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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/22913/2021

ACPR/368/2024 du 17.05.2024 sur OCL/1297/2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : CLASSEMENT DE LA PROCÉDURE;AUTEUR(DROIT PÉNAL);INCONNU;AGRESSION
Normes : CPP.319.al1.leta; CP.134

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/22913/2021 ACPR/368/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 17 mai 2024

 

Entre

A______, représenté par Me B______, avocat,

recourant,

contre l'ordonnance de classement rendue le 22 septembre 2023 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 5 octobre 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 22 septembre 2023, notifiée le 25 suivant, par laquelle le Ministère public a classé sa plainte du 20 septembre 2021 contre inconnu pour agression.

Le recourant conclut, sous suite de frais, à l'annulation de la décision querellée, à la reprise de l'instruction et à ce qu'il soit ordonné au Ministère public de "vérifier la vidéosurveillance du canton relative au jour, à l'heure et au lieu des faits" ainsi que de "faire diffuser les photographies de l'auteur des faits aux policiers patrouillant dans le quartier C______ et ordonner l'arrestation" de son agresseur.

b. Au bénéfice de l'assistance judiciaire, le recourant a été dispensé du versement des sûretés (art. 383 al. 1 CPP).

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 9 août 2021, A______ s'est présenté au poste de police afin d'y enregistrer une main courante, à la suite de l'agression dont il disait avoir été victime la veille, au restaurant D______, sis à la rue 1______ no. 2______, à C______ [GE]. Il a déclaré ignorer l'identité de son agresseur.

b. Il ressort de l'instruction de la cause que l'intervention de la police a été requise dans l'établissement précité le jour des faits litigieux, mais qu'aucune patrouille n'a pu être dépêchée sur place. Contacté par téléphone, le restaurateur a indiqué à la police ne pas disposer de caméra de surveillance.

Aucune image n'a non plus pu être recueillie auprès de la Centrale de Vidéo Protection (CVP) de la police, malgré la demande effectuée en ce sens.

c. Le 20 septembre 2021, A______ a déposé plainte pour les faits survenus le 8 août 2021.

En substance, il a exposé avoir, ce jour-là, vers 3h30 du matin, bu de l'alcool au sein de l'établissement nocturne E______ à Genève, en compagnie d'un ami, F______, qui lui avait présenté un certain "G______", surnommé "G______". À la fermeture de l'établissement, vers 5h30, F______ et lui-même s'étaient rendus dans le restaurant D______, où ils avaient encore consommé de l'alcool avec un certain "H______" – identifié comme étant I______ – et J______ – dont le nom officiel était K______ –, jusqu'aux alentours de 8h00.

Lorsqu'il avait souhaité quitter les lieux, le dénommé "G______" – attablé à proximité – s'était dirigé vers lui en lui demandant, sur un ton agressif, "qu'est-ce qu'il y a[vait]", puis l'avait, sans aucun motif, saisi par le col à l'aide de sa main gauche – l'empêchant de la sorte de respirer –, avant de le frapper à plusieurs reprises au niveau de la tête, en particulier de la bouche. Il s'était alors défendu, en assénant un coup de poing au visage de l'intéressé, à la suite de quoi ce dernier – qui le tenait toujours par le col – était monté sur un banc afin de lui porter un coup au niveau de la tête à l'aide de sa main droite.

Il avait perdu connaissance, après avoir encore reçu un coup de bouteille sur le front et un autre à l'arrière du crâne. Lorsqu'il avait repris ses esprits, "G______" l'avait frappé avec un verre au niveau de la tempe, avant de quitter l'établissement en compagnie d'un individu prénommé "L______". Il n'avait pas le souvenir d'avoir été frappé par ce dernier, mais il était possible que celui-ci soit à l'origine des coups qu'il avait reçus à l'arrière de la tête et sur le front.

Il ne connaissait pas le prénommé "G______", avec lequel il n'avait pas échangé durant la soirée, de sorte qu'il ne comprenait pas les motifs de son agression. Ce dernier était d'origine marocaine, âgé d'environ 25 ans, de corpulence athlétique, mesurait 175 cm et avait les cheveux rasés. Il était par ailleurs vêtu d'une chemise blanche à carreaux et d'un short bleu, portait des baskets ainsi qu'une casquette.

K______ et I______ avaient été témoins de son agression. Il était également parvenu à obtenir les numéros de téléphone des dénommés "G______" et "L______", par le biais de M______, avec laquelle il avait bu des verres au sein de l'établissement E______ le soir des faits litigieux.

À l'appui de sa plainte, A______ a notamment produit la copie d'un constat médical établi le 8 août 2021 par les Hôpitaux universitaires de Genève, selon lequel il présentait "plusieurs plaies superficielles sur le front, une plaie en arc de deux centimètres de long antérieure à l'oreille gauche" et "une plaie avec présence d'un corps étranger dans la paupière supérieure".

d. Par ordonnance du 1er décembre 2021, le Ministère public a ouvert une instruction pénale contre inconnu du chef d'agression (art. 134 CP).

e. Divers actes d'enquête et auditions ont été menés par la police dans le cadre de l'instruction. Il en ressort notamment les éléments suivants :

i. Malgré plusieurs tentatives, le dénommé "G______" n'avait pas pu être joint sur le numéro de téléphone portable suisse – qui n'apparaissait pas dans la base de données de la police – communiqué par A______ ;

ii. Contacté sur le numéro de portable suisse – remis à la police par le plaignant –, le dénommé "L______" s'était présenté sous le nom de N______, né en 1987, au bénéfice d'un titre de séjour italien. L'intéressé – qui n'apparaissait pas dans la base de données de la police – n'avait pas déféré à sa convocation par la police et ne répondait plus au téléphone depuis ;

iii. Auditionné par la police en qualité de personne appelée à donner des renseignements, K______ a expliqué s'être rendu le jour des faits litigieux en compagnie d'une amie – qui n'avait pas été témoin de l'agression – au restaurant D______, où ils avaient été rejoints par A______, une connaissance. Alors qu'ils discutaient, deux hommes – qu'il ne connaissait pas et qui étaient attablés à proximité – avaient proféré des insultes en arabe à l'encontre du prénommé, avant de le frapper à plusieurs reprises. Il n'avait lui-même pas assisté à l'intégralité de l'altercation, mais avait vu l'un des deux hommes saisir le plaignant par la gorge, pendant que l'autre lui assénait des coups de poing au visage. Ensuite, le second individu avait frappé A______ au niveau du visage avec un verre. Le prénommé, qui avait tenté de se défendre, était tombé au sol. Finalement, il s'était lui-même interposé afin de mettre un terme aux échanges de coups, à la suite de quoi les deux hommes – âgés d'environ 30 ans, d'origine maghrébine et mesurant 175 cm –, avaient quitté le restaurant ;

iv. Contactée par téléphone, M______ a déclaré à la police ne pas disposer d'information au sujet du dénommé "G______", précisant ne pas avoir été témoin de l'agression, ni connaître un homme du nom de "L______" ;

v. Également contacté par téléphone, F______ a indiqué à la police avoir fait la connaissance du dénommé "G______" le soir des faits litigieux. Il ne disposait d'aucune information à son sujet, ni sur son ami "L______". Pour le surplus, il n'avait pas été témoin des faits, ayant déjà quitté les lieux au moment de l'agression du plaignant ;

vi. Auditionné en qualité de témoin, I______ a confirmé avoir vu A______ échanger des coups avec un homme dont il ignorait l'identité, pendant qu'un autre individu – qu'il ne connaissait pas non plus – tentait de les séparer. A______, qui se trouvait au sol, avait reçu des coups de poing au visage de la part du premier individu. Lorsque l'altercation avait pris fin, il avait lui-même appelé les secours. Une fois l'ambulance arrivée sur place, il avait quitté les lieux et n'avait jamais recroisé les deux hommes en question – d'origine marocaine et âgés d'une trentaine d'années –, qu'il n'avait jamais vus auparavant ;

vii. La demande IRC ("Information Request Component") effectuée sur les deux numéros de téléphone portable appartenant – selon le plaignant – aux dénommés "G______" et "L______" avait permis d'établir qu'ils avaient été achetés par O______, domicilié à Genève.

Entendu par la police, ce dernier a déclaré ne pas connaître le plaignant ni ne s'être jamais rendu dans le restaurant D______, précisant être atteint d'une maladie et, partant, limité dans ses déplacements. Environ deux ans auparavant, il avait acheté, à son nom, un numéro de portable à un dénommé "G______", qui dormait à l'époque dans les caves de son immeuble. Il ne connaissait ni son nom de famille, ni sa date de naissance, et il ne l'avait pas revu depuis plus d'une année. Par ailleurs, il avait fait l'acquisition de cinq autres numéros de téléphone en faveur d'autres hommes – dont il ne connaissait pas l'identité –, il y avait de cela trois ans, dans le but de rendre service. Il avait le souvenir d'un individu dénommé "L______", ami d'"G______", qui avait également dormi dans les caves de son immeuble. Il était possible que celui-ci soit l'un des cinq hommes à qui il avait acheté un numéro de portable. Cependant, il ne l'avait pas revu depuis environ deux ans et n'avait plus entendu parler de lui.

f. Lors de l'audience par-devant le Ministère public du 15 mars 2022, A______ a confirmé sa plainte. Le lendemain des faits litigieux, M______ lui avait confié par téléphone que le dénommé "L______" – qui était "costaud", avait la peau noire et portait une queue de cheval – était originaire de P______ [Maroc] et travaillait à Q______. Elle lui avait en outre révélé que le dénommé "G______" était originaire de R______ [Maroc]. Par ailleurs, elle lui avait proposé de le mettre en contact avec la sœur ou la concubine de ce dernier, mais il avait refusé. Il n'avait plus eu de contact avec M______ depuis.

Confronté aux déclarations de cette dernière à la police – selon lesquelles elle ne connaissait pas "G______" et "L______" –, il a répondu qu'elle avait dû subir "beaucoup de pressions", comme cela avait été le cas pour K______. Ce dernier lui avait en effet révélé s'être vu proposer une somme de CHF 500.- par le dénommé "L______" en échange de son silence, offre qu'il avait toutefois refusée.

Depuis les faits dénoncés, il avait croisé une fois "G______" dans un restaurant et "L______" à la piscine de S______ avec ses deux enfants, durant l'automne 2021. Par ailleurs, I______ lui avait indiqué les avoir tous deux croisés régulièrement dans un bar situé au numéro no. 3______ de la rue 1______. Il n'avait pas d'autre information à fournir au sujet de l'identité de ces derniers.

g. Sur ordre de dépôt du Ministère public, Q______ a remis une liste de ses employés entre les 1er janvier 2020 et 20 mai 2022 portant le nom ou prénom de "L______". Seul T______, né en 1994, originaire du canton de Neuchâtel, sapeur-pompier professionnel – dont le portrait figurant au dossier ne correspondait pas à la description physique faite par le plaignant du dénommé "L______" – a été retrouvé dans sa base de données.

h. Par avis de prochaine clôture du 18 juillet 2022, le Ministère public a informé A______ qu'il entendait prononcer une ordonnance de classement et lui a imparti un délai pour présenter ses éventuelles réquisitions de preuve et solliciter une indemnité.

i. Par missive de son conseil du 30 septembre 2022, ce dernier a requis du Ministère public des investigations sur la base de deux photographies du dénommé "L______" – annexées au courrier – qu'il était parvenu à obtenir. Il a en outre sollicité le dépôt de la liste de tous les employés de Q______ dénommés "L______" ou "L______", dès lors qu'il était possible que le prénom de son agresseur soit orthographié différemment.

j. Auditionné le 9 novembre suivant par la police, A______ a expliqué avoir pris les deux photographies susmentionnées le 15 mars 2022, alors qu'il cheminait sur la place U______, dans la mesure où l'homme en question avait la même taille et une coupe de cheveux similaire au dénommé "L______". Il n'était toutefois pas certain qu'il s'agissait de son agresseur.

k. Les investigations policières ont permis de déterminer que l'individu photographié par le plaignant se nommait V______, né en 2002. Entendu par la police le 3 décembre 2022, ce dernier a confirmé qu'il s'agissait de lui sur les photographies, mais a contesté être l'auteur des faits dénoncés. Il ne connaissait pas le restaurant D______ et n'avait jamais travaillé à Q______.

l. Sur ordre de dépôt du Ministère public, le service juridique de Q______ a expliqué que deux hommes dénommés "L______" y avaient été employés durant la période concernée.

Le 8 décembre 2022, sur présentation d'une planche photographique comportant notamment les photographies des deux individus concernés, A______ n'a reconnu aucun homme ayant participé à son agression.

m. Par lettre de son conseil du même jour, A______ a produit deux photographies – floues – du profil WhatsApp du dénommé "G______". Il a précisé que, le lendemain des faits dénoncés, M______ lui avait transmis le numéro de portable de l'intéressé, qu'il avait enregistré dans son téléphone portable.

n. Le 11 janvier 2023, le Ministère public a invité le plaignant à expliquer les circonstances dans lesquelles il avait obtenu ces images et la tardiveté de leur production, dès lors qu'il avait déclaré, lors de son audition du 15 mars 2022, ne disposer d'aucune information supplémentaire au sujet de l'identité de ses agresseurs.

o. Par lettre de son conseil du 27 janvier suivant, A______ a répondu qu'il s'agissait de captures d'écran du profil WhatsApp de son agresseur, qu'il avait faites le lendemain des évènements. Une "copie digitale" avait pu être retrouvée, dès lors qu'il ne disposait plus desdites images en raison d'un changement de téléphone portable.

p. Par pli du 22 juin 2023 au Ministère public, A______ s'est enquis de la suite réservée à sa lettre du 8 décembre 2022. Par ailleurs, dans la mesure où il avait indiqué que ses agresseurs se rendait régulièrement dans le restaurant D______, il souhaitait savoir si des "mesures" avaient été prises en lien avec cette information.

C. i. Dans sa décision querellée, le Ministère public a classé la procédure faute d'avoir pu identifier les auteurs de l'infraction (art. 319 al. 1 let. a CPP), précisant qu'elle pourrait être reprise en cas de faits nouveaux au sujet de l'identité de ceux-ci (art. 323 CPP).

ii. Le Ministère public a rejeté les réquisitions de preuve formulées par A______, au motif qu'il n'était pas envisageable de requérir de la police qu'elle se rende régulièrement sur les lieux de l'agression, son organisation ne le permettant pas. De plus, seuls les agents chargés du dossier avaient pris connaissance des photographies produites par le plaignant. Pour le surplus, la présence du dénommé "G______" sur les lieux des faits semblait très incertaine.

Par ailleurs, le plaignant avait mis plus d'une année pour produire des photographies pourtant déjà en sa possession. À cela s'ajoutait que la police avait déjà mené des recherches concernant une personne photographiée par le plaignant. Or, cet individu n'était pas impliqué dans les évènements en cause. Dans ces circonstances, des investigations menées au sujet d'une personne inconnue – figurant sur une photographie de mauvaise qualité et pouvant ne pas être impliquée dans les faits – n'étaient pas concevables.

D. a. Dans son recours, A______ relève qu'il n'était pas contesté qu'il avait été victime d'une agression. Or, le Ministère public n'avait pas entrepris toutes les mesures d'instruction nécessaires à l'appréhension du ou des auteurs des actes dénoncés.

Le 20 septembre 2021, il avait déposé plainte en donnant l'identité et la description de ses agresseurs, de même que des informations précises au sujet du lieu et de l'heure des faits. Aussi, ceux-ci s'étaient déroulés dans le quartier C______, lequel était "notoirement connu pour disposer de nombreuses caméras". Cela étant, aucune démarche n'avait été effectuée afin de trouver les auteurs des faits "à l'aide de la vidéosurveillance du canton".

À cela s'ajoutait qu'aucune investigation n'avait été menée sur la base des photographies – dont seuls les agents chargés du dossier avaient pris connaissance – qu'il avait produites du dénommé "G______". Le Ministère public avait également renoncé à demander à la police de se rendre régulièrement sur les lieux des faits pour des motifs d'organisation. En définitive, aucun acte d'enquête n'avait été entrepris pour tenter d'appréhender les auteurs des faits, malgré les éléments qu'il avait lui-même fournis.

Pourtant, une "simple vérification" de la vidéosurveillance du quartier C______, ou encore la diffusion des photographies de l'un des auteurs des faits dénoncés aux policiers patrouillant à proximité des lieux des faits constituaient des mesures d'instruction "raisonnables et proportionnées", qui auraient "très probablement" permis d'interpeller les individus concernés.

Pour ces motifs, il convenait d'annuler l'ordonnance querellée et d'ordonner au Ministère public d'entreprendre les mesures d'instruction précitées.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du plaignant qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant s'oppose au classement de la procédure.

3.1.  L'art. 319 al. 1 CPP prévoit que le Ministère public ordonne le classement de tout ou partie de la procédure lorsqu'aucun soupçon justifiant une mise en accusation n'est établi (let. a) ou lorsque les éléments constitutifs d'une infraction ne sont pas réunis (let. b). Cette disposition doit être appliquée conformément au principe "in dubio pro duriore", selon lequel un classement ne peut être prononcé que si la situation factuelle et juridique est claire. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 6B_33/2021 du 12 juillet 2021 consid. 2).

3.2.  À teneur de l'art. 314 al. 1 let. a CPP, le Ministère public peut suspendre une instruction, notamment, lorsque l’auteur ou son lieu de séjour est inconnu ou qu’il existe des empêchements momentanés de procéder.

3.3.  Lorsqu'il existe un obstacle temporaire à la poursuite de l'instruction, le ministère public peut, soit suspendre la procédure (art. 314 CPP), soit clore celle-ci (arrêt du Tribunal fédéral 6B_638/2021 du 17 août 2022 consid. 2.1.2).

Dans ce dernier cas de figure, le classement doit être rendu en application de l'art. 319 al. 1 let. a CPP (absence de soupçon(s) suffisant(s) justifiant une mise en accusation du prévenu), de façon à permettre une reprise de la cause (art. 323 CPP) en cas d'évolution de la situation (ACPR/136/2024 du 22 février 2024 consid. 3.1.1; ACPR/342/2023 du 10 mai 2023, consid. 2.2 et ACPR/167/2022 du 8 mars 2022, consid. 7.1).

3.4.  En l'espèce, il n'est pas contesté que les éléments constitutifs de l'infraction d'agression (art. 134 CP) sont réalisés. Force est cependant de constater que les informations recueillies dans le cadre des investigations menées par la police, et celles du recourant, n'ont pas permis d'établir l'identité du ou des auteur(s) des actes dénoncés.

Il ressort du dossier que le Ministère public a entrepris plusieurs actes d'enquête –ayant notamment adressé des ordres de dépôt à Q______, où l'un des agresseurs présumés du recourant travaillerait prétendument – pour tenter d'identifier le ou les auteur(s) de l'infraction, mais sans succès. Les recherches menées par la police – laquelle a mené son enquête sur la base, notamment, de l'intégralité des informations fournies par le recourant – sont également restées vaines. En l'état, on ne discerne pas quel acte d'instruction complémentaire permettrait d'obtenir un résultat différent.

Le recourant estime que le visionnage des images de vidéosurveillance du quartier C______ permettrait de confondre le ou les auteur(s) de son agression. Cela étant, il ressort du dossier que des demandes avaient été effectuées par la police auprès du restaurateur et de la CVP à l'époque des faits, mais qu'aucune image de vidéosurveillance des lieux n'avait pu être recueillie.

Le recourant ne propose aucun autre acte d'instruction raisonnable, ni réalisable, qui serait en mesure de faire avancer l'instruction, les autres investigations demandées apparaissant non seulement très aléatoires, mais également disproportionnées. On ne saurait en effet exiger de la police qu'elle se rende fréquemment sur les lieux des faits dénoncés, étant précisé que cette mesure d'instruction devrait être menée sur la base de simples allégations du recourant, lequel soutient, sans preuve, que ses agresseurs s'y rendraient régulièrement. On ne voit pas non plus en quoi la diffusion de la photographie – de qualité floue et produite par le recourant plus d'un an après son obtention – de l'un de ses agresseurs présumés aux patrouilles de police du quartier C______ permettrait d'appréhender celui-ci plus de deux ans et demi après les faits, étant précisé qu'il n'est pas démontré que l'intéressé fréquenterait, qui plus est couramment, le quartier concerné. Au surplus, il convient de relever, à l'instar du Ministère public, que des investigations ont déjà été menées par la police sur la base d'autres photographies transmises par le recourant – sur lesquels figuraient prétendument l'un des auteurs de son agression –, mais qu'il s'est avéré que la personne photographiée n'était pas impliquée dans les évènements dénoncés. Il ne peut donc être exclu que l'homme apparaissant sur la photographie dont le recourant souhaite la diffusion ne soit pas lié aux faits litigieux.

Dans ces circonstances, c'est avec raison que le Ministère public a considéré que l'enquête menée par la police n'avait pas donné de résultats probants et qu'aucune investigation supplémentaire ne paraissait susceptible de conduire à l'identification et à l'interpellation du ou des auteur(s) des évènements dénoncés. Il sied de préciser que la procédure pourra toujours être reprise en cas de moyens de preuve ou de faits nouveaux déterminants, le Ministère public ayant d'ailleurs expressément réservé cette hypothèse dans sa décision.

L'ordonnance querellée ne prête dès lors pas le flanc à la critique.

4.             Justifiée, elle sera donc confirmée.

5.             Le recourant, au bénéfice de l'assistance juridique gratuite, est exonéré des frais de la procédure de recours (art. 136 al. 2 let. b CPP).

6.             La procédure étant close (art. 135 al. 2 CPP), il convient de fixer l'indemnisation du conseil juridique gratuit en deuxième instance.

6.1.  À teneur de l'art. 135 al. 1 CPP, applicable par le renvoi de l'art. 138 CPP, le conseil juridique gratuit est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. À Genève, le tarif est édicté à l'art. 16 RAJ (E 2 05 04); il prévoit une indemnisation sur la base d'un tarif horaire de
CHF 200.- pour un chef d'étude (art. 16 al. 1 let. c RAJ). Seules les heures nécessaires sont retenues; elles sont appréciées en fonction, notamment, de la nature, de l'importance, et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (art. 16 al. 2 RAJ).

6.2.  En l'occurrence, le conseil du recourant n'a pas chiffré ni justifié son activité. Eu égard au travail accompli, soit un recours de 8 pages et demie (pages de garde et conclusions comprises, dont environ 5 pages de discussion juridique), un montant de CHF 753.90 lui sera alloué, correspondant à 3h30 heures d'activité au tarif horaire de CHF 200.-, TVA à 7.7 % incluse (taux applicable jusqu'au 31 décembre 2023).

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Alloue à Me B______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 753.90 TTC pour la procédure de recours.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).