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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4170/2021

ATA/940/2022 du 20.09.2022 ( ANIM ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4170/2021-ANIM ATA/940/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 20 septembre 2022

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Sandy Zaech, avocate

contre

SERVICE DE LA CONSOMMATION ET DES AFFAIRES VÉTÉRINAIRES

 



EN FAIT

1) Monsieur A______ (ci-après : l’intéressé ou le recourant), né le ______ 1960, domicilié à Plan-les-Ouates, est au bénéfice depuis le 4 novembre 2002, d’une autorisation de détenir des animaux sauvages délivrée par le service de la consommation et des affaires vétérinaires (ci-après : SCAV ou service), qui concernait à l’époque deux psittacidés aras, mâle et femelle.

Il avait requis ensuite une nouvelle autorisation le 26 octobre 2009, qu’il a obtenue, concernant quatre couples de perroquets gris du Gabon et un couple de perroquets Ara ararauna. Cette dernière autorisation n’a pas été renouvelée après le 31 octobre 2014, M. A______ ayant indiqué que les volatiles lui avaient été volés. Elle mentionnait, en ch. 6, que tout changement dans le nombre d’animaux, les espèces détenues ainsi que dans le mode ou le lieu de détention (acquisition, naissance, cession, échange, vente, déménagement, etc.) devait être signalé au service. La cession des animaux à un tiers ne pouvait être autorisée que si cette personne était titulaire d’une autorisation de détention et devait être signalée.

2) Il est au bénéfice d’une « attestation de compétence » pour la détention d’animaux sauvages à titre privé au sens de l’art. 85 al. 3 de l’ordonnance sur la protection des animaux du 23 avril 2008 (OPAn - RS 455.1) depuis le 8 septembre 2012. Il est également président de la société genevoise des oiseaux « La B______ ».

3) M. A______ a requis et obtenu le 8 novembre 2021 du SCAV une autorisation de détention valable jusqu’au 8 novembre 2023, concernant trois couples de cacatoès C______ et deux couples de cacatoès D______.

L’autorisation relevait, dans ses prescriptions particulières (ch. 6), que le commerce et l’élevage étaient interdits.

4) Par courrier du 7 décembre 2021 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), M. A______ a exprimé son incompréhension quant à l’interdiction de l’élevage, dès lors que la précédente décision du 26 octobre 2009 ne s’y référait pas et que sa situation n’avait pas évolué entre les deux demandes.

Ce courrier a été considéré comme un recours.

5) Dans sa réponse du 25 janvier 2022, le SCAV a conclu à l’irrecevabilité du recours subsidiairement à son rejet.

L’intéressé ne motivait pas sa contestation en précisant en quoi et comment la décision contreviendrait à la législation sur la protection des animaux, mais émettait plutôt le souhait de pouvoir laisser ses oiseaux se reproduire naturellement.

Il ne bénéficiait en revanche pas d’un certificat fédéral de capacité de gardiens d’animaux ni d’une formation spécifique indépendante d’une formation professionnelle, de sorte qu’il ne pouvait pas pratiquer l’élevage, dès lors que cela constituait une activité professionnelle. Ses connaissances et capacités techniques pour assurer un éventuel élevage de ces animaux sauvages, conformément à l’art. 25 al. 4 OPAn, étaient inconnues. La décision était donc fondée et conforme au droit au regard de sa situation. Il pouvait conserver ses oiseaux, mais devait veiller à ce que les œufs soient retirés et ne puissent pas éclore.

6) Dans sa réplique du 14 mars 2022, M. A______ a rappelé qu’il avait obtenu un délai au 14 mars 2022 pour compléter son recours et faire parvenir sa réplique à la chambre administrative. Le recours était donc recevable.

Le SCAV avait violé les dispositions sur la protection des animaux, en particulier les art. 23 al. 1 de la loi fédérale sur la protection des animaux du 16 décembre 2005 (LPA-CH - RS 455) et 2 al. 3 let. i, 3 al. 1, 85 al. 3 let. b cum 95 al. 1 let. d OPAn, et abusé de son pouvoir d’appréciation en lui interdisant dans sa décision du 8 novembre 2021 de faire élevage de ces animaux. Au bénéfice d’une attestation de compétence délivrée le 8 septembre 2012, il était détenteur de dix cacatoès, soit seulement cinq couples, et n’était donc pas soumis à l’autorisation cantonale visée par l’art. 101 let. c ch. 7 OPAn. Il s’en occupait dans le cadre de ses loisirs et remplissait les conditions légales pour obtenir l’autorisation de détention. Conformément aux prescriptions légales, il ne détenait pas les volatiles individuellement et il ne pouvait donc pas s’assurer qu’ils ne se reproduisent pas. Il n’entendait pas les faire se reproduire dans le but de vendre les oisillons ou d’en tirer une autre contrepartie, mais leur offrir des conditions aussi similaires que possible à celles qui auraient été les leurs s’ils avaient été dans leur milieu naturel, ceci comprenant une composante de reproduction. Le retrait des œufs aux femelles cacatoès engendrait des pontes répétitives qui les affaiblissaient et pouvaient dans certains cas entraîner leur mort. Il entendait garder en sa possession exclusive les éventuels oisillons, les déclarer et les faire baguer. Les animaux étaient en excellente santé et étaient régulièrement examinés par Monsieur E______, vétérinaire à la clinique vétérinaire des F______. Les conditions de détention étaient irréprochables et ses compétences reconnues dans le milieu des détenteurs d’oiseaux. N’ayant pas enfreint les dispositions de la LPA-CH, il n’y avait aucun motif de lui interdire la détention et l’élevage de ces cacatoès.

La mention d’interdiction d’élevage n’apparaissait pas dans les décisions précédentes et n’était accompagnée d’aucune référence légale, alors même que la loi n’avait pas changé. S’il ne remplissait effectivement pas les conditions pour détenir et faire élevage de ces animaux à titre professionnel au sens de l’art. 2 al. 3 let. a OPAn, il était injustifié de lui interdire l’élevage dans un cadre privé. Le SCAV faisait un amalgame entre les notions d’élevage, de commerce, d’élevage à titre professionnel et d’élevage à titre privé, les conditions posées à l’art. 102 al. 1 et 2 OPAn ne concernant que les activités exercées à titre professionnel. La formation visée aux art. 192 al. 1 let. b et 197 OPAn ne concernait pas les personnes qui souhaitaient détenir et élever des animaux sauvages protégés à titre privé.

En lui interdisant de faire se reproduire ses animaux, le SCAV portait atteinte à leur bien-être, nuisait à leur possibilité de se comporter conformément à leur espèce et risquait d’engendrer chez eux de l’anxiété, en violation des art. 23 al. 1 LPA-CH et 2 al. 3 let. i, 3 al. 1, 85 al. 3 let. b cum 95 al. 1 let. d OPAn.

Il faisait également preuve d’abus de son pouvoir d’appréciation en se fondant sur des éléments étrangers au but visé par les dispositions de l’OPAn pour rendre sa décision, en l’empêchant d’adopter un comportement légal, et d’arbitraire, puisque la décision lui interdisait de manière injustifiée d’élever ses animaux.

7) Les parties ont été informées le 15 mars 2022 que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 16 du règlement d’application de la loi fédérale sur la protection des animaux du 15 juin 2011 - RaLPA - M 3 50.02).

2) Le recourant considère qu’en lui faisant interdiction de faire élevage de ses animaux, le SCAV a violé les art. 23 al. 1 LPA-CH et 2 al. 3 let. i, 3 al. 1, 8 al. 3 cum 95 al. 1 let.d OPAn, et abusé de son pouvoir d’appréciation.

3)  Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n’ont toutefois pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée en l’espèce.

Il n’en résulte toutefois pas que l’autorité est libre d’agir comme bon lui semble (ATA/505/2022 du 16 mai 2022 consid. 5). Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux de droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_37/2020 du 7 septembre 2020 consid. 5.1).

4) a. La LPA-CH vise à protéger la dignité et le bien-être de l’animal (art. 1 LPA-CH). La dignité est constituée par la valeur propre de l’animal et peut être atteinte notamment lorsque la contrainte qui lui est imposée sans justification lui cause des douleurs ou des maux ou qu’elle le met dans un état d’anxiété (art. 3 let. a LPA-CH). Le bien-être des animaux est notamment réalisé lorsque leur détention et leur alimentation sont telles que leurs fonctions corporelles et leur comportement ne sont pas perturbés et que leur capacité d’adaptation n’est pas sollicitée de façon excessive, qu’ils ont la possibilité de se comporter conformément à leur espèce dans les limites de leur capacité d’adaptation biologique, qu’ils sont cliniquement sains et que les douleurs, les maux, les dommages et l’anxiété leur sont épargnés (art. 3 let. b LPA-CH).

Selon l’art. 4 LPA-CH, quiconque s’occupe d’animaux doit tenir compte au mieux de leurs besoins et veiller à leur bien-être (al. 1), personne n’ayant le droit de leur causer de façon injustifiée des douleurs, des maux ou de dommages, les mettre dans un état d’anxiété ou porter atteinte à leur dignité d’une autre manière (al. 2). Toute personne qui détient des animaux ou en assume la garde doit, d’une manière appropriée, les nourrir, en prendre soin, leur garantir l’activité et la liberté de mouvement nécessaire à leur bien-être et, s’il le faut, leur fournir un gîte (art. 6 al. 1 LPA-CH).

Selon l’art. 7 al. 1 LPA-CH, le Conseil fédéral peut rendre obligatoires l’annonce de certaines formes de détention, l’annonce de la détention de certaines espèces animales et l’annonce de certains soins, ou les soumettre à autorisation.

Selon l’art. 10 LPA-CH, l’utilisation de méthodes d’élevage et de reproduction naturelles et artificielles ne doit pas causer, chez les parents et chez les descendants, des douleurs, des maux, des dommages ou des troubles du comportement qui seraient liés directement ou indirectement au but de l’élevage (al. 1).

b. L’ordonnance sur la protection des animaux du 23 avril 2008 (OPAn - RS 455.1) fixe en particulier les exigences minimales en matière de détention, d’alimentation, de soins, de logement ou d’enclos des animaux.

Au sens de cette ordonnance, les termes « à titre professionnel » s’entendent pour le commerce, la détention, la garde ou l’élevage d’animaux exercés à des fins lucratives pour soi-même ou pour des tiers ou pour couvrir ses propres frais ou ceux d’un tiers, la contrepartie n’étant pas forcément financière (art. 2 al. 3 let. a OPAn) ; « élevage » pour l’accouplement ciblé d’animaux en vue d’atteindre un but d’élevage, la reproduction sans but d’élevage ou la production d’animaux qui utilise des méthodes de reproduction artificielle (let. i) ; et « but d’élevage » pour l’expression chez un animal de tous les caractères physiologiques ou esthétiques que l’on cherche à obtenir par sélection (let. j).

Les animaux doivent, selon l’art. 3 OPAn, être détenus et traités de manière à ce que leurs fonctions corporelles et leur comportement ne soient pas gênés et que leur faculté d’adaptation ne soit pas sollicitée de manière excessive (al. 1). L’alimentation et les soins sont appropriés s’ils répondent aux besoins des animaux à la lumière de l’expérience acquise et des connaissances en physiologie, éthologie et hygiène (al. 3). Le détenteur d’animaux doit contrôler aussi souvent que nécessaire le bien-être de ses animaux et l’état des installations. Si celles-ci sont défectueuses et diminuent le bien-être des animaux, il doit les réparer sans délai ou prendre les mesures propres à assurer la protection des animaux (art. 5 al. 1 OPAn). Il est interdit de maltraiter les animaux, de les négliger ou de les surmener inutilement (art. 16 al. 1 OPAn).

c. Les logements et les enclos doivent satisfaire aux exigences minimales fixées dans les annexes 1 à 3 (art. 10 al. 1 OPAn). Plus particulièrement, les psittacidés de grande taille (dont notamment l'Ara macao et le Cacatua galerita) ont besoin d'une volière intérieure d'une surface d'au moins 10 m2 pour un volume d'au moins 30 m3 (tableau 2 annexe 2 OPAn). Les perroquets doivent être détenus au moins par deux et avoir une possibilité de se baigner (art. 13 OPAn et exigences particulières 14 et 19 tableau 2 annexe 2 OPAn). Les enclos doivent être éclairés par la lumière du jour ou une lumière artificielle appropriée (remarque préliminaire J annexe 2 OPAn).

d. L’élevage doit viser à obtenir des animaux en bonne santé et exempts de propriétés ou de caractères qui portent atteinte à leur dignité (art. 25 al. 1 OPAn) ; les buts d’élevage qui provoqueraient une restriction d’une fonction organique ou sensorielle ou un écart par rapport au comportement propre à l’espèce ne sont admis que s’ils peuvent être compensés sans que l’animal n’en pâtisse au niveau des soins, de la détention ou de l’alimentation, de son intégrité physique ni ne doive recevoir des soins médicaux réguliers (al. 2). Le détenteur d’animaux doit prendre les mesures que l’on peut raisonnablement exiger de lui afin d’empêcher une reproduction excessive de ses animaux (al. 4).

e. Les particuliers ne peuvent détenir des psittacidés de grande taille qu'avec une autorisation (art. 7 al. 1 et 3 LPA-CH ; art. 89 let. d OPAn et note e tableau 2 annexe 2 OPAn ; art. 7 al. 1 RaLPA). L'autorisation ne peut être obtenue que si les exigences minimales de détention sont remplies (art. 95 al. 1 let a et d OPAn). Toute personne déposant une demande d'autorisation pour la détention de psittacidés de grande taille doit pouvoir présenter une attestation de compétences correspondante (art. 85 al. 3 let. b et 95 al. 1 let. d OPAn).

Selon l’art. 30 de l’ordonnance sur les formations en matière de protection des animaux du 5 septembre 2008 (OFPAn – RS 455.1), l’objectif des formations visées à l’art. 31 al. 4, ou 85 al. 3 OPAn est que les détenteurs d’animaux et les personnes responsables de la garde des animaux connaissent les principes d’une détention des animaux conforme à leurs besoins. La formation permet d’acquérir des connaissances de base et des aptitudes pratiques en matière de bases juridiques, de besoins propres à l’espèce, de garde des animaux, d’alimentation, d’aménagement d’un environnement de vie et d’élevage des jeunes animaux (art. 32 OFPAn).

f. L’autorisation ne peut être octroyée que si les locaux, les enclos et les installations répondent aux besoins de l’espèce, sont adaptés au nombre des animaux, conformes au but de l’exploitation, et aménagés de telle façon que les animaux ne puissent pas s’en échapper (art. 95 al. 1 let. a OPAn) ; si le nombre d’animaux par unité de surface dans les établissements visés à l’art. 90, al. 2, let. b, est adapté à l’offre de nourriture et à l’utilisation du sol (let. b) ; si les animaux sont, au besoin, protégés des conditions météorologiques, des perturbations dues aux visiteurs, du bruit excessif et des gaz d’échappement par des mesures de construction ou d’autres mesures (let. c) ; si les conditions posées aux personnes visées à l’art. 85 sont remplies (let. d) ; si la surveillance vétérinaire régulière des animaux peut être attestée; ne sont pas concernés par cette disposition, les ménageries itinérantes exploitées pour de courtes durées, les petits établissements privés de détention d’animaux et les élevages de poissons de repeuplement (let. e).

L’autorisation est délivrée pour une durée maximale de deux ans pour les détentions d’animaux à titre privé (art. 96 al. 1 let. a OPAn); elle peut être assortie de conditions et de charges (al. 2).

g. À son chapitre 5, relatif à la prise en charge professionnelles des animaux, l’OPAn précise que doit être titulaire d’une autorisation cantonale quiconque remet à des tiers dans l’intervalle d’une année un nombre plus élevé d’animaux que [ ] la descendance de plus de vingt-cinq couples d’oiseaux d’une taille inférieure ou égale à celle des perruches callopsittes, la descendance de plus de dix couples d’oiseaux d’une taille supérieure à celle de la perruche callopsitte ou de plus de cinq couples d’aras ou de cacatoès (art. 101 let. c ch.7 OPAn).

Selon l’art. 102 ch. 4 OPAn, est tenu de disposer d’une formation visée à l’art. 197 OPAn, quiconque livre des animaux conformément à l’art. 101 let. c OPAn.

5) À teneur de l’art. 5 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit est la base et la limite de l’activité de l’État. Toute activité étatique doit reposer sur une règle de droit générale et abstraite, les actes de rang inférieur devant respecter ceux qui sont de rang supérieur (ATA/606/2018 du 13 juin 2018 consid. 3 ; Jean-François AUBERT/ Pascal MAHON, Petit commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, 2003, p. 43).

Le principe de la légalité se compose de deux éléments : le principe de la suprématie de la loi et le principe de l’exigence de la base légale. Le premier signifie que l'autorité doit respecter l’ensemble des normes juridiques ainsi que la hiérarchie des normes. Le second implique que l’autorité ne peut agir que si la loi le lui permet ; son action doit avoir un fondement dans une loi (ATA/606/2018 précité consid. 3 ; ATA/383/2017 du 4 avril 2017 consid. 5a). Le principe de la légalité exige donc que les autorités n'agissent que dans le cadre fixé par la loi. Il implique qu’un acte étatique se fonde sur une base légale matérielle qui est suffisamment précise et qui a été adoptée par l’organe compétent (ATF 141 II 169 consid. 3.1).

Sous son aspect de primauté de la loi, le principe de la légalité, signifie d’abord que l’administration doit respecter la loi et s’en tenir à ses prescriptions (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd. 2018, n. 467 p. 163).

6) Le service de la consommation et des affaires vétérinaires inspecte les conditions de détention des animaux de compagnie et des animaux sauvages, les refuges et les pensions d'animaux ainsi que les commerces d'animaux conformément aux exigences de la loi fédérale et de l'ordonnance fédérale en vigueur (art. 9 al. 1 RaLPA).

7) a. Le recourant se plaint de ce que l’autorisation de détention d’animaux sauvages, qui lui a été accordée le 8 novembre 2021, lui interdit la reproduction, sans base légale et en opposition avec le bien-être des animaux. Il conteste que les dispositions légales concernant l’élevage à titre professionnel lui soient applicables.

b. Dans ses écritures, l’intimée applique les dispositions relatives à la prise en charge professionnelle des animaux (art. 101, 102, 192 et 197 OPAn).

Or, le recourant expose qu’il ne détient pas ses animaux à titre professionnel et qu’il n’entend pas faire le commerce de leurs éventuels oisillons, ou les remettre à un tiers contre une quelconque contrepartie, mais les garder en sa possession, les baguer et les déclarer. L’intimée n’expose aucun élément concret permettant de retenir le contraire, en particulier qu’il les détiendrait, les garderait ou les élèverait, de même que leurs éventuels oisillons, à des fins lucratives pour lui-même ou pour des tiers ou pour couvrir ses propres frais ou ceux d’un tiers.

Par ailleurs, détenteur de cinq couples de psittacidés uniquement, le recourant n’entre pas dans la catégorie des personnes devant être titulaire d’une autorisation cantonale, au sens de l’art. 101 let. c ch. 7 OPAn, dans le cadre d’une prise en charge professionnelle des animaux, étant relevé qu’il indique qu’il ne remettrait pas les éventuels oisillons à un tiers.

C’est donc à tort que l’intimé a appliqué les dispositions relatives à la prise en charge professionnelle des animaux.

Il n’est pas contesté que le recourant est au bénéfice d’une attestation de compétences au sens des art. 85 al. 3 OPAn, délivrée le 8 septembre 2012 par la Fédération spéciale pour les amateurs et éleveurs d’oiseaux d’agrément. Aux termes de cette attestation, la « personne responsable de la formation confirm[ait] que les exigences de l’Ordonnance sur le Protection des Animaux et les exigences et l’Ordonnance du DFE sur les formations à la détention d’animaux et à la manière de les traiter ont été respectées et que les buts de la formation ont été atteints dans le cadre des prescriptions ». Le recourant a donc suivi une formation lui permettant d’acquérir des connaissances et aptitudes pratiques notamment en matière d’élevage des jeunes animaux.

c. Reste à examiner si l’autorité cantonale pouvait interdire l’élevage sur la base de l’art. 96 al. 2 OPAn.

Outre qu’il est douteux que le législateur fédéral ait autorisé les cantons à prévoir par le biais de cette disposition une réglementation plus restrictive que celle découlant du droit fédéral, force est de constater que la législation genevoise ne prévoit pas une telle interdiction.

En application des principes de la hiérarchie des normes et de la légalité, l’interdiction d’élevage figurant sur la décision du 8 novembre 2021 est infondée.

d. Au vu de ce qui précède, le recours sera admis. La décision litigieuse sera annulée et le dossier sera retourné SCAV afin qu’il rende une nouvelle décision dans le sens des considérants.

8)  Aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1’000.- sera allouée au recourant, qui a été assisté par un avocat (art. 87 al. 2 LPA), à la charge de l’État de Genève.

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 8 décembre 2021 par Monsieur A______ contre la décision du service de la consommation et des affaires veterinaires du 8 novembre 2021 ;

au fond :

l’admet ;

annule le chiffre 6 de la décision du service de la consommation et des affaires vétérinaires du 8 novembre 2021 en ce qu’il interdit la reproduction des animaux ;

confirme la décision pour le surplus ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à Monsieur A______, à la charge de l’État de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Sandy Zaech, avocate du recourant ainsi qu'au service de la consommation et des affaires vétérinaires.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et Michon Rieben, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Poinsot

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 


 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :