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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/24092/2019

ACPR/83/2023 du 02.02.2023 sur OPMP/10083/2022 ( MP ) , REJETE

Recours TF déposé le 06.03.2023, 6B_319/2023
Descripteurs : CLASSEMENT DE LA PROCÉDURE;CONTRAINTE(DROIT PÉNAL);INFRACTIONS CONTRE LE PATRIMOINE
Normes : CPP.319; CP.190; CP.139

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/24092/2019 ACPR/83/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 2 février 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, comparant par Me E______, avocat,

recourante,

contre l'ordonnance pénale et de classement partiel rendue le 28 octobre 2022 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 14 novembre 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 28 octobre 2022, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a classé partiellement la procédure à l'égard de B______ concernant les infractions de viol et de vol.

La recourante conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de ladite ordonnance et au renvoi de la cause au Ministère public pour une mise en accusation de B______ pour les infractions précitées.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ et B______ se sont mariés le ______ 2013 en Tunisie.

À la fin de l'année 2018, B______ a déposé une demande unilatérale en divorce contre A______ en Tunisie. Selon A______, la procédure était toujours pendante (plainte du 16 décembre 2019).

b. Le 8 juillet 2019, A______ a formé une requête en mesures protectrices de l'union conjugale à Genève, concluant notamment à l'autorisation de la suspension de la vie commune et à l'attribution de la jouissance exclusive du domicile conjugal.

Par jugement du 17 octobre 2019 (JTPI/14772/2019), le Tribunal de première instance a, en statuant sur mesures provisoires, attribué la jouissance exclusive du domicile conjugal à B______, en raison de ses problèmes de santé – notamment du diabète et des troubles visuels importants, l'handicapant dans ses activités de la vie quotidienne et ses déplacements –. Il a imparti un délai au 31 décembre 2019 à A______ pour quitter le domicile.

c. Le 7 novembre 2019, A______ a déposé une première plainte contre son mari pour violences psychologiques, injures et menaces, depuis plusieurs mois.

Elle a expliqué, en substance, que depuis 2018, son mari la provoquait et cherchait le conflit. Dès janvier 2019, il l'insultait au quotidien, la traitant de "sale pute", lui disant qu'elle était "sale" et menaçait de la tuer ou l'invitait à le tuer. Il était très souvent ivre et la dénigrait. Il faisait tout ce qui était en son pouvoir pour l'expulser en Tunisie.

L'intéressé a contesté les faits reprochés.

d. Le 3 décembre 2019, à la suite d'une altercation survenue entre les époux au domicile conjugal, chacun a déposé plainte contre l'autre. Ils se reprochaient mutuellement de s'être insultés et de s'en être pris physiquement à l'autre. Ils ont tous deux contesté les faits reprochés.

Dans le cadre de cette deuxième plainte, A______ reprochait notamment à son mari de l'avoir, le jour même, injuriée et empêchée de respirer en posant sa main sur la bouche. Le 22 novembre 2019, B______ voulait à tout prix avoir une relation sexuelle avec elle. Face à son refus, il l'avait encore insultée, la traitant de "pute la plus sale du monde" et lui avait tiré les cheveux. Il voulait l'embrasser de force et toucher ses parties intimes pour savoir si elle était rasée. Depuis qu'elle n'entretenait plus de relation sexuelle avec lui, il se montrait agressif.

e.a. Par décision du 3 décembre 2019, le commissaire de police a prononcé une mesure d'éloignement, d'une durée de 15 jours, à l'encontre de A______, lui interdisant de contacter et de s'approcher de son mari, de s'approcher du domicile conjugal et d'y pénétrer, en raison de son comportement violent.

e.b. A______ s'y est opposée en relevant qu'elle-même avait été victime de violences conjugales de la part de son époux.

e.c. Entendue le 9 décembre 2019 par-devant le Tribunal administratif de première instance, au sujet de la mesure d'éloignement, elle a déclaré être logée dans un foyer, ce qui était problématique au regard de la prise de son traitement médical et de l'utilisation de locaux communs. Son mari avait régulièrement adopté un comportement violent et insultant à son égard. En outre, il avait volé son téléphone, et elle avait été contrainte d'en racheter un autre. Il l'avait également forcée à des rapports sexuels. Il dormait dans le salon et ne se rendait dans la chambre que pour avoir un rapport sexuel. Elle était consciente du fait que l'admission de son opposition aurait pour seule conséquence qu'elle serait autorisée à retourner au domicile conjugal et à continuer à cohabiter avec son époux. Elle se trouvait dans une impasse, étant consciente que son retour au domicile ne serait pas une bonne solution et que, pour sa sécurité, il faudrait qu'elle reste au foyer, mais toutes ses habitudes étaient remises en cause et elle ne se sentait pas bien s'agissant de son traitement médical et des transports.

e.d. Par jugement du 10 décembre 2019 (JTAPI/1098/2019), le Tribunal administratif de première instance a rejeté l'opposition formée par A______ contre la mesure d'éloignement du 3 décembre 2019.

f. Le 16 décembre 2019, A______ a déposé une troisième plainte contre son mari pour viol, lésions corporelles, menaces, vol et injures.

Elle a notamment expliqué que, depuis le début de l'année 2019, B______ l'avait violée, à plusieurs reprises, malgré son refus clairement exprimé d'entretenir des relations sexuelles avec lui. Depuis le dépôt de la requête en mesures protectrices de l'union conjugale, le 18 juillet 2019, B______ la menaçait en lui disant qu'elle allait être expulsée de Suisse et qu'il allait la mettre à la rue, ce qui l'effrayait.

En outre, fin novembre 2019, alors qu'elle dormait, il s'était introduit dans la chambre et avait volé son téléphone portable, placé sous l'oreiller.

Dans le cadre de cette plainte, elle a notamment produit un certificat médical, daté du 4 décembre 2019, à la suite des faits du 3 précédent. L'examen médical avait mis en évidence une légère asymétrie de la face avec tuméfaction de la branche droite de la mâchoire, un hématome de la face latérale du bras droite, un hématome de la face interne du bras gauche et une importante contracture musculaire paralombaire droite. Selon ce document, elle avait en outre expliqué au médecin que, depuis plusieurs mois, son mari la forçait à avoir des rapports sexuels, contre sa volonté, en la saisissant par les cheveux et en l'insultant.

g.a. Le 28 janvier 2020 au Ministère public, A______ a maintenu ses plaintes et ajouté avoir retrouvé, à plusieurs reprises, B______ nu à côté d'elle dans le lit.

g.b. B______ a contesté l'ensemble des faits reprochés expliquant qu'il s'agissait de mensonges. En particulier, il n'avait pas forcé son épouse à des rapports sexuels. Il dormait dans le salon et n'entrait jamais dans la chambre. Dès 2018, ils faisaient chambre à part et, depuis décembre de cette même année, n'entretenaient plus de relations sexuelles. Il n'avait pas non plus dit à sa femme qu'il allait la faire expulser de Suisse et la mettre à la rue. Il a également nié avoir pris le téléphone de A______. La police avait fouillé toute la maison et n'avait pas retrouvé l'appareil.

h. Par courrier du 9 mars 2020, A______ a versé plusieurs documents, à la procédure, émanant d'associations d'aide aux victimes (Association D______ et LAVI) auprès desquelles elle s'était rendue.

Selon l'attestation de [l'association] D______ du 10 février 2020, la prénommée avait notamment expliqué que, certains soirs, son mari l'avait obligée à subir des actes qu'elle jugeait dénigrants comme lui tirer les cheveux, la mordre ou la sodomiser et qu'une main courante aurait été déposée à la police en novembre 2019. Selon A______, le point culminant des violences avait eu lieu la nuit du 2 au 3 décembre 2019, s'étant réveillée, étouffée par les mains de son mari, pensant qu'il pourrait la tuer. Selon la psychologue consultée, "le contenu des entretiens avec A______, son récit des circonstances et des effets de la violence conjugale présent[ai]ent une cohérence significative avec ce que l'expérience nous [la psychologue consultée] a[vait] appris de ce phénomène et de son déroulement".

À teneur de l'attestation du Centre LAVI du 12 février 2020, A______ avait été reçue pour la première fois le 13 novembre 2019 et avait notamment expliqué que depuis octobre 2018 son mari avait changé de comportement et était devenu insultant et humiliant. Il lui avait imposé des relations sexuelles, en lui tirant les cheveux et en lui disant "ton corps sait mieux que toi, il veut même si toi tu dis non". Lors de l'entretien du 27 suivant, elle avait raconté que B______, ivre, s'était montré insultant et qu'il lui avait touché ses parties intimes et menacé de la violer. Enfin, lors du rendez-vous du 5 décembre 2019, elle avait relaté de nouvelles violences domestiques et en particulier détaillé les faits du 3 précédent. Selon la psychologue consultée, A______ avait été bouleversée par son expérience à la police et les mesures prononcées à son encontre, qu'elle estimait très injustes. La prénommée avait dû se rendre dans une consultation psychologique spécialisée pour se faire aider. Enfin, l'impact psychologique vécu par la patiente était, selon la psychologue consultée, tout à fait cohérent avec les faits restitués.

i. Lors de l'audience du 24 août 2021 par-devant le Ministère public, le Dr C______, médecin de A______, a déclaré que sa patiente avait fait état, dès le 20 décembre 2018, de violences verbales, menaces et humiliation de la part de son mari. Le 4 novembre 2019, elle avait mentionné avoir subi plusieurs relations sexuelles non consenties de la part de son époux. Dans son souvenir, elle lui avait dit que c'était le soir, la nuit, dans un contexte d'alcool. Il lui avait aussi tiré les cheveux et imposé des attouchements sexuels. Elle avait osé en parler car tout était revenu à la surface, en novembre et décembre 2019. Il n'avait pas constaté "de traces physiques de violences. Emotionnellement et psychologiquement oui, avec un grand oui". Le 27 janvier 2020, elle lui avait également relaté une relation anale forcée.

j. Le 28 octobre 2022, le Ministère public a classé la procédure ouverte contre A______, la culpabilité de celle-ci ne pouvant être établie s'agissant des voies de faits et injures reprochées par B______.

C. Dans sa décision querellée, le Ministère public a classé la procédure à l'égard de B______, s'agissant des infractions de viol et de vol, considérant qu'au vu des éléments du dossier, en particulier des déclarations contradictoires des parties et en l'absence d'un élément de preuve objectif, la culpabilité du concerné ne pouvait être établie.

B______ a, par ailleurs, été reconnu coupable de lésions corporelles simples, injures et menaces en lien avec les violences conjugales physiques et verbales à l'encontre de son épouse.

D. a. Dans son recours, A______ considère avoir toujours été constante et concordante dans ses déclarations, corroborées par les documents médicaux produits, ainsi que par les déclarations du Dr C______. Quant à B______, il s'était contenté de nier les faits reprochés, sans apporter la moindre preuve ni explication convaincante.

b. À réception, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) – les formalités de notification (art. 85 al. 2 CPP) n'ayant pas été observées –, concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP).

Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             3.1. Aux termes de l'art. 319 al. 1 let. b CPP, le ministère public ordonne le classement de la procédure lorsque les éléments constitutifs d'une infraction ne sont pas réunis.

Cette disposition doit être interprétée à la lumière du principe "in dubio pro duriore", selon lequel un classement ne peut être prononcé que quand il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables. Ainsi, la procédure doit se poursuivre quand une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou que les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'infractions graves. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, à ce sujet, d'un pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1164/2020 du 10 juin 2021 consid. 2.1).

Dans les procédures où l'accusation repose essentiellement sur les déclarations de la victime, auxquelles s'opposent celles du prévenu et lorsqu'il n'est pas possible d'estimer que certaines dépositions sont plus crédibles que d'autres, le principe in dubio pro duriore impose en règle générale que le prévenu soit mis en accusation (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.2 et les arrêts cités). Cela vaut en particulier lorsqu'il s'agit de délits commis typiquement "entre quatre yeux" pour lesquels il n'existe souvent aucune preuve objective.

Il peut toutefois être renoncé à une mise en accusation lorsque la partie plaignante fait des dépositions contradictoires, rendant ses accusations moins crédibles ou encore lorsqu'une condamnation apparaît au vu de l'ensemble des circonstances a priori improbable pour d'autres motifs (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.2; arrêts 6B_277/2021 du 10 février 2022 consid. 3.1.3; 6B_258/2021 du 12 juillet 2021 consid. 2.2 et les arrêts cités). En outre, face à des versions contradictoires des parties, il peut être exceptionnellement renoncé à une mise en accusation lorsqu'il n'est pas possible d'apprécier l'une ou l'autre version comme étant plus ou moins plausible et qu'aucun résultat n'est à escompter d'autres moyens de preuve (arrêts du Tribunal fédréal 6B_277/2021 précité consid. 3.1.3; 6B_258/2021 précité consid. 2.2; 6B_1164/2020 du 10 juin 2021 consid. 2.2).

3.2.1. Se rend coupable de viol (art. 190 CP), quiconque, notamment en usant de menace ou de violence, en exerçant sur sa victime des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister, aura contraint une personne de sexe féminin à subir l'acte sexuel.

3.2.2. Le viol est un délit de violence, qui suppose en règle générale une agression physique. Il en résulte que toute pression, tout comportement conduisant à un acte sexuel non souhaité ne saurait être qualifié de contrainte. L'art. 190 CP, comme l'art. 189 CP (contrainte sexuelle), ne protège des atteintes à la libre détermination en matière sexuelle que pour autant que l'auteur surmonte ou déjoue la résistance que l'on pouvait raisonnablement attendre de la victime (ATF 133 IV 49 consid. 4 et
131 IV 167 consid. 3.1). L'infraction visée par l'art. 190 CP exige donc non seulement qu'une personne subisse l'acte sexuel alors qu'elle ne le veut pas, mais également qu'elle le subisse du fait d'une contrainte exercée par l'auteur. À défaut d'une telle contrainte, de l'intensité exigée par la loi et la jurisprudence, et même si la victime ne souhaitait pas entretenir une relation sexuelle, il n'y a pas viol (arrêts du Tribunal fédéral 6B_710/2012 du 3 avril 2013 consid. 3.1 et 6B_311/2011 du 19 juillet 2011 consid. 5.2).

3.2.3. En introduisant la notion de "pressions psychiques", le législateur a voulu viser les cas où l'auteur provoque chez la victime des effets tels que la surprise, la frayeur ou le sentiment d'une situation sans espoir, propres à la faire céder, sans pour autant recourir à la force physique ou à la violence (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1164/2020 précité, consid. 3.1). Pour être qualifiées de contrainte, ces pressions doivent atteindre une intensité particulière (ATF 131 IV 167 consid. 3.1), comparable à celle d'un acte de violence ou d'une menace (ATF 133 IV 49 consid. 6.2) et rendre la soumission de la victime compréhensible (arrêt du Tribunal fédéral 6B_159/2020 du 20 avril 2020 consid. 2.4.3). Au vu des circonstances du cas et de la situation personnelle de la victime, on ne doit pas pouvoir attendre d'elle de résistance, ni compter sur une telle résistance, de sorte que l'auteur peut parvenir à son but sans avoir à utiliser de violence ou de menace (ATF 131 IV 167 consid. 3.1).

L'exploitation de rapports généraux de dépendance ou d'amitié ou même la subordination comme celle de l'enfant à l'adulte ne suffisent, en règle générale pas, pour admettre une pression psychologique au sens de l'art. 190 al. 1 CP (ATF
131 IV 107 consid. 2.2; 128 IV 97 consid. 2b/aa et cc; arrêt du Tribunal fédéral 6B_583/2017 du 20 décembre 2017 consid. 3.1).

Pour déterminer si l'on se trouve en présence d'une contrainte sexuelle, il faut procéder à une appréciation globale des circonstances concrètes déterminantes (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1164/2020 précité).

3.2.4. L'infraction nécessite également un acte sexuel, ou coït, soit l'union naturelle des parties génitales de l'homme (pénis) avec celle de la femme (vagin) (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., Bâle 2017, n. 14 ad art. 190).

3.3. Se rend coupable de vol celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l'approprier (art. 139 ch. 1 CP).

3.4. En l'espèce, la recourante reproche au prévenu de l'avoir violée, à plusieurs reprises, depuis début 2019, ce que le prévenu conteste.

Force est de constater qu'elle n'a aucunement décrit les circonstances dans lesquelles les actes sexuels subis auraient eu lieu que ce soit dans sa plainte, lors des différentes auditions à la police et par-devant le Ministère public, ni dans son recours. Elle s'est contentée d'expliquer avoir trouvé, à plusieurs reprises, son époux, nu dans le lit à côté d'elle. Elle a précisé que, le 22 novembre 2019, il avait voulu l'embrasser de force et toucher ses parties intimes et que, face à son refus, il l'avait insultée et lui avait tiré les cheveux. Or, il n'est pas allégué que ces comportements se seraient produits au moment des viols allégués et ne constituent pas, en eux-mêmes, des actes sexuels au sens de l'infraction concernée.

Les seuls éléments produits par la recourante – les attestations [de l'association] D______ et LAVI et les déclarations du Dr C______ au Ministère public –, relatent les déclarations de la recourante qui apparaissent très générales concernant des relations sexuelles non consenties alors même que le récit de cette dernière au sujet des insultes proférées par son mari et les évènements du 3 décembre 2019, en particulier les gestes de ce dernier, est plus détaillé. En outre, les comportements mentionnés dans les attestations et par le médecin – morsure, sodomie, relation anale forcée – n'ont jamais été évoqués, ni a fortiori confirmés, par la recourante, devant les autorités de poursuite pénale, alors même qu'elle a été entendue, à plusieurs reprises, au cours de la procédure pénale.

En outre, plusieurs éléments au dossier suscitent le doute quant à la version de la recourante.

D'abord, ce n'est que dans le cadre de la troisième plainte que la recourante a dénoncés les faits litigieux. Il ne ressort en effet pas des documents produits qu'un viol n'aurait été mentionné dans le cadre de la procédure des mesures protectrices de l'union conjugale, ouverte dès le 8 juillet 2019. Ni même dans les deux premières plaintes déposées, les 7 novembre et 3 décembre 2019, alors que ces faits auraient débutés début 2019.

Ensuite, la recourante a contesté la mesure d'éloignement immédiate du domicile conjugal rendue à son encontre. Or, son souhait de retourner vivre auprès de la personne qu'elle accusait de la violer régulièrement semble contredire ses propos, quand bien même elle considérait comme difficile son séjour dans un foyer en raison d'un changement dans ses habitudes – traitement médical et déplacements –.

Quant au prévenu, il est demeuré constant dans ces dénégations et contrairement à ce que prétend la recourante, en l'absence de toute précision de sa part, il ne pouvait que se contenter de nier les reproches, sans être en mesure d'apporter des explications plus détaillées.

Partant, au regard de ce qui précède, la crédibilité des allégations de la recourante est mise à mal, affaiblissant dans la même mesure les soupçons qui pèsent sur le prévenu, de sorte qu'une mise en accusation de ce dernier ne se justifie pas. En outre, aucun acte d'instruction supplémentaire n'apparaît à même d'apporter un nouvel élément de preuve et la recourante n'en propose au demeurant aucun.

Par ailleurs, même à considérer la version de la recourante comme suffisamment crédible, les éléments constitutifs de l'infraction de viol n'apparaissent pas remplis. En effet, la recourante ne prétend nullement avoir été contrainte d'une quelconque manière au moment des actes sexuels non consentis. Les seuls comportements explicités – insultes ou, de manière générale, des menaces d'expulsion et d'être mise à la rue – n'atteignent pas l'intensité requise par la jurisprudence précitée, pour retenir des "pressions psychiques", quand bien même la recourante s'est dite "effrayée".

Dans ces conditions, la décision de classer la procédure concernant cet aspect était fondée.

3.5. La recourante reproche au prévenu, d'autre part, de lui avoir volé son téléphone portable, une nuit alors que l'appareil se trouvait sous son oreiller, ce que l'intéressé conteste.

Là aussi, la recourante n'apporte aucun élément de preuve. En particulier, elle n'indique pas la date précise du méfait – fin novembre 2019 –, ne donne aucune précision sur l'objet en question, telle que la marque, ni ne produit de document attestant de son existence, d'une plainte pour vol ou même d'une preuve d'achat d'un nouvel appareil, pourtant mentionné par-devant le Tribunal administratif de première instance.

Partant, en l'absence de tout élément permettant de les corroborer, les allégations de la recourante, contestées par le prévenu, n'apparaissent pas non plus suffisamment crédibles pour fonder une prévention pénale contre le concerné pour l'infraction de vol.

4.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

5.             La recourante succombe (art. 428 al. 1 CPP), mais dans la mesure où l'assistance judiciaire lui a été accordée, elle sera exonérée des frais de la procédure (art. 136 al. 2 let. b CPP).

6.             La procédure étant close (art. 135 al. 2 CPP), il convient de fixer l'indemnisation du conseil juridique gratuit pour son activité en deuxième instance.

6.1. Les art. 135 al. 1 cum 138 al. 1 CPP prévoient que le conseil juridique gratuit est rétribué conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. À Genève, ce tarif est édicté à l'art. 16 RAJ et s'élève à CHF 200.- de l'heure pour un chef d'étude (al. 1 let. c).

Seules les prestations nécessaires sont retenues; elles sont appréciées en fonction, notamment, de la nature, l'importance et les difficultés de la cause, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (art. 16 al. 2 RAJ).

6.2. En l'espèce, la recourante a requis l'octroi de dépens, sans toutefois chiffrer, ni documenter ses prétentions.

Eu égard à l'activité déployée, soit un recours de 8 pages (page de garde et conclusions incluses), une indemnité correspondant à deux heures d'activité apparaît justifiée. Un montant de CHF 430.80, TVA (7.7%) lui sera alloué.

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Alloue à Me E______, à la charge de l'état, une indemnité de CHF 430.80, TVA à 7.7% incluse, pour la procédure de recours.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à la recourante soit pour elle son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Daniela CHIABUDINI et
Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

 

Par ailleurs, le Tribunal pénal fédéral connaît des recours du défenseur d'office contre les décisions de l'autorité cantonale de recours en matière d'indemnisation (art. 135 al. 3 let. a CPP et 37 al. 1 LOAP). Le recours doit être adressé dans les 10 jours, par écrit, au Tribunal pénal fédéral, case postale 2720, 6501 Bellinzone.