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C/12526/2023

ACJC/131/2024 du 01.02.2024 sur OSQ/40/2023 ( SQP ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/12526/2023 ACJC/131/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 1ER FEVRIER 2024

 

Entre

A______ SA, sise ______ [GE], recourante contre un jugement rendu par le Tribunal de première instance de ce canton le 12 septembre 2023, représentée par
Me Marc-Ariel ZACHARIA, avocat, Lemania Law Avocats, rue de Hesse 16, 1204 Genève,

et

Monsieur B______, domicilié ______, Espagne, intimé, représenté par
Me Olivier ADLER, avocat, BM Avocats, quai Gustave-Ador 26, case postale 6253,
1211 Genève 6.

 


EN FAIT

A. Par jugement OSQ/40/2023 du 12 septembre 2023, reçu le 28 septembre 2023 par A______ SA, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure sommaire, a admis l'opposition à séquestre formée le 17 juillet 2023 par B______ contre l'ordonnance de séquestre rendue le 16 juin 2023 dans la cause C/12526/2023 (ch. 1 et 2 du dispositif), révoqué l'ordonnance précitée (ch. 3), arrêté les frais judiciaires à 1'500 fr., compensés avec les avances fournies par les parties et mis à la charge de A______ SA (ch. 4 et 5), condamné celle-ci à verser 750 fr. à B______ à titre de restitution d'avance de frais (ch. 6) ainsi que 1'700 fr. à titre de dépens (ch. 7) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 8).

B. a. Par acte expédié le 9 octobre 2023 à la Cour de justice, A______ SA a formé recours contre ce jugement, concluant à son annulation, avec suite de frais et dépens. Cela fait, elle a conclu, principalement, au rejet de l'opposition à séquestre formée par B______ et, subsidiairement, au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

b. Dans sa réponse du 6 novembre 2023, B______ a conclu au rejet du recours et à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais et dépens.

c. Par réplique spontanée du 20 novembre 2023, A______ SA a persisté dans ses conclusions.

d. La cause a été gardée à juger le 11 décembre 2023, ce dont les parties ont été avisées le même jour.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :

a. A______ SA est une société inscrite au Registre du commerce de Genève, dont le but est l'exploitation d'une agence immobilière, ainsi que l'achat et la vente de tous immeubles.

b. Jusqu'à l'été 2023, les époux B______ et C______ étaient propriétaires de la parcelle n° 1______ de la commune de D______ [GE], sur laquelle est érigée une villa sise à l'adresse chemin 2______ no. ______, [code postal] D______.

c. Le 21 juin 2021, les précités ont conclu un contrat de courtage avec E______ SA portant sur la vente de la parcelle susmentionnée. L'échéance du contrat était fixée au 28 février 2022.

Selon l'art. 3 du contrat, la commission de courtage due à E______ SA était de 3% du prix de vente hors TVA. L'art. 6 du contrat stipulait ce qui suit : "A l'expiration


du contrat, si l'affaire en question aboutit avec des clients présentés par E______ SA, le mandataire peut également prétendre à la commission fixée à l'art. 3, s'il est établi que, grâce à son concours pendant la durée du contrat et avec l'assentiment des tiers, un lien psychologique existe lors de la conclusion de l'affaire. Même si la vente intervient après la fin du mandat."

d. Par courriels des 7 et 8 septembre 2021, E______ SA a informé B______ et C______ qu'elle présentait leur villa à un couple de potentiels acquéreurs, à savoir F______ et G______, et qu'une visite aurait lieu le 10 septembre 2021.

Le 27 octobre 2021, E______ SA a confirmé à ses clients qu'un rendez-vous avec les époux F______/G______ avait été fixé le vendredi 29 octobre 2021 à 13h.

Le 10 novembre 2021, une collaboratrice de [la banque] H______ a informé B______ et C______ avoir été contactée par G______ qui souhaitait connaître "les détails précis des tranches hypothécaires à reprendre".

Le 16 décembre 2021, E______ SA a transmis à B______ et C______ une offre d'achat des époux F______/G______, qu'ils ont refusée.

e. En parallèle, dans le courant de l'automne 2021, B______ et C______ ont initié des pourparlers avec A______ SA portant sur la conclusion d'un contrat de courtage pour la vente de leur villa à D______.

Par courriel du 23 octobre 2021, B______ et C______ ont informé A______ SA qu'ils étaient liés contractuellement à d'autres agences de courtage. Ils ont ainsi demandé à A______ SA d'inclure un paragraphe dans le contrat à signer mentionnant, notamment, qu'"à la date de signature [du] mandat exclusif, les mandants ont un engagement moral envers E______ SA […], qui leur a présenté deux clients potentiels, Mr. G______ et Mr. A[...]", et d'indiquer "qu'en cas de vente dans le cadre de ces contrats, [A______ SA] ne recevra aucune commission".

f. Le 18 novembre 2021, A______ SA, en qualité de mandataire, et B______ et C______, en qualité de mandants, ont conclu un contrat intitulé "contrat de courtage exclusif" pour une durée de six mois à dater de sa signature, renouvelable ensuite tacitement de mois en mois.

Selon l'art. 1 du contrat, A______ SA était chargée par B______ et C______ "d'entreprendre toutes les démarches destinées à [leur] indiquer ou [leur] amener, directement ou indirectement, un acquéreur pour [la villa de D______], ou encore de leur servir d'intermédiaire pour la négociation de cette vente".


 

L'art. 5 du contrat était libellé comme suit :

"Le mandataire a pris note qu'à la date de signature du présent contrat, les mandants sont engagés contractuellement envers les agences immobilières suivantes :
- J______ […] jusqu'au 4.12.2021;
- K______ SA […] jusqu'au 16.12.2021;
- E______ SA […] jusqu'au 28.02.2022.

A______ SA ne percevra aucune commission pour une vente réalisée entre les mandants et les agences immobilières citées ci-dessus".

L'art. 6 du contrat stipulait par ailleurs que la commission était due "aux conditions que le courtier ait déployé une activité destinée à provoquer la conclusion d'un contrat de vente, et qu'un contrat de vente soit conclu". Les mandants s'engageaient à payer au mandataire, dès la conclusion du contrat de vente, une "commission de 2.5% + TVA calculée sur le prix accepté".

Le droit suisse était applicable au contrat et, en cas de litige, le for se trouvait à Genève (art. 8).

g. G______ s'est abonné à la newsletter de A______ SA à compter du 4 octobre 2021. Jusqu'en avril 2023, le précité a reçu 33 offres de vente de biens immobiliers, dont 6 concernant la villa de B______ et C______.

h. Les 8 et 9 février 2022, A______ SA, B______ et C______ ont conclu un avenant au contrat de courtage du 18 novembre 2021.

A teneur de l'art. 1 de cet avenant, A______ SA acceptait de réaliser, à ses frais, un projet de valorisation de la parcelle n° 1______ de la commune de D______ afin de favoriser sa vente.

L'art. 2 de l'avenant stipulait ce qui suit : "Dans le cas où le mandataire parviendrait à vendre la parcelle des mandants dans le délai prévu par le mandat de courtage, les mandant s'engagent, au moment de la vente, à verser à [A______ SA] une somme forfaitaire de 45'000 fr. en sus de la commission de courtage déjà prévue, afin de rémunérer le travail de valorisation prévu à l'art. 1. Cette somme comprendra les honoraires d'architecte, du géomètre, ainsi que du thermicien pour le dépôt du permis de construire. Dans le cas où le mandataire ne parviendrait pas à vendre la parcelle des mandants, ceux-ci ne seront pas tenu de rémunérer [A______ SA] pour ledit projet de valorisation, ni tenus de la défrayer à cet égard".

Il était encore stipulé que "dans le cas où le mandataire parviendrait à vendre la parcelle des mandants tel quel, soit sans agrandissement prévu et donc sans utilisation du travail de valorisation prévue à l'art. 1", les mandants s'engageaient, au moment de la vente, à verser à A______ SA une somme forfaitaire de 30'000 fr.

i. Fin avril-début mai 2023, E______ SA a relancé les époux F______/G______ qui ont contacté directement B______ et C______.

j. Le 17 mai 2023, B______, C______ et les époux F______/G______ ont signé un acte de vente à terme par devant Me I______, notaire.

Selon cet acte, la vente était subordonnée à la réalisation, au plus tôt le 3 juillet 2023 et au plus tard le 11 septembre 2023, de deux conditions suspensives soit (i) l'obtention des renonciations tant de l'Etat de Genève que de la Commune de D______ à l'exercice de leur droit de préemption et (ii) le paiement par les acquéreurs du solde du prix de vente.

k. Par courrier du même jour, B______ et C______ ont informé A______ SA que leur bien immobilier avait été vendu par l'intermédiaire de E______ SA. En conséquence, ils résiliaient avec effet immédiat le contrat de courtage les liant à A______ SA, celui-ci étant devenu sans objet.

l. Par pli recommandé de son conseil du 9 juin 2023, A______ SA a mis B______ et C______ en demeure de lui verser la somme de 110'775 fr., réclamée à titre de dommages-intérêts pour violation du contrat de courtage exclusif conclu par les parties le 18 novembre 2021.

En substance, A______ SA a reproché à B______ et C______ d'avoir repris contact avec E______ SA au printemps 2023, laquelle avait pris l'initiative de relancer les époux F______/G______, alors que les parties étaient liées par un contrat de courtage exclusif et que le mandat confié à E______ SA avait d'ores et déjà pris fin depuis de nombreux mois. La violation de la clause d'exclusivité prévue par le contrat ouvrait le droit de A______ SA au versement de dommages-intérêts propres à la remettre dans la situation qui aurait été la sienne si le contrat avait été exécuté "conformément aux prévisions". Le montant réclamé de 110'775 fr. comprenait le montant de la commission convenue en 80'775 fr. (75'000 fr. [2.5% du prix de vente de 3'000'000 fr.] + 5'775 fr. de TVA) et la somme forfaitaire de 30'000 fr. pour la valorisation de la parcelle.

m. Le 16 juin 2023, A______ SA a saisi le Tribunal de deux requêtes en séquestre d'une teneur similaire, l'une dirigée contre B______ (C/12526/2023) et l'autre contre C______ (C/3______/2023).

Dans la présente cause, A______ SA a requis du Tribunal qu'il ordonne le séquestre - au préjudice de B______ et à hauteur de 55'387 fr. 50 [110'775 fr. / 2] plus intérêts à 5% dès le 17 mai 2023 - de la commission de courtage relative à la vente de la villa de D______, détenue dans les livres de l'étude de Me I______, notaire à Genève.

A______ SA a précisé que sa requête était fondée sur l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP, B______ et C______ étant domiciliés en Espagne. Elle a allégué que la vente de la villa de D______ avait eu lieu "par son entremise" le 17 mai 2023, mais que la commission convenue ne lui avait pas été versée, en dépit du courrier de mise en demeure adressé à B______ et C______ le 9 juin 2023. A______ SA a invoqué la "commission de courtage du 17.05.2023" comme titre de créance et le "contrat de courtage du 18.11.2021 et [l'] avenant du 8.02.2022" comme cause de l'obligation.

Dans la cause C/3______/2023, A______ SA a formulé les mêmes conclusions à l'encontre de C______.

n. Par ordonnance du 16 juin 2023, le Tribunal a prononcé le séquestre requis à l'encontre de B______, celui-ci étant condamné aux frais et dépens.

Le procès-verbal de séquestre a été notifié au conseil du précité le 11 juillet 2023.

o. Le 17 juillet 2023, B______ a formé opposition contre l'ordonnance de séquestre susvisée et conclu à son annulation, sous suite de frais et dépens.

Il a fait valoir que la créance objet du séquestre était inexistante et inexigible. A______ SA ne prouvait pas l'existence d'un lien de causalité entre son activité et la vente de la villa aux époux F______/G______ avec lesquels elle n'avait jamais eu de contacts. Elle ne pouvait prétendre à aucune commission de courtage et ne détenait aucune créance à son encontre. Par ailleurs, les deux conditions suspensives prévues dans l'acte de vente n'étaient pas réalisées au moment du dépôt de la requête en séquestre et ne l'étaient toujours pas au jour du dépôt de son opposition, de sorte que - le contrat ne déployant pas ses effets - la créance n'était pas exigible.

p. Dans sa réponse du 21 août 2023, A______ SA a conclu, sous suite de frais et dépens, au rejet de l'opposition.

Elle a allégué que les parties avaient été liées par un contrat de courtage exclusif, à compter de l'échéance des contrats conclus antérieurement avec les agences J______, K______ SA et E______ SA. En décembre 2021, les époux F______/G______ avaient fait une offre d'achat, par l'intermédiaire de E______ SA, que B______ et C______ avaient refusée. Suite à ce refus, les pourparlers avec les époux F______/G______ s'étaient arrêtés et le dossier avait été clôturé. En reprenant contact avec E______ SA au printemps 2023, B______ avait violé la clause d'exclusivité prévue par le contrat du 18 novembre 2021. A______ SA disposait donc d'une créance en dommages et intérêts à l'encontre du précité. Il importait peu à cet égard que le contrat de vente ait été conclu sous conditions suspensives.

q. Le ______ 2023, la vente de la villa de D______ aux époux F______/G______, pour un prix de 2'977'000 fr. a été publiée dans la Feuille d'avis officielle (FAO).

r. Lors de l'audience du 28 août 2023, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions respectives, après quoi le Tribunal a gardé la cause à juger.

s. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a retenu qu'à teneur des pièces produites, les époux F______/G______ avaient été présentés à B______ et C______ par E______ SA, qui leur avait fait visiter la villa à plusieurs reprises et qui avait mené les négociations. La vente avait certes été conclue postérieurement à l'échéance du contrat de courtage, mais il apparaissait que le lien de causalité entre l'activité déployée par E______ SA et la conclusion de la vente avait été maintenu, les pourparlers ayant repris du fait des relations tissées antérieurement entre cette société et les époux F______/G______. De son côté, A______ SA ne démontrait pas que son intervention serait à l'origine de la vente du bien immobilier aux époux F______/G______, qu'elle ne connaissait du reste pas. Le fait que les époux F______/G______ étaient inscrits à la newsletter de A______ SA et qu'ils avaient reçu des offres concernant la villa de D______ ne suffisait pas à démontrer l'existence d'un lien de causalité entre l'activité de A______ SA et la vente, ni à fonder un droit au versement d'une commission de courtage, la réalisation des conditions prévues à l'art. 6 du contrat de courtage n'étant pas démontrée.

Il ressortait également des pièces produites que lors de la conclusion du contrat de courtage, A______ SA avait été informée du fait que E______ SA avait présenté les époux F______/G______ à B______ et C______ et qu'en cas de vente dans le cadre du courtage conclu avec cette société, elle ne recevrait aucune commission. Elle avait d'ailleurs accepté d'insérer une clause dans le contrat (art. 5) stipulant expressément qu'elle ne percevrait aucune commission si une vente était réalisée entre B______ et l'une des trois agences immobilières citées. A______ SA ne disposait ainsi d'aucune créance à l'encontre de ce dernier.

EN DROIT

1. 1.1 Le jugement entrepris étant une décision statuant sur opposition à séquestre, seule la voie du recours est ouverte (art. 278 al. 3 LP; art. 309 let. b ch. 6 et 319 let. a CPC).

Le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 278 al. 1 LP et 321 al. 2 CPC).

Déposé dans le délai et selon les formes requis par la loi, le recours est recevable.

1.2 La cognition de la Cour est limitée à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC et 278 al. 3 LP).

2. La recourante reproche au Tribunal d'avoir retenu qu'elle n'avait pas rendu vraisemblable sa créance en dommages-intérêts fondée sur le contrat de courtage du 18 novembre 2021 et l'avenant du 8 février 2022. Elle soutient que l'intimé aurait violé la clause d'exclusivité stipulée dans le contrat (en vendant sa villa à des acquéreurs lui ayant été présentés par un autre courtier) et, partant, qu'il serait tenu de l'indemniser pour le préjudice subi en s'acquittant de la commission convenue à l'art. 6 du contrat.

2.1.1 Selon l'art. 272 al. 1 LP, le séquestre est autorisé par le juge du for de la poursuite ou par le juge du lieu où se trouvent les biens, à condition que le créancier rende vraisemblable que sa créance existe (ch. 1), qu'on est en présence d'un cas de séquestre (ch. 2) et qu'il existe des biens appartenant au débiteur (ch. 3).

La procédure d'opposition au séquestre (art. 278 LP) est une procédure sommaire au sens propre; elle présente les trois caractéristiques de simple vraisemblance des faits, examen sommaire du droit et décision provisoire. Elle a en outre un objet et un but particulier : le séquestre, auquel le débiteur s'oppose, est une mesure conservatoire, soit la mise sous mains de justice de biens du débiteur, qui permet de garantir une créance pendant la durée de la procédure de validation du séquestre (art. 279 LP). En tant que procédure spécifique de la LP, la procédure d'opposition au séquestre est aussi une procédure sur pièces (art. 256 al. 1 CPC). C'est au cours de l'action civile en reconnaissance de dette (en validation du séquestre) qui suivra, soumise à une procédure avec un examen complet en fait et en droit, que les parties pourront faire valoir tous leurs moyens de preuve (ATF 138 III 636 consid. 4.3.2).

Le critère de la vraisemblance s'applique non seulement à l'existence de la créance en fait, mais aussi à son existence juridique. Ainsi, les faits à l'origine du séquestre doivent être rendus simplement vraisemblables. Tel est le cas lorsque, se fondant sur des éléments objectifs, le juge acquiert l'impression que les faits pertinents se sont produits, mais sans qu'il doive exclure pour autant la possibilité qu'ils se soient déroulés autrement. A cet effet, le créancier séquestrant doit alléguer les faits et produire un titre qui permette au juge du séquestre d'acquérir, au degré de la simple vraisemblance, la conviction que la prétention existe pour le montant énoncé et qu'elle est exigible. S'agissant de l'application du droit, le juge procède à un examen sommaire du bien-fondé juridique, c'est-à-dire un examen qui n'est ni définitif, ni complet, au terme duquel il rend une décision provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 5A_560/2015 du 13 octobre 2015 consid. 3).

L'opposant doit tenter de démontrer que son point de vue est plus vraisemblable que celui du créancier séquestrant (arrêts du Tribunal fédéral 5A_328/2013 du 4 novembre 2013 consid. 4.3.2; 5A_925/2012 du 5 avril 2013 consid. 9.3).

2.1.2 Selon l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP, le créancier d'une dette échue et non garantie par gage peut requérir le séquestre des biens du débiteur qui se trouvent en Suisse lorsque le débiteur n'habite pas en Suisse et qu'il n'y a pas d'autre cas de séquestre, pour autant que la créance ait un lien suffisant avec la Suisse ou qu'elle se fonde sur une reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP.

Le lien suffisant de la créance avec la Suisse peut être établi par différents points de rattachement. Outre les cas dans lesquels le droit suisse est applicable au litige (ATF 123 III 494 consid. 3a) ou pour lesquels les juridictions suisses sont compétentes ratione loci (ATF 124 III 219 consid. 3b/bb), la jurisprudence retient notamment comme point de rattachement le lieu d'exécution en Suisse de la prestation du créancier séquestrant ou de celle du débiteur séquestré (ATF
123 III 494 consid. 3a).

2.2.1 Aux termes de l'art. 412 al. 1 CO, le courtage est un contrat par lequel le courtier est chargé, moyennant un salaire, soit d'indiquer à l'autre partie l'occasion de conclure une convention (courtage d'indication), soit de lui servir d'intermédiaire pour la négociation d'un contrat (courtage de négociation). Selon l'art. 413 al. 1 CO, le courtier a droit à son salaire dès que l'indication qu'il a donnée ou la négociation qu'il a conduite aboutit à la conclusion du contrat. La passation du contrat de courtage n'est soumise à aucune forme; partant, elle peut résulter d'actes concluants (ATF 131 III 268 consid. 5.1.2 et les références citées).

Dans le courtage d'indication, il y a causalité entre l'activité du courtier et la conclusion du contrat dès que le courtier prouve qu'il a été le premier à désigner, comme s'intéressant à l'affaire, la personne qui a acheté par la suite et que c'est précisément sur la base de cette indication que les parties sont entrées en relation et ont conclu le marché (arrêt du Tribunal fédéral 4A_334/2018 du 20 mars 2019 consid. 4.1.3 et les arrêts cités). En revanche, dans le courtage de négociation, il faut qu'il y ait un lien psychologique entre les efforts du courtier et la décision du tiers de conclure (même arrêt consid. 4.1.2).

Il ressort de l'art. 413 al. 1 CO que la nature aléatoire de la rémunération du courtier est une caractéristique du contrat de courtage. La naissance du droit du courtier au versement de sa rémunération dépend seulement de la conclusion du contrat principal; il n'est pas tenu compte des efforts déployés ou du temps consacré par le courtier pour exécuter son mandat; seul le rôle que le courtier a joué dans l'aboutissement de l'affaire est déterminant (ATF 138 III 669 consid. 3.1; arrêts du Tribunal fédéral 4A_307/2018 du 10 octobre 2018 consid. 4.1; 4A_309/2016 du 31 août 2016 consid. 2.1; 4C.278/2004 du 29 décembre 2004, consid. 2.3).

Sauf convention contraire, le courtier ne perd pas son droit au versement du salaire si le contrat principal est conclu après l'expiration du contrat de courtage. En effet, conformément à la nature même du contrat de courtage, seul le lien de causalité entre les efforts déployés et la conclusion du contrat principal est décisif. Le courtier reste au bénéfice des activités causales développées avant l'expiration, la résolution ou la révocation du mandat. Il a ainsi droit à son salaire, même si l'affaire est conclue par le mandant ultérieurement (RAYROUX, CR CO I, 3ème éd. 2021, n. 27 ad art. 413 CO et les références citées).

2.2.2 L'art. 413 al. 1 CO étant de droit dispositif, les parties peuvent convenir de clauses particulières dans le but d'atténuer le caractère aléatoire de la rémunération du courtier. La validité d'une telle clause suppose un accord de volonté des parties conformément aux principes généraux du droit des obligations (arrêt du Tribunal fédéral 4C.228/2005 du 25 octobre 2005 consid. 3 et les références citées).

Selon la jurisprudence, la partie qui entend déroger à la règle de l'art. 413 al. 1 CO doit le faire avec suffisamment de clarté (ATF 113 II 49 consid. 1b; arrêt du Tribunal fédéral 4C.278/2004 du 29 décembre 2004 consid. 2.4.2). Dans un cas où le texte du contrat avait été rédigé par une société de courtage, le Tribunal fédéral a retenu qu'en tant que professionnelle dans le domaine de la vente immobilière, ce manque de clarté la desservait, puisqu'elle aurait pu et dû empêcher, par l'élaboration d'un texte clair, que ne surgissent des divergences en la matière (arrêt du Tribunal fédéral 4C.278/2004 du 29 décembre 2004, consid. 2.4.2).

Dans la pratique, au vu des cas tranchés par la jurisprudence et recensés par la doctrine, on rencontre différentes clauses particulières, qui peuvent aussi être combinées entre elles. Ainsi, les parties peuvent convenir : (1) d'une clause de renonciation au rapport de causalité : le mandant renonce au lien de causalité entre l'activité du courtier et la conclusion de l'affaire, ce dernier ayant droit à son salaire alors même que son activité est sans rapport avec la conclusion de l'affaire par le mandant; (2) d'une clause d'exclusivité : le mandant s'oblige à ne pas conclure avec des tiers des contrats de courtage portant sur l'affaire; selon la volonté des parties, la violation de cette clause peut entraîner pour le courtier, soit le droit à des dommages-intérêts s'il prouve son préjudice (violation de l'obligation contractuelle selon l'art. 97 al. 1 CO), soit le paiement de la commission convenue (cf. infra); (3) d'une clause d'exclusivité par laquelle le mandant s'interdit non seulement de recourir à un autre courtier, mais aussi de rechercher ou négocier lui-même; (4) d'une clause de garantie d'une commission ("Provisionsgarantie") : le mandant garantit au courtier tout ou partie de sa rémunération même si l'affaire est conclue par l'intermédiaire d'un tiers; ou encore (5) d'une clause de garantie d'une commission réduite même si l'affaire n'aboutit pas (arrêt du Tribunal fédéral 4A_449/2019 du 16 avril 2020 consid. 5.2 et les nombreux arrêts cités).

Ainsi, une clause d'exclusivité, par laquelle le mandant s'interdit de recourir aux services d'un autre intermédiaire, est en soi valable, même si elle peut impliquer une renonciation à l'exigence du lien de causalité - le courtier ayant droit à son salaire bien que son activité d'indicateur ou de négociateur soit sans rapport avec la conclusion de l'affaire par le mandant (arrêt du Tribunal 4C.228/2005 précité consid. 3 et les références citées). Si les parties sont convenues d'une clause d'exclusivité, le courtier a toutefois l'obligation de déployer une activité en vue de la réalisation de l'affaire que le mandant lui a confiée (RAYROUX, op. cit., n. 23 et 39 ad art. 412 CO et les références citées). Selon le Tribunal fédéral, qui se réfère à l'art. 398 al. 2 CO, cela correspond à l'obligation contractuelle du courtier de "sauvegarder les intérêts du vendeur avec la diligence d'un commerçant sérieux"; l'inactivité du courtier au bénéfice d'un contrat de courtage exclusif serait en effet incompatible avec cette obligation de préserver les intérêts du mandant (ATF 103 II 129, JdT 1978 I 150 consid. 3). Dans un arrêt rendu en 2020, le Tribunal fédéral a retenu - s'agissant d'un courtier qui, à l'exception de la visite de l'immeuble mis en vente par trois acquéreurs potentiels au début du contrat, n'avait pas établi avoir exercé, durant plus d'un an, une quelconque activité en faveur de sa mandante - qu'il y avait là indiscutablement une violation des obligations de sauvegarde et de diligence du courtier. La sanction de cette carence, qui constituait une inexécution du contrat, ne pouvait être que le refus d'allouer un salaire au courtier (arrêt du Tribunal fédéral 4C.257/1999 du 17 janvier 2020 consid. 3).

2.3 En présence d'un litige sur l'interprétation de clauses contractuelles, le juge doit rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant, empiriquement sur la base d'indices, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté, mais aussi le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat, des projets de contrat, de la correspondance échangée ou encore de l'attitude des parties après la conclusion du contrat, établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2; 140 III 86 consid. 4.1; 125 III 263 consid. 4c; 118 II 365 consid. 1).

Ce n'est que si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties, ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat, qu'il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre, c'est-à-dire conformément au principe de la confiance (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3;
130 III 417 consid. 3.2 et les arrêts cités).

2.4 En l'espèce, il n'est pas contesté que des biens appartenant au débiteur séquestré se trouvent en Suisse (à savoir la commission de courtage versée en mains du notaire ayant instrumenté la vente de la villa de D______), que ce dernier n'est pas domicilié en Suisse et que la créance fondant le séquestre présente un lien suffisant avec la Suisse, le contrat de courtage signé par les parties étant soumis au droit suisse et portant sur la vente d'un immeuble sis à Genève. Reste à examiner si la recourante - qui n'est pas au bénéfice d'une reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP - a rendu sa créance vraisemblable.

Il ressort des pièces versées au dossier que les parties ont conclu un "contrat de courtage exclusif" le 18 novembre 2021. La portée exacte de l'exclusivité octroyée au courtier (i.e. la recourante) par les mandants (i.e. l'intimé et son époux) n'a toutefois pas été définie par le contrat qui est muet sur ce point. Il ne contient aucune clause qui interdirait aux mandants de conclure une vente par l'intermédiaire d'autres courtiers - l'art. 5 prévoit, à l'inverse, que la villa est susceptible d'être vendue par l'entremise de trois autres sociétés de courtage, auquel cas la recourante n'aurait droit à aucun salaire - ou de négocier et conclure eux-mêmes le contrat de vente avec le(s) futur(s) acquéreur(s). Le contrat ne mentionne pas non plus les conséquences d'une violation de cette exclusivité. En particulier, il ne stipule pas qu'en cas de vente de la villa par l'entremise d'un autre courtier, les mandants s'exposeraient à devoir payer une commission à la recourante, quand bien même celle-ci n'aurait déployé aucune activité en rapport avec la conclusion de la vente.

L'art. 6 du contrat prévoit au contraire que la recourante ne peut prétendre à la commission convenue qu'à la condition que "le courtier ait déployé une activité destinée à provoquer la conclusion d'un contrat de vente, et qu'un contrat de vente soit conclu". Or, cette formulation tend à démontrer qu'indépendamment du terme "exclusif" mentionné dans l'intitulé du contrat, les parties n'avaient pas l'intention de renoncer - s'agissant du droit à la commission - à l'existence d'un lien de causalité entre l'activité de la recourante et la conclusion de la vente.

De plus, il ressort des pièces produites qu'avant de signer le contrat, l'intimé avait clairement fait savoir à la recourante que lui-même et son mari étaient déjà liés contractuellement à E______ SA - société qui leur avait présenté les époux F______/G______ et qui pouvait prétendre à une commission si la villa était vendue à ces derniers, y compris après l'expiration du contrat de courtage conclu le 21 juin 2021 (cf. supra EN FAIT, let. C.c et consid. 2.2.1 in fine) - et "qu'en cas de vente dans le cadre [du mandat confié à E______ SA]", la recourante "ne recevrait aucune commission". C'est d'ailleurs pour cette raison que la recourante a accepté d'insérer dans le contrat du 18 novembre 2021 - rédigé par ses soins - une clause particulière spécifiant qu'elle n'aurait droit à "aucune commission pour une vente réalisée entre les mandants et les agences immobilières citées ci-dessus [dont E______ SA]". Là encore, cette formulation tend à confirmer que dans l'esprit des parties, la recourante ne pouvait prétendre à la commission prévue à l'art. 6 du contrat que pour autant que son activité, à l'exclusion de celle des autres agences citées, ait contribué à la conclusion de l'affaire.

Au surplus, la recourante ne critique pas de façon motivée le raisonnement du Tribunal en tant que celui-ci a retenu qu'il n'existait aucun lien de causalité entre son activité et la vente de la villa aux époux F______/G______, d'une part, et que cette vente n'avait pu être conclue que grâce aux efforts déployés par E______ SA dans le cadre du contrat de courtage du 21 juin 2021, d'autre part.

Ainsi que le plaide l'intimé, il peut être déduit - au stade de la vraisemblance - de l'ensemble des éléments susmentionnés que l'intention des parties était d'exclure tout droit à une commission en faveur de la recourante pour le cas où la vente de la villa était conclue avec les époux F______/G______, par la seule entremise de E______ SA, ce qui s'est effectivement produit. Dans ces conditions, la recourante échoue à rendre vraisemblable que l'intimé aurait violé ses obligations contractuelles telles que stipulées par le contrat de courtage du 18 novembre 2021 et/ou l'avenant signé en février 2022.

A titre superfétatoire, il sera relevé qu'à teneur des pièces produites, l'activité de courtage déployée par la recourante de novembre 2021 à mai 2023 s'est limitée à la publication - à seulement six reprises sur une période de près de vingt mois - d'une annonce concernant la villa de D______ dans sa newsletter, à l'exclusion de toute autre démarche concrète (la recourante n'allègue du reste pas avoir présenté de potentiels acheteurs à l'intimé, ni avoir fait visiter la villa à des personnes intéressées, ni avoir effectué une quelconque dépense en vue de valoriser la parcelle). Or, conformément aux principes rappelés supra (consid. 2.2.2 in fine), l'inactivité du courtier au bénéfice d'une clause d'exclusivité est assimilable à une inexécution du contrat, ce qui exclut tout droit au paiement d'une commission de courtage. Ainsi, il est vraisemblable que, même s'il fallait admettre que les parties étaient convenues d'une clause d'exclusivité (avec renonciation au lien de causalité), la recourante ne pourrait quoi qu'il en soit pas réclamer le paiement de la commission stipulée à l'art. 6 du contrat.

Il suit de là que la décision du Tribunal d'admettre l'opposition à séquestre, au motif que la créance invoquée par la recourante n'avait pas été rendue suffisamment vraisemblable, n'est pas critiquable.

Le recours, infondé, sera par conséquent rejeté.

3. Les frais judiciaires de recours, arrêtés à 750 fr. (art. 48 et 61 OELP), seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 106 CPC), et compensés avec l'avance de frais fournie par celle-ci, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 CPC).

La recourante sera condamnée à verser à l'intimé, à titre de dépens de recours, la somme de 1'500 fr., débours inclus (art. 84, 85, 89 et 90 RTFMC; 23 et 25 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 9 octobre 2023 par A______ SA contre le jugement OSQ/40/2023 rendu le 12 septembre 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/12526/2023-12 SQP.

Au fond :

Le rejette.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de recours à 750 fr., les met à la charge de A______ SA et les compense avec l'avance fournie, acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ SA à verser à B______ 1'500 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.