrêt du Tribunal fédéral 4A_127/2007 du 13 septembre 2007 consid. 7.1).

7.2 En l'espèce, il a été retenu plus haut (cf. consid. 3.3 supra) que les rapports de travail ont pris fin le 31 juillet 2021. Il y a dès lors lieu de modifier le certificat de travail de l'appelante dans le sens d'un remplacement de la date du 31 décembre 2021, retenue par le Tribunal, par la date du 31 juillet 2021.

Ainsi, le contenu du certificat de travail que l'appelante sera condamnée à délivrer à l'intimée est le suivant (les passages modifiés sont indiqués en gras) :

"Nous, soussignés B______ SA (B______ SA), attestons que Madame A______, née le ______ 1971, a été employée à 100% dans notre entreprise du 21 août 2017 au 31 juillet 2021, en qualité d'assistante administrative.

Dans ce cadre, Madame A______ a eu pour tâches:

Secrétariat B______ et B______ SA:

-          Assistance au Secrétaire Général et, à compter de mai 2019, du Directeur général dans la gestion de ses affaires courantes (traitement du courrier et des appels, gestion et organisation de l'agenda, classement, suivi des dossiers, facturation, etc.);

-          Préparation, rédaction et diffusion des convocations et des procès-verbaux;

-          Organisation et participation aux évènements B______ (assemblée générale, apéritif de fin d'année, séance d'information, évènement collaborateurs, etc.);

-          Mise en page de divers documents (invitation, brochure, circulaire,…);

-          Mise en forme et diffusion de la revue de presse hebdomadaire, de bulletins d'information et de la documentation professionnelle via L______.

Gestion du site internet B______ et des réseaux sociaux:

-          Participation à la mise à jour du site internet en coordination avec ses collègues;

-          Élaboration et suivi de la page LinkedIn.

Suppléance au sein du Pôle Métiers:

-          Suppléance de la Secrétaire administrative dans le traitement du courrier (ouverture et affranchissement) ainsi que dans la mise en place et le rangement des salles de séances;

-          Participation à la permanence téléphonique et à l'intendance.

Au bénéfice de solides connaissances professionnelles et d'une grande expérience, Madame A______ a accompli ses tâches avec engagement et professionnalisme. Elle a montré une bonne capacité d'adaptation ce qui lui a permis de comprendre notre structure complexe et de collaborer efficacement avec les différents interlocuteurs de nos institutions. Madame A______ a fait preuve de flexibilité face à une charge de travail conséquente ou dans un contexte difficile. Grâce à ses bonnes compétences tant techniques qu'humaines, elle a fourni un travail de qualité à notre entière satisfaction.

Nous tenons à souligner qu'elle a mis à notre profit ses connaissances et son intérêt pour différents outils informatiques digitaux.

Grâce à son amabilité, son esprit d'équipe ainsi que son sens de la collaboration, Madame A______ était très appréciée par l'ensemble de ses interlocuteurs. Elle entretenait de bonnes relations tant avec ses supérieurs qu'avec ses collègues.

Dans le cadre d'une restructuration interne, Madame A______ a quitté notre entreprise au 31 juillet 2021, libre de tout engagement envers nos institutions, excepté celui lié au secret professionnel et au secret AVS. Nous la remercions de sa collaboration et formulons nos meilleurs vœux pour la suite de sa carrière professionnelle.

Ainsi fait à Genève, le 2 juillet 2021."

Le chiffre 9 du dispositif du jugement entrepris sera dès lors annulé et il sera statué à nouveau dans le sens de ce qui précède.

8. 8.1 La valeur litigieuse étant supérieure à 50'000 fr., la procédure d'appel est onéreuse et les frais judiciaires seront arrêtés à 500 fr. (art. 114 let. c et 116 al. 1 CPC; art. 71 RTFMC; art. 19 al. 3 let. c LaCC).

Ils seront mis à la charge de l'intimée qui succombe pour l'essentiel dans ses conclusions (art. 106 al. 2 CPC). Elle sera ainsi condamnée à verser 500 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, au titre de frais judiciaires d'appel.

8.2 Il ne sera pas alloué de dépens d'appel (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :


A la forme
:

Déclare recevable l'appel interjeté le 24 mai 2023 par A______ contre le jugement JTPH/122/2023 rendu le 21 avril 2023 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/25408/2021.

Déclare recevable l'appel interjeté le 23 mai 2023 par B______ SA contre ce même jugement.

Au fond :

Annule les chiffres 3 à 9 du dispositif du jugement entrepris et, statuant à nouveau :

Condamne B______ SA à verser à A______ une indemnité de 33'700 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 31 juillet 2021.

Condamne B______ SA à remettre à A______ un certificat de travail conforme au consid. 7.2 du présent arrêt.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais:

Arrête les frais judiciaires d'appel à 500 fr. et les met à la charge de B______ SA.

Condamne en conséquence B______ SA à verser 500 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; Madame Monique FORNI, Monsieur
Aurélien WITZIG, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.


 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.