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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1882/2023

ATAS/944/2024 du 14.11.2024 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1882/2023 ATAS/944/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 14 novembre 2024

Chambre 3

 

En la cause

A______

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Le 13 mars 2017, Madame A______ et son époux, Monsieur B______ – ce dernier ayant atteint l’âge de la retraite en 2014 – ont déposé une demande conjointe de prestations complémentaires à l’AVS/AI.

b. Des prestations ont été versées par le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC).

c. Le mariage des intéressés a été dissous par jugement du Tribunal de première instance du 14 décembre 2020, ce dont le SPC a été informé par courrier du 6 mai 2021.

d. Par décision du 10 août 2021, le SPC a recalculé le droit aux prestations de Mme A______ (ci-après : l’intéressée ou la bénéficiaire) à compter de février 2021.

e. En septembre 2021, celle-ci a fait parvenir au SPC une demande de prestations « complémentaires à l’AVS/AI » au nom de son fils.

f. Par décision du 7 février 2023, le SPC a « refusé d’entrer en matière » (sic) sur la demande de prestations déposée en 2021 et réclamé à l’intéressée le remboursement d’un montant de CHF 48'453.- correspondant aux prestations versées à tort du 1er février 2021 au 28 février 2023.

g. Par décision du 8 février 2023, le SPC a en outre réclamé la restitution des subsides versés durant la même période, soit CHF 4'781.70.

h. Par décision récapitulative du 13 mars 2023, le SPC a réclamé à l’intéressée le remboursement d’un montant total de CHF 35'435.05 correspondant aux prestations et subsides versés à tort du 1er février 2021 au 28 février 2023. Le SPC disait s’être rendu compte que l’intéressée n’étant titulaire d’aucune rente de l’assurance-vieillesse et survivants ou de l’invalidité, elle n’avait pas droit aux prestations complémentaires. Pour le surplus, le SPC indiquait avoir repris le calcul des prestations dues à son fils.

i. Le 17 mars 2023, l’intéressée s’est opposée à ces décisions en alléguant que la demande qu’elle avait déposée en février 2021 avec l’aide d’une assistante sociale de l’Hospice général portait sur des prestations complémentaires familiales.

j. Par décision du 12 mai 2023, le SPC a rejeté l’opposition en soulignant que sa demande en restitution avait simplement pour but de rétablir la situation légale.

B. a. Par écriture du 5 juin 2023, la bénéficiaire a interjeté recours auprès de la Cour de céans.

Elle allègue s’être adressée à l’Hospice général début 2021, suite à son divorce, et avoir rempli, avec l’aide de son assistante sociale, une demande de prestations complémentaires familiales en date du 2 février 2021 – demande dont elle n’a pas gardé copie.

Suite à cela, elle a reçu de la part du SPC des prestations à hauteur de CHF 1'996.- par mois, y compris un rétroactif depuis le 1er février 2021.

La recourante répète que sa demande portait sur les prestations complémentaires familiales. Elle ne conteste pas ne pas remplir les conditions d’octroi des prestations complémentaires, dès lors qu’elle ne bénéficie d’aucune rente AVS ou AI.

Dès lors que le SPC a commis une erreur dans le traitement initial de sa demande, la recourante soutient qu’il aurait dû reconsidérer l’ensemble de son dossier sous l’angle des prestations complémentaires familiales.

b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 30 juin 2023, a conclu au rejet du recours.

Il soutient que la recourante n’a jamais déposé de demande de prestations complémentaires familiales, mais bel et bien une demande de prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI.

c. Par écriture du 6 juillet 2023, la recourante a persisté dans ses conclusions.

Elle répète qu’elle ne dispose d’aucune copie de sa demande de prestations du 2 février 2021.

d. Une audience de comparution personnelle s’est tenue en date du 21 mars 2024.

La recourante a répété que c’est son assistante sociale, Madame C______, qui a formulé la demande de prestations complémentaires familiales au nom de son fils mineur et qu’elle n’en a pas gardé copie.

L’intimé a indiqué que, malgré de nouvelles recherches, aucune trace au dossier n’a été retrouvée d’une demande de prestations complémentaires familiales formulée en février 2021. Cela étant, il a relevé qu’a priori, les conditions d’octroi des prestations complémentaires familiales ne semblent pas remplies au vu du taux d’activité de l’intéressée (40%).

e. Par courrier du 25 mars 2024, la Cour de céans a interpellé l’Hospice général et sollicité la production de la copie de la demande de prestations déposée au nom de la recourante en février 2021.

f. Par courrier du 3 mai 2024, Mme C______ a confirmé avoir suivi la recourante et son fils d’août 2020 à février 2022, ajoutant en guise de réponse à la demande de la Cour : « Lors de l’entretien du 6 septembre, et au moment d’envoyer la demande SPC pour le fils de Madame, je me rends compte qu’un dossier avait déjà été envoyé en amont, car Madame me transmet un courrier du SPC indiquant un recalcul de la prestation » (sic).

g. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ – E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC – RS 831.30).

Elle statue aussi, en application de l’art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l’art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC – J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

1.3 La procédure devant la Cour de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA – E 5 10).

1.4 Le délai de recours est de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA ; art. 62 al. 1 LPA ; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC – J 4 20]; art. 43 LPCC). Lorsque le délai échoit un samedi, un dimanche ou un jour férié selon le droit fédéral ou cantonal, son terme est reporté au premier jour ouvrable qui suit (art. 38 al. 3 LPGA et 17 al. 3 LPA).

Interjeté dans les forme et délai prescrits par la loi, le recours est recevable en tant qu’il est dirigé contre la décision du 12 mai 2023.

2.             Le litige porte en premier lieu sur le bien-fondé de la demande en restitution formée par l’intimé, correspondant aux prestations qu’il estime avoir versées à tort pour la période du 1er février 2021 au 28 février 2023.

3.             Sur le plan fédéral, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux art. 4, 6 et
8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui ont droit à une rente de l’assurance-invalidité (art. 4 al. 1 let. c LPC) ou de l’assurance-vieillesse survivants (art. 4 al. 1 let. a LPC).

Sur le plan cantonal, ont droit aux prestations complémentaires les personnes qui remplissent les conditions de l’art. 2 LPCC (au nombre desquelles, notamment : domicile et résidence habituelle à Genève [al. 1 let. a], bénéficiaires d’une rente de l'assurance-vieillesse et survivants, d'une rente de l'assurance-invalidité, d'une allocation pour impotent de l'assurance-invalidité ou d’une indemnité journalière de l'assurance-invalidité pendant au moins 6 mois [al. 1 let. b]) et dont le revenu annuel déterminant n’atteint pas le revenu minimum cantonal d’aide sociale applicable (art. 4 LPCC).

Or, en l’occurrence, la recourante ne bénéficie d’aucune prestation servie par l’AVS ou l’AI, de sorte qu’elle ne remplit pas les conditions d’octroi des prestations complémentaires, ce qu’elle ne conteste au demeurant pas. C’est donc bel et bien à tort que lesdites prestations lui ont été accordées à compter de février 2021 et ce, durant deux ans.

4.             Il convient de vérifier que les conditions de la restitution réclamée sont réalisées.

4.1 S’agissant des prestations complémentaires fédérales, selon l’art. 25 al. 1
1ère phrase LPGA, en relation avec l’art. 2 al. 1 let. a de l’ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA ; RS 830.11), les prestations indûment touchées doivent être restituées par le bénéficiaire ou par ses héritiers.

Selon l’art. 3 al. 1 OPGA, l’étendue de l’obligation de restituer est fixée par une décision.

L’obligation de restituer suppose que soient remplies les conditions d’une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) ou d’une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) de la décision – formelle ou non – par laquelle les prestations en cause ont été allouées (ATF 142 V 259 consid. 3.2 et les références ; 138 V 426 consid. 5.2.1 et les références ; 130 V 318 consid. 5.2 et les références).

La révision procédurale et la reconsidération ont pour point commun de remédier à l’inexactitude initiale d’une décision (anfängliche tatsächliche Unrichtigkeit ;
cf. Ueli KIESER, Gabriela RIEMER-KAFKA, Tafeln zum schweizerischen Sozialversicherungsrecht, 5ème éd., 2013, p. 140).

La reconsidération a pour objet la correction d’une décision qui était
déjà erronée dans la constatation des faits ou dans l’application du droit au moment où elle a été prise (ATAS/1244/2020 du 10 décembre 2020 consid. 7b ; ATAS/154/2019 du 25 février 2019 consid. 3b ; ATAS/1163/2014 du 12 novembre 2014 consid. 5c ; Ueli KIESER, ATSG-Kommentar, 4ème éd. 2020, n. 20 ad art. 17 LPGA).

L’administration peut procéder à la reconsidération d’une décision formellement entrée en force de chose décidée, sur laquelle une autorité judiciaire ne s’est pas prononcée quant au fond, pour autant que la décision soit sans nul doute erronée et que sa rectification revête une importance notable (ATF 147 V 167 consid. 4.2 et la référence).

L’obligation de restituer des prestations complémentaires indûment touchées et son étendue dans le temps ne sont pas liées à une violation de l’obligation de renseigner (ATF 122 V 134 consid. 2e). Il s’agit simplement de rétablir l’ordre légal après la découverte du fait nouveau (arrêt du Tribunal fédéral 9C_398/2021 du 22 février 2022 consid. 5.1).

4.2 De la même manière, au plan cantonal, l’art. 24 al. 1 1ère phrase LPCC prévoit que les prestations indûment touchées doivent être restituées. Conformément à l’art. 43A LPCC, le SPC peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu’elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (al. 2).

L’art. 14 du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI - J 4 25.03) précise que le SPC doit demander la restitution des prestations indûment touchées au bénéficiaire, à ses héritiers ou aux autres personnes mentionnées à l’art. 2 OPGA appliqué par analogie (al. 1). Il fixe l’étendue de l’obligation de restituer par décision (al. 2).

4.3 Enfin, conformément à l’art. 33 de la loi d’application de la loi fédérale sur l’assurance-maladie du 29 mai 1997 (LaLAMal – J 3 05), les subsides indûment touchés doivent être restitués en appliquant par analogie l’art. 25 LPGA (al. 1). Lorsque des subsides ont été indûment touchés par un bénéficiaire des prestations du service, ce service peut en demander la restitution au nom et pour le compte du service de l’assurance-maladie (al. 2).

5.              

5.1 En vertu de l’art. 25 al. 2, 1ère phrase LPGA (dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2021), le droit de demander la restitution s’éteint trois ans après le moment où l’institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.

Jusqu’au 31 décembre 2020, l’art. 25 al. 2, 1ère phrase aLPGA prévoyait que le droit de demander la restitution s’éteignait un an après le moment où l’institution d’assurance avait eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.

Les délais de l’art. 25 al. 2 LPGA sont des délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d’office (ATF 146 V 217 consid. 2.1 et les références ; 142 V 20 consid. 3.2.2 et les références). Contrairement à la prescription, la péremption prévue à l’art. 25 al. 2 LPGA ne peut être ni suspendue, ni interrompue et lorsque s’accomplit l’acte conservatoire que prescrit la loi, comme la prise d’une décision (ATF 119 V 431 consid. 3c), le délai se trouve sauvegardé une fois pour toutes (ATF 138 V 74 consid. 5.2 et les références). En tant qu’il s’agit de délais de péremption, l’administration est déchue de son droit si elle n’a pas agi dans les délais requis (cf. ATF 134 V 353 consid. 3.1 et les références).

5.2 S’agissant de l’interruption de la péremption de la créance en restitution de prestations indues, la jurisprudence considère qu’une première décision de restitution de prestations rendue avant l’échéance du délai de péremption sauvegarde valablement ce délai, quand bien même elle est par la suite annulée et remplacée sur le champ par une nouvelle décision de restitution portant sur un montant corrigé (arrêt du Tribunal fédéral 8C_366/2022 du 19 octobre 2022 consid. 5.3.2 et les références).

5.3 Le délai de péremption absolu de cinq ans commence à courir à la date du versement effectif de la prestation, et non à la date à laquelle elle aurait dû être fournie (ATF 112 V 180 consid. 4a et les références).

5.3.1 Le délai de péremption relatif commence à courir dès le moment où l’administration aurait dû connaître les faits fondant l’obligation de restituer, en faisant preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle
(ATF 148 V 217 consid. 5.1.1 ; 140 V 521 consid. 2.1; 139 V 6 consid. 4.1 et
les références). Cette jurisprudence vise un double but, à savoir obliger l’administration à faire preuve de diligence, d’une part, et protéger l’assuré au cas où celle-ci manquerait à ce devoir de diligence, d’autre part (ATF 124 V 380 consid. 1). L’administration doit disposer de tous les éléments qui sont décisifs dans le cas concret et dont la connaissance fonde – quant à son principe et à son étendue – la créance en restitution à l’encontre de la personne tenue à restitution (ATF 148 V 217 consid. 5.1.1 et 5.2.1 et les références ; 146 V 217 consid. 2.1 et les références ; 140 V 521 consid. 2.1 et les références). Si l’administration dispose d’indices laissant supposer l’existence d’une créance en restitution, mais que les éléments disponibles ne suffisent pas encore à en établir le bien-fondé, elle doit procéder, dans un délai raisonnable, aux investigations nécessaires (ATF 133 V 579 consid. 5.1 non publié). À titre d’exemple, le Tribunal fédéral a considéré dans le cas de la modification des bases de calcul d’une rente par une caisse de compensation à la suite d’un divorce qu’un délai d’un mois pour rassembler les comptes individuels de l’épouse était largement suffisant (SVR 2004 IV N°41, consid. 4.3). À défaut de mise en œuvre des investigations, le début du délai de péremption doit être fixé au moment où l’administration aurait été en mesure de rendre une décision de restitution si elle avait fait preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle (ATF 148 V 217 consid. 5.2.2. et les références). En revanche, lorsqu’il résulte d’ores et déjà des éléments au dossier que les prestations en question ont été versées indûment, le délai de péremption commence à courir sans qu’il y ait lieu d’accorder à l’administration de temps pour procéder à des investigations supplémentaires (ATF 148 V 217 consid. 5.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 8C_754/2020 du 11 juin 2021 consid. 5.2).

5.3.2 Lorsque la restitution est imputable à une faute de l’administration, on ne saurait considérer comme point de départ du délai le moment où la faute a été commise, mais bien celui auquel l’administration aurait dû, dans un deuxième temps (par exemple à l’occasion d’un contrôle comptable ou sur la base d’un indice supplémentaire) reconnaître son erreur en faisant preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger de lui (ATF 148 V 217 consid. 4.2 et les références ; 146 V 217 consid. 2.2 et les références) ; ce moment intervient en principe à l’occasion du contrôle des conditions économiques des bénéficiaires, prévu par l’art. 30 OPC-AVS/AI au moins tous les quatre ans (ATF 139 V 570 consid. 3.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_96/2020 du 27 juillet 2020 consid. 4.2 et les références).

En revanche, lorsque l’illégalité de l’octroi de la prestation ressort directement du dossier et qu’il n’y a donc pas (ou plus) besoin de clarifier les éléments constitutifs de la demande de restitution, le délai commence à courir au moment déjà où l’administration aurait dû connaître ceux-ci, en faisant preuve de l’attention que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elle (ATF 148 V 217 consid. 5 et les références).

Le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de préciser, dans un cas où l’administration avait fait une erreur lors de l’octroi des prestations complémentaires à un assuré, que l’on ne pouvait pas déduire de la circonstance que ces prestations étaient fixées pour la durée d’une année et recalculées annuellement que les services chargés de les fixer et de les verser devaient avoir raisonnablement connaissance de leur caractère erroné dans le cadre de leur examen périodique ; en revanche, tel était le cas au moins tous les quatre ans lors du contrôle des conditions économiques des bénéficiaires au sens de l’art. 30 OPC-AVS/AI. En effet, il ne peut pas être exigé des services compétents qu’ils procèdent à un contrôle annuel de chaque élément du calcul des prestations complémentaires de l’ensemble des bénéficiaires, ce pour quoi d’ailleurs l’art. 30 OPC-AVS/AI prévoit un contrôle tous les quatre ans au moins (ATF 139 V 570 consid. 3.1 et les références ; arrêt du Tribunal 8C_405/2020 du 3 février 2021 consid. 3.2.2).

Lorsque la collaboration de plusieurs autorités chargées de la gestion de l’assurance est nécessaire pour la fixation des prestations ou pour leur restitution, le délai court lorsque l’une des autorités compétentes a connaissance des faits fondant l’obligation de restituer (ATF 140 V 521 consid. 2.1 et les références; ATF 139 V 6 consid. 4.1 et les références).

5.4 En l’espèce, il est incontestable que le versement des prestations est intervenu, par décision du 10 août 2021, suite à une faute de l’administration. On ignore dans quelles circonstances exactes l’intimé a pris conscience de son erreur et il est également difficile de dire exactement quand il a disposé des éléments qui auraient dû lui permettre, en faisant preuve de l’attention raisonnablement exigible de sa part, de s’apercevoir de celle-ci. Cela étant, peu importe dans la mesure où, quoi qu’il en soit, le délai de trois ans a été respecté, la demande en restitution étant intervenue en mars 2023, soit moins de trois ans après la décision d’octroi des prestations indues et le versement de celles-ci.

Eu égard à ce qui précède, c’est à juste titre et en temps utile que l’intimé a réclamé la restitution des prestations versées à tort. Ainsi que le relève l’intimé dans la décision litigieuse, une telle demande en restitution n’a pas vocation à sanctionner la recourante mais simplement à rétablir l’ordre légal. Il est rappelé ici à la recourante qu’il lui est loisible, cas échéant, de solliciter la remise de l’obligation de restituer.

6.             L’argumentaire principal de la recourante vise surtout à obtenir de l’intimé qu’il réexamine sa situation sous l’angle des prestations complémentaires familiales, pour lesquelles elle dit avoir déposé une demande en février 2021. Ce faisant, elle semble implicitement reprocher à l’intimé un déni de justice.

Si l’allégation de la recourante est partiellement corroborée par la mention, par l’intimé lui-même d’une demande formulée le 2 février 2021 dans certaines de ses décisions, il n’en demeure pas moins que les seules demandes versées au dossier ont été remplies sur des formulaires intitulés « demande de prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI », sans aucune référence aux prestations complémentaires familiales – dont on rappellera au surplus que les conditions d’octroi divergent sensiblement de celles des prestations complémentaires. Invitée à plusieurs reprises à produire la demande de prestations qu’elle invoque, la recourante n’a pu s’exécuter, pas plus que son assistante sociale.

C’est le lieu de rappeler que le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel il appartient au juge d’établir d’office l’ensemble des faits déterminants pour la solution du litige et d’administrer, le cas échéant, les preuves nécessaires (cf. art. 43 al. 1 et 61 let. c LPGA). En principe, les parties ne supportent ni le fardeau de l’allégation ni celui de l’administration des preuves. Cette maxime doit cependant être relativisée par son corollaire, soit le devoir de collaborer des parties, lequel comprend l’obligation d’apporter, dans la mesure où cela est raisonnablement exigible, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués (ATF 138 V 86 consid. 5.2.3 ; ATF 125 V 193 consid. 2). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l’obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d’absence de preuve, c’est à la partie qui voulait en déduire un droit d’en supporter les conséquences, sauf si l’impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse (ATF 124 V 372 consid. 3 ; RAMA 1999 n° U 344 p. 418 consid. 3). Cette règle ne s’applique toutefois que s’il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d’établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).

La recourante n’ayant pu faire la démonstration qu’elle aurait effectivement rempli – et déposé – une demande de prestations complémentaires familiales, on ne saurait reprocher à l’intimé de n’avoir pas traité celle-ci.

On ajoutera enfin, qu’effectivement, a priori, les conditions d’octroi de telles prestations ne semblent pas remplies, vu le taux d’activité de la recourante.

Si tant est que le recours doive également être compris comme un recours en déni de justice, celui-ci apparaît donc manifestement infondé.

7.             Eu égard aux considérations qui précèdent, le recours est rejeté.

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le