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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/25233/2022

ACPR/703/2023 du 12.09.2023 sur OTMC/2434/2023 ( TMC ) , REFUS

Descripteurs : DURÉE
Normes : CPP.221

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/25233/2022 ACPR/703/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 12 septembre 2023

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, représenté par Me C______,

recourant,

 

contre l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire rendue le 21 août 2023 par le Tribunal des mesures de contrainte,

 

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Par acte déposé au greffe de la prison, à l'attention de son Directeur, le 28 août 2023, A______, en personne, recourt contre l'ordonnance du 21 août 2023, notifiée le lendemain, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a ordonné la prolongation de sa détention provisoire jusqu'au 28 novembre 2023.

Par courriel du 1er septembre 2023, son conseil a informé la Chambre de céans maintenir le recours.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a.        A______, ressortissant albanais né le ______ 1994, a été arrêté le 28 novembre 2022. Le lendemain, le TMC a ordonné sa mise en détention provisoire, laquelle a été régulièrement prolongée jusqu’au 28 août 2023.

b.        Précédemment, dans la P/1______/2019, A______, interpellé avec D______, le 4 avril 2020 à la suite de la saisie saisie d'un sachet d'héroïne, a été condamné par ordonnance pénale du 5 avril 2020 (procédure cependant toujours ouverte à la lecture du casier judiciaire du 16 février 2023).

Dans la procédure P/2______/2021, portant sur un réseau de trafic de cocaïne et d'héroïne à Genève, plusieurs individus avaient été interpellés et condamnés, dont D______. L'ADN de A______ avait été retrouvé, le 24 février 2021, sur des sachets d'héroïne saisis.

c.         À teneur du rapport d'arrestation du 28 novembre 2022, à la suite d'une enquête de police sur un réseau de trafiquants d'héroïne originaires des Balkans (plan J______), A______ et E______ ont été interpellés dans un appartement à F______ [GE]. La perquisition du logement a permis la découverte de 1'392.7 grammes d'héroïne, 348.2 grammes de produit de coupage, plusieurs balances électroniques, du matériel de conditionnement, un carnet de comptabilité, un pistolet d'alarme et de la munition.

Le rapport de police du 26 avril 2023 révèle que l'ADN de A______ a été retrouvé sur trois téléphones portables saisis – dont l'un utilisé par le réseau pour prendre les commandes d'héroïne auprès des toxicomanes et donner les instructions aux "ouvriers" –, ainsi que sur trois cartes SIM saisies dans le logement de F______ – utilisées dans le cadre du trafic et ayant fait l'objet de mesures de surveillance secrètes –.

d.        A______ a été prévenu d'infraction à l'art. 19 al. 1 et 2 LStup et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. a et b LEI), pour avoir, à Genève :

-           dans le courant du mois de février 2021, participé à un important trafic de stupéfiants, portant à tout le moins sur 21 sachets de 5 grammes d'héroïne chacun, ainsi qu'une boulette de cocaïne, drogue destinée à être écoulée sur le territoire genevois (mise en prévention déjà prononcée le 17 septembre 2021 dans la P/2______/2021);

-           depuis une date que l'instruction devra déterminer, mais à tout le moins depuis le mois de septembre 2022, participé à un important trafic de stupéfiants, portant sur de l'héroïne, écoulant plusieurs kilogrammes de cette drogue ;

-           le 28 novembre 2022, dans l'appartement sis quai 3______ no. ______, à F______, détenu une quantité de 1'392.7 grammes d'héroïne et 348.2 grammes de produit de coupage ainsi que du matériel de conditionnement ;

-           à tout le moins depuis le mois de septembre 2022, pénétré et séjourné illégalement en Suisse, en étant démuni de tout document d'identité et de moyens de subsistance, dans le but de s'adonner au trafic de stupéfiants.

e.         A______ conteste toute implication dans le trafic reproché. Il se trouvait depuis 7 jours dans l'appartement où il avait été interpellé. Il ne se rappelait pas avoir loué ledit appartement depuis 2018. Il ignorait qu'il y avait de la drogue dans l'appartement. Il ne connaissait pas G______ avant qu'il ne se retrouve dans la même cellule que lui à B______. Un Albanais lui avait demandé d'acheter des sachets minigrip vides, raison pour laquelle son ADN avait dû se retrouver dessus.

f.         À teneur du rapport de renseignements du 20 janvier 2023, à la suite de mesures de surveillance secrètes, la police avait constaté que le réseau de trafiquants était organisé de manière professionnelle (chef de plan, ouvrier, récolteur d'argent et ravitailleur). Ainsi, E______, G______, H______ et I______ avaient effectué des transactions de drogues/argent pour le compte du réseau à la suite de commandes de toxicomanes; le premier nommé récoltait également l'argent des transactions.

g.        Le 18 juin 2023, la police a rendu son rapport de renseignements (113 pages) sur les mesures secrètes; elle a, notamment, mis en évidence les éléments confirmant l'implication active de A______ dans le réseau de trafiquants de drogue; il récoltait l'argent du réseau auprès des ouvriers; il gérait en outre un "plan".

h.        Lors de l'audience du 26 juillet 2023, le Procureur a commencé l'interrogatoire des prévenus sur les résultats des écoutes des conversations téléphoniques. Le Procureur a expliqué au prévenu la procédure à suivre s'il souhaitait un changement d'avocat d'office.

C.            Dans son ordonnance, le TMC a retenu que, malgré les dénégations du prévenu, les charges, graves vu l'ampleur du trafic de stupéfiants, demeuraient suffisantes pour justifier son maintien en détention provisoire, eu égard aux constatations de la police, aux saisies de drogue et de matériel de conditionnement et au "hit" de son ADN sur l'ouverture de 10 sachets minigrip contenant de l'héroïne. En outre, deux nouvelles personnes avaient été interpellées dans le canton de Vaud après avoir acquis 80 grammes d'héroïne auprès du réseau, actif depuis au moins 7 ans, auquel appartiendrait le prévenu.

L'instruction se poursuivait, le Ministère public devant procéder aux auditions des prévenus et de toxicomanes, procéder aux arrestations d'autres personnes impliquées dans le trafic, les confronter aux prévenus puis déterminer la suite de la procédure.

Le risque de fuite était concret et élevé, A______ étant de nationalité étrangère et sans aucune attache avec la Suisse; ce risque était renforcé par la peine-menace et concrètement encourue ainsi que par la perspective d'une expulsion de Suisse (art. 66a ss CP). Il se justifiait dès lors de le maintenir en détention avant jugement afin de s'assurer de sa présence au procès et garantir l'exécution de la peine et/ou de la mesure d'expulsion qui seraient cas échéant prononcées. Le risque de collusion demeurait concret, au vu des nombreux actes d'enquêtes en cours, notamment en vue d'identifier d'autres personnes impliquées dans le trafic, et des auditions de toxicomanes qui pourraient intervenir, notamment afin d'établir depuis quand le plan "J______" était actif, de sorte qu'il convenait d'éviter que le prévenu ne puisse contacter ces personnes et influencer leurs futures déclarations, et ne compromette ainsi l'établissement des faits. Le risque de réitération était tangible, considérant les antécédents du prévenu, déjà condamné à 3 reprises entre 2016 et 2020, notamment pour plusieurs délits en matière de LStup et pour entrée illégale, étant relevé qu'une procédure était pendante à son encontre pour une infraction à la loi sur les stupéfiants.

Le principe de proportionnalité demeurait largement respecté et aucune mesure de substitution n'était susceptible d'atteindre le but de la détention, au vu des risques retenus.

D.           a. Dans son courrier adressé au directeur de B______, A______ rappelle être détenu depuis 9 mois; se plaint de ne pas avoir obtenu de rendez-vous avec le psychologue de l'établissement; déclare vouloir faire recours contre la prolongation du TMC; se plaint de l'inactivité de son conseil; considère que l'instruction "va très lentement".

b. Par courrier du 29 août 2023, reçu par la Chambre de céans le 4 septembre suivant, A______ conteste faire partie d'un groupe, un gang ou un quelconque réseau. Il était arrivé en Suisse peu avant son arrestation; il s'était trouvé au mauvais endroit au mauvais moment; il n'avait rien à voir avec la drogue trouvée dans son appartement. Il était en Albanie en septembre et octobre 2022.

c. Le Ministère public conclut au rejet du recours. Il précise que depuis la décision querellée, deux autres personnes avaient été interpellées et entendues par la police et allaient être prochainement confrontées aux prévenus.

d. Le TMC maintient les termes de son ordonnance sans autres observations.

e. Le recourant, par son conseil, a précisé ne pas avoir d'autres éléments à apporter.

EN DROIT :

1.             La lettre au Directeur de B______ doit être interprétée comme un recours, recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre de céans n'est pas l'autorité compétente pour traiter la question de l'accès au service médical, étant précisé que le courrier était initialement adressé au directeur de la prison. En outre, la demande de changement d'avocat d'office n'est pas recevable faute de décision antérieure du Ministère public, ce dernier ayant d'ailleurs précisé au prévenu, lors de l'audience du 26 juillet 2023, la procédure à suivre.

3.             S'agissant des charges, au sens de l'art. 221 al. 1 CPP, il peut être renvoyé, en tant que de besoin, à la motivation adoptée par le premier juge (art. 82 al. 4 CPP; ACPR/747/2020 du 22 octobre 2020 consid. 2 et les références), qui expose les indices graves pesant sur le prévenu.

En particulier, il sera rappelé la quantité de drogues trouvée dans le logement qu'il louait depuis 2018 et les traces de son ADN retrouvées sur des sachets minigrips et les cartes SIM ayant fait l'objet de mesures secrètes.

4.             Le recourant ne conteste pas les risques retenus par le TMC.

À juste titre, le risque de fuite, en particulier, est très concret vu sa nationalité étrangère et son absence d'attaches en Suisse.

5.             Selon le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention, par exemple l'interdiction d'entretenir des relations avec certaines personnes (al. 2 let. g).

En l'espèce, aucune mesure de substitution n'est apte à pallier les risques retenus par le TMC et le prévenu n'en propose d'ailleurs aucune.

6.             Le recourant semble se plaindre de la violation du principe de célérité.

6.1.       L'art. 29 al. 1 Cst. dispose que toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.

À teneur de l'art. 5 al. 1 CPP, les autorités pénales engagent les procédures pénales sans délai et les mènent à terme sans retard injustifié. Lorsque le prévenu est détenu, la procédure est conduite en priorité (art. 5 al. 2 CPP).

Le grief de violation du principe de la célérité ne doit être examiné, lors du contrôle judiciaire de la détention, que pour autant que le retard dans la procédure soit propre à mettre en cause la légalité de la détention provisoire et donc à justifier un élargissement. N'importe quel retard n'est cependant pas suffisant. Il doit s'agir d'un manquement particulièrement grave, faisant au surplus apparaître que l'autorité de poursuite n'est plus en mesure de conduire la procédure à chef dans un délai raisonnable (ATF 140 IV 74 consid. 3.2; 137 IV 118 consid. 2.1; 137 IV 92 consid. 3.1 et les arrêts cités). La diligence consacrée à une instruction pénale ne s'apprécie pas seulement à l'aune du nombre ou de la fréquence des audiences d'instruction (ACPR/339/2020 du 22 mai 2020 consid. 5.2.; ACPR/196/2018 du 4 avril 2018 consid. 5.2.; ACPR/373/2013 du 7 août 2013 consid. 3.3.). On ne saurait ainsi reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont inévitables dans une procédure.

La violation éventuelle du principe de la célérité n'entraîne pas la libération immédiate du détenu lorsque la détention demeure matériellement justifiée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1B_150/2012 du 30 mars 2012 consid. 3.3; 1B_44/2012 consid. 4 et 5).

6.2.       En l'espèce, la procédure ne viole pas le principe de la célérité. Aucun retard ne peut être reproché au Procureur étant rappelées l'ampleur du trafic, celle des écoutes menées par la police et la peine-menace des infractions retenues contre le prévenu.

Les principes jurisprudentiels sus-rappelés étant respectés, le grief du recourant est infondé.

7.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

8.             Il n'y a pas lieu d'indemniser son conseil nommé d'office, le recourant ayant agi personnellement.

* * * * *

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Oriana BRICENO LOPEZ, greffière.

 

La greffière :

Oriana BRICENO LOPEZ

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/25233/2022

ÉTAT DE FRAIS

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

 

 

Total

CHF

900.00