Décisions | Sommaires
ACJC/294/2024 du 29.02.2024 sur ACJC/196/2023 ( SML ) , CONFIRME
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/9208/2022 ACJC/294/2024 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU JEUDI 29 FÉVRIER 2024 |
Entre
Monsieur A______, domicilié ______ [GE], recourant contre un jugement rendu par la 8ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 12 octobre 2022, représenté par Me Pascal DEVAUD, avocat, Eardley Avocats, rue De-Candolle 16, 1205 Genève,
et
B______, domiciliée ______ [VD], intimée, représentée par Me Jean-Samuel LEUBA, avocat, Haldy, Conod, Marquis, Leuba, Galerie St.-François A, 1002 Lausanne.
Cause renvoyée par arrêt du Tribunal fédéral du 28 septembre 2023
A. Par jugement JTPI/12019/2022 du 12 octobre 2022, expédié pour notification aux parties le 17 octobre 2022, le Tribunal de première instance a prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer poursuite n° 1______ (ch. 1), arrêté les frais judiciaires à 500 fr., compensés avec l'avance opérée, que A______ a été condamné à rembourser à [la banque] B______, en sus de 2'414 fr. à titre de dépens (ch. 2 et 3) et a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).
B. Par acte du 28 octobre 2022 à la Cour de justice, A______ a formé recours contre cette décision. Il a conclu à l'annulation de celle-ci, cela fait au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision, subsidiairement à la suspension de la procédure jusqu'à droit connu dans la P/2______/2021, subsidiairement au rejet de la requête de mainlevée, avec suite de frais et dépens.
Par décision du 7 novembre 2022, la Cour a rejeté la requête de suspension de l'effet exécutoire attaché à la décision attaquée.
B______ a conclu au rejet du recours, avec suite de frais et dépens.
A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions.
Par avis du 5 décembre 2022, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.
A______ a encore fait parvenir à la Cour une écriture en date du 9 décembre 2022, dans le but "d'attirer l'attention" sur une jurisprudence du Tribunal fédéral, à savoir l'ATF 132 III 140.
Par arrêt du 31 janvier 2023, la Cour a rejeté le recours de A______. Elle a retenu d'une part que le Tribunal avait commis une violation du droit d'être entendu du précité en ne lui transmettant pas les déterminations de B______, mais que celle-ci pouvait être réparée en procédure de recours, et d'autre part que la libération invoquée au sens de l'art. 82 al. 2 LP pour faire échec au prononcé de la mainlevée provisoire requise n'avait pas été rendu vraisemblable comme l'avait retenu à raison le premier juge.
C. Par arrêt 5A_210/2023 du 28 septembre 2023, le Tribunal fédéral a annulé l'arrêt précité et a renvoyé la cause à la Cour pour nouvelle décision. Il a retenu que A______ n'ayant pas reçu les déterminations de B______ déposées le 3 octobre 2022 au Tribunal, la violation du droit d'être entendu du précité n'avait pas été réparée en seconde instance, quand bien même ces déterminations n'auraient porté que sur des questions de droit. Il revenait ainsi à la Cour d'accorder à A______ un délai pour prendre position à leur sujet; il a ajouté que si ces déterminations ne portaient pas uniquement sur des questions de droit, la décision de première instance devrait être annulée et la cause renvoyée au Tribunal pour nouveau jugement.
Le 16 novembre 2023, A______ a réitéré sa requête de suspension de l'effet exécutoire attaché au jugement du 12 octobre 2022, ce qui a été rejeté par arrêt de la Cour du 6 décembre 2023.
Après avoir reçu de la Cour les déterminations de B______ adressées au Tribunal le 3 octobre 2022, A______ a soutenu que la cause devait être renvoyée en première instance, lesdites déterminations abordant à son sens des questions de faits. Il a cité à cet égard le passage suivant: "On ne comprend absolument pas en quoi les agissements décrits et attribués à M. D______ – qui sont postérieurs à la souscription du cautionnement du requérant – puissent être à l'origine d'une tromperie et, partant, entraîner la nullité du cautionnement du requérant", et relevé que B______ semblait n'avoir procédé qu'à une "lecture partielle des faits" qu'il avait allégués dans sa requête de suspension. Il a, par ailleurs, formulé des allégués nouveaux relatifs à la procédure pénale P/2______/2023, laquelle avait fait l'objet, le 3 octobre 2023, d'une ordonnance de refus de réquisitions de preuves et de non entrée en matière du Ministère public, décision contre laquelle il avait recouru à la Chambre des recours de la Cour de justice, devant laquelle la cause était pendante. Il a soutenu que ces allégués nouveaux portant sur des faits, la cause devait, pour ce motif également, être retournée au Tribunal.
B______ a soutenu que ses déterminations du 3 octobre 2022 ne portaient que sur une question de droit, à savoir celle de la suspension de la procédure. La cause n'avait donc pas à être renvoyée au Tribunal.
A______ a persisté dans ses conclusions, relevant notamment que la contestation des allégués de fait opérée par B______ était pertinente tant pour la question de la mainlevée que pour celle de la suspension de la cause.
B______ a persisté dans ses propres conclusions.
A______ s'est encore déterminé.
Par avis du 16 février 2024, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.
D. Il résulte de la procédure de première instance les faits pertinents suivants:
a. C______ SA a été une société anonyme inscrite au Registre du commerce genevois, entrée en liquidation à la suite d'un jugement de faillite rendu par le Tribunal le ______ 2021, et radiée le ______ 2022.
A______ en a été le directeur, avec signature collective à deux depuis 2016, puis l'administrateur unique avec signature individuelle depuis juin 2017 (succédant à D______, administrateur dès 2007, date à laquelle ce dernier était devenu directeur jusqu'en 2020, ayant déjà occupé la fonction entre 2013 et 2016).
b. Entre 2005 et 2014, B______ a accordé à C______ SA des limites de crédit, notamment garanties par un cautionnement solidaire de D______.
Le 23 juin 2016, B______ a accordé à C______ SA une nouvelle limite de crédit, dont le solde était désormais de 236'000 fr., moyennant le cautionnement solidaire (à concurrence de 150'000 fr.) de D______ déjà mentionné, ainsi qu'un cautionnement solidaire de A______, à concurrence de 100'000 fr. L'acte de crédit était contresigné par les deux précités en leur qualité de caution solidaire.
A______, par acte authentique du 1er juillet 2016, s'est constitué caution solidaire (portant sur la dette principale, les intérêts courants, les intérêts échus sur trois ans, et les commissions) envers la banque à concurrence du montant maximal de 100'000 fr.
c. Par lettre du 20 août 2021, B______ a requis de A______ qu'il honore son engagement de caution solidaire, dans la mesure où le montant qui lui était dû par C______ SA au jour de la faillite de celle-ci était de 200'570 fr., 76 plus 11'305 fr. 05 avec intérêts et commissions. Elle l'a mis en demeure de lui verser 100'000 fr. dans un délai d'un mois.
Après avoir requis et obtenu des délais pour se déterminer, A______ a, par courrier de son avocat du 25 novembre 2021, répondu qu'il considérait ne pas devoir le montant réclamé dès lors qu'il avait "été trompé", ajoutant ce qui suit: "une procédure pénale genevoise a été ouverte concernant en particulier l'acte de cautionnement du 1er juillet 2016" et "votre établissement veillera à ne pas entamer de procédure concernant sa demande en paiement contre [lui], un tel paiement étant susceptible de constituer un acte de blanchiment d'argent".
Il n'a pas communiqué davantage d'informations à B______, malgré une demande de celle-ci en ce sens.
d. Le 2 décembre 2021, B______ a produit dans la faillite de C______ SA EN LIQUIDATION une créance de 210'444 fr. 91. Cette production figure dans la liste des productions établie par l'Office des faillites et signée par C______ SA EN LIQUIDATION.
e. Le 20 décembre 2021, à la requête de B______, l'Office cantonal des poursuites a fait notifier à A______ un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur 100'000 fr. avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 21 septembre 2021, le titre de la créance étant libellé ainsi: "Montant dû en vertu d'un cautionnement solidaire de Fr. 100'000 souscrit le 01.07.2016 devant Me E______, notaire. Selon lettre de mise en demeure du 20.08.2021. Compte Entreprise n° 3______ au nom de C______ SA en liquidation".
Le poursuivi a formé opposition.
f. Par acte du 12 mai 2022, B______ a saisi le Tribunal d'une requête de mainlevée provisoire de l'opposition, avec suite de frais et dépens.
Elle a produit notamment le contrat en compte courant conclu avec C______ SA, et les conditions générales, outre l'acte de cautionnement, et la liste de productions dans la faillite de la société.
Le Tribunal a convoqué les parties à une audience, fixée le 23 septembre 2022.
Le 15 septembre 2022, A______ a déposé au Tribunal une requête de suspension de la procédure.
Il a conclu préalablement à l'annulation de l'audience fixée, un délai étant octroyé à B______ pour se déterminer, et principalement à la suspension de la cause jusqu'à droit connu dans la procédure P/2______/2021 pendante au Ministère public, subsidiairement à la fixation d'une nouvelle audience sur le fond de la procédure de mainlevée pour lui permettre de s'exprimer "concernant le fond de la requête de mainlevée".
En lien avec sa conclusion en suspension de la procédure, il a allégué que le Ministère public, en charge de la procédure P/2______/2021, ne lui avait pas accordé de droit d'accès au dossier, mais avait confirmé que la procédure avait pour objet l'acte de cautionnement susvisé. Il a soutenu, en droit, que le complexe de faits de la procédure pénale concernait une "éventuelle fraude" dont il aurait été victime lors de la signature de l'acte de cautionnement en faveur de B______, et qu'il y aurait un risque de jugements contradictoires si la mainlevée provisoire était ordonnée sur la base d'un acte de cautionnement qui se révélerait frauduleux dans la procédure pénale, étant relevé que les autorités pénales seraient mieux à même d'établir les faits en cas de fraude.
Il a, en outre, formé des allégués relatifs à une société tierce (soit F______ SA - dont il avait été également administrateur tout comme D______ – qui avait bénéficié à sa création d'un apport en nature de 35 actions de C______ SA, comme cela résulte du Registre du commerce genevois), à une correspondance entre D______ et l'avocat de celui-ci, et à la situation comptable de C______ SA. Il a, sous forme d'allégué de faits, affirmé qu'il avait été persuadé de signer l'acte de cautionnement du 1er juillet 2016 par D______, lequel "savait probablement que C______ SA se dirigeait vers la faillite", alors que lui-même était au chômage et qu'il avait été convenu qu'il serait employé de C______ SA notamment s'il signait l'acte de cautionnement.
Il a déposé des pièces, dont deux courriers qu'il avait adressés au Ministère public les 15 et 17 juin 2022. Dans le premier de ceux-ci, il avait requis un accès à la procédure pénale P/2______/2021 ainsi qu'une "brève description écrite de la procédure", mentionnant notamment que la procédure concernait en particulier "l'acte de cautionnement solidaire du 1er juillet 2016 en faveur de B______"; le Ministère public a, le 17 juin 2022, apposé un "n'empêche refusé", motif pris de ce que le dossier se trouvait en mains de la police pour enquête. Dans le second courrier, A______ avait réitéré sa demande de description de la procédure; le Ministère public a, le 17 juin 2022, apposé derechef un "n'empêche refusé".
Il a également produit des courriels échangés entre un avocat et D______, en mai et juin 2017, destinés à démontrer que, selon lui, le précité avait requis et obtenu "un conseil juridique professionnel sous forme d'une marche à suivre juridique en vue d'éviter toute responsabilité et de bénéficier des indemnités de l'assurance-chômage", et l'avait induit en erreur quant à la situation financière de la société.
Lors de l'audience du Tribunal du 23 septembre 2022, B______ a persisté dans sa requête de mainlevée provisoire. A______ a persisté dans sa requête de suspension de la procédure. Sur quoi, le Tribunal a communiqué à B______ la requête de suspension et les pièces déposées. Il a ensuite acheminé les parties à aborder "le fond". A teneur du procès-verbal, A______ a versé ses "notes de plaidoirie" (lesquelles concluent principalement au rejet de la demande de mainlevée avec suite de frais et dépens), a plaidé le dol et relevé qu'il y avait une vraisemblance, de par l'existence de la procédure pénale, de nullité de l'acte de cautionnement. B______ a persisté dans ses conclusions.
Sur quoi, le Tribunal a imparti un délai à B______ pour se déterminer sur la requête de suspension, et annoncé garder la cause à juger dès réception des déterminations sur requête de suspension, "sous réserve d'une éventuelle suspension".
Par acte du 3 octobre 2022, B______ a conclu au rejet de ladite requête. Elle s'est déterminée sur les allégués de fait, et a fait valoir que rien ne conduisait à douter de la validité du cautionnement souscrit, en particulier aucun fait allégué ne permettait d'entrevoir de tromperie. Elle a rappelé que le principe de célérité devait l'emporter
Le dossier du Tribunal n'établit pas que ces déterminations aient été transmises à A______.
1. 1.1 En cas de renvoi de la cause par le Tribunal fédéral conformément à l'art. 107 al. 2 LTF, l'autorité inférieure doit fonder sa nouvelle décision sur les considérants en droit de l'arrêt de renvoi. Le juge auquel la cause est renvoyée voit ainsi sa cognition limitée par les motifs de l'arrêt de renvoi, en ce sens qu'il est lié par ce qui a été tranché définitivement par le Tribunal fédéral (ATF 133 III 201 consid. 4.2 et 131 III 91 consid. 5.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_94/2018 du 16 juillet 2018 consid 2.2).
1.2 En l'occurrence, le renvoi procède uniquement d'une violation du droit d'être entendu relevée par le Tribunal fédéral, en lien avec les déterminations déposées le 3 octobre 2022 au Tribunal par l'intimée.
A ce stade, il convient de rappeler que la présente procédure a été initiée par la requête de mainlevée provisoire formée par l'intimée. A réception de celle-ci, le Tribunal a convoqué une audience, ordonnant par là une procédure orale (art. 253 CPC). Avant la date de l'audience, le recourant a spontanément déposé une écriture, intitulée "requête en suspension" par laquelle il a préalablement conclu à l'annulation de l'audience, un délai étant octroyé à l'intimée pour répondre sur la question de la suspension de la procédure, et principalement conclu à la suspension de la procédure, subsidiairement à l'annulation de l'audience et à la convocation d'une nouvelle audience pour s'exprimer sur le fond.
Le Tribunal a maintenu l'audience convoquée, et lors de celle-ci accordé, à teneur du procès-verbal d'audience, un délai à l'intimée pour se déterminer sur la requête de suspension, puis acheminé les parties à s'exprimer oralement sur les conclusions en mainlevée provisoire (tout en acceptant, sans explication, la production de "notes de plaidoirie", en dépit du caractère oral de la procédure), ce que celles-ci ont fait.
Ainsi, à l'issue de l'audience du Tribunal, la cause était en état d'être jugée sur le fond, l'intimée ayant persisté dans ses conclusions, et le recourant ayant oralement plaidé qu'il rendait vraisemblable sa libération (au sens de l'art. 82 al. 2 LP) au motif d'un dol allégué en raison de faits de tromperie pour lesquels il avait déposé plainte pénale. Seule la question de la suspension demeurait réservée; celle-ci supposait que soit examinée la requête, écrite, formée en ce sens par le recourant ainsi que la réponse à déposer sur cette requête de suspension.
Dans ses déterminations du 3 octobre 2022, l'intimée a pris brièvement position sur les allégués et affirmations du recourant qui n'étaient pas en lien avec l'existence de la procédure pénale, en ce sens que pour l'essentiel, ils étaient ignorés d'elle – ce qui tombe sous le sens s'agissant de rapports entre le recourant et des tiers. Elle a ajouté un commentaire dans la partie en droit, dont résulte qu'elle ne comprenait pas en quoi les faits décrits comme étant constitutifs de la plainte pénale auraient entraîné la nullité invoquée, et mis en avant pour le surplus le principe de célérité.
Il résulte du rappel qui précède que les déterminations du 3 octobre 2022 étaient limitées à la réponse à la requête de suspension; le seul objet pertinent de ces deux écritures est circonscrit à la question de l'existence d'une procédure pénale portant sur un vice du consentement, allégué par le recourant en lien avec le titre de mainlevée dont se prévaut l'intimée. Déterminer si les faits évoqués dans la plainte pénale ayant conduit à l'ouverture de la procédure pénale rendent vraisemblables la libération du recourant relève du fond de la cause, lequel, à l'issue de l'audience du Tribunal du 23 septembre 2022, était en état d'être jugé.
Pour trancher la question de la suspension au sens de l'art. 126 CPC, le fait pertinent, à apprécier en opportunité, est l'existence d'une procédure qui hypothétiquement pourrait aboutir à une décision contradictoire à celle à prendre au terme de la présente cause. Ce fait est, en l'occurrence, établi par l'existence de la P/2______/2021, alors pendante au Ministère public (aujourd'hui devant la Chambre des recours de la Cour de justice). Aucun établissement de faits supplémentaire n'entre en considération. Seule se pose une question de droit, soit celle de l'opportunité de suspendre.
Dès lors, la circonstance que le recourant a introduit dans sa requête de suspension divers faits et appréciations personnelles, outre le fait pertinent susdécrit, qui ne sont pas recevables à ce stade, sur lesquels l'intimée a pris position en indiquant pour l'essentiel les ignorer, n'est pas relevante. Il ne saurait être question, au regard du principe de la bonne foi en procédure (art. 52 CPC) de profiter d'une requête de suspension formulée spontanément par écrit pour contourner la procédure orale décidée par le Tribunal s'agissant de la réponse à une requête de mainlevée, en introduisant des faits de la cause dans la requête de suspension. Il n'est pas plus admissible d'en tirer argument, dans la configuration particulière de la présente procédure, pour obtenir un renvoi au premier juge.
En définitive, au vu de de ce qui précède, la Cour retient que les déterminations du 3 octobre 2022 déposées par l'intimée au Tribunal ne portaient que sur des questions de droit, à l'exclusion de questions recevables de fait, raison pour laquelle elles ont été communiquées en décembre 2023 au recourant, qui a maintenant pu se déterminer à leur propos. Il a dès lors été procédé conformément à l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral. Le grief de violation du droit d'être entendu n'est plus fondé.
Quant aux supposés faits nouveaux invoqués par le recourant en lien avec la P/2______/2021, ils ne sont en tout état pas recevables (art. 326 CPC).
2. S’agissant d’une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s’applique (art. 251 let. a CPC)
Aux termes de l’art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l’instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire.
2.1 Formé dans le délai prescrit et selon la forme requise par la loi, le recours est recevable.
2.2 Dans le cadre d’un recours, le pouvoir d’examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). L’autorité de recours a un plein pouvoir d’examen en droit, mais un pouvoir limité à l’arbitraire en fait, n’examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par la partie recourante (Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., Berne, 2010, n° 2307).
3. Le recourant reproche au Tribunal d'avoir procédé à une constatation inexacte des faits en omettant de retenir, dans l'état de fait du jugement attaqué, les courriers qu'il avait adressés au Ministère public les 15 et 17 juin 2022, et les réponses apportées par cette autorité, alors que ceux-ci prouvaient un fait pertinent, à savoir l'objet de la procédure pénale existante.
S'il est vrai que le premier juge n'a pas pris en considération les faits et l'offre de preuve dans la décision entreprise, lesquels ont au demeurant été retenus dans l'état de fait dressé ci-avant sur la base des éléments résultant du dossier de première instance, l'omission n'a pas porté à conséquence. En effet, contrairement à ce que soutient le recourant, les réponses du Ministère public ne démontrent pas le fait allégué (en l'occurrence la confirmation, telle que requise, de l'objet de la procédure pénale) puisqu'elles consistent en des décisions de "n'empêche refusé", soit des rejets de la requête soumise.
Le grief est ainsi sans portée.
4. Le recourant fait grief au Tribunal d'avoir refusé de suspendre la procédure dans l'attente de l'issue de la procédure pénale, et d'avoir violé l'art. 82 LP, le titre invoqué par l'intimée pour obtenir la mainlevée étant, selon lui, vraisemblablement nul.
4.1 L'art. 126 al. 1 CPC prévoit que le tribunal peut ordonner la suspension de la procédure si des motifs d'opportunité le commandent. La procédure peut notamment être suspendue lorsque la décision dépend du sort d'un autre procès.
La suspension de la procédure de mainlevée ne peut être prononcée qu'exceptionnellement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_562/2021 du 3 décembre 2021 consid. 3.2).
4.2 Selon l'art. 82 LP, le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire (al. 1); le juge la prononce si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblable sa libération (al. 2).
La procédure de mainlevée provisoire est une procédure sur pièces (Urkundenprozess), dont le but n'est pas de constater la réalité de la créance en poursuite, mais l'existence d'un titre exécutoire. Le juge de la mainlevée provisoire examine seulement la force probante du titre produit par le créancier, sa nature formelle - et non la validité de la créance (arrêt du Tribunal fédéral 5A_595/2021 du 14 janvier 2022 consid. 6.1) - et lui attribue force exécutoire si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblables ses moyens libératoires (ATF 145 III 160 consid. 5.1 et la référence).
Constitue une reconnaissance de dette l'acte sous seing privé signé par le poursuivi, d'où ressort sa volonté de payer au poursuivant, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée, ou aisément déterminable, et exigible (ATF 145 III 20 consid. 4.1.1; 139 III 297 consid. 2.3.1 et les références).
Dans la poursuite contre la caution solidaire, le poursuivant ne peut obtenir la mainlevée provisoire de l'opposition que si l'acte de cautionnement est accompagné d'une reconnaissance de dette signée du débiteur principal et si la dette principale est exigible (arrêts du Tribunal fédéral 5A_1036/2018 du 15 mai 2019 consid. 4.1; 5A_477/2011 du 10 octobre 2011 consid. 4.3.1).
Conformément à l'art. 82 al. 2 LP, le poursuivi peut faire échec à la mainlevée en rendant immédiatement vraisemblable sa libération. Il peut se prévaloir de tous les moyens de droit civil - exceptions ou objections - qui infirment la reconnaissance de dette (ATF 145 III 20 consid. 4.1.2; 142 III 720 consid. 4.1). Le poursuivi n'a pas à apporter la preuve absolue (ou stricte) de ses moyens libératoires, mais seulement à les rendre vraisemblables, en principe par titre (art. 254 al. 1 CPC; ATF 145 III 20 consid. 4.1.2; 142 III 720 consid. 4.1). Le juge n'a pas à être persuadé de l'existence des faits allégués; il doit, en se fondant sur des éléments objectifs, avoir l'impression qu'ils se sont produits, sans exclure pour autant la possibilité qu'ils se soient déroulés autrement (ATF 145 III 213 consid. 6.1.3; 142 III 720 consid. 4.1; 132 III 140 consid. 4.1.2).
Pour s'opposer à la mainlevée provisoire, le poursuivi peut rendre vraisemblable que l'obligation constatée dans le titre, causal ou abstrait, n'est pas valable en raison d'un vice de la volonté: lésion, erreur, dol ou crainte fondée (VEUILLET/ABBET, La mainlevée de l'opposition, 2ème éd. 2022, ad art. 82 n 119).
Dans le cadre d'une procédure de mainlevée, la victime d'une erreur, d'un dol ou d'une crainte fondée ne peut simplement se prévaloir du fait qu'il a invoqué ce vice de la volonté dans le délai d'une année prévue à l'art. 31 CO. Il ne s'agit pas en effet d'un droit de révocation inconditionnelle. Le poursuivi doit au contraire rendre vraisemblable le vice de la volonté invoqué. A moins qu'elles ne soient corroborées par des pièces qui accréditent la thèse soutenue, les simples allégations d'une partie n'ont à cet égard aucune valeur probante, même au niveau de la vraisemblance (arrêt du Tribunal fédéral 5A_773/2020 du 22 décembre 2020 consid. 3.2).
4.3 En l'espèce, le recourant ne critique pas, à raison, les considérants du Tribunal qui portent sur les conditions du titre de mainlevée provisoire en mains de l'intimée.
Il fonde sa libération, pour faire échec à la mainlevée, sur la nullité du contrat de cautionnement, subsidiairement sur l'absence de validité de celui-ci.
Les faits qu'il allègue pour soutenir cette thèse, soit à bien le comprendre une tromperie au moment de la signature de l'acte de cautionnement en juin 2016, et dont les éléments censés les rendre vraisemblables se rapportent à des démarches d'un tiers en mai et juin 2017 voire en 2019, ne sont pas suffisants pour donner l'impression qu'ils pourraient s'être produits. Ils sont en tout état étrangers à l'intimée, dont il n'est pas allégué qu'elle aurait participé à ou eu connaissance de la tromperie invoquée.
A cet égard, l'existence de la procédure pénale P/2______/2021, dont l'objet n'a pas été circonscrit à satisfaction au vu des pièces produites et en l'absence de production de la plainte sur la base de laquelle elle a été ouverte, n'est pas décisive. Elle ne tend en effet pas, à elle seule, à rendre vraisemblable la libération dont se prévaut le recourant.
Le sort de la cause P/2______/2021, qui a été initiée en 2021 et demeure pendante, n'apparaît au demeurant pas de nature à créer un risque de contrariété de décisions, compte tenu du caractère particulier de la procédure de mainlevée provisoire de l'opposition rappelé ci-dessus et retenu à raison par le premier juge. En tout état, étant rappelé que la suspension d'une telle procédure doit demeurer exceptionnelle, et le principe de célérité devant être respecté, il n'existe pas de motif d'opportunité qui commanderait de suspendre la présente procédure.
Pour le surplus, l'arrêt du Tribunal fédéral publié aux ATF 132 III 140, dont le recourant se prévaut pour soutenir qu'un document dont il serait rendu vraisemblable qu'il est le fruit d'une infraction pénale ne saurait fonder une mainlevée d'opposition, n'a pas la portée que celui-ci lui prête; dans cette espèce, en effet, il était question d'une mainlevée provisoire de l'opposition dans une poursuite fondée sur une reprise de contrat dont l'authenticité des signatures était contestée, soit une question sans rapport avec la thèse du recourant.
En l'occurrence, en se fondant sur des éléments objectifs apportés à la procédure, il n'y a pas matière à avoir l'impression que les faits allégués par le recourant se sont produits.
Le recourant échoue donc à rendre sa libération vraisemblable, au sens de l'art. 82 al. 2 LP.
Les griefs sont ainsi dépourvus de fondement, de sorte que le recours sera rejeté.
5. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de son recours (art. 106 al. 1 CPC), arrêtés à 950 fr. (art. 48, 61 OELP), compensés avec l'avance opérée, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).
Il ne sera pas alloué de dépens à l'intimée, qui agit en personne, en l'absence de circonstances particulières qui commanderaient d'en octroyer (art. 95 al. 3 let. c CPC).
* * * * *
La Chambre civile :
Statuant sur renvoi du Tribunal fédéral :
A la forme :
Déclare recevable le recours interjeté par A______ contre le jugement JTPI/12019/2022 rendu le 12 octobre 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/9208/2022-8 SML.
Au fond :
Le rejette.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais du recours à 950 fr. compensés à l'avance opérée, acquise à l'Etat de Genève.
Les met à la charge de A______.
Dit qu'il n'est pas alloué de dépens de recours.
Siégeant :
Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame
Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.
La présidente : Pauline ERARD |
| La greffière : Mélanie DE RESENDE PEREIRA |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.