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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/3032/2023

ACPR/688/2023 du 05.09.2023 sur ONMMP/2044/2023 ( MP ) , REJETE

Recours TF déposé le 17.10.2023, 7B_753/2023
Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;VOIES DE FAIT
Normes : CPP.310; CP.126

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/3032/2023 ACPR/688/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 5 septembre 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, agissant en personne,

recourante,


contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 23 mai 2023 par le Ministère public,


et


LE MINISTÈRE PUBLIC
de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte déposé le 5 juin 2023, complété par un second déposé le 28 suivant, A______ recourt contre l'ordonnance du 23 mai 2023, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte contre B______.

La recourante, sans prendre de conclusions formelles, demande, en substance, que B______ "réponde de ses actes" et sollicite, par ailleurs, l'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure de recours.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 20 décembre 2022, A______, née le ______ 1980, a déposé plainte contre B______.

Durant une cérémonie de baptême tenue le 24 septembre précédent par l'Église C______, dont elle est membre, alors qu'elle venait de s'adresser à lui, B______ lui avait donné deux coups "dans le ventre" avec son bras gauche. Elle n'était pas tombée et n'avait pas eu de marques mais s'était retrouvée en état de choc. Elle avait pleuré durant une semaine et, un mois plus tard, avait fait un malaise.

b. Entendu par la police le 11 janvier 2023, B______, né le ______ 1964, a expliqué que le jour en question, alors qu'il assistait au baptême de son fils, A______ était venue lui chuchoter quelque chose à l'oreille. Comme il était accaparé par la cérémonie, cette proximité l'avait surpris et dérangé. Il avait alors écarté A______ à deux reprises pour se donner de l'espace. Il n'avait pas usé de force dans ses gestes.

c. D______, présente lors de la cérémonie, a déclaré à la police que A______ s'était approchée de B______ pour lui parler. Ce dernier avait fait un "léger mouvement de coude, bras contre le corps, en direction du bras" de A______, donnant l'impression qu'il voulait s'éloigner de celle-ci.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public retient que l'atteinte physique alléguée par A______ ne revêtait pas une intensité suffisante pour être constitutive de voies de fait.

D. a. Dans son premier acte de recours, A______ détaille les circonstances de la cérémonie, de son "agression" et les conséquences de celle-ci sur sa santé. Sur une échelle d'un à dix, la force des coups de B______, donnés "dans son abdomen", se situait entre six et sept.

b. Dans son second acte, A______ liste les personnes à entendre et paraphrase des discussions qu'elle avait eues avec d'autres membres de sa communauté après l'épisode du 20 septembre 2022.

c. À l'appui de ces deux actes et après leur dépôt, A______ produit de nombreux documents, dont des certificats médicaux et des rapports de médecins, en lien avec son état de santé, ainsi qu'une vidéo de la cérémonie du 20 septembre 2022, qui ne permet pas de voir les faits dénoncés.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et – faute de notification conforme à l'art. 85 al. 2 CPP – dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

1.2. Les pièces nouvelles produites devant la juridiction de céans sont également recevables, la jurisprudence admettant la production de faits et de moyens de preuve nouveaux en deuxième instance.

En revanche, la motivation d'un recours doit être entièrement contenue dans l'acte lui-même, qui ne saurait dès lors être complété ou corrigé ultérieurement (ATF
134 II 244 consid. 2.4.2 et 2.4.3; ACPR/448/2023 du 13 juin 2023 consid 2; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 23 ad art. 385). Il s'ensuit que le second recours, déposé le 28 juin 2023, est irrecevable et qu'il n'en sera pas tenu compte.

2.             La recourante reproche au Ministère public de n'être pas entré en matière sur sa plainte.

2.1. À teneur de l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Cette disposition doit être appliquée conformément à l'adage in dubio pro duriore (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1456/2017 du 14 mai 2018 consid. 4.1 et les références citées). Celui-ci découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et art. 2 al. 2 CPP en relation avec les art. 319 al. 1 et 324 al. 1 CPP; ATF 138 IV 86 consid. 4.2) et signifie qu'en principe un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies (ATF 146 IV 68 consid. 2.1).

2.2. Les voies de fait, réprimées par l'art. 126 CP, se définissent comme des atteintes physiques qui excèdent ce qui est socialement toléré et qui ne causent ni lésions corporelles, ni dommage à la santé. Une telle atteinte peut exister même si elle n'a causé aucune douleur physique (ATF 119 IV 25 consid. 2a; ATF 117 IV 14 consid. 2a). L'atteinte visée par cette disposition présuppose une certaine intensité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_386/2019 du 25 septembre 2019 consid. 2.1).

Peuvent être qualifiées de voies de fait, une gifle, un coup de poing ou de pied, de fortes bourrades avec les mains ou les coudes (arrêt 6B_1405/2017 du 10 juillet 2018 consid. 2.1 et les références citées), l'arrosage d'une personne au moyen d'un liquide, l'ébouriffage d'une coiffure soigneusement élaborée, un " entartage ", la projection d'objets durs d'un certain poids (ATF 117 IV 14 consid. 2a/cc; arrêts 6B_163/2008 du 15 avril 2008 consid. 2; 6P_99/2001 du 8 octobre 2001 consid. 2b et 2c), le renversement dans un lieu public d'un thé chaud et d'un sucrier sur la tête de la victime (arrêt 6B_1009/2014 du 2 avril 2015 consid. 4), le fait de pousser une personne avec force à l'aide des deux mains pour la faire sortir d'un appartement (arrêt 6B_1288/2016 du 8 novembre 2017 consid. 2), le fait de saisir le bras d'une personne et la retenir par la force (arrêt 6B_693/2017 du 24 août 2017 consid. 2.1). De simples bousculades telles qu'elles sont fréquentes dans les foules ou dans les files d'attente ne dépassent pas le stade de ce qui est socialement toléré et ne représentent dès lors pas des voies de fait (ATF 117 IV 14 consid. 2a/bb). 

2.3. L'auteur de voies de fait doit agir avec intention. Celle-ci peut revêtir la forme du dessein, du dol simple ou du dol éventuel (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 6 ad art. 126).

2.4. En l'espèce, la recourante allègue avoir reçu deux coups de la part du mis en cause, "avec une intensité se situant entre six et sept sur une échelle de dix". Toutefois, elle a spontanément déclaré n'être pas tombée et n'avoir eu aucun hématome.

L'intéressé a admis avoir usé de son bras, à deux reprises, pour écarter la précitée, en niant toutefois avoir usé de la moindre force. Il ne cherchait qu'à se donner de l'espace vis-à-vis de la recourante. Le témoin a également parlé d'un "léger mouvement du coude" du mis en cause, visant à éloigner la recourante.

Ces éléments – à défaut de preuves objectives contraires, et notamment d'images de l'incident – permettent de considérer que le mis en cause a simplement écarté du bras la recourante, sans la moindre amplitude ni force dans le geste, ni volonté de la bousculer au point de la déséquilibrer.

Ce geste, similaire à une personne qui jouerait des coudes dans une foule pour se frayer un chemin, n'atteint pas une intensité suffisante pour constituer des voies de fait, comme le retient à juste titre le Ministère public.

Le traumatisme et la dégradation de sa santé que la recourante allègue avoir subis à la suite de cet évènement ne sauraient permettre de retenir la réalisation de l'infraction susvisée. En effectuant ce geste – en somme anodin –, le mis en cause ne pouvait vouloir, ni même imaginer, qu'il entrainerait de telles conséquences. Pour cette raison, les nombreux documents médicaux produits par la recourante ne sont pas à même de renverser cette appréciation.

3.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée. Le recours, qui s'avère mal fondé, pouvait être rejeté sans échange d'écritures ni débats (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP).

4.             La recourante sollicite l'assistance judiciaire gratuite pour la procédure de recours.

4.1. À teneur de l'art. 136 al. 1 CPP, la direction de la procédure accorde entièrement ou partiellement l'assistance judiciaire à la partie plaignante pour lui permettre de faire valoir ses prétentions civiles lorsqu'elle est indigente (let. a) et que l'action civile ne paraît pas vouée à l'échec (let. b). La cause ne devant pas être dénuée de toute chance de succès, l'assistance peut être refusée lorsqu'il apparaît d'emblée que la position du requérant est juridiquement infondée (arrêt du Tribunal fédéral 1B_254/2013 du 27 septembre 2013 consid. 2.1.1. et les références citées).

4.2. En l'occurrence, la question de l'indigence de la recourante peut souffrir de rester indécise. Pour les motifs exposés plus haut, le recours était voué à l'échec, si bien que les conditions pour l'octroi de l'assistance judiciaire ne sont pas remplies.

La demande sera, partant, rejetée.

5.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en intégralité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

Le refus d'octroi de l'assistance juridique gratuite est rendu sans frais (art. 20 RAJ).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance judiciaire.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

 

P/3032/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

- demande sur récusation (let. b)

CHF

Total

CHF

900.00