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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1065/2024

ATA/1361/2024 du 19.11.2024 sur JTAPI/737/2024 ( LCR ) , REJETE

Descripteurs : CIRCULATION ROUTIÈRE(DROIT DE LA CIRCULATION ROUTIÈRE);LOI FÉDÉRALE SUR LA CIRCULATION ROUTIÈRE;RÈGLE DE LA CIRCULATION;VITESSE;EXCÈS DE VITESSE;PERMIS DE CONDUIRE;RECONNAISSANCE DU PERMIS;CONDUITE MALGRÉ UNE INCAPACITÉ;INTERDICTION DE CONDUIRE;SANCTION ADMINISTRATIVE;MESURE(DROIT PÉNAL);GRAVITÉ DE LA FAUTE;FAUTE GRAVE;NÉCESSITÉ;PROFESSION;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;POUVOIR D'APPRÉCIATION;PROPORTIONNALITÉ
Normes : Cst.5.al2; Cst.29.al2; OAC.45.al1; LCR.16.al3; LCR.16c.al1.leta; LCR.16c.al2.leta; LCR.31; CP.49.al1; LPA.18
Résumé : Confirmation de l'interdiction signifiée à un conducteur de faire usage de son permis de conduire étranger sur le territoire suisse pour une durée de six mois, en raison de la commission de deux infractions graves (excès de vitesse) en un jour. Excès de vitesse important (à la limite du délit de chauffard) et faute grave du recourant, qui conduisait selon lui dans un état de « confusion généralisé ». Aucune circonstance ne permet de considérer le cas comme de moindre gravité ; l’absence d’antécédents n’est pas de nature à diminuer l’importance de la faute. Besoin professionnel du recourant de disposer d’un véhicule automobile à relativiser. Rejet du recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1065/2024-LCR ATA/1361/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 novembre 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 juillet 2024 (JTAPI/737/2024)


EN FAIT

A. a. A______, ressortissant allemand né le ______ 1979, est au bénéfice d'un permis de séjour en Suisse délivré par l'office cantonal de la population et des migrations, valable du 15 mars 2023 au 4 décembre 2027.

b. Il est titulaire d'un permis de conduire allemand, délivré le 6 avril 2013, pour la catégorie de véhicules « B ».

c. Il est employé par B______ au titre d'assistant logistique.

B. a. Le dimanche 10 septembre 2023 à 14h01, un véhicule de tourisme (de marque Bentley) immatriculé au nom de l'entreprise C______ (1______), radiée le 21 juin 2023 et dont les actifs ont été transférés à D______, a été contrôlé par un radar à proximité du 43 route de Marsillon, à Troinex, à une vitesse de 103 km/h, alors que la vitesse signalisée était de 50 km/h (localité). Après déduction de la marge de sécurité de 5 km/h, la vitesse retenue était de 97 km/h, soit un dépassement de la vitesse autorisée de 47 km/h.

Selon le rapport de police établi le 7 novembre 2023, le tracé de la route était rectiligne et la visibilité était bonne. Les conditions du trafic étaient fluides et il faisait beau temps.

b. Le même jour, à 19h10, le même véhicule a été contrôlé par un radar à proximité du 62 route du Pas-de-l'Échelle, à Veyrier, à une vitesse de 85 km/h, alors que la vitesse signalisée était de 50 km/h (localité). Après déduction de la marge de sécurité de 5 km/h, la vitesse retenue était de 80 km/h, soit un dépassement de la vitesse autorisée de 30 km/h.

Selon le rapport de police établi le 7 novembre 2023, le tracé de la route était rectiligne et la visibilité était bonne. Les conditions du trafic étaient fluides et il faisait beau temps.

c. Le conducteur du véhicule était, dans les deux situations, A______.

d. Les 6 et 20 octobre 2023, des avis au détenteur accompagnés des formulaires « reconnaissance d'infraction » ont été adressés à C______ par la police routière pour les excès de vitesse du 10 septembre 2023.

e. Le 2 novembre 2023, un employé de C______, muni d'une procuration au nom de celle-ci, s'est manifesté auprès de la police afin d'identifier le conducteur. Le 6 novembre 2023, il a rapporté les documents complétés et signés au nom de A______.

f. L'office cantonal des véhicules (ci-après: OCV) a informé A______ que les autorités de police avaient porté à sa connaissance les infractions du 10 septembre 2023, l'invitant à lui transmettre ses observations.

g. A______ a relevé que les deux infractions avaient été commises sur un tracé rectiligne, avec une bonne visibilité et des conditions de trafic fluide, sur une route sèche. Il avait pensé, à tort, qu'il était sur une route de campagne, car il n'était pas aisé pour un conducteur ne connaissant pas la typologie des lieux de s'en rendre compte, étant inattentif au panneau de circulation indiquant la limitation de vitesse. Ce jour-là, il était en proie à de vives émotions en lien avec le conflit opposant l'Azerbaïdjan à l'Arménie, son pays d'origine où résidait encore une partie de sa famille. Ces circonstances ne pouvaient excuser les excès de vitesse mais étaient de nature à expliquer l'état de confusion généralisé dans lequel il se trouvait. Il n'avait aucun antécédent et avait impérativement besoin de son permis dans le cadre de ses activités professionnelles. Il demandait ainsi que soit prononcée à son encontre une interdiction de faire usage de son permis de conduire d'une durée équivalente au minimum légal.

Il a produit une attestation de son employeur établie le 12 février 2024, à teneur de laquelle il avait impérativement besoin, en sa qualité d'assistant logistique, de son véhicule automobile pour se rendre en tout temps, en Suisse et à l'étranger, auprès de la clientèle de l'entreprise. De même, il devait prendre en charge les cadres de la société pour leurs déplacements professionnels.

h. Par décision du 21 février 2024, l’OCV a fait interdiction à A______ de faire usage de son permis de conduire étranger sur le territoire suisse pour une durée de six mois, en raison des deux excès de vitesse commis le 10 septembre 2023. Compte tenu de l’ensemble des circonstances et de l’importance de celui commis à 14h01 (97 km/h au lieu de 50 km/h), la mesure s’écartait du minimum légal, tout en tenant compte de son besoin professionnel de conduire des véhicules automobiles.

C. a. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et à ce que la durée de l'interdiction soit fixée à trois mois. Il a conclu à son audition, à celle de témoins et à la tenue d'un transport sur place.

b. L'OCV a conclu au rejet du recours.

c. Par jugement du 30 juillet 2024, le TAPI a rejeté le recours.

D. a. Par acte remis à la poste le 16 septembre 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice contre ce jugement, concluant à son annulation et à ce que la durée de l'interdiction de faire usage de son permis de conduire étranger sur le territoire suisse soit fixée à trois mois. Il a une nouvelle fois sollicité sa comparution personnelle, l'audition de témoins ainsi que la tenue d'un transport sur place.

Les actes d'enquêtes demandés permettraient d'obtenir les informations utiles en lien avec les circonstances psychologiques particulières dans lesquelles il se trouvait le 10 septembre 2023.

Il a repris sa précédente argumentation, précisant que si les infractions qu'il avait commises étaient certes objectivement graves, l'OCV avait toutefois excédé son pouvoir d'appréciation et violé le principe de la proportionnalité en prononçant une interdiction de faire usage de son permis d'une durée du double du minimum légal, au seul motif de l'importance de l'excès de vitesse, sans prendre en compte les circonstances particulières dans lesquelles ceux-ci avaient été commis, soit la configuration des lieux et son état émotionnel.

b. L'OCV a conclu au rejet du recours, précisant ne pas avoir d'observations complémentaires à formuler.

c. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de l'interdiction signifiée au recourant de faire usage de son permis de conduire étranger sur le territoire suisse pour une durée de six mois.

3.             Le recourant conclut à sa comparution personnelle, à l'audition de témoins ainsi qu'à la tenue d'un transport sur place.

3.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 138 III 374 consid. 4.3.2). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

La procédure administrative est en principe écrite. Toutefois si le règlement et la nature de l’affaire le requièrent, l’autorité peut procéder oralement (art. 18 LPA).

3.2 En l'espèce, le recourant soutient que son audition ainsi que celles de témoins permettraient d'obtenir toutes les informations utiles en lien avec les circonstances psychologiques particulières dans lesquelles il se serait trouvé le 10 septembre 2023. Or, d'une part, il s'est déjà exprimé par écrit sur cette question, que ce soit devant l'OCV, le TAPI ou la chambre de céans. D'autre part, à supposer qu'il considère, malgré cela, que des informations relatives à son état psychologique manqueraient, il n'indique pas pour quelle raison ces informations n'auraient pas pu être transmises par écrit. Son audition n'apparaît donc pas nécessaire ni même utile et ne sera ainsi, par appréciation anticipée des preuves, pas ordonnée, la chambre de céans estimant disposer de toutes les informations pertinentes sur cette problématique (pour autant qu'elle soit pertinente). Pour les mêmes raisons, les témoignages sollicités ne seront pas non plus ordonnés, étant au demeurant précisé que le recourant n'a désigné aucun témoin.

La typologie des lieux où les infractions ont été commises ainsi que les conditions météorologiques et de circulation ressortent notamment du rapport de police établi le 7 novembre 2023 et ne sont pas contestées. En outre, les données disponibles sur le système d’information du territoire à Genève (ci-après : SITG) permettent de visualiser les caractéristiques essentielles des lieux de commission des infractions. Un transport sur place n'apparaît donc pas utile et ne sera pas conséquent pas non plus ordonné.

Par ailleurs, le recourant s'est vu offrir la possibilité de faire valoir ses arguments par écrit. Il s'est ainsi exprimé de manière circonstanciée sur l'objet du litige et a produit les pièces auxquelles il s’est référé dans ses écritures. La chambre de céans dispose ainsi d'un dossier complet qui lui permet de statuer en connaissance de cause.

Il ne sera donc pas procédé aux actes d'instruction sollicités.

4.             Le recourant se plaint de la durée de l'interdiction qui lui a été faite de faire usage de son permis de conduire étranger sur le territoire suisse, qu'il estime disproportionnée.

4.1 En vertu de l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée en l’espèce.

4.2 Conformément à l'art. 42 par. 1 de la Convention sur la circulation routière du 8 novembre 1968 (RS 0.741.10 ; ratifiée tant par l'Allemagne que par la Suisse), les parties contractantes ou leurs subdivisions peuvent retirer à un conducteur, qui commet sur leur territoire une infraction susceptible d'entraîner le retrait du permis de conduire en vertu de leur législation, le droit de faire usage sur leur territoire du permis de conduire, national ou international, dont il est titulaire.

L’usage d’un permis étranger peut être interdit en vertu des dispositions qui s’appliquent au retrait du permis de conduire suisse (art. 45 al. 1 1ère phr. de l’ordonnance réglant l’admission à la circulation routière du 27 octobre 1976 - OAC - RS 741.51). Le retrait d'admonestation du permis de conduire est une mesure administrative ordonnée dans l'intérêt de la sécurité routière, qui vise à amender le conducteur fautif et à éviter les récidives (ATF 133 II 331 consid. 4.2 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_372/2008 du 13 février 2009 consid. 3.1).

4.3 Selon l'art. 16 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01), les permis de conduire et les autorisations seront retirés lorsque l’autorité constate que les conditions légales de leur délivrance ne sont pas ou ne sont plus remplies (al. 1). Une infraction aux prescriptions sur la circulation routière entraîne le retrait du permis de conduire ou un avertissement lorsque la procédure prévue par la loi fédérale sur les amendes d’ordre du 24 juin 1970 (LAO - RS 741.03) n’est pas applicable (al. 2).

Les infractions à la LCR sont réparties en fonction de leur gravité en trois catégories distinctes, assorties de mesures administratives minimales : les infractions légères, moyennement graves et graves (art. 16a à 16c LCR). Pour déterminer la durée du retrait d’admonestation, la loi distingue ainsi entre ces trois catégories d'infractions. Les principes relatifs aux retraits de permis de conduire d'admonestation sont, beaucoup plus que sous l'ancien droit, fonction de la mise en danger créée par l'infraction (ATA/1018/2024 du 27 août 2024 consid. 3.2 et les arrêts cités).

4.3.1 Selon l'art. 16c al. 1 let. a LCR, commet une infraction grave la personne qui, notamment, en violant gravement les règles de la circulation, met sérieusement en danger la sécurité d’autrui ou en prend le risque. De jurisprudence constante, la qualification du cas grave au sens de cette disposition correspond à celle de l’art. 90 al. 2 LCR (ATF 132 II 234 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_402/2015 du 10 février 2016 consid. 2.1).

Dans le domaine des excès de vitesse, la jurisprudence a été amenée à fixer des règles précises afin d'assurer l'égalité de traitement entre conducteurs. Ainsi, le cas est objectivement grave, c'est-à-dire sans égard aux circonstances concrètes, en cas de dépassement de la vitesse autorisée de 25 km/h ou plus à l'intérieur des localités, de 30 km/h ou plus hors des localités et sur les semi-autoroutes dont les chaussées, dans les deux directions, ne sont pas séparées et de 35 km/h ou plus sur les autoroutes (ATF 132 II 234 consid. 3.1 ; 124 II 259 consid. 2b). Cette jurisprudence ne dispense toutefois pas l'autorité de tout examen des circonstances du cas concret ; d'une part, l'importance de la mise en danger et celle de la faute doivent être appréciées, afin de déterminer quelle doit être la durée du retrait (art. 16 al. 3 LCR) ; d'autre part, il y a lieu de rechercher si des circonstances particulières (par exemple la configuration des lieux, la densité du trafic, les conditions de visibilité ou la réputation de l'automobiliste [arrêt du Tribunal fédéral 6A.123/2001 du 19 mars 2002 consid. 3b]) ne justifient pas de considérer néanmoins le cas comme plus grave ou, inversement, comme moins grave. Ainsi, notamment, un dépassement de vitesse à l'intérieur d'une localité peut constituer un cas de moindre gravité que celui qui résulterait d'une appréciation purement schématique, lorsque le conducteur avait des motifs sérieux de penser qu'il ne se trouvait plus dans la zone de limitation de vitesse (arrêts du Tribunal fédéral 1C_125/2016 du 25 octobre 2016 consid. 3.1 ; 1C_87/2016 du 13 juin 2016 consid. 2.1 ; 6B_464/2015 du 8 février 2016 consid. 5.1 et références citées).

Les limitations de vitesse, telles qu'elles résultent de la loi ou de la signalisation routière, valent comme limites au-delà desquelles la sécurité de la route est compromise. Elles indiquent aux conducteurs les seuils à partir desquels le danger est assurément présent. Leur respect est donc essentiel à la sécurité du trafic. Les seuils fixés par la jurisprudence pour distinguer le cas de peu de gravité, le cas de moyenne gravité et le cas grave tiennent compte de la nature particulière du danger représenté pour les autres usagers de la route selon que l'excès de vitesse est commis sur une autoroute (ATF 123 II 106 consid. 2c), une semi-autoroute (ATF 122 IV 173 consid. 2d), une sortie d'autoroute (ATF 128 II 131 consid. 2b), en dehors des localités (ATF 121 IV 230 consid. 2c) ou à l'intérieur des localités (ATF 121 II 127 consid. 3c ; arrêt du Tribunal fédéral 6A.81/2006 du 22 décembre 2006 consid. 4.3). Ils n'ont pas été fixés à la légère, mais reposent sur les considérations d'un collège d'experts mandatés par la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral. Ces derniers ont ainsi relevé que les excès de vitesse représentent une importante source de dangers à l'intérieur des localités. Les conducteurs doivent en effet gérer un plus grand nombre de paramètres que sur les routes principales situées en dehors des localités ou sur une autoroute, ce qui exige d'eux une attention plus soutenue. Par ailleurs, on rencontre à l'intérieur des localités de nombreux usagers de la route, tels que des enfants, des personnes âgées ou encore des cyclistes, qui sont exposés à un danger particulier en raison de leur vulnérabilité. Il existe en outre un risque plus élevé de collisions latérales avec d'autres véhicules automobiles débouchant d'artères secondaires (arrêt du Tribunal fédéral 1C_83/2008 du 16 octobre 2008 consid. 2.5).

4.3.2 Après une infraction grave, le permis d’élève conducteur ou le permis de conduire est retiré pour trois mois au minimum (art. 16c al. 2 let. a LCR).

Les circonstances qui doivent être prises en considération pour fixer la durée du retrait du permis de conduire sont notamment l'atteinte à la sécurité routière, la gravité de la faute, les antécédents en tant que conducteur ainsi que la nécessité professionnelle de conduire un véhicule automobile (art. 16 al. 3 LCR).

Conformément à l'art. 16 al. 3 LCR, la durée minimale du retrait ne peut être réduite. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, cette dernière règle s’impose à l'autorité et aux tribunaux sans dérogation possible, même pour tenir compte de besoins professionnels particuliers du conducteur. Ainsi, si des circonstances telles que la gravité de la faute, les antécédents ou la nécessité professionnelle de conduire un véhicule automobile doivent être prises en compte pour fixer la durée du retrait, la durée minimale prescrite par la loi ne peut pas être réduite. En outre, aucun critère d'appréciation, fût-il absolu, ne donne droit à une limitation du retrait à la durée minimum légale (ATF 135 II 334 consid. 2.2 ; 132 II 234 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_188/2010 du 6 septembre 2010 consid. 2.1 ; ATA/1173/2024 du 8 octobre 2024 consid. 4.1 et les références citées).

Ces éléments doivent faire l'objet d'une appréciation d'ensemble, de manière à atteindre autant que possible l'effet éducatif et préventif auquel tend la mesure. Dans ce contexte, l'autorité cantonale dispose d'un large pouvoir d'appréciation et l'autorité de recours n'intervient que si celle-ci a abusé de ce pouvoir, par exemple en ne prenant pas en compte certains éléments pertinents ou encore en appréciant leur portée de manière tout à fait insoutenable (ATF 128 II 173 consid. 4b in JdT 2002 I 593, et la jurisprudence citée). Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2).

4.4 Le juge administratif doit examiner la situation professionnelle de l'intéressé et déterminer si la mesure dont il est susceptible de faire l'objet serait, compte tenu des besoins professionnels, particulièrement rigoureuse (ATF 123 II 572 consid. 2c ; ATA/254/2020 du 3 mars 2020 consid. 7a et les arrêts cités).

Lorsqu'il s'agit d'apprécier le besoin professionnel de conduire un véhicule automobile, il convient de respecter le principe de la proportionnalité. Le retrait du permis de conduire est ressenti plus durement par le conducteur qui en a besoin pour des raisons professionnelles, de sorte qu'un retrait plus court suffit, en règle générale, à l'admonester de manière efficace et à le dissuader de commettre de nouvelles infractions. Un tel conducteur peut donc être privé de son permis moins longtemps que celui qui se limite à un usage commun, même si les fautes commises sont identiques. La réduction s'opère ainsi proportionnellement au degré de sensibilité à la sanction. Il n'existe pas, d'un côté, des conducteurs qui n'ont aucunement besoin de leur permis et, de l'autre, des conducteurs qui en ont un besoin impératif, tels que les chauffeurs professionnels ; la gradation est au contraire continue. La détermination du degré de sensibilité à la sanction ne permet pas cependant, à elle seule, de décider si et dans quelle mesure une réduction se justifie. Une telle question doit être tranchée au regard de toutes les circonstances du cas (ATF 128 II 285 consid. 2.4 ; 123 II 572 consid. 2c ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2008 du 25 novembre 2008 consid. 3.3.1).

Le Tribunal fédéral a ainsi nié l'utilité professionnelle du permis de conduire pour des agents d'assurances ou des courtiers immobiliers, au motif que les transports publics ou le taxi permettaient d'accéder à une clientèle potentielle suffisante dans des délais acceptables pour que l'activité professionnelle, bien qu'entravée d'une manière non négligeable, ne soit pas rendue impossible ou compliquée à l'excès (arrêts du Tribunal fédéral 1C_63/2007 du 24 septembre 2007 consid. 4.5 ; 6A.24/2005 du 24 juin 2005 consid. 3).

La chambre de céans s'est prononcée à plusieurs reprises sur la question des besoins professionnels d'un conducteur dont le permis de conduire a été retiré. Pour que le besoin d'un véhicule puisse être pris en considération d'une façon déterminante, il faut que le retrait de permis interdise à l'intéressé tout exercice de son activité lucrative, comme c'est le cas pour un chauffeur de taxis, un livreur ou un routier par exemple ou tout au moins qu'il entraîne une perte de gain importante, soit des frais considérables faisant apparaître la mesure comme une punition disproportionnée, s'ajoutant ou se substituant à la condamnation pénale (ATA/5/2007 du 9 janvier 2007 ; ATA/39/2006 du 24 janvier 2006).

4.5 Aux termes de l'art. 31 LCR, le conducteur devra rester constamment maître de son véhicule de façon à pouvoir se conformer aux devoirs de la prudence (al. 1). Toute personne qui n'a pas les capacités physiques et psychiques nécessaires pour conduire un véhicule parce qu’elle est sous l’influence de l’alcool, de stupéfiants, de médicaments ou pour d’autres raisons, est réputée incapable de conduire pendant cette période et doit s’en abstenir (al. 2). La conduite en état d’incapacité constitue pour le moins une mise en danger abstraite accrue grave de la sécurité routière (ATF 130 IV 32 consid. 5 ; Cédric MIZEL, Droit et pratique illustrée du retrait du permis de conduire, 2015, p. 499).

L'adage nemo auditur suam (propriam) turpitudinem allegans (nul ne peut se prévaloir de sa propre faute) concrétise le principe constitutionnel de la bonne foi (art. 9 Cst.) et vaut également en matière de droit public (arrêt du Tribunal fédéral 2C_17/2008 du 16 mai 2008 consid. 6.2).

4.6 Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 Cst., exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité). En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (proportionnalité au sens étroit ; ATF 126 I 219 consid. 2c et les références citées).

4.7 En l'espèce, le recourant ne conteste à juste titre pas avoir commis deux excès de vitesse de respectivement 47 km/h et 30 km/h sur des tronçons limités à 50 km/h, ce qui est objectivement constitutif, en application de la jurisprudence susmentionnée, de deux infractions graves (art. 16c al. 1 let. a LCR). Par conséquent, l'OCV avait l'obligation de prononcer à son encontre une interdiction de faire usage en Suisse de son permis de conduire pour une durée minimale de trois mois. Il a porté cette durée à six mois, compte tenu de l’ensemble des circonstances et de l’importance de l'excès de vitesse commis à 14h01, tout en tenant compte du besoin professionnel du recourant de conduire des véhicules automobiles.

Le raisonnement de l'OCV et le résultat auquel il est parvenu ne sont pas critiquables, pour les raisons qui suivent.

4.7.1 Constituent des circonstances à prendre en compte en défaveur du recourant l'importance de son excès de vitesse, la gravité de sa faute ainsi que la commission d'une seconde infraction grave le même jour.

L'excès de vitesse commis par le l'intéressé à 14h01 est important puisqu'il se situe à la limite (soit 3 km/h) du délit de chauffard réprimé par l'art. 90 al. 3 et 4 LCR. Or, lorsqu'un automobiliste commet un délit de chauffard, son permis lui est retiré pour deux ans au moins (art. 16c al. 2 let.abis LCR).

La faute commise par le recourant est grave. À le suivre, l'état psychologique dans lequel il se trouvait, soit « un état de confusion généralisé », expliquerait son manque d'attention au moment des faits et devrait être considéré comme un élément permettant de réduire la sanction. Or, tel ne saurait être le cas. En effet, s'il était, comme il le décrit, en proie à des émotions – quelles qu'en soient les causes – telles qu'elles l'empêchaient de se rendre compte, d'une part, qu'il roulait dans une localité et, d'autre part, que la vitesse était limitée à 50 km/h à l’entrée de la localité quel que soit le sens dans lequel on la traversait (ce qui ressort de la consultation du SITG), il se trouvait alors en incapacité de conduire et il lui incombait ainsi d’y renoncer, conformément à l'art. 31 al. 2 LCR. Or, en prenant malgré cela le volant, – sans qu'il ressorte d'ailleurs du dossier qu'il se trouvait dans la nécessité de le faire –, et en commettant un excès de vitesse important, en étant de surcroît totalement inattentif aux règles de la circulation et à son environnement, il a considérablement augmenté le risque de provoquer un accident, mettant ainsi gravement en danger la sécurité routière.

Enfin, la commission d'une seconde infraction grave au sens de l'art. 16c al. 1 let. a LCR, de surcroît le même jour, constitue une circonstance aggravante qui doit avoir, comme en droit pénal, pour effet d'augmenter la sanction dans une juste proportion (art. 49 al. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0). Cela s'impose d'autant plus que cette seconde infraction a été commise en plein milieu d'une zone d'habitations (au lieu-dit « Le Petit Veyrier » à hauteur du 62, route du Pas-de-l'Échelle), comme le confirme la consultation du SITG.

4.7.2 En revanche, comme l'a relevé à juste titre le TAPI, aucune circonstance ne permet de considérer le cas comme de moindre gravité. L’absence d’antécédents n’est pas de nature à diminuer l’importance de la faute commise. En outre, bien que le tracé de la route ait été rectiligne, que la visibilité fût bonne, que les conditions du trafic aient été fluides et que le temps était beau, le recourant était totalement inattentif aux règles de la circulation et aux lieux dans lesquels il circulait, qu’il a indiqué ne pas connaître. Les bonnes conditions de visibilité, du tracé et de trafic n'enlèvent d'ailleurs rien à l'importance de l'excès de vitesse, à la faute grave du recourant et au danger qu'il a fait naître en prenant le volant malgré les vives émotions qu’il traversait au moment des faits. Enfin, au vu de l'existence de deux panneaux à chacune des extrémités de la route, le recourant n'avait aucun motif – ni a fortiori de motif sérieux – de penser qu'il ne se trouvait pas ou plus dans la zone de limitation de vitesse.

4.7.3 Il ressort de l'attestation produite par son employeur que le recourant a un besoin professionnel de son véhicule. Toutefois, le recourant n'allègue pas, ni a fortiori ne démontre, que la conduite d'un véhicule automobile serait sa seule activité professionnelle au sein de l'entreprise qui l'emploie, ni qu'il ne pourrait pas être remplacé temporairement pour la partie de son activité dévolue à la conduite. En outre, rien ne permet de retenir que l'intéressé ne pourrait pas se déplacer chez les clients de son employeur au moyen des transports publics. Par conséquent, le besoin professionnel du recourant de disposer de la possibilité de se déplacer au volant d’un véhicule automobile doit être relativisé.

Il apparaît dès lors que la durée de l'interdiction de faire usage du permis de conduire fixée à six mois par l'OCV, soit trois mois en sus du minimum légal, tient compte dans une juste mesure des circonstances aggravantes, soit de la gravité et de la répétition des excès de vitesse commis et de la faute du recourant, de son besoin professionnel relatif ainsi que de l'inexistence de circonstances qui auraient permis de considérer le cas comme de moindre gravité.

Pour le surplus, l'interdiction de faire usage du permis de conduire est apte à faire prendre conscience au recourant du danger qu'il a fait naître en raison de son comportement fautif et de le dissuader de récidiver. On ne voit pas quelle autre mesure moins incisive pourrait être prononcée. Enfin, l'intérêt public à la sécurité routière, qui est d'importance majeure, prime l'intérêt du recourant à pouvoir conduire son véhicule pendant la durée de l'interdiction. Ainsi, et compte tenu de l'ensemble des circonstances, celle-ci n'apparaît pas disproportionnée.

L'OCV n'a donc pas abusé de son pouvoir d'appréciation en prononçant une interdiction de faire usage du permis de conduire d'une durée de six mois.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de procédure de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 septembre 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 juillet 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______, à l'office cantonal des véhicules, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu’à l’office fédéral des routes.

Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. MAZZA

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. KRAUSKOPF

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :