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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2092/2024

ATAS/1058/2024 du 23.12.2024 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2092/2024 ATAS/1058/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 23 décembre 2024

Chambre 5

 

En la cause

A______

A______

représenté par Me Marie-Josée COSTA, avocate

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en 1974, a travaillé en tant qu’agent de sécurité à temps partiel pour deux bars.

b. L’assuré a subi un accident en juillet 2017, en glissant dans les escaliers sur son lieu de travail. Il a subi une déchirure du ligament de l’épaule gauche et a présenté des lombalgies dès cet évènement. Une incapacité de travail totale a été attestée, et l’assurance-accidents a versé des indemnités journalières jusqu’au 30 juin 2018, date à laquelle l’assurance d’indemnités journalières en cas de maladie a pris le relais.

c. Le docteur B______, spécialiste FMH en rhumatologie, a procédé à l’expertise de l’assuré le 27 septembre 2018 à la demande de l’assurance d’indemnités journalières en cas de maladie. L’expert a mentionné dans l’anamnèse un rapport de consultation de la docteure C______, spécialiste FMH en rhumatologie, qui avait indiqué dans son rapport du 1er mars 2018 la persistance de lombalgies après l’accident du 2 juillet 2017 que l’IRM n’expliquait pas, et des douleurs de l’épaule gauche. L’assuré se plaignait de lombalgies basses et de douleurs à la face antérieure des genoux, mais n’avait pratiquement plus de gêne à l’épaule gauche. À l’issue de son examen, le rhumatologue a noté que l’assuré était relativement démonstratif. Le retour de la position penché en avant était dit douloureux, alors que l’assuré se redressait rapidement, sans attitude antalgique. L’examen neurologique ne montrait pas de signes d’irritation ni de déficit radiculaire aux membres inférieurs. L’imagerie révélait une discopathie dégénérative modérée L3-L4 et L4-L5 mais pas d’élément objectif permettant d’expliquer des lombalgies handicapantes, de sorte que l’impression générale était assez mitigée. S’agissant des genoux, l’expert se disait assez interrogatif face à des douleurs handicapantes, eu égard aux constats radio-cliniques somme toute relativement peu inquiétants. Une année après le début de l’incapacité de travail, les plaintes ne semblaient pas évoluer, et leur caractère invalidant n’était pas clairement justifié. Malgré l’absence d’atteinte ostéoarticulaire handicapante, le Dr B______ concluait à une incapacité de travail en tant qu’agent de sécurité. Cette profession était contre-indiquée par les lombalgies et l’épaule gauche plus fragile. La capacité de travail était en revanche entière dans une activité adaptée limitant le port de charges en élévation avec le bras gauche et le port de charges modérées à lourdes avec le tronc en flexion.

d. En date du 16 novembre 2018, l’assuré a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI).

e. Le 13 décembre 2018, la docteure D______, spécialiste FMH en médecine générale, a indiqué que l’assuré ne pouvait plus exercer son activité habituelle en raison de ses douleurs chroniques. Sa capacité de travail était entière dans une activité adaptée. Il ne pouvait pas stationner longtemps debout, parcourir de longs trajets, soulever et porter des charges, monter et descendre les escaliers, fléchir le tronc, s'accroupir, ou travailler avec les bras et la tête en élévation. Les diagnostics avec incidence sur la capacité de travail étaient des lombo-sciatalgies gauches, depuis 2014, des cervicalgies, des douleurs à l'épaule gauche depuis 2015 et des gonalgies bilatérales depuis 2017.

f. Le 10 avril 2019, l’OAI a calculé le degré d’invalidité en se fondant sur la méthode mixte, la sphère professionnelle étant pondérée à 75%. La comparaison des revenus aboutissait à un degré d’invalidité de 14%.

g. Dans un avis du 27 juin 2019, le service médical régional (ci-après : le SMR) de l'OAI a retenu une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle, mais entière depuis toujours dans une activité adaptée. Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : alternance des positions, pas de mouvements en porte-à-faux du tronc, port de charges limité à 10 kg, pas d'exposition à des vibrations, pas de port de charges en élévation avec le membre supérieur gauche, pas d'activité avec le membre supérieur gauche au-delà de l'horizontale, pas de mouvements répétitifs avec l'épaule gauche, pas de montées ou descentes d’escaliers ni échelles, pas de marche prolongée, pas de station debout prolongée, pas de marche en terrain irrégulier, pas de position à genoux ou accroupie.

h. Le 1er juillet 2019, l’OAI a adressé à l’assuré un projet de décision lui refusant une rente et des mesures d’ordre professionnel. La perte de gain était nulle dans la sphère professionnelle, et l’assuré ne subissait pas d’empêchement dans les travaux habituels compte tenu de sa capacité de travail entière. Au vu du large éventail des professions adaptées, des mesures professionnelles n’étaient pas nécessaires.

i. Par contestation du 21 août 2019, l’assuré a déclaré s’opposer à la décision de l’OAI. Il a soutenu que sa lésion à l’épaule l’empêchait d’exercer son travail et nécessitait un changement de profession.

j. Dans un rapport du 6 novembre 2019, la docteure E______, spécialiste FMH en neurologie, a relaté que l’examen mettait en évidence un léger syndrome cervical. L’examen électromyographique était quasiment normal, hormis une discrète inversion des vitesses de conduction compatible avec une discrète neuropathie du nerf médian droit dans le canal carpien.

k. L’assuré a suivi un stage auprès de la Fondation IPT, du 2 octobre au 2 décembre 2019. Dans leur rapport du 20 décembre 2019, les responsables ont évoqué et décrit les pistes professionnelles retenues, en ajoutant que les difficultés de santé de l’assuré ne permettaient pas « d’avancer vers une reconversion professionnelle ».

l. Dans un avis du 10 mars 2020, le SMR a préconisé un stage d’orientation professionnelle.

m. Dans un rapport du 25 mars 2020, le docteur F______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a indiqué que l’assuré se plaignait de cervico-brachialgies depuis trois ans et qu’il avait développé des douleurs chroniques diffuses au niveau de la région cervicale et lombaire ainsi qu’à l’épaule gauche, et des gonalgies bilatérales. Une intervention de l’épaule gauche était prévue, mais elle était retardée en raison du coronavirus. L’assuré ne pouvait rester longtemps debout, marcher sur de longs trajets, soulever et porter des charges, monter et descendre des escaliers, fléchir le tronc, s’accroupir et travailler avec les bras et la tête en élévation. Au plan médical, une activité adaptée sans utilisation des membres supérieurs était possible à 100% de manière progressive.

n. Le 29 mai 2020, le docteur G______, médecin au service de chirurgie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), a pratiqué une arthroscopie de l’épaule gauche, avec une réinsertion du sus-épineux, une ténodèse du long chef du biceps et une acromioplastie.

Le 9 octobre 2020, ce médecin a noté une évolution lentement favorable à gauche, avec néanmoins une symptomatologie à droite très handicapante pour l’assuré. Une IRM a montré une tendinopathie de la coiffe sans rupture transfixiante et sans autre lésion.

Dans un rapport du 16 décembre 2020, le Dr G______ a relaté une évolution marquée par des douleurs importantes, avec une shoulder subjective value de 50%. Une IRM de contrôle n’avait pas montré de récidive de lésion, mais une inflammation importante. Il proposait la poursuite de la physiothérapie, la situation n’étant pas stabilisée.

o. Selon une note du 21 septembre 2020, l’assuré a indiqué à l’OAI « ne pas être dans une optique COPAI », disant avoir besoin de temps pour récupérer.

p. Le 2 mars 2021, le Dr F______ a diagnostiqué, avec répercussion sur la capacité de travail, une lombosciatalgie gauche, une cervicalgie, une déchirure du tendineux droit, une chondropathie du condyle interne de grade III au genou droit, une tendinite d’Achille des deux côtés, et une tendinite nette dans la gouttière du biceps gauche. L’évolution était lentement favorable depuis l’intervention de l’épaule gauche, avec des douleurs surtout nocturnes et à la mobilisation. L’assuré était très gêné par son épaule droite, avec une difficulté à porter des charges et à la mobilisation. Ce médecin a confirmé les limitations fonctionnelles précédemment posées. L’assuré n’était pas en mesure, pour l’instant, de reprendre une activité professionnelle. Les limitations étaient probablement définitives dans l’activité habituelle. Dans une activité adaptée, la capacité de travail était de 50% avec une formation préalable.

q. Dans un avis du 23 avril 2021, le SMR a retenu une capacité de travail complète dans une activité adaptée, dès le 2 juillet 2017, nulle dès mai 2020, et de 50% dès mars 2021.

r. Dans une note du 1er juin 2021, l’OAI a retenu un degré d’invalidité de 35%. Des mesures de réadaptation ne seraient pas de nature à réduire le dommage. L’OAI a précisé qu’un « COPAI avait été jugé nécessaire pour évaluer les aptitudes professionnelles de l’assuré », mais que celui-ci n’avait pas pu le suivre en raison de son état alors non stabilisé. Informé par l’OAI de la capacité de travail de 50% retenue par le SMR, l’assuré lui avait indiqué que son état n’était toujours pas stabilisé et qu’il ne souhaitait pas bénéficier de mesures de réadaptation, mais attendait le versement d’une rente.

s. Une enquête ménagère a eu lieu au domicile de l’assuré le 13 septembre 2021. L’assuré a déclaré à l’enquêtrice qu’il aurait continué à travailler dans le même domaine d'activité sans atteinte à la santé. Il exerçait une activité à temps partiel par choix. L'activité de nuit lui apportait un revenu plus intéressant qu'un contrat de jour pour un travail similaire. Cette enquête a conclu à un empêchement pondéré sans exigibilité de 16% et à un empêchement pondéré avec exigibilité de 0%.

t. Par décision du 4 mai 2022, l’OAI a octroyé à l’assuré une rente entière d’invalidité du 1er août 2020 au 31 mai 2021. Compte tenu d’une capacité de travail de 50% dès mars 2021, la perte de gain dans la sphère professionnelle était de 47.12%, et de 35.34% une fois pondérée à 75%, au vu du statut mixte.

u. Par courrier du 6 mai 2022 à l’OAI, l’assuré a contesté l’amélioration de son état de santé en mars 2021. Il a soutenu que le Dr F______ n’avait repris son suivi qu’en juin 2021 et que ce médecin avait attesté une incapacité de travail totale.

Il a notamment produit plusieurs certificats d’arrêt de travail, un rapport des HUG du 27 juillet 2021 mentionnant une évolution lentement favorable, avec une récupération presque complète de la mobilité à l’épaule, des rapports de radiographie et d’IRM de la colonne lombaire du 10 août 2021, une IRM de l’épaule droite du 13 septembre 2021, ainsi que plusieurs rapports d’infiltration.

B. a. Le 24 mai 2022, l’assuré a interjeté recours contre la décision de l’OAI auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) et a contesté la capacité de travail de 50%, retenue dès mars 2021.

b. Dans un avis du 20 juin 2022, le SMR a notamment retenu que l’IRM de l’épaule droite de septembre 2021 révélait une aggravation par rapport à celle de 2019, et que l'IRM lombaire d'août 2021 faisait état d’une atteinte inflammatoire des articulations sacro-iliaques. Il y avait lieu d’interroger les médecins traitants sur ces points.

c. Dans sa réponse du 21 juin 2022, l’OAI a conclu au renvoi de la cause pour instruction complémentaire.

d. Par arrêt du 30 juin 2022 (ATAS/609/2022), la chambre de céans a annulé la décision de l’intimé du 4 mai 2022 et lui a renvoyé la cause pour reprise de l’instruction et nouvelle décision.

C. a. Dans un rapport du 24 octobre 2022, le Dr F______ a confirmé une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée avec une formation préalable, ainsi que les limitations fonctionnelles précédemment définies. Il a posé les diagnostics de lombosciatalgies gauches (M54.4), cervicalgies (M54.2), déchirure du tendon sus-épineux gauche (M75.1), chondropathie du condyle interne de grade III du genou droite (M23), tendinite d'Achille des deux côtés (M76.6), tendinite nette dans la gouttière du biceps gauche (M75.2), cervicalgies avec coup du lapin le 3 juin 2022, et déconditionnement. Il n’y avait aucun changement ; la colonne cervicale allait mieux, le dos et les épaules n’allaient pas, surtout la droite. L’assuré avait mal aux jambes et aux épaules la nuit, il était complètement déconditionné, avec des épaules tombantes et « démusclé ». Le récent coup du lapin avait eu pour suite une raideur cervicale, sans trouble neurologique.

b. Le 24 juillet 2023, le Dr F______ a conclu à une capacité de travail nulle, même dans une activité adaptée, signalant une évolution très stationnaire. L’assuré avait subi deux infiltrations du dos et une de l'épaule, qui avaient diminué la symptomatologie. Actuellement, il se plaignait de douleurs au niveau de l'épaule gauche et des deux genoux.

c. Après avoir informé l’assuré de son intention de mettre en œuvre une expertise orthopédique et rhumatologique et lui avoir soumis la mission d’expertise, l’OAI lui a indiqué, le 19 octobre 2023, que les experts seraient les docteurs H______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, et I______, spécialiste en rhumatologie.

d. Dans leur évaluation consensuelle du 15 janvier 2024, les experts ont rapporté des incohérences entre l'importance des plaintes de l’assuré et leurs constatations sur son comportement pendant l'expertise, celui-ci effectuant des gestes qu'il disait ne pas pouvoir réaliser chez lui. De plus, malgré le fait qu'il alléguait ne pas pouvoir rester assis plus d’une heure, il avait pu conduire sur un trajet de deux heures trente, sans arrêt. A priori, il n'y avait pas de comorbidité, le contexte psychosocial paraissait plutôt favorable. Les limitations ne semblaient pas uniformes dans tous les domaines de la vie et ne s'expliquaient pas par les seules pathologies rhumatologiques. Les diagnostics étaient ceux de status après arthroscopie de l'épaule gauche, qui ne montrait qu'une arthrose acromio-claviculaire modérée ; de douleurs de l'épaule droite secondaires à une tendinopathie fissuraire non transfixiante et calcifications du sous-scapulaire ; de douleurs cervicales sur discopathie, sans irradiation dans les membres supérieurs ; de douleurs des deux genoux, le genou gauche montrant essentiellement une atteinte dégénérative et le genou droit une atteinte dégénérative associée à une fissure méniscale ; de lombalgies sur lombarthrose L3-L4 et L4-L5 avec dessiccation discale, discopathie circonférentielle et déchirure de l'anneau discal fibreux, protrusion discale paramédiane gauche L3-L4 avec conflit de la racine L4 gauche, protrusion discale L4-L5 foraminale gauche au contact des deux racines L5, disque hypomobile en L5-S1 avec hémisacralisation L5 gauche, lombarthrose L4-L5 et arthropathie érosive L2-L3, L3-L4 ; et d’obésité. Les limitations fonctionnelles consistaient à privilégier les activités sédentaires en alternance des positions assise et debout, sans port de charges, à éviter les efforts de soulèvement à partir du sol au-delà de 5 kg, la position en porte-à-faux du buste, le port proche du corps de charges de plus de 5 kg, la position à genoux et accroupie, les montées et descentes répétées d'escaliers, le travail en hauteur (échelle, escabeau, tabouret, échafaudage), le piétinement prolongé, la marche en terrain irrégulier ou prolongée, les efforts des membres supérieurs au-delà de la ligne des épaules, et les efforts des membres supérieurs, en tirant ou en poussant.

Les experts ont de concert retenu que la capacité de travail dans l’activité de vigile était nulle depuis le 2 juillet 2017. Dans une activité adaptée, la capacité de travail était complète du 2 juillet 2017 à mai 2020, date de l’arthroscopie de l'épaule gauche, puis à nouveau complète depuis novembre 2020, soit six mois après l’intervention. L’assuré n’assumait que peu de gestes de la vie quotidienne mais il était pourtant parfaitement autonome et pouvait se déplacer en voiture ou en avion. Ses ressources internes semblaient pauvres, dans la mesure où il ne désirait pas reprendre une activité professionnelle et attendait une rente d'invalidité. Il n'y avait cependant aucune raison de nier l’exigibilité d’une activité parfaitement adaptée.

Au plan rhumatologique, le Dr I______ a relevé que l’assuré affirmait ne pas pouvoir tenir assis plus de 20 minutes, mais qu’il était resté une heure dix assis, sans manifester de douleurs et était venu en voiture de Genève, restant assis deux heures dans sa voiture. Il disait ne pas être capable de rester assis dans son canapé, mais plutôt allongé. Le piétinement était limité à 20 minutes, la marche à une demi-heure. Il ressentait également des douleurs à la montée et à la descente des escaliers. L’assuré se plaignait principalement d'une douleur lombaire depuis longtemps, qui avait augmenté progressivement sur plusieurs années, surtout depuis deux ans. La douleur à l’épaule gauche restait présente, même si la mobilité s’était améliorée. Elle n’était pas constante mais survenait surtout après l'effort. La capacité de cette épaule gauche était limitée à 60% selon l’assuré. Dans les suites de sa douleur de l'épaule gauche était apparue une douleur de l'épaule droite, actuellement plus importante qu’à gauche. Ces douleurs des épaules pouvaient le gêner à l'habillage et au déshabillage, lorsqu'il prenait une douche ou lorsqu’il se lavait les cheveux. Enfin, l’assuré souffrait de douleurs aux deux genoux, surtout depuis trois ans, plutôt variables, et il ressentait des craquements à la montée ou à la descente des escaliers. Il pouvait se mettre à genoux et accroupi mais pas maintenir ces positions. Il avait parfois une sensation d'instabilité des genoux et des difficultés pour le passage de la position assise à la position debout. Les nuits étaient variables et il ressentait souvent une douleur lombaire. Les experts ont décrit le traitement antalgique, notant du Condrosulf® une fois par jour, du Dafalgan® trois fois par jour, de l’ibuprofène trois fois jour, ce qui déclenchait beaucoup de douleurs d'estomac. L’assuré avait subi une gastroscopie et coloscopie qui s’étaient révélées normales. Il avait arrêté ce traitement durant trois mois avant de le reprendre. Il prenait du Targin® lorsque la douleur est plus forte. Sa douleur sur l'échelle visuelle analogique était cotée à 2.5/10, au maximum 7/10.

L’examen rhumatologique ne trouvait pas de signe de fibromyalgie, ni de signe d'épicondylite du côté droit. L'examen cervical et lombaire montrait une bonne mobilité et l'absence d'irradiation, et l'examen neurologique était normal. L'examen de l'épaule gauche était également parfaitement rassurant, sans signes de capsulite rétractile. L'examen des deux genoux, malgré une atteinte dégénérative bilatérale, était également rassurant avec une bonne mobilité et l'absence d'épanchement. Finalement, l'examen de l'épaule droite confirmait l'existence d'une atteinte de la coiffe des rotateurs. L’assuré présentait par ailleurs un syndrome d'apnées du sommeil. Il avait été opéré d'hémorroïdes et devait être opéré prochainement d'une sinusite. Il n’était pas suivi par un psychiatre.

L’expert a noté que l’assuré s’était déshabillé en enlevant un sweatshirt à capuche puis un t-shirt en levant les bras largement au-dessus de la tête. Il descendait son pantalon sans difficulté en position debout, mais en se tenant sur le dossier de la chaise.

L’examen du Dr H______ était cohérent avec les déclarations de l’assuré concernant ses douleurs. En revanche, cet expert s’est dit fortement gêné par le fait que l’assuré, bien qu’il indiquât ne pas pouvoir rester assis plus d’une heure, avait pu conduire sur un trajet de deux heures trente, sans arrêt. Il a précisé, s’agissant des diagnostics de douleurs aux genoux, qu’il s’agissait de gonalgies sur chondropathie de stade III du condyle externe et déchirure du ménisque interne des deux côtés, et en ce qui concernait les épaules, d’omalgies droites sur déchirure partielle du sus-épineux, non transfixiante et tendinopathie calcifiante de la coiffe des rotateurs et déchirure partielle du sous-scapulaire. La situation n’était pas stabilisée au niveau de l'épaule à droite et des deux genoux. Ces articulations méritaient potentiellement un traitement par arthroscopie, mais cela ne changerait globalement pas grand-chose à la capacité de travail de l’assuré, dont le problème relevait des lombalgies. Celui-ci avait bénéficié de près de dix infiltrations au rachis, avait subi cinq IRM, pratiquait la physiothérapie et était sous médication. Malgré cela, l’évolution du rachis était stationnaire, voire s’aggravait. Avec le temps, si les problèmes d'omalgies droites et de genoux s’amélioraient, on pourrait imaginer lever la restriction du travail au-dessus du plan des épaules, et dans une certaine mesure la pratique de terrains difficiles. Le problème lombaire resterait toutefois un handicap certain pour l’assuré, raison pour laquelle la capacité de travail dans une activité adaptée était de 80%. La prise en charge des gonalgies bilatérales et de l'omalgie droite pouvait également avoir un impact sur la capacité de travail dans une activité adaptée, et on pouvait imaginer qu'avec une prise en charge bien conduite, on pourrait obtenir une capacité de travail à 100% dans une activité adaptée.

e. L’OAI a recalculé le degré d’invalidité de l’assuré, le 20 février 2024. Il s’est référé, pour le revenu après invalidité, au revenu tiré d’activités simples et répétitives selon l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS) 2018, TA1_tirage_skill_level, niveau 1, soit CHF 5'417.- par mois, et CHF 60'990.- par an, après adaptation à la durée normale de travail. Le revenu sans invalidité de CHF 43'038.- en 2017 extrapolé à plein temps s’élevait à CHF 57'665.-. En 2020, le degré d’invalidité, fondé sur un revenu après invalidité tiré des données statistiques de l’ESS 2020 de CHF 65'815.-, et sur un revenu sans invalidité de CHF 58'634.- à plein temps et après indexation, était nul. Il n’y avait aucune invalidité dans la sphère ménagère.

f. Le 26 février 2024, l’OAI a adressé un projet de décision à l’assuré, lui allouant une rente entière du 1er août 2020 au 31 janvier 2021. Dès cette date, le degré d’invalidité était nul et n’ouvrait pas le droit à une rente d’invalidité.

g. Le 15 avril 2024, l’assuré a déclaré contester le projet de décision de l’OAI. Il a soutenu que l’expertise comprenait bon nombre de contradictions, qu’il a détaillées.

h. Par décision du 27 mai 2024, l’OAI a confirmé les termes de son projet.

D. a. Par écriture de son mandataire, du 24 juin 2024, l’assuré a interjeté recours contre la décision de l’OAI devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans). Il a conclu, sous suite de dépens, préalablement, à ce qu’une expertise soit ordonnée afin de se prononcer sur son état de santé, principalement, à la modification de la décision de l’intimé en ce sens qu'une rente entière d'invalidité lui était due pour une durée indéterminée à compter du 1er mai 2019, à ce qu’il soit dit et constaté qu’il avait droit à une rente entière d'invalidité à compter du 1er mai 2019 pour une durée indéterminée, subsidiairement, à l’annulation de la décision de l’intimé et au renvoi de la cause à cet office, pour mise en place de mesures d'ordre professionnel, à ce qu’il soit dit et constaté qu’il avait droit à des mesures d'ordre professionnel, et plus subsidiairement, à l’annulation de la décision de l’intimé, au renvoi de la cause à cet office pour instruction complémentaire et nouvelle décision, et à ce qu’il soit ordonné à cet office de confier une expertise à des spécialistes choisis par consensus.

Il a reproché à l’intimé de s’être uniquement fondé sur le rapport d’expertise, dont le SMR s’était limité à reprendre les conclusions. Celles-ci semblaient reposer sur le seul fait qu’il avait pu conduire depuis Genève pour se rendre au lieu de l'expertise. Il s’agissait cependant d'un élément ponctuel qui ne démontrait rien, le recourant s’étant soumis à ses obligations en prenant des médicaments pour supporter les douleurs et en mettant le siège chauffant pour arriver au centre d'expertise comme il l’avait pu. Cela n’avait rien à voir avec les efforts soutenus, réguliers et quotidiens qu'impliquait une activité professionnelle, étant précisé que la prise de médicaments avait également faussé l'examen et les constatations des experts. Le recourant s’est dit surpris de lire qu'il aurait dit clairement vouloir une rente. Après écoute des enregistrements, il avait en réalité exprimé ne pas savoir ce qu'il pourrait encore faire et n’avoir jamais évoqué une rente. Les experts avaient ainsi faussement interprété les propos du recourant en sa défaveur. Le rapport d'expertise était non seulement contradictoire mais également non motivé. Ce rapport retenait une incapacité totale, mais uniquement à compter de mai 2020, ce qui était un non-sens. En effet, le recourant avait fait une chute en juillet 2017, que l’expert ne mentionnait même pas puisqu’il fixait le début de l'incapacité de travail à une rixe intervenue en mai 2020. Quant à l'orthopédiste, il ne discutait pas de la période antérieure à mai 2020. Si le recourant avait dû être opéré en mai 2020, opération repoussée en raison de la pandémie, les atteintes et l'incapacité de travail totale qui en découlait étaient antérieures. Les conclusions des experts reposaient ainsi sur une étude superficielle du dossier. La fin de l'incapacité de travail était fixée à novembre 2020 et n’était motivée que par l'écoulement du temps, soit six mois après l'intervention. Or, le 16 décembre 2020, les HUG avaient conclu à une inflammation importante. L’expert orthopédiste admettait que la situation n’était pas stabilisée et il recommandait trois interventions. Il soulignait que l’atteinte au rachis se dégradait malgré les traitements. Le rapport d’expertise contenait en outre une importante contradiction, l’expert en chirurgie orthopédique mentionnant une capacité de travail de 80%, tout en retenant une capacité de travail complète. En outre, l’expert rhumatologue n’était pas spécialisé FMH. Partant, l’expertise n’avait aucune valeur probante. Le début du droit remontait manifestement à mai 2019, soit six mois après le dépôt de la demande.

Le degré d’invalidité était également erroné. En effet, le recourant avait une activité fixe et un emploi à horaires variables. Contrairement à ce qui ressortait du rapport de l'enquête ménagère, l'exercice d'une activité à temps partiel n'était pas un choix. Le recourant aurait voulu travailler à 100% mais n'avait pas trouvé de poste dans la sécurité le soir, seul domaine où il pouvait faire valoir son expérience. Il avait été mal compris par l'enquêtrice, il aurait voulu travailler à 100% de nuit car cela était plus lucratif, mais n'avait pas trouvé de poste compatible avec ses deux activités pour atteindre un temps complet. À l'époque de l'accident, le recourant avait besoin de trouver un logement à la suite de la séparation de son épouse et avait donc besoin de travailler à plein temps pour des raisons financières. Ainsi, un statut d'actif à 100% aurait dû être retenu.

En outre, si la chambre de céans devait retenir une capacité de travail résiduelle, encore faudrait-il qu'elle soit exploitable sur le marché du travail. Or, l’intimé avait considéré qu’un stage d’évaluation était nécessaire pour déterminer la capacité de travail en 2021. L’état de santé s’était encore aggravé depuis, de sorte que des mesures d'ordre professionnel devaient être mises en place avant d'envisager une suppression de rente. La clôture du mandat de réadaptation en 2021 était due à une incompréhension par la spécialiste de réadaptation, le recourant lui ayant indiqué que son état n’était pas stabilisé en 2021, et il n’était ainsi pas prêt à se soumettre à des mesures de réadaptation à ce moment, ce qui ne relevait pas d’un refus de sa part. Les limitations fonctionnelles devaient être revues, de même que la capacité de travail et le rendement. Le revenu avec invalidité devait également être revu, en tenant compte d’un abattement maximal au vu du taux d’occupation partiel, des limitations fonctionnelles et des années de service.

b. Dans sa réponse du 30 août 2024, l’intimé a conclu au rejet du recours. Il a soutenu, en substance, que l’expertise revêtait valeur probante. Les limitations fonctionnelles n’empêchaient pas l’exercice d’activités adaptées, accessibles sans formation complémentaire. Les compétences dans le domaine de la sécurité étaient transférables dans une activité de surveillant, derrière un écran, dans une entreprise de sécurité ou dans un commerce, et le recourant pouvait également travailler dans un centre d'appel. S’agissant du statut mixte retenu, il était justifié car le recourant travaillait à 75% avant son accident.

c. Le 26 septembre 2024, le recourant a persisté dans ses conclusions. Il a soutenu que l’intimé ne répondait pas à ses griefs sur la date de début de l'incapacité totale de travail dans une activité adaptée ou sur la contradiction de l'expert orthopédique sur sa prétendue capacité de travail dans une activité adaptée, qui était à la fois estimée à 80% et 100%. L’expertise n’avait aucune valeur probante. L’intimé ne s’était pas non plus prononcé sur ses arguments sur son statut. Les activités suggérées par celui-ci n’étaient pas adaptées, dès lors qu’il ne pouvait rester en position assise.

Il a affirmé que sa hernie discale s’était aggravée selon un rapport d’IRM du 10 septembre 2024, qu’il a produit, et qui concluait à la majoration de taille de la hernie discale L3-L4 postéro-latérale et foraminale gauche par rapport à l’IRM précédente du 27 avril 2023, avec conflit radiculaire L3 gauche, ainsi qu’un rapport d’infiltration de l’épaule droite du 12 septembre 2024.

d. Dans sa duplique du 17 octobre 2024, l’intimé a persisté dans ses conclusions. Il s’est rallié à l’avis du SMR du 10 octobre 2024, lequel notait que la hernie discale avait été prise en compte par les experts et que l’IRM n’était pas nécessairement corrélée à un examen clinique.

e. Dans ses déterminations du 31 octobre 2024, le recourant a persisté dans ses conclusions, soutenant que la récente IRM révélait un conflit radiculaire que les experts ignoraient. Il a produit une attestation du 28 octobre 2024 établie par le docteur J______, spécialiste FMH en médecine générale, mentionnant une aggravation nette de l’état anxieux depuis deux semaines, ayant motivé une médication psychiatrique et une demande de consultation, ajoutant que l’intimé n’avait pas investigué cet aspect.

f. La chambre de céans a transmis copie de cette écriture à l’intimé le 31 octobre 2024.

g. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

h. Les autres faits et documents seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « En droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de refus de prestations invalidité de l’OAI, au-delà du 31 janvier 2021.

3.              

3.1 La LAI a connu une novelle le 19 juin 2020, entrée en vigueur le 1er janvier 2022. Dans ce cadre, le système des quarts de rente jusque-là applicable a été remplacé par un système linéaire de rentes (Message concernant la modification de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité [Développement continu de l'assurance-invalidité], FF 2017 2442).

3.2 L’art. 28b LAI, en vigueur depuis le 1er janvier 2022, dispose que la quotité de la rente est fixée en pourcentage d’une rente entière (al. 1). Pour un taux d’invalidité compris entre 50 et 69%, la quotité de la rente correspond au taux d’invalidité (al. 2). Pour un taux d’invalidité supérieur ou égal à 70%, l’assuré a droit à une rente entière (al. 3). La lettre b des dispositions transitoires relatives à cette modification prévoit notamment que pour les bénéficiaires de rente dont le droit à la rente est né avant l’entrée en vigueur de ladite modification et qui n’avaient pas encore 55 ans à cette date, la quotité de la rente ne change pas tant que leur taux d’invalidité ne subit pas de modification au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA (al. 1). La quotité de la rente reste également inchangée après une modification du taux d’invalidité au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA si l’application de l’art. 28b de la loi se traduit par une baisse de la rente en cas d’augmentation du taux d’invalidité ou par une augmentation de la rente en cas de réduction (al. 2). Le Message précise que la quotité de la rente est calculée conformément au nouveau système si son taux d’invalidité a subi une modification d’au moins cinq points de pourcentage (FF 2017 2504). On rappellera ici que l’art. 17 LPGA régissant la révision du droit à la rente en cas de modification du taux d’invalidité s’applique également à la décision par laquelle une rente échelonnée dans le temps est accordée avec effet rétroactif (arrêt du Tribunal fédéral 9C_244/2020 du 5 janvier 2021 consid. 4.3.1).

3.3 Selon la jurisprudence, lorsque la décision dont est recours a été rendue après le 1er janvier 2022, il y a lieu conformément aux principes de droit intertemporel généralement applicables (cf. sur ce point ATF 144 V 210 consid. 4.3.1) de déterminer en vertu du droit applicable jusqu’au 31 décembre 2021 si un droit à la rente est né avant cette date. Lorsque le droit à la rente est né après cette date, le nouveau droit est applicable (arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2).

3.4 En l’occurence, le droit à la rente est né en août 2020 selon la décision de l’intimé, de sorte que l’ancien droit reste applicable, sous réserve d’une modification du degré d’invalidité de cinq points de pourcentage au moins après le 1er janvier 2022 (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_55/2023 du 11 juillet 2023 consid. 2.2), dont la chambre de céans examinera, ci-après, si elle est survenue.

4.             Selon l’art. 8 al. 1er LAI, les assurés invalides ou menacés d’une invalidité (art. 8 LPGA) ont droit à des mesures de réadaptation pour autant que ces mesures soient nécessaires et de nature à rétablir, maintenir ou améliorer leur capacité de gain ou leur capacité d’accomplir leurs travaux habituels (let. a) et que les conditions d’octroi des différentes mesures soient remplies (let. b). Le droit aux mesures de réadaptation n’est pas lié à l’exercice d’une activité lucrative préalable. Lors de la fixation de ces mesures, il est tenu compte de la durée probable de la vie professionnelle restante. L’art. 8 al. 3 let. b LAI dispose que les mesures de réadaptation comprennent notamment des mesures de réinsertion préparant à la réadaptation professionnelle et les mesures d’ordre professionnel, lesquelles englobent l’orientation professionnelle, la formation professionnelle initiale, le reclassement, le placement et l’aide en capital.

L’art. 14a LAI précise que l’assuré qui présente depuis six mois au moins une incapacité de travail (art. 6 LPGA) de 50% au moins a droit à des mesures de réinsertion préparant à la réadaptation professionnelle (mesures de réinsertion), pour autant que celles-ci servent à créer les conditions permettant la mise en œuvre de mesures d’ordre professionnel (al. 1). Sont considérées comme mesures de réinsertion les mesures ciblées ci-après qui visent la réadaptation professionnelle les mesures socioprofessionnelles (let. a) ; et les mesures d’occupation (let. b) (al. 2). L’art. 15 LAI dispose que l’assuré auquel son invalidité rend difficile le choix d’une profession ou l’exercice de son activité antérieure a droit à l’orientation professionnelle.

Pour déterminer si une mesure est de nature à maintenir ou à améliorer la capacité de gain d'un assuré, il convient d'effectuer un pronostic sur les chances de succès des mesures demandées (ATF 132 V 215 consid. 3.2.2 et les références). Celles-ci ne seront pas allouées si elles sont selon toute vraisemblance vouées à l'échec (arrêt du Tribunal fédéral I 388/06 du 25 avril 2007 consid. 7.2). Le droit à une mesure de réadaptation suppose en outre qu'elle soit appropriée au but de la réadaptation poursuivi par l'assurance-invalidité, tant objectivement en ce qui concerne la mesure que sur le plan subjectif en ce qui concerne la personne de l'assuré (VSI 2002 p. 111 consid. 2 et les références).

De plus, il faut que l'invalidité soit d'une certaine gravité pour que le droit à des mesures de réadaptation soit ouvert. La jurisprudence a ainsi fixé le seuil d'invalidité à partir duquel des mesures de réadaptation doivent être octroyées à 20% (ATF 130 V 488 consid. 4.2, 124 V 108 consid. 3a).

5.             Il convient en préambule de rappeler ce qui suit au sujet du droit à la rente.

En vertu de l’art. 28 LAI dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021, l’assuré a droit à une rente d’invalidité aux conditions suivantes : sa capacité de gain ou sa capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles (let. a) ; il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable (let. b) ; au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (let. c) (al. 1). L’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à trois quarts de rente s’il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins (al. 2).

L’art. 29 LAI dispose que le droit à la rente prend naissance au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA, mais pas avant le mois qui suit le 18e anniversaire de l’assuré (al. 1). Le droit ne prend pas naissance tant que l’assuré peut faire valoir son droit à une indemnité journalière au sens de l’art. 22 (al. 2).

Conformément au principe selon lequel la réadaptation prime la rente, ancré à l’art. 28 al. 1 let. a LAI, le droit à la rente ne peut en principe naître que lorsque toutes les possibilités de réadaptation, dont les mesures de réinsertion, ont été épuisées. Le fait que les mesures de réadaptation n’aient été que partiellement, voire pas du tout efficaces, est sans incidence sur cet état de fait. Néanmoins, avant ce moment, un droit (temporaire) à la rente peut exceptionnellement naître si l’assuré n’était pas ou pas encore apte à la réadaptation (ATF 148 V 397 consid. 6.2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_380/2021 du 31 janvier 2022 consid. 5.1).

6.             La loi prévoit différentes méthodes pour évaluer l'invalidité d'un assuré en fonction du statut de ce dernier.

6.1 Chez les assurés qui exerçaient une activité lucrative à plein temps avant d'être atteints dans leur santé physique, mentale ou psychique, il s’agit d’appliquer la méthode générale de comparaison des revenus (art. 28a al. 1 LAI en corrélation avec l'art. 16 LPGA) (ATF 137 V 334 consid. 3.1.1).

6.1.1 L’art. 16 LPGA prévoit que, pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation. Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient en principe de se placer au moment de la naissance du droit à la rente (ATF 128 V 174 consid. 4a).

6.1.2 Le revenu sans invalidité se détermine en établissant au degré de la vraisemblance prépondérante ce que l’intéressé aurait effectivement pu réaliser au moment déterminant s’il était en bonne santé (ATF 129 V 222 consid. 4.3.1). Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu’il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l’assuré a obtenu avant l’atteinte à sa santé, en tenant compte de l’évolution des salaires. En effet, selon l’expérience générale, la dernière activité aurait été poursuivie sans atteinte à la santé. Les exceptions à ce principe doivent être établies au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_934/2015 du 9 mai 2016 consid. 2.2).

6.1.3 Pour déterminer le revenu d'invalide de l'assuré, il faut en l'absence d'un revenu effectivement réalisé se référer aux données salariales, telles qu'elles résultent des ESS (ATF 126 V 75 consid. 3b). Le revenu tiré d'activités simples et répétitives (niveau 4 jusqu'à l'ESS 2010 et niveau 1 dès l'ESS 2012) est une valeur statistique qui s'applique à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers (arrêt du Tribunal fédéral 9C_692/2015 du 23 février 2016 consid. 3.1). La notion de marché équilibré du travail est une notion théorique et abstraite qui sert de critère de distinction entre les cas tombant sous le coup de l'assurance-chômage et ceux qui relèvent de l'assurance-invalidité. Elle implique, d'une part, un certain équilibre entre l'offre et la demande de main d'œuvre et, d'autre part, un marché du travail structuré de telle sorte qu'il offre un éventail d'emplois diversifiés, tant au regard des exigences professionnelles et intellectuelles qu'au niveau des sollicitations physiques. Il n'y a donc pas lieu d'examiner la question de savoir si un assuré peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s'il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail sur un marché où les places de travail disponibles correspondent à l'offre de main d'œuvre (arrêt du Tribunal fédéral 9C_326/2018 du 5 octobre 2018 consid. 6.2 et les références). Selon la jurisprudence, il y a lieu de procéder à une réduction des salaires statistiques lorsqu'il résulte de l’ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité ou catégorie d’autorisation de séjour et taux d’occupation) que le revenu que pourrait réaliser l'assuré en mettant en valeur sa capacité résiduelle de travail est inférieur à la moyenne. Un abattement global maximal de 25% permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 148 V 174 consid. 6.3). Savoir s'il convient de procéder à un abattement sur le salaire statistique en raison des circonstances du cas particulier constitue une question de droit, tandis que l'étendue de l'abattement justifié dans un cas concret constitue une question typique relevant du pouvoir d'appréciation (ATF 146 V 16 consid. 4.2). 

6.2 Chez les assurés qui n'exerçaient pas d'activité lucrative avant d'être atteints dans leur santé physique, mentale ou psychique et dont il ne peut être exigé qu'ils en exercent une, il y a lieu d'effectuer une comparaison des activités, en cherchant à établir dans quelle mesure l'assuré est empêché d'accomplir ses travaux habituels ; c'est la méthode spécifique d'évaluation de l'invalidité (art. 28a al. 2 LAI en corrélation avec les art. 8 al. 3 LPGA). L’art. 27 al. 1 du règlement sur l'assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201) dans sa teneur dès le 1er janvier 2018 dispose que par travaux habituels, il faut notamment entendre l'activité usuelle dans le ménage, ainsi que les soins et l’assistance apportés aux proches.

S’agissant du degré d’invalidité dans la sphère ménagère, une enquête ménagère effectuée au domicile de la personne constitue en règle générale une base appropriée et suffisante pour évaluer les empêchements dans l'accomplissement des travaux habituels (ATF 128 V 93 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_657/2021 du 22 novembre 2022 consid. 5.1).  

6.3 L'art. 27 bis RAI dans sa teneur du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2021 – applicable ratione temporis (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_553/2017 du 18 décembre 2017 consid. 5.2) prévoyait que pour les personnes qui exercent une activité lucrative à temps partiel et accomplissent par ailleurs des travaux habituels visés à l'art. 7 al. 2 LAI, le taux d'invalidité est déterminé par l'addition des taux suivants : le taux d'invalidité en lien avec l'activité lucrative (let. a) ; le taux d'invalidité en lien avec les travaux habituels (let. b) (al. 2). Le calcul du taux d'invalidité en lien avec l'activité lucrative est régi par l'art. 16 LPGA, étant entendu que le revenu que l'assuré aurait pu obtenir de l'activité lucrative exercée à temps partiel, s'il n'était pas invalide, est extrapolé pour la même activité lucrative exercée à plein temps (let. a) ; la perte de gain exprimée en pourcentage est pondérée au moyen du taux d'occupation qu'aurait l'assuré s'il n'était pas invalide (let. b) (al. 3). Pour le calcul du taux d’invalidité en lien avec les travaux habituels, on établit le pourcentage que représentent les limitations dans les travaux habituels par rapport à la situation si l’assuré n’était pas invalide. Ce pourcentage est pondéré au moyen de la différence entre le taux d’occupation visé à l’al. 3 let. b et une activité lucrative exercée à plein temps (al. 4).

Avec cette réglementation, le calcul du taux d’invalidité pour la partie concernant l’activité lucrative continue d’être régi par l’art. 16 LPGA. L’élément nouveau est que le revenu sans invalidité n’est plus déterminé sur la base du revenu correspondant au taux d’occupation de l’assuré, mais est désormais extrapolé pour la même activité lucrative exercée à plein temps. La détermination du revenu d’invalide est, quant à elle, inchangée. La perte de gain exprimée en pourcentage du revenu sans invalidité est ensuite pondérée au moyen du taux d’occupation auquel l’assuré travaillerait s’il n’était pas invalide (Gisella MAURO, Ralph LEUENBERGER, Changements dans la méthode mixte in Sécurité sociale, CHSS 1/2018).

6.4 Pour déterminer la méthode applicable à un cas particulier, il faut selon la jurisprudence non pas, malgré la teneur de l'art. 8 al. 3 LPGA, chercher à savoir dans quelle mesure l'exercice d'une activité lucrative aurait été exigible de la part de l'assuré, mais se demander ce qu’il aurait fait si l'atteinte à la santé n'était pas survenue (ATF 133 V 504 consid. 3.3). Lorsque l’assuré accomplit ses travaux habituels, il convient d'examiner, à la lumière de sa situation personnelle, familiale, sociale et professionnelle, s'il aurait consacré, étant valide, l'essentiel de son activité à son ménage ou s'il aurait également vaqué à une occupation lucrative. Pour déterminer, voire circonscrire le champ d'activité probable de l'assuré, il faut notamment tenir compte d'éléments tels que la situation financière du ménage, l'éducation des enfants, l'âge de l'assuré, ses qualifications professionnelles, sa formation ainsi que ses affinités et talents personnels. Selon la pratique, la question du statut doit être tranchée sur la base de l'évolution de la situation jusqu'au prononcé de la décision administrative litigieuse, encore que, pour admettre l'éventualité de l'exercice d'une activité lucrative partielle ou complète, il faut que la force probatoire reconnue habituellement en droit des assurances sociales atteigne le degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 137 V 334 consid. 3 et les références). L’évaluation tiendra également compte de la volonté hypothétique de l'assuré, qui comme fait interne ne peut être l'objet d'une administration directe de la preuve et doit être déduite d'indices extérieurs établis au degré de la vraisemblance prépondérante tel que requis en droit des assurances sociales (arrêt du Tribunal fédéral 9C_279/2018 du 28 juin 2018 consid. 2.2).

Selon le principe de la « déclaration de la première heure » développé par la jurisprudence et applicable de manière générale en assurances sociales, en présence de deux versions différentes et contradictoires d'un fait, le juge peut accorder sa préférence à celle que l'assuré a donnée alors qu'il en ignorait peut-être les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être consciemment ou non le résultat de réflexions ultérieures (ATF 142 V 590 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_663/2009 du 1er février 2010 consid. 3.2).

7.             Pour pouvoir trancher le droit aux prestations, l'administration ou l'instance de recours a besoin de documents que le médecin ou d'autres spécialistes doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 ; 115 V 133 consid. 2). Ces données médicales permettent généralement une appréciation objective du cas (arrêt du Tribunal fédéral 8C_713/2019 du 12 août 2020 consid. 5.2).

7.1 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales, le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il convient que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3a, 122 V 157 consid. 1c).

7.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux. Ainsi, lorsqu'au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu’en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien- fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

7.3 S'agissant de la valeur probante des rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc et les références). Au surplus, on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou un juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_405/2008 du 29 septembre 2008 consid. 3.2)

8.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

9.             En l’espèce, il sied en premier lieu d’examiner si le statut mixte retenu par l’intimé est conforme au droit.

9.1 Le recourant a toujours fait état d’activités exercées à temps partiel, et ses déclarations à l’enquêtrice sont univoques. Le recourant ne conteste d’ailleurs pas les avoir tenues mais soutient uniquement qu’elles découlent d’un malentendu, dont on ne voit cependant pas très bien en quoi il consisterait. Même s’il fallait considérer que le recourant a préféré des activités de nuit à temps partiel car elles étaient mieux rémunérées que des activités de jour, cela ne modifie en rien le caractère volontaire de ce mode d’organisation de sa vie professionnelle. On ajoutera que, même s’il tenait à travailler de nuit, le recourant aurait pu rechercher des compléments d’activités, par exemple en début de soirée ou en fin d’après-midi. Or, il n’existe aucun indice étayant les allégations à l’appui de son recours selon lesquelles il aurait cherché à augmenter son temps de travail, à compléter ses activités ou à trouver un autre emploi à temps complet. Partant, on doit admettre, notamment eu égard au principe des déclarations de la première heure, que le recourant aurait poursuivi une activité à temps partiel, même sans atteinte à la santé. Ses arguments selon lesquels son statut familial et son divorce l’auraient contraint à augmenter son taux d’activité afin de trouver un logement à la suite de sa séparation ne suffisent pas à retenir, au degré de la vraisemblance prépondérante, qu’il aurait cherché une activité à plein temps, sans atteinte à la santé. On doit noter ici que le recourant vit, avec sa compagne, dans un logement de quatre pièces depuis sa séparation en 2018, selon ce qui ressort de l’enquête ménagère et du rapport du Dr B______, de sorte qu’on ne saurait considérer qu’il lui aurait été indispensable de trouver un revenu rémunéré à plein temps pour se reloger de manière adéquate à la suite de sa séparation, sans atteinte à la santé.

Au plan du calcul, l’intimé a établi que l’activité professionnelle était exercée à 75%. Le premier employeur a fait état d’une activité exercée huit à douze heures par semaine dans son rapport du 11 décembre 2018, et le second a fait état d’un taux d’activité de 50% dans l’annonce de sinistre, le contrat de travail avec cet employeur stipulant un revenu de CHF 2'100.- sur la base de la convention collective de travail. Le taux de 75% correspond à l’addition de ces taux d’activité en tenant compte d’une durée hebdomadaire de travail de 40 heures par semaine, une moyenne de dix heures par semaine étant prise en compte pour la première activité. Ce calcul s’avère donc exact.

On notera encore que l’enquête concluant à l’absence d’empêchement dans la sphère ménagère n’est pas contestée, et il n’y a pas lieu d’y revenir.

9.2 Il convient d’examiner si l’expertise des Drs H______ et I______ satisfait aux exigences en matière de valeur probante de rapports médicaux.

Cette expertise a été basée sur le dossier médical complet du recourant, qui y est résumé. Elle contient, au plan formel, les éléments nécessaires selon la jurisprudence, puisque les médecins ont relaté l’anamnèse, les plaintes du recourant, ont consigné leurs observations cliniques et posé des diagnostics précis avant de se prononcer sur la capacité de travail du recourant.

Sur le fond, les contradictions que le recourant croit voir dans le rapport d’expertise et qu’il a énumérées dans son courrier de contestation, ne relèvent pas de contradictions intrinsèques de l’expertise, mais il s’agit en réalité de différences entre les rapports médicaux et pièces du dossier qui y sont cités. Il y a, en revanche, une contradiction importante dans le fait que l’expert orthopédiste retient une capacité de travail de 80%, en raison du problème lombaire, alors même que les experts ont admis dans leur consilium une capacité de travail totale dans une activité adaptée, sans aucunement expliquer cette différence. On relèvera, de plus, que les conclusions de l’orthopédiste sont quelque peu imprécises, voire contradictoires, puisqu’il semble retenir que les lombalgies entraînent une réduction de 20% de la capacité de travail, tout en ajoutant qu’une prise en charge des gonalgies et de l’omalgie permettrait d’augmenter la capacité de travail à 100%. On s’étonne, dans ces circonstances, que l’intimé n’ait pas invité les experts à préciser et clarifier leurs conclusions, et qu’il ne se soit pas déterminé sur cette contradiction, que le recourant a relevée à plusieurs reprises dans la présente procédure. Cela étant, comme on le verra ci-dessous, ce point n’a pas de répercussion pratique en l’espèce.

Pour le surplus, la motivation des conclusions des experts selon lesquelles la capacité de travail est entière dans une activité adaptée est certes relativement succincte. Cela étant, ils ont fait état, dans ce cadre, d’examens cliniques rassurants, révélant une bonne mobilité, et de douleurs dont la cotation est relativement basse. Ils ont, en outre, tenu compte des plaintes du recourant dans la définition des limitations fonctionnelles. Ils ont, par ailleurs, évoqué des incohérences, citant notamment le fait que le recourant a été en mesure de se dévêtir et de se rhabiller en accomplissant des gestes qu’il disait douloureux, voire impossibles, qu’il a pu conduire durant deux heures en tout cas sans arrêt, et rester assis durant l’intégralité des entretiens, alors qu’il soutient ne pas pouvoir tenir la position assise plus d’une heure. Ainsi, contrairement à ce que soutient le recourant, les experts ne se sont pas bornés à exclure toute incapacité de travail en raison du seul fait qu’il avait pu conduire, sans s’arrêter, de Genève à Fribourg.

À ce sujet, ses explications quant au fait qu’il se serait simplement plié à ses obligations de collaborer et aurait pris des médicaments ne convainquent pas. D’une part, il aurait pu se rendre à l’examen en aménageant des pauses si celles-ci étaient indispensables. D’autre part, si la médication lui permet de surmonter ses douleurs, on ne comprend pas pourquoi tel ne serait pas le cas dans la vie quotidienne et dans le cadre d’une activité lucrative, étant souligné que le recourant n’allègue pas qu’il aurait pris des antalgiques dans une mesure excédant la posologie recommandée, étant précisé que la compliance à un traitement médicamenteux paraît relever d’un traitement exigible au sens de l’art.  7 al. 1 LPGA, en l’absence de contre-indication médicalement établie. Or, dans le cas d’espèce, si le recourant a rapporté des maux de ventre en lien avec la prise d’antalgiques, aucun médecin n’a fait état d’effets secondaires incompatibles avec la poursuite du traitement ou émis de réserves à ce sujet.

Quant au fait que les experts auraient mal interprété les déclarations du recourant en concluant que celui-ci espérait une rente, il n’a guère de portée. En effet, ce point n’est pas déterminant pour apprécier la capacité de travail médico-théorique, même s’il peut être pris en compte pour apprécier la cohérence du comportement d’un assuré.

En ce qui concerne le fait que l’expert orthopédiste a indiqué que la situation n’était pas stabilisée, cela ne suffit pas non plus à conclure à l’inexigibilité d’une reprise professionnelle. En effet, cette assertion doit être comprise en ce sens que des arthroscopies pourraient être bénéfiques au recourant. Cela étant, aucun des médecins traitants – malgré le traitement relativement intensif et l’échec des nombreuses infiltrations – n’a suggéré pour l’heure de telles interventions. Celles-ci n’apparaissent ainsi pas comme des traitements concrètement envisagés actuellement, et l’expert en a lui-même relativisé l’indication puisqu’il note que celles-ci pourraient « potentiellement » avoir lieu.

S’agissant du fait que les Drs H______ et I______ n’ont retenu d’incapacité de travail que dès la date de l’intervention pratiquée en mai 2020, il faut préciser que cette évaluation se réfère, non pas à l’activité antérieure d’agent de sécurité – dans laquelle ils ont admis une incapacité de travail totale depuis juillet 2017 – mais à une activité adaptée, dont aucun médecin traitant n’excluait expressément l’exercice jusqu’à cette intervention. La fin de l’incapacité de travail transitoire liée à l’arthroscopie pratiquée, établie six mois après celle-ci, ne prête pas non plus le flanc à la critique, malgré l’inflammation à l’épaule rapportée en décembre 2020 par les médecins des HUG, puisqu’elle s’entend également dans une activité épargnant les épaules.

La mention dans le volet rhumatologique de l’expertise d’une douleur de l’épaule gauche, apparue en mai 2020, dans les suites d’une rixe dans le cadre de son travail, est certes inexacte. Cette erreur n’est cependant pas d’une importance telle qu’elle invaliderait l’intégralité de l’expertise, a fortiori dès lors que la cause et les circonstances d’apparition d’une atteinte ne revêtent pas une portée essentielle en matière d’assurance-invalidité, comme cela peut être le cas dans l’assurance-accidents.

Le recourant fait, en outre, valoir que l’expert rhumatologue ne disposerait pas d’un titre de spécialiste FMH. À ce sujet, les Lignes directrices pour l’expertise rhumatologique établies par la Société Suisse de Rhumatologie, accessibles en ligne https://www.rheuma-net.ch/images/pdf/lignes-directrices-pour-lexpertise-rhumatologique-05-2018.pdf, prévoient au chiffre 2.4 qu’une des exigences posées à l’expert est que celui-ci dispose d’une formation de spécialiste en rhumatologie, mais elles n’exigent pas qu’il soit titulaire d’un titre de spécialiste de la FMH. En l’espèce, selon le registre des professions médicales MedReg, le Dr I______ est titulaire d’un titre de spécialiste obtenu en France après une formation post-graduée, et faisant l’objet d’une reconnaissance. Il ne s’est, par ailleurs, pas prévalu d’un titre de spécialiste FMH. On ne se trouve pas dans la situation ayant conduit à l’arrêt I 65/07 du 31 août 2007, dans lequel le Tribunal fédéral a retenu que le médecin examinateur s’était précisément arrogé un tel titre dans son rapport, alors qu’il ne pouvait pas y prétendre et qu’il ne disposait pas de l'autorisation de pratiquer prévue par le droit cantonal, ce qui entachait la fiabilité de son rapport.

On doit, de plus, souligner que les conclusions des experts paraissent concorder avec l’appréciation des autres médecins. Il faut rappeler que le Dr B______ avait, dans son expertise, conclu à une pleine capacité de travail dans une activité adaptée, en relevant que les plaintes n’étaient pas objectivées par les éléments radio-cliniques, constat partagé par la Dre C______ s’agissant des lombalgies. La Dre D______ retenait, elle aussi, à fin 2018, une pleine capacité de travail dans une activité adaptée, à l’instar du Dr F______, qui a fait état de l’exigibilité d’un travail à temps complet, dans son rapport du 25 mars 2020. Ce médecin est, certes, revenu sur cette appréciation, puisqu’il a mentionné une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée, dans ses rapports du 2 mars 2021 et du 24 octobre 2022, puis une capacité de travail nulle dans une activité adaptée le 24 juillet 2023. Cependant, ces changements d’appréciation ne sont pas motivés et ne suffisent ainsi pas à mettre en doute l’expertise, en particulier dès lors que malgré certaines précisions diagnostiques, l’état de santé, les limitations fonctionnelles et les douleurs décrits par le Dr F______ dans ses différents rapports, paraissent pour l’essentiel superposables, celui-ci indiquant l’absence de changement en octobre 2022 et une évolution stationnaire en juillet 2023. On notera, du reste, que les limitations fonctionnelles admises par les experts vont au-delà de celles retenues par ce médecin. Quant aux médecins des HUG, ils ne se sont pas expressément prononcés sur la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée.

Enfin, l’aggravation de l’état de santé, signalée en octobre 2024 par le Dr J______, est postérieure à la décision attaquée, si bien que son éventuelle incidence sur la capacité de gain du recourant n’a, en toute hypothèse, pas à être analysée dans la présente procédure. En effet, le juge apprécie la légalité des décisions attaquées d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue. Les faits survenus postérieurement et ayant modifié cette situation doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_758/2020 du 25 mai 2021 consid. 3.2). Cela vaut également pour l’accroissement de la hernie discale constaté en septembre 2024.

9.3 Le recourant fait, en outre, valoir que l’intimé ne pouvait retenir d’activité exigible sans lui avoir fait suivre le stage d’observation dans un centre d’observation professionnelle de l’assurance-invalidité, dont le SMR avait retenu la nécessité.

Cet argument ne lui est d’aucun secours, sans qu’il soit nécessaire d’examiner s’il a refusé de se soumettre à une telle mesure ou en a simplement souhaité le report à une date ultérieure pour des raisons de santé, de sorte que la question de son aptitude subjective comme condition du droit à une telle mesure peut rester ouverte. En effet, le droit à l'orientation professionnelle selon l'art. 15 LAI suppose que l'assuré est capable en lui-même de faire le choix d'une profession ou d'une nouvelle orientation professionnelle, mais qu’à la suite d'une atteinte à la santé, il en est empêché parce que les connaissances relatives aux aptitudes, capacités professionnelles et possibilités ne suffisent pas pour pouvoir faire le choix d'une profession adaptée au handicap ou d'une nouvelle orientation dans une telle profession (arrêt du Tribunal fédéral 9C_236/2012 du 15 février 2013 consid. 3.5). Dans le cas d'un assuré dont l'activité après invalidité devait être adaptée à des mesures classiques d'épargne du rachis, le Tribunal fédéral a retenu que le caractère relativement anodin de l'atteinte à la santé n'exigeait pas une mesure d'orientation complète, les propositions formulées par le service de réadaptation de l'assurance-invalidité étaient suffisantes, et que le marché du travail équilibré présentait un éventail suffisamment large d'activités légères, dont un nombre significatif étaient adaptées et accessibles sans aucune formation particulière, si bien qu'il n'existait guère d'obstacles à l'exercice d'un emploi adapté (arrêt du Tribunal fédéral 9C_534/2010 du 10 février 2011 consid. 4.3).

Au vu des limitations fonctionnelles dans le cas d’espèce – correspondant en substance à l’exercice d’une activité sédentaire avec mesures d’épargne du rachis et sans sollicitations excessives des épaules – il n’apparaît pas d’emblée que la nature de l’atteinte est telle qu’elle imposerait un stage d’observation. De plus, le stage auprès de la Fondation IPT a déjà permis au recourant de suivre notamment le module PIE (Prise d'Informations en Entreprise), soit une méthode de recherche d'emploi alternative, axée sur l'approche du marché caché de l'emploi. À l’issue de cette mesure, plusieurs pistes professionnelles adaptées du point de vue médical ont été énumérées. Enfin, les exemples d’activités donnés par l’intimé et accessibles, sans formation particulière, paraissent effectivement adaptés aux limitations fonctionnelles du recourant. S’agissant de son affirmation selon laquelle la position assise lui serait impossible, elle ne correspond pas aux limitations fonctionnelles retenues au plan médical, et les postes suggérés par l’intimé semblent, quoi qu’il en soit, compatibles avec des changements de position, en se levant brièvement au besoin.

9.4 Reste à vérifier le calcul du taux d’invalidité effectué par l’intimé.

Comme on l’a vu, le statut mixte et la pondération à 75% de la sphère professionnelle doivent être confirmés dans le cas d’espèce.

S’agissant du revenu sans invalidité, l’intimé s’est référé au salaire de CHF 2'100.- multiplié par douze mensualités, selon le contrat conclu avec le premier employeur. Pour le second employeur, il a retenu un salaire horaire de CHF 36.15, vacances incluses, multiplié par 10.5 heures par semaine pour un 25%, au vu de l’horaire hebdomadaire de 42 heures annoncé par l’employeur dans la déclaration d’accident. Cela correspond en 2017 à CHF 17'840.-. Le revenu global se montant ainsi à CHF 43'040.- en 2017, et après indexation à CHF 43'255.20 en 2018 et à CHF 43'994.- en 2020. Extrapolés à 100%, les revenus avant invalidité étaient de CHF 57'633.- en 2018 et de CHF 58'659.- en 2020.

On notera que les bases de calcul du revenu sans invalidité appliquées par l’intimé s’avèrent favorables au recourant, puisque, selon son compte individuel AVS – lequel est en principe déterminant selon l’art. 25 du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS - RS 831.101), ses revenus déclarés s’élevaient à CHF 8'205.- et CHF 10'952.- en 2015, CHF 4'200.- et CHF 15'110.- en 2016, CHF 10'500.- et CHF 7'699.- en 2017 et étaient ainsi largement inférieurs à ceux retenus par l’intimé.

Quant au revenu après atteinte à la santé, c’est à juste titre que l’intimé l’a fondé sur le revenu tiré d’activités simples et répétitives selon les ESS dans leurs éditions de 2018 et 2020. On doit ainsi retenir un revenu après invalidité de CHF 67'768.- en 2018 et CHF 65'815.- en 2020 après adaptation à la durée normale de travail. L’intimé a concédé un abattement de 10% sur ce revenu, ce qui le porte à respectivement CHF 60'991.- en 2018 et CHF 59'234.- en 2020. Dès lors que l’intimé n’a pas excédé son pouvoir d’appréciation en retenant un abattement de 10%, la chambre de céans n’est pas fondée à le revoir.

Il convient de revenir ici sur la contradiction contenue dans le rapport d’expertise et la capacité de travail de 80% articulée par l’expert orthopédiste, en soulignant que, même en tenant compte d’une capacité de travail réduite à ce taux, et même en appliquant l’abattement maximal de 25% sur le revenu statistique d’invalide, les degrés d’invalidité seraient respectivement de 29% en 2018 et 31% en 2020, ce qui serait insuffisant pour ouvrir le droit à la rente, même sans tenir compte de la pondération résultant du statut mixte du recourant.

Ces comparaisons révèlent l’absence totale de perte de gain à la suite de l’atteinte à la santé.

Compte tenu de ces éléments, c’est à juste titre que l’intimé a alloué à l’assuré une rente entière dès le 1er août 2020 – soit trois mois après l’incapacité de travail totale dans une activité adaptée que l’arthroscopie pratiquée en mai 2020 a entraînée, conformément à l’art. 88a al. 2 RAI – et qu’il y a mis un terme dès le 1er février 2021, soit trois mois après novembre 2020, date à laquelle le recourant a recouvré, à dires d’expert, une pleine capacité de travail dans une activité adaptée.

La décision doit ainsi être confirmée dans son résultat.

10.          

10.1 Mal fondé, le recours est rejeté.

10.2 La procédure en matière de contestations portant sur des prestations de l’assurance-invalidité n’étant pas gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), le recourant supporte l’émolument de procédure de CHF 200.-.

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge du recourant.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le