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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/12303/2022

ACPR/690/2023 du 05.09.2023 sur ONMMP/4727/2022 ( MP ) , ADMIS/PARTIEL

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;VIOLATION DU SECRET PROFESSIONNEL(DROIT PÉNAL);FRAIS JUDICIAIRES;PLAIGNANT;ACTION RÉCURSOIRE
Normes : CPP.310; CP.321; CPP.427; CPP.420

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/12303/2022 ACPR/690/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 5 septembre 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, France, agissant en personne,

recourante,

 


contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 23 décembre 2022 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 5 janvier 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 23 décembre précédent, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a renoncé à entrer en matière sur les faits visés par la procédure (chiffre 1 du dispositif), l'a condamnée à la moitié des frais de la procédure fixés à CHF 510.-, soit CHF 255.- (chiffre 2), laissé le solde à la charge de l'État (chiffre 3), l'a condamnée à payer à B______ la somme de CHF 150.- à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (chiffre 4), alloué à B______ une indemnité complémentaire de CHF 150.- (chiffre 5) et, enfin, l'a condamnée à payer à l'État les montants figurant sous les chiffres 3 et 5, soit un total de CHF 405.-, en application de l'art. 420 CPP (chiffre 6).

La recourante demande l'annulation de l'ordonnance querellée, de l'action récursoire et "des frais [auxquelles elle est] condamnée à payer".

b. La recourante a versé les sûretés en CHF 800.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par ordonnance du 5 mars 2020, le Tribunal de première instance (ci-après: TPI) a désigné Me B______ en qualité de mandataire d'office d'A______, dans le cadre de la procédure civile l'opposant à son ex-conjoint.

b.a. En amont d'une audience prévue le 10 mai 2022, pour laquelle la comparution personnelle des parties avait été ordonnée, A______ a envoyé deux courriels à B______, respectivement des 27 avril et 4 mai 2022, dont la teneur était la suivante:

- "Tout d'abord, navrée pour mon silence. Je suis actuellement hospitalisée, et je vais l'être encore quelques semaines. Je suis par conséquent en arrêt maladie, je vous transmets mon CM ci-joint. […] Je vous remercie également de veiller à ce que mon certificat médical ne soit pas diffusé à la partie adverse. Et de ne pas informer la partie adverse de mon hospitalisation. C'est une information qui relève du secret médical";

- "Je vous fais parvenir mon certificat d'hospitalisation. […] Pour le Tribunal, j'ai demandé quand même à ma Doctoresse le certificat que je vous joins. Si jamais ça vous est utile pour justifier moon absence, mes certificats ayant été précédemment critiqués par la partie adverse, je préfère que vous ayez tous les documents nécessaires" (sic).

b.b. Le certificat médical envoyé par A______ est signé par une Docteure spécialiste en gynécologie et obstétrique qui atteste que l'intéressée est "hospitalisée depuis le 27.04.2022 pour une durée indéterminée".

c. Le procès-verbal de l'audience du 10 mai 2022, pour laquelle l'absence d'A______ a été déclarée "excusée", prête les déclarations suivantes à B______:

"Je n'ai pas d'adresse à communiquer de ma mandante. Elle habite effectivement en France avec [sa fille]. L'hospitalisation de ma mandante est à durée indéterminée et risque de se prolonger".

d. Le lendemain de ladite audience, A______ a adressé à son avocate un courriel comportant les passages suivants:

"J'ai lu le pv. Je ne comprends pas les questions sur mon adresse et sur un conjoint. […] Relatif à mon hospitalisation: l'information n'était-elle pas confidentielle? Les certificats ont été donnés à la partie adverse? Y a-t-il eu des discussions à ce sujet non mentionné au Pv?" (sic).

Par courriel du même jour, B______ a répondu à A______: "vu que la présence des parties était exigée, j'étais obligée de déposer le certificat d'hospitalisation pour que vous soyez excusée. Sinon, vous auriez été en défaut".

e. Le 12 mai 2022, A______ a porté plainte contre B______ pour "non-respect et violation du secret médical et du secret de fonction".

En substance, elle lui reproche d'avoir, en violation de ses instructions, produit son certificat médical à l'audience, le rendant ainsi accessible à son ex-conjoint. Ledit certificat médical était suffisamment explicite pour que ce dernier pût comprendre la raison de son hospitalisation – à savoir une grossesse – et B______ savait que la confidentialité sur ce sujet était nécessaire en raison du comportement nocif et destructeur de son ancien compagnon.

f. Invitée à se déterminée sur cette plainte, B______, sous la plume de son conseil, a d'abord précisé avoir été relevée de son mandat en faveur de A______. À l'origine, sa nomination à la défense de celle-ci découlait du fait que la procédure civile stagnait en raison des absences successives de son ancienne cliente aux audiences et la présentation de certificats médicaux que celle-ci avait elle-même rédigés. Du courriel du 4 mai 2022, elle avait compris qu'elle était pleinement autorisée à produire le certificat médical reçu de A______. Cela était également nécessaire pour la défense de cette dernière, dès lors que le TPI avait avisé les parties que l'audience du 10 mai 2022 serait la dernière et que leur comparution personnelle était obligatoire. Elle sollicitait une indemnité de CHF 2'238.60, à mettre à la charge de A______, correspondant à l'émolument de décision de la Commission du Barreau pour la levée du secret et la préparation de ses observations par son conseil.

Parmi les pièces jointes figurait un courrier du 9 mai 2022, signé de sa main, informant le TPI que A______ ne pourrait pas assister à l'audience du lendemain en raison d'une hospitalisation. Le certificat médical était joint et une copie était réservée au conseil de la partie adverse.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public constate que B______ n'était soumise ni au secret médical, ni au secret de fonction, de sorte qu'elle ne pouvait pas avoir enfreint un quelconque devoir, lié à de tels secrets. S'agissant d'une éventuelle violation du secret professionnel (art. 321 CP), il ressortait du dossier que A______ était tenue d'informer le juge civil de son incapacité à se présenter à l'audience du 10 mai 2022. B______ n'avait donc d'autre choix que de fournir le certificat médical de sa cliente d'alors. De surcroît, l'avocate pouvait comprendre, vu la teneur du courriel du 4 mai 2022, qu'elle était en droit de transmettre ce document au TPI.

A______, ayant dénoncé une violation du secret de fonction, infraction poursuivie d'office, et une violation du secret professionnel, infraction poursuivie sur plainte, il se justifiait de mettre à sa charge la moitié des frais de procédure, eu égard à la non-entrée en matière prononcée. La cause ne présentant pas de complexité particulière, B______, avocate de profession, pouvait se défendre seule, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de l'indemniser pour les honoraires de son conseil. En revanche, l'émolument de CHF 300.- pour la décision de levée du secret professionnel, nécessaire à B______ pour se déterminer sur la plainte de A______, devait être mis, pour moitié, à la charge de cette dernière.

Enfin, A______ avait accusé B______ de violation du secret professionnel en sachant que la production du certificat médical était nécessaire à sa défense et avait autorisé son conseil à transmettre le document au tribunal. Ses accusations étaient ainsi infondées et, en déposant sa plainte, elle avait, à tout le moins par négligence grave, provoqué l'ouverture de la procédure. L'action récursoire de l'art. 420 CPP permettait ainsi à l'État de réclamer à l'intéressée le remboursement de la moitié des frais de la procédure et la moitié de l'indemnité allouée à B______.

D. a. Dans son recours, A______ revient sur sa situation personnelle et plus particulièrement sur le conflit l'opposant à son ex-conjoint et les risques auxquels elle s'exposerait si celui-ci devait obtenir des renseignements la concernant. Pour cette raison, elle avait expressément instruit B______ de ne pas fournir son certificat médical à la partie adverse mais cette dernière, en connaissance de cause, avait délibérément choisi de le faire malgré tout. La teneur du document ne laissait pas la place au doute quant à la raison de son hospitalisation. Plutôt que d'agir dans ses intérêts, B______ ne l'avait pas suffisamment conseillée, n'avait pas protégé son secret médical, avait divulgué des informations et des documents sans son accord et discuté en audience de sa grossesse et de sa vie de couple. Elle avait, en outre, déposé plainte de bonne foi, en l'étayant avec des documents. Sa condamnation, par l'action récursoire, servait juste d'exemple qu'un "civil" ne pouvait pas défendre ses droits face à un "avocat", même si ce dernier ne faisait pas son travail et trahissait son client.

b. Dans ses observations, le Ministère public estime que A______ n'invoquait, dans le recours, aucun argument susceptible de remettre en cause l'ordonnance querellée, ou alléguait des faits qui excédaient l'objet du litige.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et – faute de notification conforme à l'art. 85 al. 2 CPP – dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La recourante, qui agit en personne, s'oppose à l'ordonnance querellée dans sa globalité.

On peut toutefois déduire, sans préjudice pour sa part, qu'elle conteste uniquement la non-entrée en matière en tant qu'elle porte sur la violation du secret professionnel – in casu, de l'avocat – et non sur la violation du secret de fonction auquel la mise en cause n'est, en tout état, pas soumise.

2.1. Selon l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis. Cette disposition doit être appliquée conformément à l'adage "in dubio pro duriore". Celui-ci découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et art. 2 al. 2 CPP en relation avec les art. 319 al. 1 et 324 al. 1 CPP) et signifie qu'en principe une non-entrée en matière ne peut être prononcée par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1).

2.2. L'art. 321 ch. 1 CP punit, sur plainte, notamment les avocats et défenseurs en justice qui révèlent un secret à eux confié en vertu de leur profession ou dont ils ont eu connaissance dans l’exercice de celle-ci.

2.2.1. La notion de secret doit être comprise largement. Un fait peut ne pas être véritablement secret, en ce sens qu'il est connu d'un cercle restreint de personnes, mais néanmoins revêtir un caractère confidentiel, en raison de la volonté du mandant. (A. MACALUSO/ L. MOREILLON/ N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 27 et n. 31 ad art. 321).

2.2.2. Le comportement punissable consiste à révéler le secret à une personne non autorisée. La communication à un tiers qui connaissait déjà le fait secret ne constitue donc pas une révélation, à moins qu'elle ait renforcé une connaissance qui n'était qu'incertaine ou présumée (A. MACALUSO/ L. MOREILLON/ N. QUELOZ (éds), op. cit., n. 72 ad art. 321; M. DUPUIS/ L. MOREILLON/ C. PIGUET/ S. BERGER/ M. MAZOU/ V. RODIGARI (éds), Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., Bâle 2017, n. 32 ad art. 321).

La révélation d'un fait soumis au secret professionnel peut, en présence de l'un des motifs justificatifs suivants, être considérée comme licite : le client bénéficiaire du secret y consent (art. 321 al. 1, in limine, CP) – accord qui peut être tacite ou résulter d'actes concluants (M. DUPUIS/ L. MOREILLON /C. PIGUET /S. BERGER / M. MAZOU/ V. RODIGARI (éds), op. cit., n. 42 ad art. 321) –; l'autorité supérieure ou de surveillance de l'avocat l'a autorisée par écrit (art. 321 al. 2, in fine, CP); il existe un autre motif justificatif, légal (art. 14 CP et ss) ou extralégal (M. DUPUIS/ L. MOREILLON/ C. PIGUET/ S. BERGER/ M. MAZOU/ V. RODIGARI (éds), op. cit., n. 58 et ss ad art. 321).

2.2.3. Les obligations professionnelles légales constituent notamment la base d'une justification au sens de l'art. 14 CP (ACPR/120/2022 du 21 février 2022 consid. 4.2.4.2).

La LLCA règle, à l'art. 12, les devoirs professionnels de l'avocat. Ceux-ci doivent "exercer leur profession avec soin et diligence" (let. a). En tant que devoir professionnel, il incombe à l'avocat de défendre au mieux les intérêts de son client. Ils sont en premier lieu les défenseurs des intérêts des parties et, à ce titre, agissent unilatéralement pour leur client (cf. ATF 130 II 270 consid. 3.2.2; 106 Ia 100 consid. 6b p. 104 s.). Dans le procès civil, il convient notamment de respecter les obligations procédurales d'exposer et de motiver les faits qui incombent au client (cf. ATF 144 III 519 consid. 5.2; 141 III 433 consid. 2.6).

2.3. En l'espèce, la recourante reproche à la mise en cause d'avoir, en contradiction avec les instructions reçues, remis au TPI un certificat médical la concernant, dévoilant à son ex-conjoint "le secret" de son hospitalisation. Ce faisant, l'avocate aurait enfreint l'art. 321 CP.

En transmettant le document en question le 9 mai 2022, la mise en cause a anticipé l'absence de sa cliente – soit la recourante – à l'audience agendée le lendemain, pour laquelle la comparution personnelle des parties avait été ordonnée. Sa démarche visait ainsi à s'assurer que sa mandante ne soit pas considérée comme défaillante au sens du Code de procédure civile (art. 147 al. 1 CPC), avec les conséquences procédurales et matérielles qui peuvent en découler.

La défense des intérêts de la recourante commandait ainsi à la mise en cause de justifier l'absence de sa cliente d'alors, en l'occurrence par le certificat médical attestant de l'hospitalisation de l'intéressée.

La mise en cause pouvait, en outre, inférer du courriel de la recourante du 4 mai 2022 qu'elle avait l'accord de cette dernière pour procéder de la sorte. En effet, à teneur de ce message, la recourante lui a transmis le certificat médical, à titre de "documents nécessaires", dans le cas où celui-ci s'avérait "utile pour justifier [son] absence à l'audience". Certes, ces consignes étaient contradictoires avec celles contenues dans le courriel du 27 avril précédent, mais la chronologie de leur envoi pouvait laisser supposer que le second révoquait les instructions du premier.

Par ailleurs, la mise en cause s'est limitée à transmettre comme information l'hospitalisation de la recourante. Rien au dossier ne permet de conclure qu'elle aurait fourni plus de détails au TPI et, plus particulièrement, à la partie adverse, ni discuté du sujet plus en avant durant l'audience. Enfin, la grossesse de la recourante – réel point sur lequel portait le secret – n'apparaissait pas à la lecture du certificat médical. Le document est succinct et vague, faisant uniquement état d'une hospitalisation pour une durée indéterminée. Que la signataire du document soit une spécialiste en gynécologie et obstétrique ne permettait pas encore de conclure à une grossesse, même pour son ex-compagnon, la liste des pathologies traitées par cette branche de la médecine étant abondante.

En résumé, la mise en cause n'a transmis que les informations strictement nécessaires pour pouvoir assurer la défense des intérêts de la recourante, laquelle avait préalablement laissé penser qu'elle autorisait la production du document litigieux.

Dans ces circonstances, les conditions d'une violation du secret professionnel n'apparaissent pas réalisées.

Pour le surplus, les autres accusations de la recourante sur la manière dont la mise en cause aurait globalement mené son mandat excèdent l'objet du litige, n'ayant pas été rapportées dans sa plainte du 12 mai 2022 et ne seront donc pas examinées plus en avant.

La non-entrée en matière peut donc être confirmée.

3.             La recourante conteste sa condamnation à la moitié des frais de la procédure et de l'indemnité octroyée à la mise en cause.

3.1. Aux termes de l'art. 427 al. 2 let. a CPP, en cas d'infractions poursuivies sur plainte, les frais peuvent, si la procédure est classée ou le prévenu acquitté, être mis à la charge de la partie plaignante ou du plaignant qui, ayant agi de manière téméraire ou par négligence grave, a entravé le bon déroulement de la procédure ou rendu celle-ci plus difficile. La condition de la témérité ou de la négligence grave ne s'applique toutefois qu'au plaignant (art. 120 CPP) et non à la partie plaignante (art. 118 CPP), laquelle peut se voir imputer les frais sans autre condition (ATF 138 IV 248 consid. 4.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_467/2016 du 14 juin 2017 consid. 2.3); en effet, la personne qui porte plainte pénale et qui prend part à la procédure comme partie plaignante doit assumer entièrement le risque lié aux frais, tandis que celle qui porte plainte mais renonce à ses droits de partie ne doit supporter les frais qu'en cas de comportement téméraire (ATF 138 IV 248 consid. 4.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_467/2016 précité).

La règle de l'art. 427 al. 2 CPP a un caractère dispositif; le juge peut donc s'en écarter si la situation le justifie. La loi est muette sur les motifs pour lesquels les frais sont ou non mis à la charge de la partie plaignante. Le juge doit statuer selon les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC; ATF 138 IV 248 consid. 4.2.4). Il dispose d'un large pouvoir d'appréciation à cet égard (ATF 138 IV 248 consid. 4.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 6B_108/2018 du 12 juin 2018 consid. 3.1).

L'art. 427 al. 2 CPP s'applique également en cas de prononcé d'une non-entrée en matière (arrêt du Tribunal fédéral 6B_446/2015 du 10 juin 2015 consid. 2.4.1). De par sa nature, une décision de ce type est, en principe, rendue rapidement sans que des mesures d'instruction n'aient été prises. Dans ce cas, la partie plaignante n'aura pas eu l'occasion de participer activement à la procédure et sa situation est comparable à celle où elle ne fait que déposer une plainte pénale. Il convient donc de ne mettre les frais à la charge de la partie plaignante, dans le cadre d'une non-entrée en matière, qu'en cas de circonstances particulières (arrêt du Tribunal fédéral 6B_446/2015 précité, consid. 2.4.2).

3.2. Lorsque la partie plaignante supporte les frais en vertu de l'art. 427 al. 2 CPP, les dépens éventuellement alloués au prévenu peuvent être mis à sa charge en application de l'art. 432 al. 2 CPP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_108/2018 précité consid. 4.1).

3.3. En l'espèce, point n'est nécessaire de distinguer si la recourante revêt la qualité de partie plaignante ou seulement de plaignante pour écarter l'application de l'art. 420 al. 2 let. a CPP.

Le Ministère public ayant clos la procédure par une non-entrée en matière, sans que la recourante n'ait eu l'occasion d'y participer, la mise des frais de première instance à la charge de la précitée appelaient des circonstances particulières.

Or, celles-ci font défaut.

Visiblement, la recourante accordait une certaine importance à la (non) transmission de certaines informations concernant sa situation personnelle à son ancien conjoint. Si ces instructions à ce sujet ont pu se révéler contradictoires entre deux courriels, elle a néanmoins accompagné sa plainte de documents visant à démontrer ses réticences, qu'elle a exprimés auprès de la mise en cause en amont de l'audience du 10 mai 2022. Que cette dernière ait pu se croire, de bonne foi, autorisée à produire le certificat médical ne signifie pas encore que telle était la volonté de la recourante, qui a pu rester sur ses réserves initiales. Au moment pour elle d'apprendre que la mise en cause avait produit le certificat, sa réaction d'y voir un agissement contraire à ses intérêts et, par extension, contraire aux devoirs de l'avocat, et de porter plainte pour ces faits, n'apparaît ni téméraire, ni négligente. Enfin, on ne saurait reprocher à la recourante, comme le fait le Ministère public, d'avoir volontairement dénoncé des infractions n'ayant pas vocation à s'appliquer au cas d'espèce. Rien ne permet de conclure que l'intéressée disposerait d'une formation juridique, qui lui aurait notamment permis de distinguer les différents types de secret protégés par le Code pénal suisse.

Il s'ensuit qu'il ne se justifiait pas de faire supporter à la recourante les frais de la procédure de première instance. Par identité de motifs, les conditions pour mettre à la charge de la plaignante l'indemnité due au prévenu acquitté étant les mêmes, il n'existe pas de raison de faire supporter à la recourante la moitié de l'émolument payé par la mise en cause pour obtenir la levée de son secret professionnel.

Le recours sera dès lors admis sur ces points.

4.             La recourante conteste l'application de l'action récursoire.

4.1. L'art. 420 let. a CPP accorde à la collectivité publique une action récursoire contre toute personne qui a provoqué l'ouverture de la procédure pénale de manière intentionnelle ou par négligence grave. Cette action tend au remboursement des frais de la procédure et, le cas échéant, des indemnités et de la réparation morale allouées au prévenu acquitté. La collectivité ne doit user de l'action récursoire qu'avec retenue; elle est néanmoins autorisée à réclamer le remboursement des frais à celui qui a saisi l'autorité de poursuite pénale de manière infondée ou par malveillance (arrêts du Tribunal fédéral 6B_944/2015 du 25 mai 2016 consid. 5 ; 6B_620/2015 du 3 mars 2016 consid. 2.2 ; 6B_446/2015 du 10 juin 2015 consid. 2.1).

Une action récursoire entre ainsi en ligne de compte en cas de soupçons sans fondement, mais non lorsqu'une plainte est déposée de bonne foi. L'on songe plutôt à la dénonciation calomnieuse au sens de l'art. 303 CP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_638 du 3 février 2021 consid. 2.2) commise sous la forme d'une machination astucieuse, au sens de l'art. 303 ch. 1 al. 2 CP ou d'une plainte pénale déposée à la légère ("leichtfertige Anzeige"; N. SCHMID / D. JOSITSCH, Schweizerischen Strafprozessordnung, Praxiskommentar, 4e éd., Zurich 2023, n. 5 ad art. 420). Selon la jurisprudence, le dénonciateur qui utilise le droit de dénoncer à des fins étrangères à celles pour lesquelles ce droit a été prévu agit par négligence grave (arrêt 6B_317/2018 précité, consid. 2.2).

4.2. Compte tenu des développements qui précèdent (cf. consid. 3.3. supra), il peut être retenu que les conditions pour l'action récursoire ne sont pas remplies en l'occurrence et l'ordonnance querellée sera annulée également sur ce point.

5.             Partant, le recours est partiellement admis.

Les chiffres 2, 4 et 6 de l'ordonnance querellée seront annulées. Les frais de la procédure devant l'instance précédente seront intégralement laissés à la charge de l'État, de même que l'indemnité de CHF 300.- allouée à la mise en cause à titre de dépens.

6.             Les frais de la procédure de recours seront arrêtés à CHF 800.- au total (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

A______, qui obtient partiellement gain de cause, supportera la moitié de ces frais, montant qui sera prélevé sur les sûretés versées. Le solde desdites sûretés lui sera restitué.

L'autre moitié des frais sera laissée à la charge de l'État (art. 428 al. 1 CPP).

7.             Bien qu'obtenant en partie gain de cause, la recourante, qui agit en personne, ne peut prétendre à des dépens.

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Admet partiellement le recours.

Annule les chiffres 2, 4 et 6 de l'ordonnance querellée et dit que les frais de procédure devant le Ministère public sont laissés à la charge de l'État, ainsi que l'indemnité de CHF 300.- allouée à B______ à titre de dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

Confirme l'ordonnance querellée pour le surplus.

Condamne A______ à la moitié des frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 800.-, soit au paiement de CHF 400.-.

Dit que ce dernier montant (CHF 400.-) sera prélevé sur les sûretés versées et invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer à A______ le solde desdites sûretés, soit CHF 400.-.

Laisse le solde des frais de la procédure de recours (CHF 400.-) à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 


 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

P/12303/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

715.00

- demande sur récusation (let. b)

CHF

Total

CHF

800.00