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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2168/2011

ATA/276/2012 du 08.05.2012 ( CPOPUL ) , REJETE

Recours TF déposé le 15.06.2012, rendu le 28.06.2012, REJETE, 2C_581/12
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2168/2011-CPOPUL ATA/276/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 8 mai 2012

2ème section

 

dans la cause

 

Mesdames N______ et L______ X______
représentées par Me Lida Lavi, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION



EN FAIT

1. Madame N______ X______, ressortissante suisse, a une fille prénommée L______ X______, née le ______ 1993.

Depuis le 30 septembre 1994, elle était mariée avec Monsieur V______ X______. Le Tribunal de première instance (ci-après : TPI) de Genève a toutefois prononcé le divorce des époux X______ par jugement du 23 septembre 2003.

Le 10 juillet 2007, Mme N______ X______ s'est remariée à Vernier avec Monsieur F______ A______, qui a pris le nom de X______.

2. Au terme de l'enquête à laquelle il a procédé, l'office cantonal de la population (ci-après : OCP) a informé Mme N______ X______ le 7 avril 2009 qu'il enregistrait dans le registre cantonal de la population son départ et celui de sa fille du canton de Genève pour Challex, en France, dès le 1er janvier 2004. Elle ne résidait plus à l'avenue du G______ ______ car l'appartement était occupé par son ex-mari et la famille de celui-ci.

3. Le 7 mai 2009, Mme N______ X______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif, devenu depuis le 1er janvier 2011 la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

Il devait être constaté qu'elle était toujours domiciliée à l'avenue du G______ ______, au 11ème étage. Elle était locataire de cet appartement mais propriétaire d'un autre, sis dans le même immeuble au 6ème étage et qui était loué à des tiers.

4. Le 27 juillet 2009, l'OCP a renouvelé le permis de séjour de M. F______ X______ mais à son ancien nom de F______ A______. Dans le cadre du recours précité, les époux X______ ont contesté cette dernière décision, réclamant un permis de séjour au nom de F______ X______

En 2007 et 2008, Mme N______ X______ alléguait avoir vécu au ______, avenue du G______, dans l'appartement de sa mère, décédée. Elle avait effectué deux ou trois séjours en Tunisie avec son époux. Elle avait été hospitalisée durant cinq mois. Elle se rendait fréquemment à Challex, où résidait une partie de sa famille. Enfin, depuis 2008, elle résidait chez son propre père, prénommé D______ X______ et vivant à Genève.

Quant à sa fille, elle avait toujours été scolarisée en France et n'avait pas de domicile fixe. Son mari non plus.

Mme N______ X______ avait toujours payé ses impôts et ses primes d'assurance-maladie en Suisse, où elle percevait également les allocations familiales pour sa fille ainsi que sa rente d'invalidité.

5. Statuant sur le recours du 7 mai 2009 par arrêt du 4 août 2010 (ATA/535/2010), le Tribunal administratif a déclaré irrecevable le recours des époux X______ dans la mesure où il était dirigé contre la décision précitée du 27 juillet 2009 et l’a rejeté, dans la mesure où il était recevable, contre la décision de l’OCP du 7 avril 2009. Pour le surplus, il a renvoyé la cause à la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : CCRA), devenue depuis le 1er janvier 2011 le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI). Cet arrêt n'a pas fait l'objet d'un recours.

6. Selon le jugement du Tribunal des baux et loyers (ci-après : TBL) du 20 septembre 2010, Mme N______ X______ et M. V______ X______ étaient alors co-titulaires du bail portant sur un appartement de 4 pièces au 11ème étage de l'immeuble sis ______, avenue du G______ à Genève.

7. Le 1er octobre 2010, les époux M______, domiciliés ______, C______ à Genève, ont attesté à l'intention de l'OCP qu'ils hébergeaient à cette date les époux X______.

8. Le 3 novembre 2010, Mme N______ X______, indiquant habiter ______, C______ à Genève, a réclamé à l'OCP l'envoi de son matériel de vote. Elle n'avait jamais quitté Genève et contestait avoir pris une adresse en France.

9. Le 17 novembre 2010, l'OCP a répondu à l'intéressée que la décision qu'il avait prise le 7 avril 2009 était entrée en force. Elle devait formellement annoncer son arrivée à Genève, à une date postérieure au 7 avril 2009.

10. Le 24 novembre 2010, Mme N______ X______ a rempli un formulaire individuel d'annonce d'arrivée à Genève pour sa fille et elle-même dès le 1er décembre 2010 à l’adresse ______, avenue du G______. Ce document comportait aussi le nom de son mari, M. F______ A______, sans la signature de ce dernier. Mme N______ X______ mentionnait avoir séjourné précédemment à Genève de 1960 à 1998 puis de 1999 à 2010. Elle a ajouté une annotation manuscrite selon laquelle malgré l’ATA du 4 août 2010 (ATA/535/2010 précité), elle n’avait jamais quitté le territoire genevois depuis 1999.

11. Le 9 décembre 2010, l'OCP a enregistré le retour à Genève, dès le 1er décembre 2010, de Mme N______ X______ et de sa fille, à l'adresse indiquée par celles-ci, soit ______, avenue du G______.

12. L'OCP a cependant éprouvé des doutes quant à la réalité de la domiciliation des intéressées dans le canton de Genève, notamment en raison d'une demande de renseignements du service d'avance et de recouvrement des pensions alimentaires (ci-après : SCARPA) désireux de s'assurer que les avances qu'il avait versées du 1er janvier 2004 au 30 juin 2007 en faveur de L______ X______ n'étaient pas indues, ces prestations supposant que la bénéficiaire soit domiciliée à Genève.

L’OCP a procédé à une nouvelle enquête domiciliaire le 18 janvier 2011, qui a fait apparaître que ni les époux X______ ni L______ X______ ne vivaient à l'adresse précitée.

13. Par deux décisions des 7 et 10 juin 2011, déclarées exécutoires nonobstant recours, adressées la première à Mme N______ X______ et la seconde à Mme L______ X______ à l’adresse ______, avenue du G______, l'OCP a annulé avec effet rétroactif au 1er décembre 2010 l'annonce d'arrivée sur le territoire genevois qu'elles avaient faite le 24 novembre 2010.

14. Le 15 juillet 2011, Mmes X______ ont interjeté recours contre ces décisions auprès de la chambre administrative en concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif, à leur audition, ainsi qu'à celle de M. D______ X______, respectivement leur père et grand-père. Principalement, elles demandaient l'annulation desdites décisions et leur inscription dans le registre cantonal de la population du canton de Genève.

A l'appui de leur recours, elles ont notamment produit :

- un courrier de Mme L______ X______, adressé le 30 juin 2011 à l'OCP, dans lequel elle indiquait que depuis fin 2010, elle habitait chez M. D______ X______, ______, C______, ce que celui-ci a confirmé selon une attestation établie le même jour sans mention d'aucune date (pièces nos 31 et 32) ;

- une attestation de l'Université de Genève (ci-après : l’université), datée du 5 avril 2011, selon laquelle Mme L______ X______ était admissible à l'université dès le semestre d'automne s'ouvrant le 19 septembre 2011 (pièce n° 37) et une demande de logement, non datée, remplie par la recourante à l'intention de l'office du logement (ci-après : OLO) comportant ladite adresse (pièce n° 38) ;

- un certificat d'assurance 2011 et une facture du Badminton Club du 8 novembre 2009 concernant Mme L______ X______ et adressés tous deux ______, avenue du G______ (pièces nos 39 et 40) ;

- un certificat de résidence secondaire établi pour Mme N______ X______ par la commune de Challex le 16 septembre 2008 (pièce n° 20) ;

- des copies de cartes de vote au nom de Mme N______ X______, ______ avenue du G______, pour des scrutins s'étant déroulés en septembre et novembre 2009, septembre 2010 et mars 2011 (pièce n° 27) ;

- divers courriers selon lesquels Mme N______ X______ avait résilié pour le 30 septembre 2011 le bail de ses locataires, vivant dans son appartement de l'avenue du G______ ______, au 6ème étage, car elle avait besoin de ce logement pour sa propre famille. Quant à celui du 11ème étage, dont elle était toujours co-locataire, elle n'avait pu y habiter depuis juillet 2008 puisque son précédent mari avait changé les serrures et l'occupait avec sa nouvelle famille (pièces nos 21 et 22) ;

- un courrier adressé le 1er janvier 2011 par la caisse cantonale genevoise de compensation (ci-après : CCGC) à Mmes X______, à l'adresse ______, avenue du G______, les informant du montant de leurs rentes mensuelles en les invitant à lui communiquer tout changement de situation, d'adresse, d'état-civil, etc. (pièce n° 24) ;

- une attestation du 9 mai 2011 établie par l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC), selon laquelle Mme N______ X______ était inscrite au rôle des contribuables et assujettie de manière illimitée aux impôts cantonaux et communaux (ci-après : ICC) ainsi qu'à l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD) à Genève depuis 2003 (pièce n° 26).

15. Invité à se déterminer sur effet suspensif, l'OCP a répondu le 28 juillet 2011 que les décisions attaquées revêtant un caractère négatif, seules des mesures provisionnelles pourraient être ordonnées. Selon une jurisprudence constante, une telle demande devait être rejetée car si elle était admise, cela équivaudrait à l'admission du recours sur le fond. Or, il était établi que depuis le 1er janvier 2004, les recourantes ne devaient plus figurer dans le registre des habitants du canton de Genève.

Par ailleurs, l'OCP avait, par décision exécutoire nonobstant recours du 21 juillet 2011, refusé de renouveler l'autorisation de séjour de M. F______ X______ puisque les conjoints ne faisaient pas ménage commun comme l'art. 42 de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20) leur en faisait obligation.

16. Ces observations ont été transmises aux recourantes qui ont, le 16 août 2011, persisté dans leurs conclusions : si des mesures provisionnelles n'étaient pas accordées, Mme N______ X______ se retrouverait sans aucun domicile légal et Mme L______ X______ subirait un préjudice irréparable car elle débuterait prochainement des études à l'université et il était impératif qu'un domicile lui soit reconnu à l'adresse qui était la sienne depuis fin 2010, soit chez son grand-père à Genève.

17. Par décision du 19 août 2011, la présidente de la chambre administrative a rejeté la demande d’effet suspensif, traitée comme demande de mesures provisionnelles. Faire droit aux conclusions des recourantes alors que les décisions attaquées revêtaient un caractère négatif reviendrait à leur octroyer le plein de leurs conclusions sur le fond.

18. Le 13 octobre 2011, l’OCP a conclu au rejet du recours et à la confirmation de ses propres décisions des 7 et 10 juin 2011.

L’établissement et le séjour étaient des notions de police devant être distinguées du domicile civil, même si elles s’appuyaient sur cette dernière notion, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral. L’inscription d’une personne dans le rôle du contrôle des habitants constituait un indice pour la détermination du domicile de celle-ci. Il était cependant toujours possible de prouver, dans une procédure civile ou administrative, que le domicile n’était pas au lieu où la personne était considérée comme établie. Se référant aux dispositions topiques de la loi fédérale sur l’harmonisation des registres des habitants et d’autres registres officiels de personnes du 23 juin 2006 (LHR - RS 431.02), à la loi d’application de celle-ci du 3 avril 2009 (LaLHR - F 2 25), ainsi qu’à la loi sur le séjour et l’établissement des Confédérés du 28 août 2008 (LSEC - F 2 05), de même qu’au règlement d’application de celle-ci du 18 août 2009 (RSEC - F 2 05.01), l’OCP renvoyait, pour la période du 1er janvier 2004 au 1er décembre 2010, à sa décision du 7 avril 2009, entrée en force, selon laquelle Mmes X______ étaient domiciliées à Challex. L’ATA/535/2010 du 4 août 2010 précité était en force. L’OCP faisait également référence à titre superfétatoire à l’arrêt de la Cour de justice du 12 mars 2009 figurant dans le dossier qu'il a produit. Il résultait de cet arrêt que la Cour de justice avait rejeté l'appel déposé par Mme N______ X______ contre le jugement prononcé le 19 novembre 2008 par le Tribunal civil de première instance la déboutant de sa demande en réintégrande, visant l'appartement de 4 pièces au 11ème étage de l'immeuble ______, avenue du G______ à Genève, dans lequel vivait alors son ex-mari, prénommé V______.

Lors de son annonce d’arrivée le 24 novembre 2010, Mme N______ X______ avait, malgré les décisions précitées, mentionné comme lieu d’établissement l’adresse ______, avenue du G______, en ajoutant qu’elle n’avait jamais quitté le territoire genevois depuis 1999. Or, suite à l’enquête domiciliaire effectuée le 18 janvier 2011, il était apparu que l’adresse postale communiquée par Mme N______ X______ ne correspondait pas à celle de sa résidence effective. Un établissement fictif était contraire à la LHR et à la jurisprudence, de même qu’à la LSEC et au règlement d’application de celle-ci. Mme N______ X______ ayant délibérément tenté de tromper les autorités, l’OCP l’avait informée qu’il envisageait de prononcer une ordonnance pénale dès l’entrée en force de sa décision du 7 juin 2011, conformément aux art. 12 LSEC et 352 ss du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0). Mme N______ X______ ne contestait pas ne pas résider ______, avenue du G______, mais tentait de démontrer que son domicile civil au sens de l’art. 23 du Code civil suisse du 10 décembre l907 (CCS - RS 210) se trouvait à Genève. Seule la résidence effective était de nature à constituer l’établissement. Ainsi, il était sans importance que Mme N______ X______ n’ait pas pu physiquement vivre dans l’appartement dont elle était locataire avec son précédent époux car ce logement était occupé par ce dernier et la nouvelle famille de celui-ci. Enfin, l’OCP relevait les contradictions quant à sa résidence effective résultant des écritures même de Mme N______ X______. Dans son recours du 15 juillet 2011, elle indiquait avoir logé chez son père jusqu’au début du mois de décembre 2010, tout en produisant à l’appui dudit recours une attestation des époux M______ selon laquelle elle aurait logé avec son époux chez ces derniers dès le mois d’octobre 2010. C’était par pure convenance personnelle que Mme N______ X______ souhaitait s’inscrire dans le registre des habitants, ce qui lui permettait de percevoir les avances versées par le SCARPA, selon les informations fournies à l’OCP par ce service.

Quant à Mme L______ X______, il était mentionné dans le formulaire rempli le 24 novembre 2010 qu’elle logeait alors ______, avenue du G______. Dans le recours du 15 juillet 2011, elle indiquait pourtant vivre chez son grand-père depuis la fin de l’année 2010 alors que dans un courrier du 30 juin 2011, Mme L______ X______ affirmait habiter chez ce dernier depuis plusieurs mois. Quant à l’attestation dudit grand-père, M. D______ X______, du 30 juin 2011, elle mentionnait uniquement qu’il hébergeait sa petite-fille chez lui ______, C______, sans préciser aucune date. Selon l'OCP, cette attestation avait vraisemblablement été établie pour les besoins de la cause, Mme N______ X______ ayant, lors de la procédure précédente devant la chambre de céans (A/535/2010 précité), également prétendu loger chez son père, M. D______ X______.

19. Le 17 novembre 2011, Mme L______ X______ a envoyé spontanément au juge délégué la copie du bail qu’elle avait signé en son nom pour un appartement à la C______ n° ______, valable dès le 1er décembre 2011. Après avoir habité plusieurs mois chez son grand-père, elle avait pu bénéficier d’un logement qui s’était libéré dans le même immeuble.

20. Le 14 décembre 2011, l’OCP a envoyé à la chambre de céans copie du courrier qu’il avait adressé à Mme L______ X______ le 12 décembre 2011 informant cette dernière de l’enregistrement de son arrivée sur le territoire genevois à partir du 1er décembre 2011. Aucune inscription rétroactive ne serait effectuée, et ce jusqu’à droit connu sur le recours pendant par-devant la chambre administrative.

21. Copies de ce pli et de son annexe ont été transmises au conseil des recourantes qui, à la requête du juge délégué, a répondu le 11 janvier 2012 que Mme L______ X______, en particulier, maintenait son recours.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le droit d’être entendu est une garantie de nature formelle dont la violation entraîne, lorsque sa réparation par l'autorité de recours n'est pas possible, l'annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 133 III 235 consid. 5.3 p. 250 ; Arrêts du Tribunal fédéral 8C.104/2010 du 29 septembre 2010 consid. 3.2 ; 4A.15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.2 ; ATA/862/2010 du 7 décembre 2010 consid 2 et arrêts cités). Sa portée est déterminée en premier lieu par le droit cantonal (art. 41 ss LPA) et le droit administratif spécial (ATF 124 I 49 consid. 3a p. 51 et les arrêts cités ; Arrêt du Tribunal fédéral 5A.11/2009 du 31 mars 2009 ; 2P.39/2006 du 3 juillet 2006 consid. 3.2). Si la protection prévue par ces lois est insuffisante, ce sont les règles minimales déduites de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) qui s’appliquent (art. 29 al. 2 Cst. ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A.15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.1 ; A. AUER/ G. MALINVERNI/M. HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, Berne 2006, Vol. 2, 2e éd., p. 603, n. 1315 ss ; B. BOVAY, Procédure administrative, Berne 2000, p. 198). Quant à l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), il n'accorde pas au justiciable de garanties plus étendues que celles découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. (Arrêts du Tribunal fédéral 6B.24/2010 du 20 mai 2010 consid. 1 ; 4P.206/2005 du 11 novembre 2005 consid. 2.1 et arrêts cités).

Tel qu’il est garanti par cette dernière disposition, le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 135 II 286 consid. 5.1.p. 293 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C.161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 5A.150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 ; 1C.104/2010 du 29 avril 2010 consid. 2 ; 4A.15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.1 ; ATA/824/2010 du 23 novembre 2010 consid. 2 et les arrêts cités).

3. Cela n’implique pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 134 I 140 consid. 5.3 p. 148 ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A.15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.1 et les arrêts cités ; ATA/862/2010 du 7 décembre 2010 consid 2).

Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 132 II 485 consid. 3.2 p. 494 ; 127 I 54 consid. 2b p. 56 ; 127 III 576 consid. 2c p. 578 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2).

Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 131 I 153 consid. 3 p. 158 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C.58/2010 du 19 mai 2010 consid. 4.3 ; 4A.15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.2 et les arrêts cités ; ATA/432/2008 du 27 août 2008 consid. 2b). Le droit d’être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 133 II 235 consid 5.2 p. 248 ; 129 I 232 consid. 3.2 p. 236 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C.424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2 ; 2C.514/2009 du 25 mars 2010 consid. 3.1).

4. En l'espèce, il sera renoncé à l'audition des recourantes et de M. D______ X______, les pièces produites et le dossier de l'OCP contenant tous les éléments probants, de sorte que la cause est en état d'être jugée

5. L'ATA/535/2010 du 4 août 2010 rendu par le Tribunal administratif, devenu depuis lors, la chambre de céans est devenu définitif, n'ayant pas fait l'objet d'un recours au Tribunal fédéral. Il en résulte que la décision qu'avait prise l'OCP le 7 avril 2009 est entrée en force, le départ du canton de Genève de Mmes N______ X______ et L______ X______ ayant été enregistré pour la France le 1er janvier 2004.

6. Le droit administratif connaît les principes de la force et de l’autorité de chose jugée : un jugement rendu par un tribunal devenu définitif par l’écoulement du délai de recours, ou par l’absence de toute autre possibilité de recours ordinaire, ne peut plus être remis en cause devant une autorité administrative ou judiciaire (ATA/451/2011 du 26 juillet 2011 ; T. TANQUEREL, op. cit., n. 865 ss ; E. HÄFELIN/G. MÜLLER/F. UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 6ème éd., Berne 2009, 990 ss).

Selon la jurisprudence, l’autorité de la chose jugée ne s’attache qu’au seul dispositif du jugement ; elle ne s’étend pas aux motifs. Cependant, il faut parfois recourir aux motifs du jugement pour connaître le sens exact, la nature et la portée précise du dispositif d’un jugement. Dans un cas concret, la portée du dispositif d’un jugement doit donc être déterminée à la lumière de l’ensemble des motifs de celui-ci (ATF 136 III 345 consid. 2.1 = SJ 2010 I 529, 532, et les références citées).

L'ATA précité étant revêtu de l'autorité de la chose jugée, comme l'OCP l'avait d'ailleurs écrit à Mme N______ X______ le 17 novembre 2010 déjà, la conclusion des recourantes tendant à ce que la chambre de céans constate qu'elles n'avaient jamais quitté le territoire du canton de Genève est irrecevable.

7. Le fait d'être domicilié dans le canton de Genève permet notamment de bénéficier de certains avantages, financiers en particulier.

« Est tenu de s'annoncer ou de communiquer toute modification de données le concernant celui qui arrive, réside ou séjourne dans le canton » (art. 4 et 5 al. l LaLHR). Une obligation similaire résulte des autres lois susmentionnées relative à la police des étrangers (art. 8 et 10 RSEC).

8. L'OCP ayant révoqué les 7 et 10 juin 2011 l'enregistrement de l'arrivée des intéressées sur territoire genevois dès le 1er décembre 2010 suite à l'enquête à laquelle il avait procédé, le fardeau de la preuve de leur domiciliation à Genève dès cette dernière date leur incombe.

Même si l'annonce d'arrivée dans le canton, faite le 24 novembre 2010, et de nombreuses autres pièces produites par les recourantes font mention de leur adresse ______, avenue du G______, il est constant que ni l'une ni l'autre n'ont eu leur domicile effectif à cette adresse, l'appartement du 11ème étage ayant continué d'être occupé depuis 2008 par M. V______ X______ et sa nouvelle famille (arrêt du 12 mars 2009 de la Cour de justice précité) d'une part, et le bail de celui du 6ème étage ayant été résilié pour le 30 septembre 2011, sans qu'aucune pièce n'établisse que le locataire en soit parti à cette date, d’autre part.

Le fait que Mme N______ X______ soit inscrite dans le rôle des contribuables et dans le rôle électoral à l'adresse ______ avenue du G______ ne prouve ainsi pas que son domicile effectif ait été à Genève dès le 1er décembre 2010. D'ailleurs, elle a elle-même allégué avoir été hébergée avec son mari en octobre 2010 chez les époux M______ à l'adresse ______, C______ (pièce n° 13), mais en novembre 2009, elle avait déclaré avoir logé chez son père, ce qui était toujours le cas en novembre 2010 (pièce n° 14). Mme L______ X______ a également habité chez ce dernier depuis une date qui ne résulte pas de l'attestation produite et établie par celui-ci et jusqu'au 30 novembre 2011, puisque dès le 1er décembre 2011 elle a emménagé dans son propre logement ______, C______.

9. Au vu de ces pièces et de ces déclarations contradictoires, l'OCP était fondé non seulement à nourrir des doutes mais à considérer que les recourantes n'avaient pas rapporté la preuve de leur domicile effectif à Genève dès le 1er décembre 2010. La révocation prononcée les 7 et 10 juin 2011 à titre rétroactif de leur inscription dès le 1er décembre 2010 dans le registre des habitants du canton de Genève est ainsi justifiée, de sorte que le recours sera rejeté. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge des recourantes, prises conjointement et solidairement. Il ne leur sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 juillet 2011 par Mesdames N______ et L______ X______  contre les décisions de l’office cantonal de la population des 7 et 10 juin 2011 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Mesdames N______ et L______ X______, prises conjointement et solidairement, un émolument de CHF 500.- ;

dit qu’il ne leur est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Lida Lavi, avocate des recourantes, à l’office cantonal de la population ainsi qu’à l’office fédéral des migrations.

Siégeants : Mme Hurni, présidente, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction :

 

 

M. Tonossi

 

la présidente siégeant :

 

 

E. Hurni

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.