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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/2185/2025

ACPR/408/2025 du 27.05.2025 sur OTMC/1370/2025 ( TMC ) , REFUS

Descripteurs : DÉTENTION PROVISOIRE;RISQUE DE FUITE;PROPORTIONNALITÉ
Normes : CPP.221

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/2185/2025 ACPR/408/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 27 mai 2025

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon, représenté par Me B______, avocat,

recourant,

 

contre l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire rendue le 30 avril 2025 par le Tribunal des mesures de contrainte,

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9,
1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Par acte expédié le 12 mai 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 30 avril 2025, notifiée le 1er mai suivant, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a prolongé sa détention provisoire jusqu'au 1er août 2025.

Le recourant conclut à l'annulation de l'ordonnance précitée et à sa libération immédiate, subsidiairement subordonnée aux mesures de substitution qu'il propose, voire à ce que la prolongation soit limitée au 1er juin 2025.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Par ordonnance pénale du 26 janvier 2025, le Ministère public a déclaré A______, ressortissant britannique né le ______ 2003, coupable de violence ou menace contre les autorités (art. 285 ch. 1 al. 1 CP), ainsi que de voies de fait (art. 126 al. 1 CP), vol d’importance mineure (art. 139 ch. 1 cum 172ter CP), dommages à la propriété d'importance mineure (art. 144 al. 1 cum 172ter CP) et infraction à l’art. 115 al. 1 let. a et 3 LEI.

Il l'a condamné à une peine pécuniaire de 50 jours-amende à CHF 30.- le jour, avec sursis durant 3 ans, ainsi qu'à une amende de CHF 1'300.-.

b. Il lui est reproché, d'avoir :

- le 25 janvier 2025, dans un magasin sis rue 1______ no. ______, à Genève, dérobé, dans un dessein d'enrichissement illégitime, une cigarette électronique d'une valeur de CHF 13.90, puis, lorsque l'employé du magasin l'avait surpris et voulu le retenir, jeté ladite cigarette contre une vitrine, l'endommageant de la sorte, et avoir asséné deux coups de pied sur la cuisse gauche de l'employé, qui a déposé plainte pénale;

- le même jour, dans le cadre de son arrestation à la suite de ces faits, lors de son transfert de la voiture de service au poste de police de C______, donné deux coups de pied dans le bas des jambes du fonctionnaire de police, qui a déposé plainte pénale;

- le 25 janvier 2025 ou à une date antérieure, pénétré sur le territoire suisse sans documents d'identité.

c. Lors de son audition par la police, le 25 janvier 2025, A______ – qui a refusé de signer le procès-verbal – a déclaré s'appeler "D______", le nom ci-devant [A______] étant son alias car il avait un faux passeport britannique. À la question de savoir où il séjournait, il a répondu "j'habite sur la planète terre". Au vu de l'attitude du prévenu, qui riait aux questions qui lui étaient posées, la police a mis fin à l'audition.

d. A______, à qui l'ordonnance pénale a été notifiée en main propre, le 26 janvier 2025, a immédiatement formé opposition. Il a été relaxé.

e. Ce même 26 janvier 2025, une patrouille de police a aperçu, à la rue des Alpes, à Genève, un individu – qui se révèlera être A______ – cagoulé et torse nu, qui importunait les passants. Approché par les policiers, le précité a refusé de retirer le
t-shirt faisant office de cagoule et de s'identifier. Après qu'il eut posé les mains sur le véhicule de police pour que les agents puissent procéder à sa fouille, A______ a pris la fuite en direction du lac, puis dans le quartier des Pâquis, où il a été interpellé. À teneur du rapport de police établi le même jour, il tenait des propos incohérents et proférait des injures en anglais.

f. Le même jour, au poste de police de G______, où il avait été amené par la police, A______ a arraché et cassé une lampe du plafond de la salle d'audition, ce qui a conduit au dépôt d'une plainte pénale par l'État de Genève.

g. Après avoir été vu par un médecin, A______ a été transféré aux urgences psychiatriques pour évaluation, puis à l'hôpital de psychiatrie de E______ (ci-après : E______). Sur le rapport d'intervention médicale, le médecin a mentionné : "Idées délirantes et persécution".

Un placement à des fins d'assistance (PAFA) a été ordonné par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant.

h. Le 1er février 2025 à 9h33, à E______, A______ a menacé de mort le personnel hospitalier ainsi que les agents de sécurité et policiers présents et s’est violemment débattu, empêchant ces derniers d’effectuer leur travail. Après que la sécurité de l'hôpital et des patrouilles de police avaient été requises pour permettre le traitement per os ordonné par le médecin, A______ a donné un coup de poing à un agent de sécurité, qui, blessé au visage, a déposé plainte pénale.

i. À teneur du rapport de police établi le 1er février 2025, à la suite des faits susmentionnés, A______ n'a pas pu être auditionné en raison de son état psychologique. En annexe à ce rapport figure le compte rendu d'intervention [de la sécurité] établi par les Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG).

j. A______ a été placé en état d'arrestation le 1er février 2025.

Il est prévenu, en sus des faits retenus par l'ordonnance pénale susmentionnée et pour les événements subséquents, de dommages à la propriété (art. 144 CP), empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 CP), lésions corporelles simples (art. 123 CP) et violence ou menace contre les autorités (art. 285 CP).

k. À teneur des éléments au dossier, A______, qui est domicilié au Royaume-Uni, faisait l'objet d'un avis de disparition des autorités britanniques, sa mère ayant signalé sa disparition le 24 janvier 2025. Informées de la présence du prévenu à Genève, et de sa situation, les autorités britanniques ont refusé la prise en charge de son retour, en raison du fait qu'il devrait être médicalisé sous haute surveillance. Son rapatriement n'a donc pas été possible.

l. À teneur du procès-verbal d'audience du 2 février 2025, le Ministère public n'a pas pu entendre le prévenu, en raison de son état. Seul était présent son avocat d'office.

m. Dans l'ordonnance du 3 février 2025 ayant prononcé la mise en détention provisoire de A______ jusqu'au 1er mai 2025, le TMC a retenu l'existence de charges suffisantes et graves, eu égard aux constatations de la police, à la plainte déposée par l'agent de sécurité blessé et à la photo de lui prise après le coup, ainsi qu'au rapport de E______ annexé au rapport d'arrestation décrivant le comportement du prévenu.

A______ présentait un risque de fuite, dès lors qu'il était de nationalité britannique, domicilié en Grande-Bretagne où vivait sa famille qui le recherchait depuis plusieurs semaines. Il était en Suisse depuis peu, sans domicile fixe et n'y avait aucune attache. Il avait, de plus, fait l'objet d'un avis de disparition en Grande-Bretagne. Il y avait ainsi sérieusement lieu de craindre qu'en cas de libération, il fuie ou disparaisse, vu ses attaches à l'étranger et son état psychique instable.

Il existait également un risque de réitération, au vu de l'état psychique du prévenu, qui semblait incontrôlable et avait dû être maîtrisé de force par le personnel de E______ et les forces de l'ordre, auxquelles il s'en était pris par la violence. Il y avait lieu de craindre qu'il ne commette d’autres infractions du même genre.

n. Par mandat du 20 février 2025 [modifié le 24 suivant s'agissant du prénom de l'un des experts], le Ministère public a ordonné l'expertise psychiatrique de A______. Les questions soumises aux experts portent sur la capacité du précité à prendre part aux débats, l'existence d'un trouble mental, la responsabilité pénale et les éventuelles mesures à ordonner.

o. Le 15 mai 2025, l'avocat du prévenu a transmis au Ministère public une lettre, en anglais, écrite par A______, dans laquelle ce dernier expose, en substance, ne pas comprendre ce qu'il s'est passé mais ne pas souhaiter que cela arrive à nouveau. Il présente ses excuses et ne comprend pas pourquoi il est toujours détenu, alors qu'il s'efforce d'être bon ("I try to be good") et fait tout ce qu'on lui dit. Il souhaite sortir [de prison] et reprendre le cours de sa vie.

p. S'agissant de sa situation personnelle, il ressort des quelques éléments au dossier, qu'il est célibataire et sans profession.

À teneur de l'extrait du casier judiciaire suisse, le prévenu n'a pas d'antécédents. Aucun extrait du casier judiciaire britannique ne figure au dossier.

C.            Dans l'ordonnance querellée, le TMC retient l'existence de charges suffisantes. L'instruction se poursuivait, le Ministère public annonçant devoir recevoir le rapport de l’expertise psychiatrique [attendu pour la fin du mois de mai 2025]. Les risques de fuite et de réitération retenus, dans sa précédente ordonnance, persistaient, aucun élément allant dans le sens d'une diminution n'étant intervenu depuis lors. En particulier, l'expertise psychiatrique était toujours en cours et il y avait lieu d'attendre les conclusions des experts pour déterminer l'éventuelle capacité du prévenu à prendre part aux débats, son degré de responsabilité, ainsi que les éventuelles mesures susceptibles de pallier le risque de récidive, au vu des troubles psychiques dont il souffrait.

Les mesures de substitution proposées n'étaient pas aptes à pallier les risques retenus.

Une prolongation de trois mois, nécessaire au vu des actes d'instruction devant encore être accomplis, "respect[ait] le principe de proportionnalité au vu des faits reprochés à la personne prévenue et de la peine concrètement encourue en cas de condamnation".

D.           a. Dans son recours, A______ soulève une violation de son droit d'être entendu, car le TMC avait omis de détailler et motiver ses conclusions visant la durée selon lui excessive de la détention provisoire, au regard de la peine prévisible à laquelle il devait s'attendre s'il venait à être condamné. Or, il avait longuement exposé, dans ses observations devant le TMC, devoir s'attendre à être condamné tout au plus à une peine pécuniaire avec sursis, respectivement à une peine privative de liberté de moins de trois mois.

Le recourant soutient, avec plusieurs exemples de décisions de la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice ainsi que du Tribunal fédéral, que la durée de la détention provisoire déjà effectuée serait d'ores et déjà excessive. Au vu des faits reprochés, sur un court laps de temps, ainsi que de son état au moment des événements, de son jeune âge et de l'absence d'antécédents, une peine privative de liberté supérieure à trois mois ne se justifiait pas, étant relevé qu'il n'avait pas été arrêté après les faits du 26 janvier 2025 et que la détention litigieuse ne concernait donc que ceux du 1er février 2025. Avec la prolongation de sa détention provisoire, il risquait de perdre son logement, ainsi que sa place au sein de la fondation "F______". Or, il bénéficiait, dans ce cadre, d'un suivi médical rigoureux et structuré, adapté à sa situation.

Le recourant conteste le risque de fuite. Il souhaitait certes retourner en Angleterre, où il bénéficiait d'un suivi régulier et approprié, et du soutien de sa mère. Aucun élément ne mettait en doute sa volonté de déférer aux convocations. Sa situation patrimoniale précaire ne pouvait être retenue contre lui, puisqu'il était de notoriété publique que les déplacements entre la Suisse et l'Angleterre étaient peu onéreux. Il pouvait compter sur l'appui de sa mère, de son équipe médicale et de l'ambassade, laquelle s'intéressait à son dossier. Il était prêt à verser une caution de CHF 800.-, somme qui représentait la moitié de sa fortune totale. Il était aussi possible d'exiger de lui qu'il reste en Suisse moyennant les mesures suivantes : versement de la caution susmentionnée, son placement "volontaire" à E______, l'obligation de continuer les traitements, l'obligation de séjourner "dans le secteur sécurisé" de E______, l'interdiction de quitter le domaine de la clinique, l'interdiction de consommer de l'alcool, l'obligation de contacter le Service de la réinsertion et du suivi pénal (ci-après : SRSP) dans les deux jours de sa libération, l'obligation de produire au SRSP chaque mois une attestation du suivi thérapeutique, le prononcé de restrictions de déplacement, l'interdiction de se rendre dans certains lieux, l'obligation de se présenter régulièrement à un poste de police, la remise de tous ses documents d'identité et l'obligation de se soumettre à un suivi socio-judiciaire.

Il ne présentait, en outre, aucun risque de réitération, simple ou qualifié. Âgé de 21 ans, il n'avait pas d'antécédents judiciaires et les infractions reprochées, commises lors d'un épisode de décompensation, ne revêtaient pas la qualification de crime grave au sens de l'art. 221al. 1bis CPP. En tout état, les mesures proposées seraient suffisantes à pallier un tel risque.

Dès lors que le délai de trois mois pour le rapport d'expertise venait à échéance le 20 mai 2025, un délai d'un mois et demi était suffisant pour clore l'instruction et le renvoyer, cas échéant, en jugement.

b. Le Ministère public conclut au rejet du recours. La durée de la détention provisoire n'était pas excessive au regard des charges pesant sur A______, eu égard à la peine-menace et concrètement encourue. En outre, au vu des troubles psychiatriques dont il semblait souffrir, le prévenu encourait, conjointement ou alternativement, une mesure, en fonction des conclusions du rapport d'expertise psychiatrique devant être rendu incessamment. Le risque de fuite devait être retenu car, même soumis aux mesures de substitution qu'il proposait, le prévenu pourrait disparaître dans la clandestinité ou retourner en Angleterre pour échapper à la présente procédure pénale. Le risque de réitération découlait, par ailleurs, de l'état psychique du prévenu, dont rien n'attestait à ce stade qu'il s'était, comme il l'affirmait, stabilisé. Les mesures de substitution proposées n'étaient pas aptes à contenir ces risques.

c. Le TMC maintient les termes de son ordonnance, sans formuler d'observations.

d. Le recourant renonce à répliquer.

 

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant invoque une violation de son droit d'être entendu, sous l'angle d'un défaut de motivation.

2.1. Une autorité viole le droit d'être entendu découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. lorsqu'elle ne respecte pas son obligation de motiver ses décisions afin que le justiciable puisse les comprendre et exercer ses droits de recours à bon escient (ATF 147 IV 409 consid. 5.3.4; 146 II 335 consid. 5.1). Pour satisfaire à cette exigence, il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision. Elle n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, peuvent être tenus pour pertinents (ATF 147 IV 249 consid. 2.4; 142 II 154 consid. 4.2; 139 IV 179 consid. 2.2). La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 7B_990/2023 du 3 avril 2024 consid. 2.1.1).

2.2. En l'espèce, s'il aurait été préférable que l'autorité précédente réponde aux arguments soulevés par le prévenu relatifs avec la durée de sa détention provisoire au regard de la peine à laquelle il s'estime concrètement exposé, la décision entreprise ne consacre pas de violation de son droit d'être entendu. Elle retient en effet explicitement l'absence de violation du principe de la proportionnalité, au vu des faits reprochés au recourant "et de la peine concrètement encourue en cas de condamnation". On comprend aisément que le TMC considère que la peine prévisible dépasse la détention provisoire ordonnée.

Le grief sera donc rejeté.

3.             Le recourant ne conteste pas les charges retenues. Il n'y a donc pas à s'y attarder, mais à renvoyer, en tant que de besoin, à la motivation adoptée par le premier juge (art 82 al. 4 CPP; ACPR/747/2020 du 22 octobre 2020 consid. 2 et les références), qui expose les indices graves et concordants pesant sur le prévenu.


 

4.             Le recourant conteste le risque de fuite.

4.1.       Conformément à l'art. 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire peut être ordonnée s'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite. Selon la jurisprudence, le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier le placement ou le maintien en détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 145 IV 503 consid. 2.2; 143 IV 160 consid. 4.3).

4.2.       En l'espèce, le recourant, de nationalité britannique, est domicilié au Royaume-Uni et ne dispose d'aucune attache avec la Suisse. Alors qu'il suivait un traitement psychiatrique dans une institution en Angleterre, il a quitté son pays sans en informer ses proches, qui ont signalé sa disparition, et est venu en Suisse, où il a commis les actes ayant conduit à sa détention provisoire. Lors de sa seconde interpellation, il a pris la fuite devant les policiers. En cas de libération, le recourant retournerait dans son pays d'origine ou disparaîtrait dans la clandestinité, et rien au dossier ne permet de penser, au vu des comportements qui précèdent, qu'il se présenterait aux actes d'instruction et à l'éventuelle audience de jugement. En particulier, sa situation financière alléguée [il allègue que sa fortune se limiterait au double de la caution de CHF 800.- proposée] ne paraît pas suffisante à garantir la prise en charge de ses déplacements et, le cas échéant, de son hébergement en Suisse pour la durée des éventuelles audiences. Le recourant mentionne le soutien de l'ambassade britannique, mais celle-ci n'a pas accepté de prendre en charge les frais de son rapatriement lors de son arrestation.

Dans ces circonstances, c'est donc à bon droit que le TMC a retenu un risque de fuite.

5.             L'admission de ce risque indiscutable dispense l'autorité de recours d'examiner si un autre risque – alternatif – l'est également (arrêts du Tribunal fédéral 7B_144/2025 du 24 mars 2025 consid. 3.3 ; 7B_188/2024 du 12 mars 2024 consid. 6.3.1 et 1B_197/2023 du 4 mai 2023 consid. 4.5).

6.             Le recourant propose des mesures de substitution.

6.1.       Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention, par exemple la fourniture de sûretés (al. 2 let. a), la saisie des documents d'identité et autres documents officiels (al. 2 let. b), l'assignation à résidence ou l'interdiction de se rendre dans un certain lieu ou un certain immeuble (al. 2 let. c), l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif (al. 2 let. d). La liste des mesures de substitution énoncée à l'art. 237 CPP n'est pas exhaustive (arrêt du Tribunal fédéral 1B_654/2011 du 7 décembre 2011 consid. 4.2).

6.2.       À teneur de l'art. 238 CPP, le tribunal peut, s'il y a danger de fuite, astreindre le prévenu au versement d'une somme d'argent afin de garantir qu'il se présentera aux actes de procédure et se soumettra à l'exécution d'une sanction privative de liberté (al. 1). Le montant des sûretés dépend de la gravité des actes reprochés au prévenu et de sa situation personnelle (al. 2).

Selon la jurisprudence, le caractère approprié de la garantie doit être apprécié notamment "par rapport à l'intéressé, à ses ressources, à ses liens avec les personnes appelées à servir de cautions et pour tout dire à la confiance qu'on peut avoir que la perspective de perte du cautionnement ou de l'exécution des cautions en cas de non-comparution à l'audience agira sur lui comme un frein suffisant pour éviter toute velléité de fuite" (ATF 105 Ia 186 consid. 4a, citant l'arrêt CourEDH Neumeister c. Autriche du 27 juin 1968, Série A, vol. 7, par. 14; cf. arrêt 1P.165/2006 du 19 avril 2006 consid. 3.2.1, publié in SJ 2006 I p. 395). Si la caution doit être fournie par un tiers, il y a lieu de prendre en considération les relations personnelles et financières du prévenu avec cette personne (arrêt du Tribunal fédéral 1P.690/2004 du 14 décembre 2004 consid. 2.4.3 et les références).

6.3.       En l'espèce, le recourant propose le versement de sûretés d'un montant de CHF 800.- représentant, selon lui, la moitié de sa fortune. Bien que l'on ne dispose que de peu d'informations sur la situation financière du recourant, une caution d'un aussi faible montant ne saurait suffire à garantir sa présentation aux actes de la procédure, s'il venait à être libéré.

Le placement "volontaire" du recourant à E______ ne suffirait pas non plus à pallier le risque de fuite, puisque son maintien en cet endroit ne dépendrait que de sa propre volonté, dont on peut douter de la constance au vu de son souhait affirmé de retourner en Angleterre, pays qu'il aurait apparemment fui en janvier dernier pour éviter un traitement psychiatrique. Cette disparition fait craindre que le recourant ne fasse de même, ici, pour se soustraire à la procédure pénale.

L'interdiction de quitter le domaine de la clinique, l'obligation de se présenter régulièrement à un poste de police et la remise de tous ses documents d'identité sont toutes des mesures fondées sur la volonté du prévenu, qui ne paraît pas suffisante en l'état, pour les raisons susmentionnées. On peine en outre à comprendre la proposition de placement au "secteur sécurisé" de E______, qui ne s'apparente pas à une remise en liberté.

Les autres mesures proposées ne sont pas de nature à pallier le risque de fuite, et on ne voit pas quelle autre mesure (non évoquée) y parviendrait.

7.             Le recourant invoque une violation du principe de la proportionnalité.

7.1. À teneur des art. 197 al. 1 et 212 al. 3 CPP, les autorités pénales doivent respecter le principe de la proportionnalité lorsqu'elles appliquent des mesures de contrainte, afin que la détention provisoire ne dure pas plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible. Selon une jurisprudence constante, la possibilité d'un sursis, voire d'un sursis partiel, n'a en principe pas à être prise en considération dans l'examen de la proportionnalité de la détention préventive (ATF 133 I 270 consid. 3.4.2 p. 281-282; 125 I 60; arrêts du Tribunal fédéral 1B_750/2012 du 16 janvier 2013 consid. 2, 1B_624/2011 du 29 novembre 2011 consid. 3.1 et 1B_9/2011 du 7 février 2011 consid. 7.2).

7.2. En l'espèce, le recourant estime, en se référant à des décisions rendues dans d'autres procédures sans lien avec lui, que la détention provisoire ordonnée excéderait la peine qu'il encourrait concrètement, rendant ainsi excessive la première.

On ne saurait toutefois procéder à une comparaison, forcément abstraite, de la situation du recourant avec celle d'autres prévenus dans d'autres causes. Seule se pose donc la question de savoir si la loi a été correctement appliquée à son cas. En l'occurrence, le recourant a été relaxé à l'issue de sa première arrestation, après qu'il s'en fut pris physiquement à l'employé de l'enseigne dans laquelle il venait de commettre un vol de peu d'importance. Quelques jours plus tard, alors qu'il se trouvait interné de manière non volontaire en raison de troubles psychiques, le recourant a frappé et blessé un agent de sécurité dont la présence avait été requise par les médecins pour assurer le bon déroulement de l'injection ordonnée. Ce comportement a conduit à l'arrestation du recourant – qui est aussi prévenu d'autres chefs d'infractions – et sa mise en détention provisoire.

Le Ministère public est désormais dans l'attente du dépôt (apparemment) imminent du rapport d'expertise psychiatrique, lequel doit déterminer les éventuels troubles dont souffrirait le recourant et l'éventuel traitement pour y remédier, ainsi que se prononcer sur sa capacité à prendre part à la procédure pénale et sa responsabilité pénale. La prolongation ordonnée est donc nécessaire pour l'accomplissement de cet acte d'instruction, lequel sera vraisemblablement suivi de l'audition des experts, puis de l'avis de prochaine clôture de l'instruction, des éventuels actes d'instruction requis par les parties et de la suite que décidera le Ministère public. En fonction des conclusions de l'expertise, la nécessité du maintien en détention provisoire pourra être réexaminée.

En l'état, au vu des actes reprochés au recourant et des actes d'instruction devant encore être accomplis, la détention provisoire ordonnée, y compris la prolongation litigieuse pour trois mois, ne parait pas avoir déjà atteint la peine concrètement encourue par le recourant (art. 212 al. 3 CPP), si tous les faits dont il est prévenu devaient être retenus par l'autorité de jugement.

C'est donc en vain que le recourant allègue une durée excessive de la détention provisoire.

8.             Le recours s'avère ainsi infondé et doit être rejeté.

9.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

10.         Le recourant plaide au bénéfice d'une défense d'office.

10.1.   Selon la jurisprudence, le mandat de défense d'office conféré à l'avocat du prévenu pour la procédure principale ne s'étend pas aux procédures de recours contre les décisions prises par la direction de la procédure en matière de détention avant jugement, dans la mesure où l'exigence des chances de succès de telles démarches peut être opposée au détenu dans ce cadre, même si cette question ne peut être examinée qu'avec une certaine retenue. La désignation d'un conseil d'office pour la procédure pénale principale n'est pas un blanc-seing pour introduire des recours aux frais de l'État, notamment contre des décisions de détention provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 1B_516/2020 du 3 novembre 2020 consid. 5.1).

10.2.   En l'occurrence, quand bien même le recourant succombe, on peut admettre que l'exercice de ce premier recours ne procède pas d'un abus.

L'indemnité du défenseur d'office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Catherine GAVIN, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/2185/2025

ÉTAT DE FRAIS

 

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

30.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

795.00

 

 

Total

CHF

900.00