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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1688/2022

ATAS/295/2023 du 02.05.2023 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1688/2022 ATAS/295/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 2 mai 2023

Chambre 6

 

En la cause

 

A______

Représenté par ADC Association de défense des chômeur-se-s

 

recourant

 

contre

 

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI

 

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après: l'assuré ou le recourant), né le ______ 1998, dont le contrat de travail à durée déterminée a pris fin le 31 décembre 2019, s’est inscrit auprès de l’office cantonal de l'emploi (ci-après : l'OCE) pour un taux d’activité de 50% le 2 janvier 2020, sollicitant le versement de prestations de l'assurance-chômage. Un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert dès le 1er janvier 2020.

b. Ses preuves de recherches personnelles d'emploi montrent, dès le mois de janvier 2020, des postulations pour des emplois à plein temps ou à temps partiel (de 50% à 80%).

c. Dans le formulaire de pré-inscription transmis le même jour à l'OCE, l'assuré a exposé souhaiter entamer une formation auprès de la Haute école de gestion (ci-après: HEG), dans le cadre d’un cursus en emploi.

d. À teneur de son site internet, dont un extrait est joint au dossier, la formation proposée par la HEG donne le choix entre un cursus en emploi (avec une activité professionnelle entre 50% et 80%), effectué en quatre ans, [que l'assuré appelle « duale »] et un autre à plein temps, effectué en trois ans.

B. a. Il ressort des procès-verbaux d'entretien avec sa conseillère en placement, Madame B______ (ci-après: la conseillère) que l'assuré était célibataire, sans enfant et logeait chez sa mère. Il recherchait une activité professionnelle à temps partiel en raison de son souhait de débuter une formation à la HEG en septembre 2020.

b. Le 28 août 2020, l'assuré a modifié sa disponibilité à l'emploi de 100% à un taux de 80% dès le 1er septembre 2020, mentionnant comme motif la reprise d'études à temps partiel.

c. N'ayant pas trouvé d'emploi avant la rentrée scolaire, il a débuté une formation à plein temps auprès de la HEG le 14 septembre 2020.

d. La conseillère a mentionné, dans le procès-verbal d'entretien du 3 novembre 2020, que l'assuré avait de la peine à trouver du temps pour ses recherches d'emploi à cause des cours qu'il suivait, qu'il semblait peu intéressé par le retour en emploi, son intérêt se portant plutôt sur la gestion de ses indemnités. Elle a alors transmis le dossier au service juridique pour examen de l'aptitude au placement.

e. Par courriel du 9 novembre 2020, le service juridique de l'OCE a informé l'assuré que son aptitude au placement était en cours d'examen dès lors qu'il avait déclaré avoir repris une formation. Des informations sur la durée de cette formation et sur les horaires de ses cours lui étaient réclamées d’ici au 16 novembre 2020.

f. Le 8 décembre 2020, l’assuré a accusé réception du courriel précité et indiqué un horaire de cours de la semaine du 21 septembre 2020 de :

-     8h15-13h et 14h15-18h le lundi ;

-     8h15-10h et 14h15-18h le mardi ;

-     9h15-12h et 13h15-17h le mercredi ;

-     9h15-12h et 13h15-17h le jeudi ;

-     8h15-13h et 14h15-16h le vendredi.

Par ailleurs, il a mentionné être en attente d’un emploi pour passer en duale sur quatre ans.

g. Dans le procès-verbal d'entretien du 8 décembre 2020, la conseillère a confirmé que l'assuré était très pris par ses études à la HEG. Elle a toutefois ajouté que l'assuré se disait prêt à renoncer à celles-ci, s'il trouvait un emploi s'accompagnant d'une formation interne. Elle a mentionné que l’assuré lui avait dit ne pas avoir reçu le « courrier » concernant son aptitude au placement et le lui avoir envoyé par courriel le même jour.

h. Par décision du 11 décembre 2020, l'OCE a déclaré l'assuré inapte au placement dès le 14 septembre 2020, au motif qu'il avait débuté une formation à plein temps, dont les horaires de cours l'empêchaient d'exercer une activité lucrative.

i. L'assuré a formé opposition à cette décision le 9 janvier 2021, exposant que l'objectif de son inscription était de suivre une formation en emploi et que ses recherches avaient été effectuées dans ce but. Motivé à associer un emploi et une formation en parallèle, il ne désirait pas mettre fin à ses études.

j. L’assuré a transmis à l’OCE une copie d’un courriel du 18 février 2021 à la HEG demandant à celle-ci de préciser qu’un délai supplémentaire lui avait été accordé pour pouvoir transmettre son contrat de travail pour le premier semestre 2020 en raison de la pandémie du Covid-19. Il y précisait qu'il avait eu la chance de bénéficier, par téléphone en début d'année, d'un délai plus laxiste pour ce faire.

k. Il a également fourni une attestation de la HEG du 1er mars 2021 confirmant qu'il s'était inscrit dans le cursus « en emploi ». N'ayant pas de travail le jour de la rentrée académique, le 14 septembre 2020, il avait été inscrit dans le cursus à plein temps, ce qui aurait pu être modifié jusqu'au 9 octobre 2020 s'il avait trouvé un emploi dans l'intervalle.

l. Le 2 mars 2021, l’OCE a requis de l’assuré qu’il transmette une attestation de l’école indiquant qu’il pouvait suivre en tout temps une formation en emploi.

m. L'OCE a rejeté l'opposition par décision du 26 avril 2021. L’assuré n’avait pas la disponibilité nécessaire pour prendre un emploi salarié à côté de sa formation à plein temps et ne pouvait modifier en tout temps son cursus, de sorte qu’il était inapte au placement dès le 14 septembre 2020. Cette décision est entrée en force.

n. L’assuré a trouvé un emploi le 22 février 2021 et son dossier à l’ORP a été annulé.

o. Par décision du 13 octobre 2021, la Caisse cantonale genevoise de chômage a réclamé à l'assuré le remboursement de la somme de CHF 9'115.35, correspondant aux indemnités perçues indument du 14 septembre au 30 novembre 2020.

p. Le 9 novembre 2021, l'assuré a sollicité la remise de son obligation de restituer la somme réclamée, exposant avoir continué à rechercher un emploi à un taux entre 50% et 100% après avoir entamé sa formation à la HEG à plein temps. Son objectif était de demander à la HEG de poursuivre sa formation en duale s'il trouvait un emploi à temps partiel ou d'abandonner ses études au profit de son entrée sur le marché du travail s'il trouvait un poste à plein temps. Sa conseillère en était informée. Ils avaient alors convenu que son inscription au chômage serait maintenue jusqu'à ce qu'il trouve un emploi à 50% ou 100% et ce, malgré ses études universitaires. Sa conseillère ne lui avait pas fait part des conséquences d'une formation à plein temps sur son aptitude au placement. Cette absence d'information l'avait conduit, sans le savoir, à adopter un comportement préjudiciable vis-à-vis de l'assurance-chômage. Il avait sincèrement pensé pouvoir être inscrit « à 100% » au chômage malgré ses études. Il demandait que sa bonne foi soit reconnue. En outre, la restitution de CHF 9'115.35 le mettrait dans une situation financière très difficile.

q. Par décision du 1er février 2022, l'OCE a refusé la remise de l'obligation de restituer la somme litigieuse, au motif que la condition de la bonne foi était manquante, dès lors que l'assuré aurait dû savoir, en faisant preuve d'un minimum d'attention, qu'il n'était plus apte au placement dès son intégration à la HEG à plein temps le 14 septembre 2020.

r. Par courriel du 13 février 2022, l'assuré a contacté sa conseillère afin de lui demander un courrier de sa part indiquant ce qu'ils avaient convenu quant à la continuation de ses recherches d'emploi. Il y résumait la procédure en cours et ses intentions, exposant à cet égard, notamment, avoir, en accord avec sa conseillère, continué de rechercher un emploi dans le but d'intégrer une formation duale à la HEG, cursus qui lui tenait à cœur. Il avait suivi des cours du soir durant deux ans, en parallèle d'un emploi de conseiller clientèle à plein temps afin de pouvoir intégrer cette école. Il n'avait toutefois pas été simple pour lui de trouver un emploi et il avait d'abord dû intégrer la HEG à plein temps.

Il ajoutait avoir contacté le service juridique de l'OCE car il ne comprenait pas l'inaptitude au placement, dès lors que sa conseillère l’avait invité à continuer d’effectuer des recherches d'emploi. Il avait alors expliqué audit service qu'il serait compliqué pour lui de vivre sans revenu jusqu'à ce qu'il trouve un emploi. Son interlocuteur lui avait alors conseillé d'arrêter sa scolarité afin de continuer à percevoir les indemnités du chômage, ce qu'il avait refusé car il était essentiel pour lui de continuer sa formation à la HEG.

s. Par courriel du 16 février 2022, la conseillère lui a répondu qu'il pouvait mentionner dans son opposition «[qu'elle n'avait] pas attiré [son] attention sur le fait qu'être inscrit à plein temps tout en cherchant du travail n'était pas possible».

t. Le 2 mars 2022, l'assuré s'est opposé à la décision du 1er février 2022.

u. Par décision sur opposition du 19 avril 2022, l'OCE a rejeté l'opposition au motif que la condition de la bonne foi n'était pas remplie.

C. a. Par acte du 25 mai 2022, l'assuré a formé recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l'encontre cette décision. Il conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de la décision querellée, la condition de la bonne foi étant remplie.

b. Le 21 juin 2022, l'intimé a persisté dans les termes de sa décision du 19 avril 2022.

c. Lors de l'audience de comparution personnelle du 17 octobre 2022, le recourant a notamment exposé avoir suivi, jusqu'en juin 2020, une formation en communication, en cours du soir, cela afin de lui permettre d'intégrer une haute école. Lorsqu'il s'était renseigné auprès de la HEG, il lui avait été expliqué que, pour intégrer une formation en duale, il devait, en principe, présenter un contrat de travail un mois après que les cours aient commencé. Cependant, en raison de la pandémie, ce délai avait été assoupli et un contrat de travail pouvait être transmis en tout temps.

Il avait cherché un emploi à plein temps depuis janvier 2020, puis à 80% dès le mois de septembre 2020. Les cours en duale étaient de quatre heures le soir, sauf le vendredi, ainsi qu'une journée à plein temps. Il avait informé sa conseillère en placement de son intention de suivre un cursus en duale tout en travaillant, ainsi que de son inscription à la HEG à plein temps. La seule information qui lui avait été communiquée était qu'il ne pouvait pas rechercher un emploi à plein temps en étant inscrit en duale, raison pour laquelle il avait modifié son taux de disponibilité à 80%. Il n'avait pas été informé de la transmission de son dossier au service juridique pour examen de son aptitude au placement.

Après avoir trouvé un emploi, à 50%, en février 2021, son inscription à plein temps dans cette école avait été modifiée pour une formation en duale dès le deuxième semestre de 2021.

Il avait informé sa conseillère de son inscription à plein temps et se souvenait qu'ils en avaient discuté plusieurs fois.

d. La conseillère a été entendue en qualité de témoin. Elle a expliqué que le recourant l'avait informée de son intention de s'inscrire à la HEG en duale. Il lui semblait avoir discuté avec le recourant de la possibilité d'être inscrit à plein temps et de modifier son inscription en duale le jour où il trouverait un travail. Elle ne se souvenait pas si le recourant l'avait informée être inscrit à plein temps mais se souvenait qu'il lui avait indiqué pouvoir modifier son inscription de plein temps en duale. L'objectif du recourant était clairement de s'inscrire en duale et de travailler à côté de ses études.

Elle avait pris conscience des horaires à plein temps du recourant au moment où elle avait consulté les courriers du service juridique. Elle aurait pu demander les horaires de cours au recourant mais ne l'avait pas fait. Le recourant l'ayant informée avoir des difficultés à trouver du temps pour rechercher un emploi ou pour participer à des mesures, elle s'était questionnée sur son aptitude au placement et avait transmis le dossier au service juridique. Elle n'en avait pas informé le recourant.

Elle avait rédigé le courriel du 16 février 2022 car elle avait estimé qu'elle n'avait pas attiré l'attention du recourant quant à son aptitude au placement en raison de son inscription à plein temps à la HEG. Elle pensait que du moment où la caisse avait ouvert un droit à l'assuré, celui-ci pensait recevoir ses indemnités à juste titre.

Elle avait déjà eu des assurés inscrits dans une formation en emploi et leur indemnisation n'avait pas posé de problème. Elle ne connaissait pas la possibilité d'être inscrit à plein temps et de modifier son inscription en cours d'année.

e. Le 31 octobre 2022, le recourant a transmis à la chambre de céans la copie de son contrat de travail pour un emploi à 50%, débutant le 22 février 2021 et une attestation d'immatriculation de la HEG datée du 22 février 2021 mentionnant que le recourant était inscrit dans le cursus en emploi du 22 février 2021 au 19 septembre 2021. Il a précisé que la HEG n'était pas en mesure de lui fournir « une simulation d'un changement d'inscription qu'il aurait pu faire en tout temps ».

f. L'intimé a constaté que le recourant n'avait pas apporté d'éléments susceptibles de modifier la décision sur opposition du 19 avril 2022. En particulier, il n'avait pas démontré pouvoir en tout temps, et notamment avant le début du deuxième semestre, modifier son inscription à la HEG.

g. Par courrier du 18 décembre 2022, le recourant a confirmé ses précédentes explications et avoir pleinement informé sa conseillère sur son inscription à plein temps.

h. Interrogée par le chambre de céans, la HEG a indiqué, dans un courrier du 16 janvier 2023, que le recourant s'était inscrit en emploi au printemps 2020 pour une rentrée en septembre de la même année. N'ayant pas pu fournir un contrat de travail dans les délais impartis, il avait automatiquement été basculé dans la filière à plein temps. C'était au printemps 2021 que le recourant avait trouvé du travail et avait pu rejoindre la filière en emploi, dans laquelle il étudiait encore. Le changement de filière (plein temps / en emploi) à l'inter semestre était possible jusqu'en 2020-2021, mais ne se faisait plus depuis l'année académique 2021-2022. De fait, il ne s'agissait pas d'un assouplissement en raison de la pandémie, mais d'une pratique courante à ce moment-là.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Le 1er janvier 2021, est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA, laquelle est applicable en vertu des art. 1 al. 1 et 95 al. 1 LACI. Déposé postérieurement au 1er janvier 2021, le recours est par conséquent soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario)

3.             Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais du 7ème jour avant Pâques au 7ème jour après Pâques inclusivement (art. 38 al. 4 let. a LPGA et art. 89C let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]), le recours est recevable (art. 56ss LPGA; art. 62ss LPA).

4.             Le litige porte sur la question de savoir si le recourant peut bénéficier d'une remise de l'obligation de restituer la somme de CHF 9'115.35, correspondant aux indemnités perçues du 14 septembre au 30 novembre 2020, singulièrement sur la réalisation de la condition de la bonne foi.

À cet égard, il sied de préciser que la demande de remise du recourant, bien que formée dans le délai d'opposition à la décision de restitution du 13 octobre 2021, ne contient que des arguments concernant la remise de l'obligation de restituer, de sorte qu'il n'y a pas lieu de considérer que l'intimé aurait dû la traiter comme une opposition à la décision de restitution du 13 octobre 2021 (ATAS/923/2021 du 10 septembre 2021).

5.              

5.1 Selon l'art. 25 al. 1, première phrase, LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. L'assuré concerné peut demander la remise de l'obligation de restituer, lorsque la restitution des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, le mettrait dans une situation difficile (art. 25 al. 1, deuxième phrase, LPGA). Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l'obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c; arrêt du Tribunal fédéral 8C_364/2019 du 9 juillet 2020 consid. 4.1).

Selon l’art. 4 al. 1 et 2 de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales (OPGA - RS 830.11), la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l'intéressé se trouve dans une situation difficile (al. 1). Est déterminant, pour apprécier s'il y a une situation difficile, le moment où la décision de restitution est exécutoire (al. 2).

5.2 Savoir si la condition de la bonne foi, présumée en règle générale (art. 3 du Code civil suisse, du 10 décembre 1907 - CC - RS 210 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_795/2020 du 10 mars 2021 consid. 4.2), est réalisée doit être examiné dans chaque cas à la lumière des circonstances concrètes (arrêt du Tribunal fédéral 8C_269/2009 du 13 novembre 2009 consid. 5.2.1). La condition de la bonne foi doit être remplie eu à égard à la période où l’assuré a reçu les prestations indues dont la restitution est exigée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_711/2019 du 2 avril 2020 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_1032/2012 du 17 décembre 2013 consid. 4.2).

La jurisprudence constante considère que l’ignorance, par le bénéficiaire, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre qu’il était de bonne foi. Il faut bien plutôt qu’il ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. Il s’ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d'emblée lorsque les faits qui conduisent à l'obligation de restituer (violation du devoir d’annoncer ou de renseigner) sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. En revanche, l'assuré peut invoquer sa bonne foi lorsque l'acte ou l'omission fautifs ne constituent qu'une violation légère de l'obligation d'annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_43/2020 du 13 octobre 2020 consid. 3 et 9C_16/2019 du 25 avril 2019 consid. 4).

On parlera de négligence grave lorsque l'ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d'une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (ATF 110 V 176 consid. 3d ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2019 du 25 avril 2019 consid. 4). La mesure de l'attention nécessaire qui peut être exigée doit être jugée selon des critères objectifs, où l'on ne peut occulter ce qui est possible et raisonnable dans la subjectivité de la personne concernée (faculté de jugement, état de santé, niveau de formation, etc. ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_413/2016 du 26 septembre 2016 consid. 3.1 ; Sylvie PÉTREMAND, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 69 ad art. 25 LPGA). Il faut ainsi en particulier examiner si, en faisant preuve de la vigilance exigible, l’assuré aurait pu constater que les versements ne reposaient pas sur une base juridique. Il n’est pas demandé à un bénéficiaire de prestations de connaître dans leurs moindres détails les règles légales. En revanche, il est exigible de lui qu’il vérifie les éléments pris en compte par l’administration pour calculer son droit aux prestations. On peut attendre d'un assuré qu'il décèle des erreurs manifestes et qu'il en fasse l'annonce (arrêt du Tribunal fédéral 9C_498/2012 du 7 mars 2013 consid. 4.2). On ajoutera que la bonne foi doit être niée quand l’enrichi pouvait, au moment du versement, s’attendre à son obligation de restituer, parce qu’il savait ou devait savoir, en faisant preuve de l’attention requise, que la prestation était indue (art. 3 al. 2 CC ; ATF 130 V 414 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_319/2013 du 27 octobre 2013 consid. 2.2).

En revanche, l’intéressé peut invoquer sa bonne foi si son défaut de conscience du caractère indu de la prestation ne tient qu’à une négligence légère, notamment, en cas d’omission d’annoncer un élément susceptible d’influer sur le droit aux prestations sociales considérées, lorsque ladite omission ne constitue qu’une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner sur un tel élément (ATF 112 V 97 consid. 2c ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_16/2019 précité consid. 4 et 9C_14/2007 du 2 mai 2007 consid. 4 ; DTA 2003 n° 29 p. 260 consid. 1.2 et les références ; RSAS 1999 p. 384 ; Ueli KIESER, Kommentar zum Bundesgesetz über den Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts - ATSG, 2020, n. 65 ad art. 25 LPGA).

5.3 Le principe de la bonne foi s'applique en matière d'assurances sociales. Le législateur en a ancré certaines de ses prémisses dans la LPGA et les lois spécifiques, à savoir le devoir de renseigner. Selon l'art. 27 LPGA, dans les limites de leur domaine de compétence, les assureurs et les organes d’exécution des diverses assurances sociales sont tenus de renseigner les personnes intéressées sur leurs droits et obligations (al. 1), chacun ayant au surplus le droit d’être conseillé, en principe gratuitement, sur ses droits et obligations, par les assureurs à l’égard desquels les intéressés doivent faire valoir leurs droits ou remplir leurs obligations (al. 2) ; si un assureur constate qu’un assuré ou ses proches ont droit à des prestations d’autres assurances sociales, il les en informe sans retard (al. 3).

Découlant directement de l’art. 9 Cst. et valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités, lorsqu’il a réglé sa conduite d’après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l’administration. Selon la jurisprudence, un renseignement ou une décision erronés de l’administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que l’autorité soit intervenue dans une situation concrète à l’égard de personnes déterminées, qu’elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et que l’administré n’ait pas pu se rendre compte immédiatement de l’inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu’il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et que la réglementation n’ait pas changé depuis le moment où l’assurance a été donnée (ATF 131 II 627, consid. 6.1, p. 636 et les références).

Selon l'art. 22 OACI, les organes d'exécution mentionnés à l'art. 76 al. 1 let. a à d LACI (notamment les caisses de chômage, les autorités cantonales et les ORP) renseignent les assurés sur leurs droits et obligations, notamment sur la procédure d’inscription et leur obligation de prévenir et d’abréger le chômage. Les caisses renseignent les assurés sur leurs droits et obligations entrant dans le domaine d'activité des caisses (art. 81 LACI). Les autorités cantonales et les ORP renseignent les assurés sur leurs droits et obligations entrant dans leurs domaines d'activité spécifiques (art. 85 et 85b LACI).

Le devoir de conseil de l'assureur social au sens de l'art. 27 al. 2 LPGA comprend l'obligation d'attirer l'attention de la personne intéressée sur le fait que son comportement pourrait mettre en péril la réalisation de l'une des conditions du droit aux prestations (ATF 131 V 472 consid. 4.3). Il s'étend non seulement aux circonstances de fait déterminantes, mais également aux circonstances de nature juridique (SVR 2007 KV n° 14 p. 53 et la référence). Son contenu dépend entièrement de la situation concrète dans laquelle se trouve l'assuré, telle qu'elle est reconnaissable pour l'administration. Aucun devoir de renseignement ou de conseil au sens de l'art. 27 LPGA n'incombe à l'institution d'assurance tant qu'elle ne peut pas, en prêtant l'attention usuelle, reconnaître que la personne assurée se trouve dans une situation dans laquelle elle risque de perdre son droit aux prestations (ATF 133 V 249 consid. 7.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_557/2010 du 7 mars 2011 consid. 4.1).

6.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

7.             En l'espèce, il convient d'examiner si le recourant savait ou devait savoir que les indemnités de l’assurance-chômage reçues entre le 14 septembre et le 30 novembre 2020 étaient indues.

7.1 Il n’est pas contesté que le recourant entendait suivre une formation à la HEG dans le cadre d’un cursus en emploi lui permettant d’exercer une activité lucrative en parallèle. Toutefois, n'ayant pas trouvé de travail à la rentrée scolaire de septembre 2020, il a débuté sa formation à plein temps. Durant toute la période litigieuse, le recourant a perçu des indemnités de chômage pour un taux d'occupation de 80%.

7.2 L’intimé a considéré que la formation à plein temps était incompatible avec une aptitude au placement du recourant et que celui-ci aurait dû savoir, en faisant preuve d'un minimum d'attention, qu'il n'était plus apte au placement dès le début de sa formation à plein temps, ce qui excluait sa bonne foi. De son côté, le recourant soutient qu’il avait obtenu un délai au-delà du 9 octobre 2020 pour basculer dans le cursus duale et que sa conseillère l’avait conforté dans son droit au versement des indemnités, nonobstant sa formation à plein temps.

7.3 S’agissant de la possibilité pour le recourant de modifier son mode de cursus en cours d’année, la conseillère, entendue en qualité de témoin, a confirmé que le recourant lui avait dit pouvoir modifier son inscription de plein temps à duale le jour où il trouverait un travail. Le recourant n'a cependant pas été en mesure de fournir une attestation de la HEG confirmant cette possibilité. Le recourant n’a pas non plus été en mesure d’indiquer précisément quel responsable de la direction de la HEG lui aurait donné, par oral, des informations dans ce sens. Il a produit une attestation de cette dernière, du 1er mars 2021, indiquant que son inscription à plein temps aurait pu être transférée vers une formation en emploi jusqu'au 9 octobre 2020, s'il avait trouvé un travail dans l'intervalle. Par ailleurs, interpellée par la chambre de céans, la HEG, par la plume de son responsable de la coordination de l'enseignement et des relations internationales, a indiqué, dans un courrier du 16 janvier 2023, que, jusqu'en 2020-2021, un changement de filière était possible à l'inter-semestre. Il ne s'agissait alors pas d'un assouplissement des règles de transfert de cursus en raison de la pandémie mais d'une pratique courante qui avait été abolie par la suite. Le recourant ayant trouvé un emploi au printemps 2021, il avait pu rejoindre la filière en emploi. Il ressort ainsi de ces documents qu'un changement de cursus n'était pas possible en tout temps mais uniquement jusqu’au 9 octobre 2020 et ensuite à l’intersemestre, ce qui a d’ailleurs été le cas du recourant, lequel est passé dans le cursus en emploi dès le 22 février 2021.

7.3.1 Il est ainsi établi qu’un changement de cursus était possible jusqu'au 9 octobre 2020, de sorte qu'il ne fait nul doute que jusqu'à cette date, bien qu'étant inscrit dans un cursus à plein temps, le recourant pouvait de bonne foi s'estimer en droit de toucher des indemnités de l'assurance-chômage à un taux de 80%, puisqu'il aurait pu modifier son cursus aussitôt un emploi trouvé. Il doit dès lors être retenu que le recourant a perçu de bonne foi les prestations du chômage à tout le moins jusqu'au 9 octobre 2020.

7.3.2 Dès le 10 octobre 2020, il est établi que le recourant a informé sa conseillère du maintien de son inscription à la HEG à plein temps. Or, celle-ci a affirmé, dans son courriel du 16 février 2022, puis en audience, ne jamais avoir informé le recourant que sa formation à plein temps pouvait poser un problème d'aptitude au placement. La conseillère a, par ailleurs, déclaré n'avoir pris conscience des horaires à plein temps du recourant qu'au moment où elle avait consulté les courriers du service juridique. Elle a toutefois admis ne pas avoir questionné le recourant à ce sujet. En outre, il ressort de l’audition de la conseillère que, selon elle, le recourant pensait recevoir ses indemnités à juste titre. Le recourant a ainsi non seulement respecté son devoir d'information auprès de l’intimé - en fournissant toutes les informations pertinentes sur sa situation -, mais il a été conforté par sa conseillère dans son droit aux prestations de chômage au-delà du 9 octobre 2020. Dans ces conditions, on doit considérer que dès le 10 octobre 2020, le recourant a certes fait preuve d’une négligence en ne requérant pas de l’intimé une confirmation claire de son droit aux indemnités de chômage, au vu de sa formation à plein temps, mais que cette négligence doit être qualifiée de légère, ayant été conforté par sa conseillère dans son droit aux indemnités, alors même que celle-ci avait le devoir, selon l'art. 27 al. 2 LPGA, d'attirer son attention sur le fait que son comportement pourrait mettre en péril son droit aux prestations, ce d’autant qu’elle détenait toutes les informations pertinentes sur la situation du recourant.

7.3.3 En revanche, à partir du moment où le recourant a été informé par l’intimé que son aptitude au placement posait problème, sa bonne foi ne peut plus être admise, le recourant devant savoir que les prestations pourraient être indues. Or, cette information n’a été reçue par le recourant - ce qui n’est pas contesté par l’intimé - qu’au plus tôt lors de l’entretien de conseil du 8 décembre 2020 par l’entremise de sa conseillère - celle-ci ayant d’ailleurs précisé qu’elle n’avait pas, antérieurement, informé le recourant qu’elle transférait son dossier au service juridique pour examen de son aptitude au placement - puis par un courriel de la conseillère du même jour, soit au-delà de la fin de la période litigieuse, le 30 novembre 2020.

7.4 Au vu de ce qui précède, le recourant doit être considéré comme étant de bonne foi durant toute la période litigieuse du 14 septembre au 30 novembre 2020.

8.             Le recours sera partiellement admis, la décision litigieuse annulée et la cause renvoyée à l'intimé afin qu'il examine la seconde condition cumulative de la remise de l'obligation de restituer, soit la situation difficile du recourant, celle de la bonne foi étant admise, et rende une nouvelle décision.

9.             Le recourant, représenté par un mandataire, obtenant gain de cause, une indemnité lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]), arrêtée en l'espèce à CHF 500.-.

Au surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA).

 


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision de l’intimé du 19 avril 2022.

4.        Renvoie la cause à l’intimé dans le sens des considérants.

5.        Alloue au recourant, à charge de l'intimé, une indemnité de CHF 500.- à titre de participation à ses frais et dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le