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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3154/2024

ATAS/234/2025 du 31.03.2025 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3154/2024 ATAS/234/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 31 mars 2025

Chambre 6

 

En la cause

 

A______

 

recourante

contre

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. A______ (ci-après : l’assurée), née le ______ 1992, mariée depuis le 23 mai 2023, mère d’un enfant né le ______ 2010, originaire d’Albanie, entrée en Suisse en 2018, a exercé une activité de serveuse depuis le 2 juin 2020 pour B______.

b. En février 2020, l’assurée a chuté à ski et présenté une entorse du genou droit avec une déchirure du ligament croisé antérieur (ci-après : LCA), traitée conservativement.

c. Le 16 février 2021, l’assurée a chuté à ski et présenté une entorse du genou droit.

d. Le 24 juin 2022, l’assurée a chuté et présenté une entorse du genou gauche, avec rupture du LCA, et une contusion traumatique du bassin, entrainant une incapacité de travail totale.

B. a. Le 13 juin 2023, l’assurée a déposé une demande de prestations d’invalidité.

b. Le 20 septembre 2023, le docteur C______, spécialiste FMH en orthopédie, a indiqué un suivi depuis le 18 octobre 2022 et un diagnostic d’entorse du genou gauche avec une rupture complète du LCA. La capacité de travail était nulle dans l’activité habituelle et de 100% dans une activité totalement sédentaire. Une intervention chirurgicale était préconisée.

c. À la demande de la BALOISE ASSURANCE SA (ci-après : BALOISE), assureur accidents, le docteur D______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, a rendu un rapport d’expertise le 12 décembre 2023, lequel concluait à une capacité de travail de l’assurée nulle dans l’activité habituelle et de 100% dans une activité adaptée (travaux de manutention légère).

d. Le 19 février 2024, le Dr C______ a mentionné que le genou droit était stable et très peu douloureux, mais que le genou gauche était instable. L’assurée devait marcher avec prudence, pas de rotation du genou gauche, pas de montées et descentes d’escaliers, aucune activité utilisant les genoux en rotation et pas de course. Seule une activité sédentaire assise pouvait entrer en considération. Le pronostic était très mauvais sans une stabilisation chirurgicale du genou gauche.

e. Le 6 mars 2024, les docteurs E______, médecin chef, et F______, cheffe de clinique, à l’hôpital de La Tour, ont rendu deux rapports, en estimant, dans l’un, qu’il existait une indication chirurgicale à une reconstruction du LCA et, dans l’autre, qu’il n’y avait pas d’indication chirurgicale urgente à une reconstruction du LCA.

f. Par décision du 14 mai 2024, la BALOISE a cessé le versement de l’indemnité journalière au 31 mai 2024 et reconnu à l’assurée une pleine capacité de travail dans une activité adaptée au 1er juin 2024.

g. Le 31 mai 2024, l’assurée s’est inscrite à l’office régional de placement (ci‑après : ORP).

h. Par projet de décision du 11 juin 2024, l’office de l’assurance-invalidité (ci‑après : OAI) a refusé à l’assurée un droit à une rente d’invalidité et à des mesures d’ordre professionnel. L’incapacité de travail était totale du 24 juin 2022 au 12 novembre 2023. Cependant, la demande de prestations ayant été déposée le 13 juin 2023, la rente due dès le 24 juin 2023 ne pouvait être versée que dès décembre 2023. Or, à cette date, l’assurée présentait une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée, soit depuis le 13 novembre 2023. Le degré d’invalidité de l’assurée était nul (revenu de valide de CHF 55'503.- et d’invalide de CHF 67'078.-).

i. Par décision du 1er juillet 2024, la BALOISE a nié le droit de l’assurée à une rente d’invalidité et lui a alloué une indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) de 10%.

j. Le 1er juillet 2024, l’assurée s’est opposée au projet de décision de l’OAI précité. Elle acceptait la décision d’une activité nulle dans la profession habituelle et complète dans une activité adaptée, mais ses limitations fonctionnelles entrainaient une invalidité supérieure à 20%. Elle avait donc droit à une formation professionnelle.

k. Le 20 août 2024, la caisse de chômage UNIA a informé l’assurée qu’elle avait droit à 90 indemnités journalières.

l. Par décision du 30 août 2024, l’OAI a rejeté la demande de prestations.

C. a. Le 25 septembre 2024, l’assurée a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision précitée, en indiquant qu’elle présentait une « impotence » d’au moins 20% et qu’elle serait apte à travailler après une réadaptation et une formation professionnelle adaptée à son handicap physique.

b. Le 24 octobre 2024, l’OAI a conclu au rejet du recours ; l’assurée avait subi une entorse au genou gauche en février 2021 et un traumatisme plus important de ce genou en juin 2022. Il n’y avait pas d’arrêt de travail durable antérieurement au deuxième accident de 2022. Le calcul du degré d’invalidité était erroné et, rectifié, donnait un taux de 9,3%, toujours insuffisant pour ouvrir le droit à des prestations.

c. Le 14 novembre 2024, le dossier de l’assurée a été annulé par l’ORP.

d. Le 27 novembre 2024, l’assurée a communiqué un courrier du 19 novembre 2024 envoyé à l’office cantonal de l’emploi, selon lequel la BALOISE se basait sur deux accidents successifs concernant le genou gauche ; or, elle avait bien subi une déchirure du LCA du genou gauche le 24 juin 2022, mais le 10 février 2021 elle avait subi une déchirure du LCA du genou droit.

e. Le 20 janvier 2025, la chambre de céans a tenu une audience de comparution personnelle. La recourante ne s’est pas présentée.

f. Le 17 février 2025, les parties ont été entendues en audience de comparution personnelle.

g. À la demande de la chambre de céans, la caisse de chômage UNIA a communiqué le 21 février 2025 le dossier de l’assurée et l’office cantonal de l’emploi le 4 mars 2025.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connait, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA).

2.             Le litige porte sur le droit de la recourante à une mesure d’ordre professionnel.

3.              

3.1 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI – RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.

En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence).

En l’occurrence, la recourante requiert postérieurement au 1er janvier 2022 des mesures d’ordre professionnel, de sorte que les nouvelles dispositions de la LAI sont applicables.

3.2 Selon l’art 8 LAI, les assurés invalides ou menacés d’une invalidité (art. 8 LPGA) ont droit à des mesures de réadaptation pour autant que ces mesures soient nécessaires et de nature à rétablir, maintenir ou améliorer leur capacité de gain ou leur capacité d’accomplir leurs travaux habituels (al. 1 let. a) ; que les conditions d’octroi des différentes mesures soient remplies (al. 1 let b).

Le droit aux mesures de réadaptation n’est pas lié à l’exercice d’une activité lucrative préalable. La détermination des mesures tient notamment compte de l’âge de l’assuré (al. 1bis let. a) ; de son niveau de développement (al. 1bis let. b) ; de ses aptitudes (al. 1bis let. c) et de la durée probable de la vie active (al. 1bis let. d).

En cas d’interruption d’une mesure de réadaptation, l’octroi de la même mesure ou d’une autre mesure de réadaptation est examiné à nouveau conformément aux al. 1 et 1bis (al. 1ter).

Les assurés ont droit aux prestations prévues aux art. 13 et 21, quelles que soient les possibilités de réadaptation à la vie professionnelle ou à l’accomplissement de leurs travaux habituels (al. 2).

Les assurés ont droit aux prestations prévues à l’art. 16 al. 3 let. b que les mesures de réadaptation soient nécessaires ou non pour maintenir ou améliorer leur capacité de gain ou leur capacité d’accomplir leurs travaux habituels (al. 2bis).

Les mesures de réadaptation comprennent des mesures médicales (al. 3 let. a) ; l’octroi de conseils et d’un suivi (al. 3 let. abis) ; des mesures de réinsertion préparant à la réadaptation professionnelle (al. 3 let. ater) ; des mesures d’ordre professionnel (al.3 let. b), l’octroi de moyens auxiliaires (al. 3 let. d).

3.3 Selon l’art. 15 LAI, l’assuré auquel son invalidité rend difficile le choix d’une profession a droit à l’orientation professionnelle et à une mesure préparatoire à l’entrée en formation (al. 1) ; l’assuré auquel son invalidité rend difficile l’exercice de son activité antérieure a droit à l’orientation professionnelle (al. 2).

3.4 Pour déterminer si une mesure est de nature à maintenir ou à améliorer la capacité de gain d'un assuré, il convient d'effectuer un pronostic sur les chances de succès des mesures demandées (ATF 132 V 215 consid. 3.2.2 et les références). Celles-ci ne seront pas allouées si elles sont vouées à l'échec, selon toute vraisemblance (arrêt du Tribunal fédéral I 388/06 du 25 avril 2007 consid. 7.2). Le droit à une mesure de réadaptation présuppose qu'elle soit appropriée au but de la réadaptation poursuivi par l'assurance-invalidité, et cela tant objectivement en ce qui concerne la mesure que sur le plan subjectif en rapport avec la personne de l'assuré. En effet, une mesure de réadaptation ne peut être efficace que si la personne à laquelle elle est destinée est susceptible, partiellement au moins, d'être réadaptée. Partant, si l'aptitude subjective de réadaptation de l'assuré fait défaut, l'administration peut refuser de mettre en œuvre une mesure (arrêt du Tribunal fédéral 9C_846/2018 du 29 novembre 2019 consid. 5.1 et les références), sans qu'il soit nécessaire de recourir à la procédure préalable de mise en demeure prévue par l'art. 21 al. 4 LPGA (arrêts du Tribunal fédéral 8C_480/2018 du 26 novembre 2018 consid. 7.3 et les références ; 9C_59/2017 du 21 juin 2017 consid. 3.3 et les références), une telle procédure préalable n'étant requise que si une mesure de réadaptation a été commencée et qu'il est question de l'interrompre (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_783/2015 du 7 avril 2016 consid. 4.8.2 et les références). L'absence de capacité subjective de l'assuré doit toutefois être établie au degré de la vraisemblance prépondérante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_667/2015 du 6 septembre 2016 consid. 5.3 et les références).

Sont réputées nécessaires et appropriées toutes les mesures de réadaptation professionnelle qui contribuent directement à favoriser la réadaptation dans la vie active. L’étendue de ces mesures ne saurait être déterminée de manière abstraite, puisque cela suppose un minimum de connaissances et de savoir-faire et que seules seraient reconnues comme mesures de réadaptation professionnelle celles se fondant sur le niveau minimal admis. Au contraire, il faut s’en tenir aux circonstances du cas concret. Celui qui peut prétendre au reclassement en raison de son invalidité a droit à la formation complète qui est nécessaire dans son cas, si sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être sauvegardée ou améliorée de manière notable (ATF 124 V 108 consid. 2a ; VSI 1997 p. 85 consid. 1).

3.5 Se pose en premier lieu la question de savoir si l'assuré est invalide ou menacé d'une invalidité permanente (art. 28 al. 1er LAI). On rappellera qu'il n'existe pas un droit inconditionnel à obtenir une mesure professionnelle (voir par ex. l'arrêt du Tribunal fédéral 9C_385/2009 du 13 octobre 2009). Il faut également relever que si une perte de gain de 20% environ ouvre en principe droit à une mesure de reclassement dans une nouvelle profession (ATF 139 V 399 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_500/2020 du 1er mars 2021 consid. 2 et les références), la question reste ouverte s'agissant des autres mesures d'ordre professionnel prévues par la loi (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_464/2009 du 31 mai 2010).

3.6 L’orientation professionnelle, qui inclut également les conseils en matière de carrière, a pour but de cerner la personnalité des assurés et de déterminer leurs capacités et leurs dispositions qui constitueront la base permettant de choisir une activité professionnelle appropriée ou une activité dans un autre domaine, voire un placement adéquat. Y ont droit les assurés qui, en raison de leur invalidité, sont limités dans le choix d’une profession ou dans l’exercice de leur activité antérieure et qui ont dès lors besoin d’une orientation professionnelle spécialisée (Circulaire sur les mesures de réadaptation professionnelle, CMRPr, p. 16, nos 2001 et 2002). Le Tribunal fédéral a rappelé que l'orientation professionnelle se démarque des autres mesures d'ordre professionnel (art. 16 ss LAI) par le fait que, dans le cas particulier, l'assuré n'a pas encore fait le choix d'une profession. L'art. 15 LAI suppose que l'assuré soit capable en principe d'opérer un tel choix, mais que seule l'invalidité l'en empêche, parce que ses propres connaissances sur les aptitudes exigées et les possibilités disponibles ne sont pas suffisantes pour choisir une profession adaptée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_882/2008 du 29 octobre 2009 consid. 5.1 et les références).

Selon la CMRPr n° 16.1 (état au 1er janvier 2025), le groupe ciblé pour l’orientation professionnelle est celui de personnes assurées ayant suivi une formation professionnelle initiale et/ou avec expérience professionnelle auxquelles l’invalidité rend difficile l’exercice de leur activité actuelle et qui ont par conséquent besoin d’une orientation professionnelle spécialisé.

4.             En l’occurrence, la recourante ne conteste pas spécifiquement le calcul du degré d’invalidité de l’intimé, lequel aboutit à un degré d’invalidité nul. Elle estime néanmoins ne pouvoir être apte à travailler qu’après une réadaptation et formation professionnelle adaptées.

La recourante exerçait une activité de serveuse depuis son arrivée en Suisse. Selon l’extrait de son compte individuel de la caisse cantonale genevoise de compensation, elle a travaillé pour les employeurs G______ et B______.

Compte tenu de l’absence de formation de la recourante, de son degré d’invalidité nul et du constat qu’il existe un large éventail d’activités variées et non qualifiées n’impliquant pas de formation particulière et compatibles avec les limitations fonctionnelles de la recourante (pas de piétinement, pas de déplacement sur de longues distances, pas de changement de directions, pas de marche sur sols irréguliers, ne pas monter ou descendre des escaliers fréquemment, ne pas grimper sur une échelle ou un tabouret, ne pas s’accroupir ou s’agenouiller et ne pas porter de charges de plus de 5-10 kg), une mesure d’ordre professionnel, singulièrement une orientation professionnelle, ne se justifie pas, ce d’autant que la recourante a déclaré qu’elle tentait par elle-même une reconversion vers une activité de manucure (procès-verbal d’audience du 17 février 2025).

Partant, la décision de l’intimé refusant une mesure d’ordre professionnel ne peut qu’être confirmée.

5.             Le recours est rejeté.

Au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner la recourante au paiement d'un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1 bis LAI).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de la recourante.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le