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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1007/2024

JTAPI/538/2024 du 05.06.2024 ( LCR ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : RETRAIT DE PERMIS;FAUTE GRAVE;CONDAMNATION;ANTÉCÉDENT;ALCOOL
Normes : LCR.16c.al1.letb; LCR.16c.al2.letc; LCR.16.al3
En fait
En droit
Par ces motifs

 

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1007/2024 LCR

JTAPI/538/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 5 juin 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1973, est titulaire d'un permis de conduire français obtenu le 11 octobre 1995, pour la catégorie B.

2.             Par décision du 6 septembre 2023, l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) a interdit à M. A______ de faire usage de son permis de conduire étranger sur le territoire suisse à titre préventif et a ordonné qu'une expertise visant à évaluer son aptitude à la conduite soit réalisée par un médecin de niveau 4.

Il était retenu qu'il avait conduit, le 26 août 2023, en état d'ébriété en présentant un taux d'alcool qualifié de 0.98 mg/l à l’éthylomètre, dans le Tunnel des Communes-Réunies au volant d'une voiture.

3.             Le début de l’interdiction a été fixé au 27 août 2023, date incluse.

4.             Par jugement du 23 janvier 2024, statuant sur opposition et à nouveau, contradictoirement, le tribunal de police a déclaré M. A______ coupable de conduite en état d'ébriété (art. 91 al. 2 let. a de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 - LCR - RS 741.01), d’empêchement d’accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) et de violation simple des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR).

Ce jugement est entré en force.

5.             Dans son rapport du 21 février 2024, la Dresse B______, médecin spécialiste du trafic SSML, a conclu que M. A______ était apte à la conduite et que son aptitude n'était conditionnée à aucune exigence médicale particulière.

6.             Par décision du 1er mars 2024, déclarée exécutoire nonobstant recours, l'OCV a interdit à M. A______ de faire usage de son permis de conduire étranger sur le territoire suisse, en application de l'art. 16c LCR, pour une durée de quatorze mois, en raison des évènements du 26 août 2023. Il s'agissait d'une infraction grave. L’intéressé n’avait pas présenté d’observations et ne justifiait pas d’un besoin professionnel au sens de la jurisprudence ni d’une bonne réputation, le système d'information relatif à l’admission à la circulation (SIAC) faisant apparaître une interdiction de faire usage du permis de conduire étranger sur le territoire suisse prononcée par décision du 13 août 2018, pour une durée de 3 mois en raison d'une infraction grave, mesure dont l'exécution avait pris fin le 14 janvier 2019.
Compte-tenu de l’ensemble des circonstances et notamment de l’importance du taux d’alcool, il prononçait une mesure s’écartant du minimum légal.

La durée de l’interdiction était fixée du 27 août 2023 au 26 octobre 2024, dates incluses.

7.             Par acte daté du 22 mars 2024, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision.

L'événement ayant conduit au prononcé de la décision querellée n’était pas strictement une récidive. Il s’agissait d’une faute grave, ce dont il avait pleinement conscience, mais isolée et qui ne se reproduirait pas. De plus, il n'y avait eu aucune intention de refus d'obtempérer de sa part, même si cela n'avait pas été retenu, pas plus que de perte de maitrise, d'accident, de dommages matériels, corporels, de prétentions de tiers et/ou plaintes. Il rappelait les circonstances de l’excès de vitesse de décembre 2017, en soulignant que 5 ans et 9 mois séparaient ces deux infractions qui n’étaient pas de la même nature. Titulaire du permis de conduire voiture depuis 1996 et du permis moto depuis 2005, il avait parcouru plusieurs centaines de milliers de kilomètres en Suisse, en Europe, en Amérique, Asie, Afrique, de nuit comme de jour, sans aucun accident. L'interdiction de quatorze mois était une mesure totalement excessive et constituait une atteinte grave à sa mobilité, notamment professionnelle. De plus, son aptitude à la conduite avait été démontrée médicalement tant d'un point de vue physique (vue 12/10 et vision périphérique totale, reflexes parfaits) que comportemental (entretien également à des fins d'évaluation psychologique). Il demandait par conséquent la levée de l'interdiction de conduire, avec effet immédiat, pour les motifs évoqués.

8.             Le 4 avril 2024, l'OCV s'est opposé à la restitution de l'effet suspensif.

Suite à sa décision du 6 septembre 2023, entrée en force, M. A______ était sous interdiction de faire usage de son permis de conduire français sur le territoire suisse depuis le 27 août 2023. Or, comme jugé par le Tribunal fédéral et le tribunal de céans, une exécution fractionnée du retrait du permis de conduire, respectivement d'une interdiction de faire usage d'un permis de conduire étranger sur le territoire suisse, était exclue. En effet, une telle exécution était incompatible avec le but préventif et éducatif de la mesure et allait à l'encontre de la conception du législateur selon laquelle un retrait de permis devait être ordonné et effectivement subi pour une certaine durée fixée par la loi. Le bien-fondé de la durée de l'interdiction de faire usage du permis de conduire étranger sur le territoire suisse, laquelle devait être fixée à douze mois au minimum au vu de la récidive du recourant, soit jusqu'au 26 août 2024, serait abordée dans le cadre de l’examen au fond du recours. Le recourant n'avait enfin pas démontré en quoi son intérêt personnel à recouvrer immédiatement son droit de conduire primerait sur l'intérêt public de prévention et d'éducation lié à l'exécution de la mesure dans sa totalité, tel que cela avait été voulu par le législateur fédéral.

9.             Invité par courrier du tribunal du 9 avril 2024 à répliquer dans un délai au 15 avril 2024 sur les observations de l'OCV sur effet suspensif, le recourant n’a pas donné suite.

10.         Par décision du 17 avril 2024 (DITAI/254/2024), le tribunal a rejeté la demande de restitution de l'effet suspensif au recours formée par M. A______.

11.         Par courrier du 18 avril 2024 parvenu au tribunal le 22 suivant, M. A______ a, en substance, relevé que l'OCV n'apportait aucune argumentation pertinente et réitéré les termes de ses précédents courriers. Il s’agaçait profondément de cet acharnement administratif coûteux en francs, en temps et en santé mentale.

La position de l'OCV était inepte et pas un mot n’était dit de la prétendue infraction de décembre 2017 qui lui valait un effet de peine en cascade en s'appuyant sur une prétendue récidive qui n'en était à l'évidence pas une, ni par sa nature ni par sa date séparant la dernière de 5 ans et 9 mois. L’interdiction de circuler en Suisse n'avait maintenant plus aucune raison d'être, n'avait définitivement plus aucun sens et n’était que préjudiciable. Dans une société construite par, pour et autour de la mobilité, il interdisait à l'OCV de tenter de lui expliquer que son droit et sa nécessité de mobilité n'étaient pas justifiés.

12.         Dans ses observations du 24 mai 2024 sur le fond, l’OCV a indiqué persister intégralement dans les termes de sa décision et conclure au rejet du recours, sous suite de frais et dépens.

Sa décision était conforme à la loi et à la jurisprudence fédérale en matière de conduite en état d'ébriété qualifiée, compte tenu de l'antécédent du recourant. Pour rappel, ce dernier avait fait l'objet d'une interdiction de faire usage de son permis de conduire étranger sur le territoire suisse prononcée par décision du 13 août 2018, pour une durée de trois mois en raison d'une infraction grave, mesure dont l'exécution avait pris fin le 14 janvier 2019. Il s’était pour le surplus écarté du minimum légal applicable de douze mois, en raison de l'importance du taux d'alcool relevé à l'éthylomètre, soit 0.98 mg/l d'air expiré, représentant plus du double de la limite des 0,40 mg/l d'air expiré. Bien que, ce faisant, il n’avait pas mésusé de son pouvoir d'appréciation, il ne serait pas opposé à réduire d'un mois la durée fixée, soit treize mois au lieu de quatorze, si le recourant participait à un cours dispensé par le Bureau de prévention des accidents (BPA), dont un formulaire était joint en annexe. A réception d'une attestation de participation audit cours, une nouvelle décision serait alors prononcée.

13.         Par duplique du 31 mai 2024, M. A______ a notamment informé le tribunal qu’il allait s’inscrire aux cours du BPA, sous réserve de ses disponibilités et possibilités de mobilités.

14.         Ce courrier a été transmis à l’OCV le 3 juin 2024, pour information.

 

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal des véhicules (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

4.             Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 515 p. 171).

5.             Saisi d'un recours, le tribunal applique le droit d'office. S'il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent
(art. 69 al. 1 LPA ; cf. ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a ; ATA/585/2015 du 9 juin 2015 ; ATA/285/2013 du 7 mai 2013), de sorte qu'il peut admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (cf. ATF 135 III 397 consid. 1.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_540/2013 du 5 décembre 2013 consid. 3 ; 2C_349/2012 du 18 mars 2013 consid. 2.1).

6.             Le recourant estime la décision querellée inepte, disproportionnée et constitutive d’une grave atteinte à sa mobilité, notamment professionnelle. Aucun antécédent ne pouvait être retenu à son encontre.

7.             Les permis et les autorisations seront retirés lorsque l’autorité constate que les conditions légales de leur délivrance ne sont pas ou ne sont plus remplies; ils pourront être retirés lorsque les restrictions ou les obligations imposées dans un cas particulier, lors de la délivrance, n’auront pas été observées (art. 16 al. 1 LCR).

8.             Lorsque la procédure prévue par la loi fédérale sur les amendes d’ordre du 24 juin 1970 (LAO - RS 741.03) n’est pas applicable, une infraction aux prescriptions sur la circulation routière entraîne le retrait du permis d'élève-conducteur ou du permis de conduire ou un avertissement (art. 16 al. 2 LCR).

9.             Pour déterminer la durée et s'il y a lieu de prononcer un retrait d'admonestation, la LCR distingue les infractions légères, moyennement graves et graves
(art. 16a à 16c LCR).

10.         Selon l'art. 16c al. 1 let. b LCR, commet une infraction grave celui qui conduit un véhicule automobile en état d'ébriété et présente un taux d'alcool qualifié dans l'haleine ou dans le sang.

11.         Selon l'art. 2 de l'ordonnance de l'Assemblée fédérale concernant les taux limites d'alcool admis en matière de circulation routière du 15 juin 2012 (RS 741.13),
ci-après : l'ordonnance, est considéré comme qualifié un taux d'alcool dans le sang de 0.8 gramme pour mille ou plus (let. a), ou un taux d'alcool dans l'haleine de 0.4 mg ou plus par litre d'air expiré (let. b).

12.         Ainsi que cela ressort notamment de la formulation de l'art. 16 al. 2 LCR
(« une infraction aux prescriptions sur la circulation routière entraîne le retrait ») et de l'art. 16c al. 2 LCR (« le permis de conduire est retiré »), le retrait du permis de conduire est une mesure obligatoire, qui, dès que ses conditions légales sont remplies, doit être ordonnée par l'autorité, laquelle ne dispose d'aucun pouvoir d'appréciation à cet égard et ne saurait dès lors, par exemple, prononcer des sanctions de substitution à l'encontre du conducteur fautif, d'autant plus si celles-ci ne sont pas prévues par la loi.

13.         Après une infraction grave, le permis d'élève conducteur ou le permis de conduire est retiré pour trois mois au minimum (art. 16c al. 2 let. a LCR).

L'art. 16c al. 2 let. c LCR prévoit toutefois que le permis de conduire est retiré pour douze mois au minimum si, au cours des cinq années précédentes, le permis a été retiré une fois en raison d'une infraction grave ou à deux reprises en raison d'infractions moyennement graves.

14.         En vertu de l'art. 16 al. 3 LCR, les circonstances qui doivent être prises en considérations pour fixer la durée du retrait du permis de conduire sont notamment l'atteinte à la sécurité routière, la gravité de la faute, les antécédents en tant que conducteur ainsi que la nécessité professionnelle de conduire un véhicule automobile ; la durée minimale du retrait ne peut être toutefois réduite.

Ces éléments doivent faire l'objet d'une appréciation d'ensemble, de manière à atteindre autant que possible l'effet éducatif et préventif auquel tend la mesure. Dans ce contexte, l'autorité cantonale dispose d'un large pouvoir d'appréciation et l'autorité de recours n'intervient que si celle-ci a abusé de ce pouvoir, par exemple en ne prenant pas en compte certains éléments pertinents ou encore en appréciant leur portée de manière insoutenable (ATF 128 II 173 consid. 4b ; JdT 2002 I 593 et la jurisprudence citée). Il y a lieu ainsi de rechercher si des circonstances particulières ne justifient pas de considérer le cas comme plus grave ou, inversement, comme de moindre gravité (arrêt 1C_125/2016 du 25 octobre 2016).

15.         Lorsqu'il s'agit d'apprécier le besoin professionnel de conduire un véhicule automobile, il convient de respecter le principe de la proportionnalité. Le retrait du permis de conduire est ressenti plus durement par le conducteur qui en a besoin pour des raisons professionnelles, de sorte qu'un retrait plus court suffit, en règle générale, à l'admonester de manière efficace et à le dissuader de commettre de nouvelles infractions. Un tel conducteur peut donc être privé de son permis moins longtemps que celui qui se limite à un usage commun, même si les fautes commises sont identiques. La réduction s'opère ainsi proportionnellement au degré de sensibilité à la sanction (ATF 128 II 285, consid. 2.4 ; 123 II 572, consid. 2c ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_504/2011 du 7 mars 2012, consid. 4.1).

16.         Le besoin professionnel ne peut être pris en compte dans le cadre de la fixation de la durée d'un retrait de permis que dans la mesure où la privation de ce document revient à interdire à l'intéressé tout exercice de son activité lucrative ou entraîne pour lui une perte de gain telle ou des frais à ce point considérables que la mesure apparaît manifestement disproportionnée, comme ce serait le cas, par exemple, pour un chauffeur professionnel, un chauffeur de taxis, un livreur ou un routier
(arrêts du Tribunal fédéral 1C_430/2011 du 7 mars 2012 consid. 4.2 ; 1C_63/2007 du 24 septembre 2007 consid. 4.4 ; SJ 1994 p. 534). Le Tribunal fédéral a ainsi nié l'utilité professionnelle du permis de conduire pour des agents d'assurances ou des courtiers immobiliers, au motif que les transports publics ou le taxi permettaient d'accéder à une clientèle potentielle suffisante dans des délais acceptables pour que l'activité professionnelle, bien qu'entravée d'une manière non négligeable, ne soit pas rendue impossible ou compliquée à l'excès (arrêts du Tribunal fédéral 1C_63/2007 du 24 septembre 2007, consid. 4.5 ; 6A.24/2005 du 24 juin 2005, consid. 3 ; arrêt 6A.104/2002 du 24 janvier 2003 consid. 3.2).

17.         En principe, l'autorité administrative statuant sur un retrait du permis de conduire est liée par les constatations de fait d'un jugement pénal entré en force. La sécurité du droit commande en effet d'éviter que l'indépendance du juge pénal et du juge administratif ne conduise à des jugements opposés, rendus sur la base des mêmes faits. L'autorité administrative ne peut s'écarter du jugement pénal que si elle est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait inconnues du juge pénal ou qui n'ont pas été prises en considération par celui-ci, s'il existe des preuves nouvelles dont l'appréciation conduit à un autre résultat, si l'appréciation à laquelle s'est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés, ou si le juge pénal n'a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 139 II 95 consid. 3.2 ; 137 I 363 consid. 2.3.2 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_470/2019 du 31 janvier 2020 consid. 5.1.2 ; 1C_611/2018 du 18 avril 2019 consid. 2.2 ; 1C_202/2018 du 18 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_30/2017 du 21 avril 2017 consid. 2.1).

18.         À teneur de l'art. 42 al. 1 de la convention sur la circulation routière du 8 novembre 1968 (RS 0.741.10), conclue à Vienne le 8 novembre 1968, entrée en vigueur pour la Suisse le 11 décembre 1992 et pour la France le 9 décembre 1971, les parties contractantes ou leurs subdivisions peuvent retirer à un conducteur qui commet sur leur territoire une infraction susceptible d'entraîner le retrait du permis de conduire en vertu de leur législation le droit de faire usage sur leur territoire du permis de conduire, national ou international, dont il est titulaire.

19.         Le droit suisse prévoit que l'usage d'un permis étranger peut être interdit en vertu des dispositions qui s'appliquent au retrait du permis de conduire suisse
(art. 45 al. 1 de l’ordonnance réglant l’admission des personnes et des véhicules à la circulation routière du 27 octobre 1976 (OAC - RS 741.51) ; cf. ATA/390/2018 du 24 avril 2018 consid. 3b).

20.         Les règles et principes énoncés ci-dessus sont donc applicables mutatis mutandis à l'interdiction de faire usage du permis de conduire étranger, notamment français, sur le territoire suisse.

21.         En l'occurrence, le recourant ayant définitivement été reconnu coupable par les juridictions pénales de, notamment, conduite en état d'ébriété avec un taux d'alcool qualifié de 0.98 mg/l à l’éthylomètre (art. 91 al. 2 let. a LCR), c'est à juste titre que l’OCV a qualifié la faute de grave et lui a interdit de faire usage de son permis de conduire étranger sur le territoire suisse pour une durée d’à tout le moins douze mois, en application de l’art. 16c al. 2 let. c LCR. En effet, dans le cadre de la fixation de la durée du retrait de permis, l’OCV devait prendre en compte, à titre d'antécédent, l’interdiction de faire usage du permis de conduire étranger sur le territoire suisse prononcée par décision du 13 août 2018, pour une durée de trois mois en raison d'une infraction grave, dès lors que l’exécution de cette mesure avait pris fin le 14 janvier 2019, soit moins de cinq ans avant la commission de la nouvelle infraction, survenue le 26 août 2023.

L’OCV étant lié par cette durée minimale incompressible de douze mois, même en présence de besoins professionnels de conduire des véhicules avérés, seule se pose la question d’une réduction de la durée de l’interdiction de quatorze à douze mois. À cet égard, l'autorité explique s'être écartée du minimum légal prévu par l'art. 16c al. 2 let. c LCR, compte tenu de l'importance du taux d'alcool avec lequel l’intéressé a conduit.

Comme vu ci-dessus, une infraction grave, au sens de l'art. 16c al. 1 let. b LCR, doit être retenue au détriment du recourant. Il convient dès lors de relever que sa faute, de même que la mise en danger induite par son comportement, sont manifestement graves. La mesure prononcée peut certes apparaître sévère et l'on comprend les inconvénients qu’elle représente pour le recourant. La décision querellée - limitée au territoire suisse – ne l'empêche toutefois pas de conduire en France. Le recourant - qui exerce la profession de courtier en assurance - ne peut enfin valablement se prévaloir d'un besoin professionnel de conduire au sens strict où l'entendent la jurisprudence et la doctrine ; il ne le prétend d’ailleurs pas. Dans ces conditions, le tribunal estime que l'OCV n'a pas excédé ou abusé de son large pouvoir d'appréciation, en tenant compte de l'importance du taux d'alcool avec lequel le recourant a conduit, pour s'écarter du minimum légal de douze mois, décision qui apparait dès lors conforme au principe de la proportionnalité, qui gouverne toute action étatique (art. 36 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101).

Dans ces conditions, la décision querellée ne peut être que confirmée et, partant, le recours rejeté.

Cela étant, il sera donné acte à l’OCV de ce qu’il n’est pas opposé à réduire la durée de la mesure querellée de quatorze à treize mois à réception d’une attestation de participation du recourant à un cours dispensé par le BPA.

22.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 800.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 22 mars 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 1er mars 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             donne acte à l’office cantonal des véhicules de ce qu’il n’est pas opposé à réduire la durée de la mesure d’interdiction de conduire en Suisse avec son permis de conduire étranger prononcée à l’encontre du recourant par décision du 1er mars 2024 de quatorze à treize mois, à réception d’une attestation de participation du recourant à un cours dispensé par le Bureau de prévention des accidents (BPA) ;

4.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 800.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais ;

5.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière