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Décisions | Chambre civile

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C/21388/2023

ACJC/1023/2024 du 20.08.2024 sur OTPI/760/2023 ( SDF ) , MODIFIE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/21388/2023 ACJC/1023/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 20 AOÛT 2024

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ [GE], appelante d'une ordonnance rendue par la 6ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 4 décembre 2023 et intimée, représentée par Me B______, avocate,

et

Monsieur C______, domicilié ______ [GE], intimé et appelant, représenté par Me Daniela LINHARES, avocate, MALBUISSON Avocats, galerie Jean-Malbuisson 15, case postale 1648, 1211 Genève 1.

 

 


EN FAIT

A. Par ordonnance OTPI/760/2023 du 4 décembre 2023, reçue par A______, dans sa version motivée, le 21 décembre 2023, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures provisionnelles, a autorisé les époux A______ et C______ à vivre séparés (chiffre 1 du dispositif), attribué à l'épouse la jouissance exclusive du domicile conjugal sis rue 1______ no. ______, [code postal] Genève (ch. 2), fixé à C______ un délai au 2 janvier 2024 pour quitter le domicile conjugal précité et en remettre les clés à A______ (ch. 3), dit que l'autorité parentale sur l'enfant D______ demeurerait conjointe (ch. 4), dit que la garde sur l'enfant D______ serait alternée entre les parties, à savoir du lundi début de l'école au mercredi 13h chez la mère, du mercredi 13h au vendredi 20h chez le père et les week-ends en alternance chez chaque parent (ch. 5), dit que la garde alternée, selon les modalités fixées au chiffre 5, entrerait en vigueur dès la sortie des HUG de A______, au bénéfice d'une attestation médicale certifiant de l'amélioration de son état psychique et de sa capacité à prendre en charge l'enfant D______ (ch. 6), dit que, dans l'intervalle, l'enfant précitée serait prise en charge par son père, C______ (ch. 7), dit que ce dernier devrait amener régulièrement l'enfant D______ auprès de sa mère durant l'hospitalisation de cette dernière, conformément au besoin clairement exprimé par l'enfant (ch. 8), fixé le domicile légal de l'enfant au domicile de sa mère, rue 1______ no. ______, [code postal] Genève (ch. 9), donné acte aux parties de ce qu'elles s'engageaient à ouvrir un compte commun pour les dépenses de l'enfant D______ (ch. 10), donné acte aux parties de leur accord sur le versement des allocations familiales et de la rente complémentaire AI sur ce compte commun (ch. 11), donné acte aux parties de leur accord à ce que les frais effectifs de l'enfant D______ soient payés depuis ce compte commun (ch. 12), donné acte aux parties de leur engagement à partager à parts égales entre elles les frais supplémentaires de l'enfant D______ (ch. 13), donné acte aux parties de ce qu'elles renonçaient à toute contribution à leur entretien réciproque (ch. 14), réservé la question de l'arriéré des allocations familiales et du remboursement d'une partie de la rente complémentaire à la procédure au fond (ch. 15), condamné les parties, en tant que de besoin, à exécuter l'ordonnance (ch. 16), réservé la décision finale du Tribunal quant au sort des frais judiciaires (ch. 17) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 18).

B. a. Par acte expédié le 28 décembre 2023 au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ appelle de cette ordonnance, dont elle sollicite l'annulation du chiffre 14 du dispositif, avec suite de frais judiciaires.

Cela fait, elle conclut, principalement, à ce que la Cour constate un revenu hypothétique pour C______ correspondant à un taux de travail supplémentaire d'au minimum 30%, soit un revenu global net de 3'813 fr. 33 pour un 80% de taux d'activité, 13ème salaire inclus, et condamne celui-ci à lui verser une contribution à son entretien de 700 fr. par mois et d'avance dès le mois de janvier 2024. Subsidiairement, elle conclut à ce que la Cour renvoie la cause au Tribunal pour qu'il statue à nouveau sur ce point, dans le sens des considérants.

Elle produit une pièce nouvelle.

b. Par acte déposé le 22 décembre 2023 au greffe de la Cour, C______ appelle également de cette ordonnance, sollicitant que la Cour annule les chiffres 2 et 3 du dispositif, laisse les frais judiciaires à la charge de l'Etat et compense les dépens.

Cela fait, il conclut, principalement, à ce que la Cour rejette les mesures provisionnelles sollicitées par A______. Subsidiairement, il conclut à ce que la Cour dise que les époux pourraient tous les deux demeurer au domicile conjugal sis rue 1______ no. ______, [code postal] Genève, l'époux demeurant dans la chambre conjugale et l'épouse dans la chambre de l'enfant avec celle-ci, lui donne acte de ce qu'il s'engageait à aménager la chambre de l'enfant pour que celle-ci et A______ puissent y demeurer, de ce qu'il s'engageait à n'adresser la parole à son épouse que pour des questions relatives à l'enfant D______ et de ce qu'il s'engageait à passer le moins de temps possible au domicile conjugal sis rue 1______ no. ______, [code postal] Genève, quand il n'aurait pas la garde de l'enfant. Plus subsidiairement, il conclut à ce que la Cour lui attribue la jouissance exclusive du domicile conjugal sis rue 1______ no. ______, [code postal] Genève durant la procédure et fixe un délai raisonnable à A______ pour quitter ledit domicile conjugal.

c. Dans leurs réponses, les parties concluent chacune à ce que la Cour déclare irrecevable l'appel de sa partie adverse et confirme l'ordonnance entreprise. A______ conclut également à ce que la Cour condamne son époux en tous les frais et dépens de la procédure de première et deuxième instance, dont une indemnité de 2'491 fr. 70 HT, correspondant à 7h30 d'activité pour la première instance, et 2'225 fr. HT, pour 6h50 d'activité pour la seconde instance au tarif horaire de 350 fr. (cheffe d'Etude) et de 150 fr. (stagiaire), au titre de ses frais de représentation. Elle produit une nouvelle pièce.

d. Par arrêt ACJC/1727/2023 du 29 décembre 2023, la Cour a déclaré irrecevable, subsidiairement rejeté, la requête de suspension du caractère exécutoire de l'ordonnance attaquée formée par C______ et dit qu'il serait statué sur les frais liés à la décision dans l'arrêt rendu sur le fond.

e. Les parties n'ayant pas fait usage de leur droit de réplique, la Cour a gardé la cause à juger.

 

 

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier:

a. Les époux A______, née [A______] le ______ 1990 à E______ (Portugal), et C______, né le ______ 1986 à F______ (Portugal), ont contracté mariage le ______ 2019 à Genève.

b. De leur union est issue l'enfant D______ (ci-après : D______), née le ______ 2017 à Genève.

c. A______ souffre depuis plusieurs années d'une histiocytose pulmonaire qui entraine une insuffisance respiratoire très sévère et une hypertension pulmonaire. Elle suit depuis 2018 une oxygénothérapie liquide qui la contraint à se déplacer avec une bouteille d'oxygène et est en attente d'une transplantation pulmonaire.

d. Dans cette attente, elle a commencé, le 26 septembre 2023, des séances de physiothérapie aux HUG.

e. La situation financière de A______ se présente de la manière suivante :

e.a Depuis juillet 2019, elle perçoit une rente AI à 100% qui s'élève actuellement à 1'509 fr. par mois.

e.b Sa prime d'assurance maladie de base, subside déduit, s'élève à 376 fr. 70 par mois, ses frais de transports publics à 70 fr. par mois et son montant de base OP à 1'350 fr. par mois.

f. La situation financière de C______ se présente de la manière suivante :

f.a Après une période de chômage, il a trouvé un emploi de nettoyeur [auprès de] G______ à compter du mois de décembre 2022 et travaille à 50% (tous les matins) pour un revenu mensuel net d'environ 2'200 fr., versé 13 fois l'an, soit un revenu mensuel net de 2'383 fr. 33.

f.b Sa prime d'assurance maladie de base s'élève à 502 fr. 50 par mois, ses frais de transports publics à 70 fr. par mois et son montant de base OP à 1'350 fr. par mois.

g. D______ est en 3ème primaire à l'école H______ qui se trouve à quatre minutes à pied du domicile familial.

Sa prime d'assurance maladie de base, subside déduit, s'élève à 21 fr. 30 par mois, ses frais de transports publics à 45 fr. par mois et son montant de base OP à 400 fr. par mois.

Elle bénéficie d'allocations familiales à hauteur de 311 fr. ainsi que d'une rente complémentaire AI de 604 fr. par mois.

h. Le loyer du domicile conjugal s'élève à 1'061 fr. par mois

i. Depuis mars 2023, les époux ont décidé de partager par moitié l'intégralité des charges liées au ménage et à D______.

j. Par requête du 18 octobre 2023, A______ a requis le prononcé de mesures protectrices de l'union conjugale, concluant notamment à ce que le Tribunal lui attribue la jouissance exclusive du logement familial, situé rue 1______ no. ______, [code postal] Genève, et du mobilier le garnissant, impartisse un délai de trois mois à C______ pour quitter ledit logement dès l'envoi de la convocation à la première audience de comparution personnelle et constate que les époux ne se devaient aucune contribution d'entretien.

En substance, A______ faisait valoir qu'elle souffrait de l'emprise de son époux qui avait souvent fait preuve à son égard de mépris et de dénigrement et qui contrôlait ses faits et gestes, en ayant notamment installé une caméra à leur domicile, qui avait entretemps été enlevée. Depuis qu'elle lui avait annoncé en octobre 2022 qu'elle voulait se séparer, la situation entre les époux était encore plus conflictuelle et n'était plus supportable.

k. Le 1er novembre 2023, A______ a déposé une plainte pénale pour injure à l'encontre de C______.

l. Le 7 novembre 2023, A______ s'est rendue aux HUG en raison d'un état d'anxiété lié à sa séparation, impactant son état de santé général. Elle a sollicité un avis psychiatrique en raison des violences psychologiques qu'elle disait subir.

m. Le 20 novembre 2023, A______ a saisi le Tribunal d'une requête de mesures superprovisionnelles urgentes et provisionnelles, en complément des mesures protectrices de l'union conjugale déposée le 18 octobre 2023.

Sur mesures provisionnelles, elle a conclu notamment au prononcé de mesures d'expulsion de son époux du domicile conjugal et d'attribution en sa faveur des droits et obligations du logement conjugal, à ce que le Tribunal lui attribue la jouissance exclusive du logement familial, ainsi que du mobilier le garnissant, exige que C______ lui remette toutes les clés du domicile, de la boîte aux lettres et de la cave, par conseils interposés, et l'autorise à faire changer les serrures du domicile.

A l'appui de ses conclusions, A______ se prévalait du fait que C______ aurait rebranché la caméra de surveillance, ce qui lui permettait d'être au courant de tout ce qu'elle faisait ou disait dans l'appartement. Face aux injures et au comportement contrôlant, méprisant et humiliant de son époux, elle avait porté plainte à la Police de I______ le 1er novembre 2023 mais malgré cela, les violences verbales et psychiques continuaient. Elle ne pouvait continuer d'accepter de vivre dans un tel climat de violence pour elle-même et pour le bon développement de sa fille, de sorte qu'elle était contrainte de demander les mesures sollicitées, fondées tant sur l'art. 28b CC que l'art. 176 al. 1 CC.

n. Par ordonnance du 20 novembre 2023, le Tribunal a rejeté la requête de mesures superprovisionnelles, considérant que les circonstances décrites dans la requête et les pièces produites ne rendaient pas vraisemblable une urgence particulière justifiant le prononcé des mesures requises avant audition des parties, ce d'autant plus qu'une audience était d'ores et déjà fixée au lendemain.

o. Le 21 novembre 2023, le Tribunal a sollicité du Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (ci-après: SEASP) l'établissement d'un rapport d'évaluation.

p. Les parties ont été entendues lors de l'audience de comparution personnelle du 21 novembre 2023.

C______ a notamment expliqué qu'il travaillait à 50% car lorsqu'on commençait comme nettoyeur [auprès de] G______ il fallait toujours attendre un certain temps pour pouvoir passer à 100%. Il y travaillait depuis le mois de décembre 2022 et figurait déjà sur la liste pour passer à 100%. Il avait engagé des recherches pour trouver un poste à 50% ailleurs mais il avait interrompu ses recherches car il avait peur de laisser D______ avec sa mère, vu les tentatives de suicide et l'automutilation de cette dernière.

Les parties se sont notamment mises d'accord sur l'absence de contribution d'entretien entre époux.

N'ayant pas eu connaissance des écritures sur mesures provisionnelles de son épouse, C______ a sollicité un délai pour déposer ses plaidoiries écrites sur mesures provisionnelles, ce que le Tribunal lui a accordé. L'époux a également pris note que celles-ci devraient être limitées à la question de l'attribution du domicile conjugal vu qu'il s'agissait du seul point litigieux sur mesures provisionnelles.

q. Dans ses plaidoiries finales écrites du 27 novembre 2023, C______ a notamment conclu, principalement, à ce que le Tribunal lui attribue la jouissance du domicile conjugal sis rue 1______ no. ______, [code postal] Genève, pendant la durée de la procédure et fixe un délai raisonnable à A______ pour quitter ledit domicile. Subsidiairement, il a conclu à ce que le Tribunal dise aux époux qu'ils pourraient tous les deux demeurer au domicile conjugal, dise que lui-même demeurerait dans la chambre conjugale et A______ ainsi que D______ dans la chambre de celle-ci, lui donne acte de son engagement à aménager la chambre de l'enfant D______ pour que celle-ci et sa mère puissent y demeurer, lui donne acte de son engagement à n'adresser la parole à son épouse que pour des questions relatives à l'enfant et lui donne acte de son engagement à passer le moins de temps possible au domicile conjugal quand il n'aurait pas la garde de l'enfant. Plus subsidiairement, il a conclu à ce que le Tribunal attribue la jouissance exclusive du domicile conjugal à A______ pendant la durée de la procédure et lui impartisse un délai au 2 janvier 2024 pour le quitter.

r. Dans ses plaidoiries écrites du 27 novembre 2023, A______ a informé le Tribunal de la survenance d'éléments factuels supplémentaires importants, dont sa tentative de suicide le 24 novembre 2023 et son actuelle hospitalisation qui l'obligeaient à modifier ses conclusions sur mesures provisionnelles. Elle a ainsi notamment conclu à ce que le Tribunal constate, pour C______, un revenu hypothétique correspondant à un travail supplémentaire d'au minimum 30%, soit un revenu global net de 3'818 fr. 33 pour un 80% de taux d'activité, 13ème salaire inclus, et condamne celui-ci à lui verser une contribution à son entretien de 700 fr. par mois et d'avance. S'agissant de l'expulsion de son époux du domicile conjugal, de l'attribution de la jouissance exclusive et des droits et obligations du domicile conjugal, elle a persisté dans ses conclusions.

s. A réception des plaidoiries écrites, le Tribunal a gardé la cause à juger.

t. Par courrier du 1er décembre 2023, C______ a sollicité un délai pour se déterminer sur les conclusions nouvelles de son épouse.

D. Dans l'ordonnance entreprise, le Tribunal a retenu que dans la mesure où il avait ordonné l'établissement d'un rapport d'évaluation au SEASP, la procédure risquait de se prolonger encore quelques mois, si bien qu'une certaine urgence à statuer serait admise, notamment sur l'attribution de la jouissance exclusive du domicile conjugal afin de mettre fin au climat familial délétère et apaiser les tensions. Il paraissait plus raisonnable d'imposer à C______ de déménager qu'à son épouse. Vu l'état de santé de celle-ci et sa fragilité psychologique, il ne pouvait être attendu d'elle qu'elle entreprenne des démarches pour trouver à se reloger. C______ ne travaillait qu'à mi-temps, de sorte qu'il disposait du temps libre pour entreprendre des recherches d'appartement et trouver une solution de relogement, étant précisé que sa situation financière était également meilleure que celle de son épouse. Un délai au 2 janvier 2024, correspondant au délai qu'il avait lui-même indiqué dans ses conclusions subsidiaires, lui était accordé pour quitter le logement familial. Ce délai, certes court, était nécessaire pour protéger D______ au vu des fortes tensions au sein du couple. Le Tribunal n'a pas statué sur l'expulsion de l'époux du domicile conjugal et l'attribution des droits et obligations sur celui-ci à l'épouse. Enfin, le fait nouveau invoqué par A______ pour réclamer une contribution d'entretien en sa faveur, à savoir sa tentative de suicide, ne justifiait pas de revenir sur l'accord des parties intervenu en audience.

 

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions sur mesures provisionnelles dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. b et al. 2 CPC).

En l'espèce, la cause porte notamment sur l'entretien entre époux et l'attribution de la jouissance exclusive du domicile conjugal, problématique que le Tribunal fédéral considère être de nature pécuniaire (arrêts 5A_808/2016 du 21 mars 2017 et 5A_829/2016 du 15 février 2017). La valeur litigieuse, calculée conformément à l'art. 92 CPC, est supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 L'ordonnance querellée ayant été notifiée aux parties, dans sa version motivée, le 21 décembre 2023, les appels sont recevables pour avoir été interjetés auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 CPC) et dans le délai utile de 10 jours applicable en procédure sommaire (art. 142 al. 1, 248 let. d et 314 al. 1 CPC). Les mémoires réponses sont également recevables (art. 312 et 314 CPC).

1.3 Les mesures provisionnelles étant soumises à la procédure sommaire au sens propre (art. 248 let. d CPC), la cognition de la Cour est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb, in JT 2002 I 352; arrêt du Tribunal fédéral 5A_12/2013 du 8 mars 2013 consid. 2.2).

1.4 La fixation de la contribution d'entretien du conjoint dans le cadre de mesures protectrices de l'union conjugale est soumise à la maxime de disposition (art. 58 CPC; ATF 129 III 417 consid. 2.1.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_792/2016 du 23 janvier 2017 consid. 4.1; 5A_421/2015 du 21 janvier 2016 consid. 6.2.3). L'attribution du domicile conjugal est, quant à elle, soumise à la maxime d'office lorsqu'il y a un enfant mineur comme en l'espèce (art. 58 et 296 al. 3 CPC).

1.5 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

Dans la mesure des conclusions prises en appel (art. 315 al. 1 CPC), la Cour établit les faits d'office (maxime inquisitoire, art. 272 et 296 al. 1 CPC). La maxime inquisitoire ne dispense toutefois pas les parties de collaborer activement à la procédure et d'étayer leurs propres thèses. Il leur incombe de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuve disponibles (ATF 130 III 102 consid. 2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_855/2017 du 11 avril 2018 consid. 4.3.2).

1.6 Par souci de clarté et pour respecter l'ordre initial des parties, A______ sera désignée ci-après comme l'appelante et C______ comme l'intimé.

2. L'appelante a produit des pièces nouvelles en deuxième instance.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

Dans les causes concernant les enfants mineurs, eu égard aux maximes d'office et inquisitoire illimitée régissant la procédure (art. 296 CPC), la Cour de céans admet tous les novas (cf. ACJC/345/2016 consid. 3.1; ACJC/361/2013 consid. 1.3).

2.2 En l'espèce, les pièces produites en appel sont recevables, dès lors qu'elles concernent l'attribution du logement conjugal, dans lequel vit un enfant mineur.

3. L'intimé a formulé des conclusions nouvelles en appel. L'appelante a modifié ses conclusions.

3.1 Selon l'art. 317 al. 2 CPC, la demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 CPC sont remplies et que la modification repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux.

Le juge d'appel statue d'office sur la recevabilité des conclusions modifiées (art. 60 CPC).

La nouveauté d'une conclusion se rapporte à l'objet du litige, qui est déterminé par les conclusions prises et le complexe de faits sur lequel elles reposent, dans la mesure où celui-ci, c'est-à-dire le fondement en faits sur lequel reposent les conclusions, doit être pris en considération pour individualiser les conclusions (ATF 143 III 254 consid. 3.1; arrêts du Tribunal fédéral 4A_95/2020 du 17 avril 2020 consid. 2; 4A_15/2017 du 8 juin 2017 consid. 3.3.3).

Une simple précision des conclusions doit être distinguée d'une modification de la demande. Il y a modification lorsque le demandeur introduit de nouveaux allégués au procès et que, de ce fait, la demande n'est plus identique à celle initialement déposée. La demande reste identique lorsque les conclusions, les faits et les "tenants et aboutissants juridiques" qui fondent la prétention invoquée sont identiques (ATF 136 III 341 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_621/2012 du 20 mars 2013 consid. 4.3.2).

La restriction des conclusions ne constitue pas une conclusion nouvelle (arrêt du Tribunal fédéral 5A_184/2013 du 26 avril 2013 consid. 3.2).

3.2 En l'espèce, l'intimé conclut en appel pour la première fois au rejet des mesures provisionnelles sollicitées par l'appelante et retire ses conclusions plus subsidiaires tendant à ce que le domicile conjugal soit attribué à l'appelante et à ce qu'un délai lui soit octroyé pour quitter ledit domicile.

Ces conclusions s'inscrivent dans le même complexe de faits. Elles ne constituent en réalité, pour la première partie, qu'une reformulation et, pour la seconde partie, une réduction. En effet, s'agissant de l'entretien entre époux, les parties s'étaient mise d'accord en première instance sur le fait qu'aucune contribution d'entretien entre époux ne devait être octroyée. L'appelante est revenue sur cet accord dans ses plaidoiries finales et a sollicité une contribution d'entretien en sa faveur. L'intimé a donc pris, en appel, la conclusion tendant au rejet des mesures provisionnelles sollicitées par l'appelante, ce qui correspond à ce qu'aucune contribution d'entretien ne soit fixée entre époux. Il s'agit ainsi d'une reformulation de la même conclusion prise devant le premier juge. Concernant le logement conjugal, le retrait d'une conclusion subsidiaire constitue une réduction des conclusions, laquelle n'est pas considérée comme une conclusion nouvelle.

S'agissant de l'appelante, bien qu'elle se plaigne de déni de justice dans son appel – le Tribunal n'ayant pas traité sa demande de mesures provisionnelles fondées sur l'art. 28b CC (i.e. expulsion de l'intimé du logement conjugal et attribution à l'appelante des droits et obligations sur ledit logement) – elle n'a pas repris formellement ses conclusions à ce propos en appel. Il s'agit ainsi d'une réduction des conclusions de l'appelante, laquelle est recevable.

Partant, les conclusions prises par les parties en appel sont recevables.

4. Les parties reprochent au Tribunal d'avoir procédé à une constatation inexacte des faits sur plusieurs points. L'état de fait présenté ci-dessus a donc été rectifié et complété dans la mesure nécessaire, sur la base des actes et pièces de la procédure.

5. L'intimé reproche au Tribunal d'avoir prononcé des mesures provisionnelles tendant à l'attribution de la jouissance exclusive du domicile conjugal, aucune urgence à statuer et aucune atteinte n'étant rendue vraisemblable. Il invoque également une violation de son droit d'être entendu puisqu'il n'avait pas eu l'occasion de se déterminer sur les faits nouveaux apportés par l'appelante à l'appui de ses plaidoiries finales du 27 novembre 2023.

5.1 Des mesures provisionnelles peuvent valablement être prononcées dans le cadre d'une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale, notamment lorsque cette procédure risque de se prolonger (ACJC/1415/2022 du 21 octobre 2022 consid. 1.3; ACJC/474/2016 du 8 avril 2016 consid. 2.1; ACJC/1237/2015 du 16 octobre 2015 consid. 3.3.1; ACJC/395/2015 du 27 mars 2015 consid. 3.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_870/2013 du 28 octobre 2014 consid. 5). De telles mesures ne peuvent toutefois être ordonnées que pour autant que les conditions posées par l'art. 261 CPC soient réunies (ACJC/154/2014 du 7 février 2014 consid. 4).

5.1.1 Selon l'art. 261 al. 1 CPC, le tribunal ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable, d'une part, qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être (let. a) et, d'autre part, que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (let. b).

Dans le contexte particulier de mesures provisionnelles sollicitées dans le cadre d'une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale, l'existence d'un préjudice difficilement réparable doit être appréciée au regard des conséquences concrètes qu'aurait pour la partie requérante l'absence de telles mesures. Un tel préjudice doit ainsi notamment être admis s'il est rendu vraisemblable que, à défaut de mesures provisionnelles, la partie requérante serait contrainte de modifier de manière importante son organisation en prenant des mesures sur lesquelles il ne lui sera que difficilement possible de revenir par la suite : tel pourra par exemple être le cas si, faute de décision judiciaire faisant obligation à son conjoint de contribuer à son entretien, un époux se voit contraint de quitter le logement qu'il occupait jusqu'alors, de se séparer du moyen de transport qu'il utilisait régulièrement ou encore de retirer un enfant de l'école privée qu'il fréquentait. En revanche, le fait de devoir renoncer pendant la durée de la procédure à certaines dépenses (voyages de loisirs, achat d'un nouveau véhicule plus luxueux, etc.) n'influant pas durablement sur les conditions d'existence de l'époux requérant ne saurait être considéré comme constitutif d'un préjudice difficilement réparable (ACJC/178/2023 du 24 janvier 2023 consid. 4.1.2; ACJC/1684/2019 du 12 novembre 2019 consid. 4.1; ACJC/1387/2019 du 24 septembre 2019 consid. 3.2; ACJC/824/2016 du 10 juin 2016 consid. 3.1.1).

5.1.2 Si les époux ne parviennent pas à s'entendre au sujet de la jouissance de l'habitation conjugale, l'art. 176 al. 1 ch. 2 CC prévoit que le juge attribue provisoirement le logement conjugal à l'une des parties en faisant usage de son pouvoir d'appréciation. Il doit procéder à une pesée des intérêts en présence, de façon à prononcer la mesure la plus adéquate au vu des circonstances concrètes (arrêts du Tribunal fédéral 5A_829/2016 du 15 février 2017 consid. 3.1; 5A_298/2014 du 24 juillet 2014 consid. 3.3.2 et les références).

En premier lieu, le juge doit examiner à quel époux le domicile conjugal est le plus utile ("grösserer Nutzen"). Ce critère conduit à attribuer le logement à celui des époux qui en tirera objectivement le plus grand bénéfice, au vu de ses besoins concrets. A cet égard, entrent notamment en considération l'intérêt de l'enfant, confié au parent qui réclame l'attribution du logement, à pouvoir demeurer dans l'environnement qui lui est familier, l'intérêt professionnel d'un époux, qui, par exemple, exerce sa profession dans l'immeuble, ou encore l'intérêt d'un époux à pouvoir rester dans l'immeuble qui a été aménagé spécialement en fonction de son état de santé. L'application de ce critère présuppose en principe que les deux époux occupent encore le logement dont l'usage doit être attribué. Le fait qu'un des époux ait par exemple quitté le logement conjugal non pas pour s'installer ailleurs mais pour échapper provisoirement à un climat particulièrement tendu au sein du foyer ou encore sur ordre du juge statuant de manière superprovisionnelle ne saurait toutefois entraîner une attribution systématique de la jouissance du logement à celui des époux qui l'occupe encore (arrêt du Tribunal fédéral 5A_829/2016 du 15 février 2017 consid. 3.1; 5A_291/2013 du 27 janvier 2014 consid. 5.4).

Si ce premier critère de l'utilité ne donne pas de résultat clair, le juge doit, en second lieu, examiner à quel époux on peut le plus raisonnablement imposer de déménager, compte tenu de toutes les circonstances. A cet égard, entrent notamment en considération l'état de santé ou l'âge avancé de l'un des époux qui, bien que l'immeuble n'ait pas été aménagé en fonction de ses besoins, supportera plus difficilement un changement de domicile, ou encore le lien étroit qu'entretient l'un d'eux avec le domicile conjugal, par exemple un lien de nature affective. Des motifs d'ordre économique ne sont en principe pas pertinents, à moins que les ressources financières des époux ne leur permettent pas de conserver ce logement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_829/2016 du 15 février 2017 consid. 3.1).

Si ce second critère ne donne pas non plus de résultat clair, le juge doit alors tenir compte du statut juridique de l'immeuble et l'attribuer à celui des époux qui en est le propriétaire ou qui bénéficie d'autres droits d'usage sur celui-ci (ATF 120 II 1 consid. 2c; arrêts du Tribunal fédéral 5A_298/2014 du 24 juillet 2014 consid. 3.3.2; 5A_291/2013 du 27 janvier 2014 consid. 5.3.3; 5A_710/2009 du 22 février 2010 consid. 3.1, non publié aux ATF 136 III 257).

5.1.3 Garanti aux art. 29 al. 2 Cst et 53 CPC, le droit d'être entendu comprend en particulier le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur sujet (ATF 135 II 286 consid. 5.1; 135 I 187 consid. 2.20; 129 II 497 consid. 2.2).

Le droit d'être entendu est une garantie de nature formelle, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 144 IV 302 consid. 3.1 et les références). Cependant, ce droit n'est pas une fin en soi. Ainsi, lorsqu'on ne voit pas quelle influence sa violation a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1). Partant l'admission de la violation du droit d'être entendu suppose que, dans sa motivation, le recourant expose quels arguments il aurait fait valoir dans la procédure cantonale et en quoi ceux-ci auraient été pertinents. A défaut, le renvoi de la cause au juge précédent, en raison de la seule violation du droit d'être entendu, risquerait de conduire à une vaine formalité et à prolonger inutilement la procédure. Dans cette perspective, la violation du droit d'être entendu peut être réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours jouissant d'un pouvoir d'examen complet en fait et en droit (ATF 145 I 167 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_679/2022 du 25 avril 2023 consid. 4.1 non publié in ATF 148 III 109).

5.2 En l'espèce, un rapport d'évaluation du SEASP a été sollicité par le Tribunal, ce qui reporte de quelques mois le prononcé des mesures protectrices de l'union conjugale. Le prononcé de mesures provisionnelles doit être dicté par une urgence particulière à statuer, ce qui semble être le cas en l'espèce. En effet, il ressort de la procédure que de vives tensions existent entre les parties, celles-ci ayant conduit l'appelante non seulement à demander un suivi psychiatrique et à déposer une plainte pénale à l'encontre de son époux mais aussi, plus récemment, à faire une tentative de suicide. Il est ainsi rendu vraisemblable qu'en l'absence de prononcé de mesures provisionnelles tendant à l'attribution du domicile conjugal à l'un des époux, l'état de santé général de l'appelante risque de se dégrader encore davantage, ce qui constitue un préjudice difficilement réparable.

Force est ainsi de constater qu'il est urgent, pour le bien de la famille, que les époux vivent séparément et partant, d'attribuer à l'une d'elles la jouissance exclusive du domicile conjugal. Il ne saurait ainsi être fait droit à la conclusion principale de l'intimé tendant à ce que la Cour dise que les époux peuvent continuer à vivre tous les deux au domicile conjugal, même dans des chambres séparées.

5.2.1 L'intimé, bien qu'il prenne des conclusions plus subsidiaires tendant à ce que la jouissance exclusive du domicile conjugal lui soit attribuée, ne les motive pas dans la partie en droit de son appel, de sorte que la recevabilité de ces conclusions est douteuse. Quoi qu'il en soit, elles ne sauraient être suivies.

Le premier critère retenu par la jurisprudence ne permet pas de trancher la question en faveur de l'une des parties. En effet, les parties se sont accordées sur l'exercice d'une garde alternée sur l'enfant, l'appartement ne semble pas avoir été spécialement aménagé pour l'appelante et aucune des parties ne dispose d'un intérêt professionnel à rester dans le domicile conjugal.

En revanche, le deuxième critère prévu par la jurisprudence permet de trancher la question. En effet, compte tenu de l'état de santé physique et psychique de l'appelante, lui imposer la recherche d'un nouveau logement et un déménagement apparaît déraisonnable. A l'instar de ce qu'a retenu le Tribunal, outre l'absence de problème de santé s'agissant de l'intimé, celui-ci travaille à mi-temps, de sorte qu'il dispose du temps nécessaire pour rechercher un nouveau logement et préparer son déménagement. En outre, la conclusion d'un nouveau bail à son nom lui sera plus aisée puisqu'il est actif professionnellement.

Par conséquent, c'est à juste titre que le premier juge a attribué la jouissance exclusive du domicile conjugal à l'appelante.

5.2.2 Concernant le délai imparti à l'intimé par le Tribunal pour quitter le domicile conjugal, l'intimé ne le critique pas non plus dans son appel. Cela étant, ce délai est échu au jour du prononcé du présent arrêt, de sorte qu'il y a lieu de le refixer. Afin de tenir compte de l'urgence précitée (cf. consid. 5.2 supra) mais aussi des difficultés à trouver un logement à Genève, ce d'autant plus que celui-ci devra se situer non loin du domicile conjugal afin de permettre l'exercice effectif de la garde alternée convenue entre les parties, il se justifie de fixer à l'intimé un ultime délai au 30 septembre 2024 pour quitter le domicile conjugal.

5.2.3 La remise des clés à l'appelante dans le même délai sera confirmée. Sur ce point, contrairement à ce que soutient l'intimé, dite remise se justifie dès lors que sa présence au domicile conjugal, sans l'accord de l'appelante, ne sera plus autorisée après la date précitée.

5.2.4 Enfin, le Tribunal n'a, certes, pas donné l'occasion à l'intimé de se déterminer sur les plaidoiries finales écrites déposées et les faits nouveaux introduits par l'appelante le 27 novembre 2023 puisqu'il a rendu l'ordonnance attaquée le 4 décembre 2023, et ce nonobstant sa demande expresse formulée le 1er décembre 2023 de pouvoir bénéficier d'un délai pour ce faire. Cette manière de procéder est constitutive d'une violation du droit d'être entendu de l'intimé.

Cela étant, l'intimé a pu se déterminer sur les faits nouveaux allégués par l'appelante dans le cadre de son appel, puisque la Cour jouit d'un pouvoir de cognition complet. En outre, dans la mesure où l'ordonnance attaquée est confirmée dans le présent arrêt, à l'exception du délai précité qui est de facto prolongé, les arguments de l'intimé n'ont pas été déterminants pour l'issue du litige. La violation du droit d'être entendu commise par le premier juge n'a ainsi pas eu d'influence sur la procédure, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'annuler l'ordonnance attaquée pour ce seul motif.

5.3 En conclusion, le chiffre 2 du dispositif de l'ordonnance attaquée sera confirmé et le chiffre 3 dudit dispositif sera réformé dans le sens qui précède.

6. L'appelante reproche au Tribunal de ne pas avoir relevé que son consentement à la renonciation à une contribution d'entretien en sa faveur n'était pas libre et éclairé. Elle soutient que, ayant appris au début de l'audience que sa requête de mesures superprovisionnelles avait été rejetée, elle n'était pas en mesure de s'engager valablement en raison de la crainte de devoir continuer à vivre avec son époux sous le même toit. Elle fait également grief au premier juge de ne pas avoir examiné si les conditions d'une modification de la requête étaient réalisées, rejetant simplement ses nouvelles conclusions prises dans ses plaidoiries finales.

6.1 L'art. 273 CPC, qui énonce les règles spécifiques au déroulement de la procédure sommaire en matière de mesures protectrices de l'union conjugale, prévoit à son al. 3 que le tribunal tente de trouver un accord entre les parties.

6.1.1 L'accord des époux, au sens de cette disposition, prend le plus souvent la forme d'une convention organisant de manière consensuelle un régime de séparation provisoire au sens de l'art. 176 CC. De tels accords sont notamment visés par l'art. 273 al. 3 CPC, le juge pouvant jouer en la matière un rôle conciliateur important (Tappy, Code de procédure civile, Commentaire romand, 2ème éd., 2019, n. 45 ad art. 273 CPC).

Ni le Code civil, ni le CPC ne déterminent expressément les conditions d'homologation d'une convention de mesures protectrices, qui prêtaient à discussion déjà avant le 31 décembre 2010. Selon la doctrine, il ne s'agit pas simplement d'une transaction consignée au procès-verbal et acquérant dès lors force de chose jugée selon l'art. 241 al. 1 et 2 CPC. Comme pour une convention de mesures provisionnelles, les règles matérielles (contrôle limité s'agissant de questions relevant de la maxime de disposition, plus étendu s'agissant du sort des enfants) et formelles (ratification sous forme de l'intégration de la convention dans le dispositif d'une décision) de l'art. 279 CPC relatives aux conventions des parties sur les effets du divorce s'appliquent par analogie (Tappy, op. cit., n. 48 ad art. 273 CPC).

6.1.2 L'article 279 CPC prévoit que le tribunal ratifie la convention sur les effets du divorce après s'être assuré que les époux l'ont conclue après mûre réflexion et de leur plein gré, qu'elle est claire et complète et qu'elle n'est pas manifestement inéquitable (al. 1). La convention n'est valable qu'une fois ratifiée par le tribunal. Elle doit figurer dans le dispositif de la décision (al. 2).

La question d'un consentement qui ne serait pas mûrement réfléchi peut se poser notamment lorsqu'un accord sur les effets du divorce se conclut immédiatement à l'issue d'une séance marathon, fût-ce en présence du juge, les parties pouvant s'être senties mises sous pression (Tappy, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd., 2019, n. 12b ad art. 279 CO). Selon le Tribunal fédéral, une convention signée au terme d'une longue négociation, à la fin d'une audience éprouvante de plus de quatre heures, reste cependant conclue après mûre réflexion et de plein gré, d'autant qu'en l'espèce le conjoint qui le contestait avait bénéficié des conseils d'un avocat et de deux suspensions lui permettant de s'entretenir séparément avec lui (arrêt du Tribunal fédéral 5A_683/2014 du 18 mars 2015 consid. 6).

6.1.3 En cas de divorce prononcé sur requête commune, l'art. 289 CPC prévoit que la décision de divorce ne peut faire l'objet que d'un appel pour vice du consentement.

Cette disposition ne limite cependant les griefs admissibles en appel qu'au sujet du prononcé du divorce lui-même. Les effets du divorce en revanche, même résultant d'une convention des parties ou de conclusions communes ratifiées, peuvent être contestés en deuxième instance selon les règles ordinaires (Tappy, op. cit., n. 7 ad art. 289 CPC).

S'il est possible d'appeler ou de recourir selon les règles ordinaires sur tous les effets du divorce, réglés d'un commun accord ou non, la portée de cette possibilité varie selon le type d'effets dont il s'agit et selon qu'on se trouve dans un divorce sur requête commune avec accord complet ou non. Ainsi, en cas de procédure sur requête commune avec accord partiel, des voies de droit avec pouvoirs de cognition ordinaires doivent permettre de contester la décision sur les points sur lesquels il n'y a eu aucune entente des parties (Tappy, op. cit., n. 15 ad art. 289 CPC). S'agissant des effets du divorce réglés d'un commun accord au contraire, un appel ou un recours sont possibles, mais seulement pour faire vérifier que les conditions pour ratifier la convention des parties et prononcer le divorce étaient réunies. Il ne s'agit pas pour l'autorité d'appel ou de recours de réexaminer et le cas échéant modifier les effets en question selon sa propre appréciation. La juridiction de deuxième instance peut en revanche substituer à celle du premier juge sa propre appréciation sur l'admissibilité de l'accord des parties en refaisant les contrôles de la convention requis par l'art. 279 CPC, d'intensité variable selon les questions. Ainsi, outre un vice de consentement, elle peut tenir compte d'une impossibilité ou d'une illégalité du partage des prestations de sortie, ou d'une iniquité manifeste de la convention sur la liquidation du régime matrimonial ou les contributions d'entretien entre époux (Tappy, op. cit., n. 16 ad art. 289 CPC).

Dans le calcul des contributions d'entretien, le minimum vital du droit des poursuites du débirentier doit toujours être préservé (ATF 147 III 265 consid. 7.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_450/2020 du 4 janvier 2021 consid. 5.3).

6.1.4 Le contrat n'oblige pas celle des parties qui, au moment de le conclure, était dans une erreur essentielle (art. 23 CO).

Selon l'art. 29 al. 1 CO, si l'une des parties a contracté sous l'empire d'une crainte fondée que lui aurait inspirée sans droit l'autre partie ou un tiers, elle n'est point obligée.

La crainte est réputée fondée lorsque la partie menacée devait croire, d'après les circonstances, qu'un danger grave et imminent la menaçait elle-même, ou l'un de ses proches, dans sa vie, sa personne, son honneur ou ses biens (art. 30 al. 1 CO).

Il appartient à la partie menacée de prouver aussi bien l'existence d'une situation de menace que son effet causal sur la conclusion du contrat (Schmidlin/Campi, Commentaire romand, Code des obligations I, 3ème éd., 2021, n. 23 ad art. 29/30 CO).

6.1.5 La demande ne peut être modifiée aux débats principaux que si la prétention nouvelle ou modifiée repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux (art. 230 al. 1 let. b CPC), qu'elle relève de la même procédure et, alternativement, qu'elle présente un lien de connexité avec la dernière prétention ou que la partie adverse consent à la modification de la demande (art. 227 al. 1 CPC).

Les faits et moyens de preuve nouveaux mentionnés à l'art. 230 al. 1 let. b CPC sont ceux qui peuvent être admis dans la procédure conformément à l'art. 229 CPC. Ils ne recouvrent pas seulement les nova au sens de l'art. 229 al. 1 CPC, soumis à condition. En effet, l'art. 230 al. 1 let. b CPC lie de manière générale l'admissibilité d'une modification de la demande avec des faits ou moyens de preuve nouveaux. Lorsque le juge établit les faits d'office, des faits et moyens de preuve nouveaux sont admis sans restriction jusqu'aux délibérations (art. 229 al. 3 CPC); une modification des conclusions pourra alors se fonder sur un tel fait ou un tel moyen de preuve. La maxime inquisitoire ne prive pas de sens la condition posée par l'art. 230 al. 1 let. b CPC, qui ne s'appliquerait pas dans ce cas-là. Quand bien même la modification de la demande n'a pas à reposer sur des nova au sens de l'art. 229 al. 1 CPC, l'exigence de la nouveauté demeure. C'est dire que le demandeur ne saurait introduire une nouvelle conclusion en se fondant sur les seuls faits allégués précédemment (arrêt du Tribunal fédéral 4A_395/2017 du 11 octobre 2018 consid. 4.4.2, note Bastons Bulletti in CPC Online (newsletter du 14.11.2018)).

6.2.1 En l'espèce, l'appelante ne peut raisonnablement soutenir que son consentement à la renonciation d'une contribution d'entretien entre époux était vicié.

En effet, d'une part, elle a elle-même conclu dans sa requête de mesures protectrice de l'union conjugale à l'absence de fixation de contribution d'entretien entre époux après avoir exposé la situation financière précaire de la famille. En outre, elle n'a pris aucune conclusion dans sa requête de mesures provisionnelles du 20 novembre 2023 s'agissant d'une contribution d'entretien entre époux. Lors de l'audience du 21 novembre 2023, l'appelante a, une nouvelle fois et alors qu'elle était assistée par son avocate, renoncé à une contribution d'entretien en sa faveur. Le seul fait de se voir refuser les mesures superprovisionnelles requises, même si cela impliquait la continuation temporaire de la vie commune dans un climat tendu, ne suffit pas à rendre vraisemblable que l'appelante se sentait menacée et/ou dans l'erreur lorsqu'elle a confirmé son accord sur la renonciation à une contribution d'entretien entre époux. L'accord des parties intervenu en audience n'apparaît ainsi pas vicié.

C'est ainsi à juste titre que le Tribunal a donné acte aux parties de ce qu'elles ont renoncé à toute contribution à leur entretien réciproque.

6.2.2 Quoi qu'il en soit, la Cour ne relève aucune iniquité manifeste dans le fait de ne fixer aucune contribution d'entretien entre époux dans le cas d'espèce et à ce stade. En effet, l'intimé, après une période de chômage, a récemment trouvé un emploi à mi-temps et perçoit un revenu mensuel net de 2'383 fr. 33. Aucun revenu hypothétique supplémentaire ne saurait être imputé à l'intimé, au stade des mesures provisionnelles sur mesures protectrices de l'union conjugale, ce d'autant plus compte tenu de la garde alternée convenue sur l'enfant D______ et de l'âge de celle-ci.

Les charges incompressibles de l'intimé totalisant au minimum 2'922 fr. 50, comprenant 1'350 fr. de montant de base OP, 502 fr. de prime d'assurance maladie de base, 70 fr. de frais de transports publics et un loyer hypothétique de 1'000 fr. par mois – le domicile conjugal étant attribué à l'appelante – sa situation présentera un déficit de plus de 500 fr. par mois dès qu'il quittera le domicile conjugal. Le minimum vital du débiteur devant être préservé, aucune contribution d'entretien entre époux ne peut être fixée en l'état. La solution ne serait pas différente si l'intimé touchait un subside pour sa prime d'assurance maladie, celui-ci étant, selon toute vraisemblance, inférieur à 500 fr.

6.2.3 Enfin, et à titre superfétatoire, l'appelante était parfaitement au courant de la situation financière de la famille et a renoncé à réclamer de son époux une contribution à son entretien dans sa requête de mesures protectrices de l'union conjugale. Si elle entendait modifier sa conclusion dans ses plaidoiries finales sur mesures provisionnelles, elle devait alléguer des faits nouveaux. Or, les seuls faits nouveaux qu'elle a allégués consistaient en sa propre tentative de suicide et son hospitalisation temporaire, faits qui n'ont pas d'incidence sur la situation financière précitée de l'intimé, comme l'a retenu à juste titre le Tribunal. Ainsi, les conditions pour la modification de la conclusion prise par l'appelante tendant à ce qu'aucune contribution d'entretien entre époux ne soit fixée ne sont pas réalisées.

6.3 A la lumière des éléments qui précèdent, le chiffre 14 du dispositif de l'ordonnance attaquée sera confirmé.

7. L'appelante sollicite que les frais judiciaires et dépens de la procédure de première instance et d'appel soient mis à la charge de l'intimé.

7.1 Si l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de la première instance (art. 318 al. 3 CPC).

Les frais comprennent les frais judiciaires et les dépens (art. 95 al. 1 CPC). Le tribunal statue sur les frais en règle générale dans la décision finale (art. 104 al. 1 CPC). La décision sur les frais des mesures provisionnelles peut être renvoyée à la décision finale (art. 104 al. 3 CPC).

7.2 En l'espèce, le Tribunal a renvoyé sa décision sur les frais en lien avec l'ordonnance attaquée à la décision au fond. Partant, il n'y a pas lieu de revoir cette décision, qui est conforme à la loi.

7.3 S'agissant des frais judiciaires des appels interjetés par les parties, incluant l'émolument de décision sur effet suspensif, il sera fait masse de ceux-ci, et ils seront fixés à 1'800 fr. (art. 31 et 37 RTFMC). Lesdits frais seront mis à la charge des parties par moitié chacune compte tenu de la nature et de l'issue du litige (art. 95, 104 al. 1, 105, 106 et 107 al. 1 let. c CPC). Les parties plaidant au bénéfice de l'assistance judiciaire, lesdits frais seront provisoirement laissés à la charge de l'Etat de Genève, qui pourra en requérir le remboursement ultérieurement (art. 122 al. 1 let. b, 123 al. 1 CPC et 19 RAJ).

Nonobstant la conclusion de l'appelante tendant à ce que des dépens d'appel lui soient alloués, il se justifie de dire que chaque partie supportera ses propres dépens d'appel compte tenu de la nature familiale du litige et de la situation financière des parties (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 28 décembre 2023 par A______ contre l'ordonnance OTPI/760/2023 rendu le 4 décembre 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/21388/2023.

Déclare recevable l'appel interjeté le 22 décembre 2023 par C______ contre l'ordonnance précitée.

Au fond :

Annule le chiffre 3 du dispositif de l'ordonnance précitée.

Cela fait, et statuant à nouveau sur ce point :

Fixe à C______ un délai au 30 septembre 2024 pour quitter le domicile conjugal sis rue 1______ no. ______, [code postal] Genève, et en remettre les clés à A______.

Autorise en tant que de besoin A______ à faire appel à la force publique dès cette date.

Confirme l'ordonnance précitée pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais d'appel :

Arrête les frais judiciaires des deux appels à 1'800 fr. et les met à la charge de A______ et C______ par moitié entre eux.

Laisse provisoirement lesdits frais à la charge de l'Etat de Genève.

Dit que chaque partie supportera ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Pauline ERARD, Madame Paola CAMPOMAGNANI, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.