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Décisions | Tribunal pénal

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P/22733/2018

JTDP/1032/2022 du 26.08.2022 sur OPMP/4432/2021 ( OPOP ) , JUGE

Normes : LCR.90
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL DE POLICE

 

Chambre 18


26 août 2022

 

MINISTÈRE PUBLIC

contre

Monsieur X______, né le ______1989, domicilié ______, prévenu, assisté de Me A______


CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public conclut à un verdict de culpabilité du chef de violations graves des règles de la circulation routière, au prononcé d'une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 250.- le jour avec sursis et un délai d'épreuve de 3 ans ainsi que d'une amende de CHF 3'000.- à titre de sanction immédiate.

X______ conclut à l'inexploitabilité des données ressortant du RAG, en tout état à son acquittement, persiste dans ses conclusions en indemnisation au sens de l'art. 429 CPP et conclut à ce que les frais de la procédure soient laissés à la charge de l'Etat. Très subsidiairement, il conclut au prononcé d'une amende de CHF 250.-, à la réduction des frais de procédure mis à sa charge, persistant dans ses conclusions en indemnisation.

*****

Vu l'opposition formée le 20 mai 2021 par X______ à l'ordonnance pénale rendue par le Ministère public le 11 mai 2021;

Vu la décision de maintien de l'ordonnance pénale du Ministère public du 19 août 2021;

Vu l'art. 356 al. 2 et 357 al. 2 CPP selon lequel le tribunal de première instance statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition;

Attendu que l'ordonnance pénale et l'opposition sont conformes aux prescriptions des art. 352, 353 et 354 CPP;

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DE POLICE

statuant sur opposition :

Déclare valables l'ordonnance pénale du 11 mai 2021 et l'opposition formée contre celle-ci par X______ le 20 mai 2021.

et statuant à nouveau :

 

EN FAIT

A. Par ordonnance pénale du 11 mai 2021, valant acte d'accusation, il est reproché à X______ d'avoir, à Genève, le 28 mars 2018 vers 13h30, alors qu'il circulait au volant du véhicule de service de la police n° 1______, dans le cadre d'une course poursuite impliquant le véhicule automobile immatriculé 2______ (France) conduit par B______:

-            omis d'observer la prudence nécessaire en roulant à une vitesse supérieure à 80 km/h, atteignant notamment 95 km/h, marge de sécurité déduite, sur un tronçon où la vitesse était limitée à 50 km/h; et

-            circulé à vive allure à contresens malgré la présence d'automobilistes circulant normalement sur la voie descendante de la route de Chêne,

faits qualifiés de violations graves des règles de la circulation routière au sens de l'art. 90 al. 2 de la Loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR; RS 741.01).

B. Les éléments pertinents suivants ressortent de la procédure:

Rapport de la Brigade routière et accidents (BRA) du 31 juillet 2018

a.a. Le 28 mars 2018 vers 13h30, une course-poursuite a eu lieu entre un véhicule immatriculé en France, dont le conducteur a été identifié plus tard comme étant B______, et de nombreuses voitures de police. Initiée à la rue des Deux-Ponts, dite course-poursuite a conduit les protagonistes jusqu'à la route de Chêne, où B______ a finalement pu être appréhendé après que son véhicule ait heurté un cycliste, lequel a été grièvement blessé.

a.b. Durant cette course-poursuite, B______, qui était sous l'emprise de stupéfiants, a commis de nombreuses infractions à la loi sur la circulation routière.

Sur le pont de Saint-Georges, en direction de la rue des Deux-Ponts, il a franchi une ligne de sécurité et circulé en sens inverse, dépassant notamment par la gauche la voiture de police sérigraphiée n° 1______. Les occupants de ce véhicule de police, X______ et C______, se sont lancés à sa poursuite, enclenchant les feux bleus et la sirène ainsi que le signal "stop police" et effectuant des appels de phares.

B______ a poursuivi sa course sur la rue des Deux-Ponts, le pont de Sous-Terre et le quai du Seujet, où il a pris de la vitesse pour échapper aux policiers.

Une demande de renforts a été diffusée par la Centrale d'engagement, de coordination et d'alarmes (CECAL) à 13h34.

B______ et la voiture de police n° 1______ ont emprunté le quai Turrettini, puis la rue du Temple, où B______ a dérapé dans un virage sur une dizaine de mètres, en présence de nombreux piétons. L'intéressé a tourné sur la rue De-Grenus, en direction de la rue Rousseau puis de la place De-Grenus, et a dangereusement dépassé un petit train touristique progressant à faible allure sur la rue des Etuves, où la chaussée carrossable mesure 4.80 mètres à son endroit le plus large. Toujours poursuivi par la police, il a emprunté la place Chevelu, le quai des Bergues, la place des Bergues, la rue Arnold-Winkelried et la place Kléberg ainsi que la rue du Cendrier, en sens interdit. La course-poursuite s'est poursuivie sur la rue de Chantepoulet en direction du pont du Mont-Blanc, où d'autres patrouilles de police l'ont rejointe. Sans ralentir, B______ a contourné par la gauche une voiture de police qui arrivait face à lui. Il a ensuite circulé sur la place du Port, le quai Gustave-Ador, la rue Pierre-Fatio, la rue Francois-Versonnex, l'avenue de Frontenex, l'avenue Pictet-de-Rochemont et la route de Chêne. Sur ce tronçon, il s'est dangereusement déplacé d'une voie à l'autre, sans égard pour les autres usagers, compte tenu de sa vitesse élevée et de la densité du trafic. Il a franchi à plusieurs reprises une double ligne de sécurité, circulé à contresens, dépassé des véhicules par la droite, heurté un autocar en stationnement, franchi des carrefours sans respecter la signalisation lumineuse en phase rouge et contourné à grande vitesse le barrage formé par un véhicule de police, manquant de renverser son conducteur.

Sur la route de Chêne, la voiture de police n° 3______, conduite par D______, s'est approchée au plus près du véhicule de B______ et l'a heurté volontairement plusieurs fois avec son pare-chocs, équipé de tampons poussoirs. Les deux véhicules ont circulé sur la partie centrale de la chaussée, interdite au trafic et réservée aux trams, puis sur les voies descendantes. A la hauteur de l'avenue de la Gare-des-Eaux-Vives, D______ s'est déplacé sur la gauche pour remonter le véhicule de B______. Un heurt s'est produit entre les deux véhicules. B______ a perdu le contrôle de son automobile, qui est parti en embardée sur la gauche et a heurté le bord du trottoir avec l'arrière gauche, puis le cycliste E______, qui arrivait en sens inverse. Le véhicule de B______ a poursuivi sa course en tête-à-queue, a heurté le trottoir une seconde fois, puis a été projeté en arrière sur la chaussée. Il s'est brutalement arrêté contre un mât de signalisation à l'extrémité d'un îlot séparant la chaussée carrossable de celle réservée au tram. D______ a appuyé l'avant de son véhicule contre celui de B______ pour l'immobiliser.

E______ a subi de multiples fractures au pied gauche et son vélo s'est retrouvé hors d'usage, tout comme la voiture de B______. A l'endroit de l'embardée, le revêtement bitumeux était particulièrement accidenté et la chaussée était humide.

b.a. Entendu le 28 mars 2018 par la police, X______ a expliqué qu'alors qu'il était au volant du véhicule de police n° 1______, avec C______ comme passager, et qu'ils étaient à l'arrêt sur le pont de Saint-Georges, B______ les avait dépassés par la gauche, en franchissant une ligne de sécurité et en roulant à contresens en direction de la rue des Deux-Ponts, puis avait franchi l'intersection avec le quai Ernest-Ansermet sans prêter attention aux véhicules qui circulaient normalement.

Il avait alors enclenché la sirène et les feux bleus pour interpeller l'intéressé et actionné à plusieurs reprises les grands phares pour lui signaler que les feux bleus s'adressaient bien à lui. Sur la rue des Deux-Ponts, il avait enclenché la signalisation lumineuse "stop police". Sur le pont de Sous-Terre, il s'était placé à la hauteur de B______ et C______ lui avait intimé l'ordre de stopper son véhicule par des gestes répétés. B______ les avait cependant ignorés et s'était engagé sur le quai du Seujet, où il avait accéléré. L'intéressé avait ensuite commis de nombreuses violations des règles de la circulation routière lors de la course-poursuite qui s'en était suivie. A la place du Port, B______ avait évité, sans freiner, un véhicule de police positionné devant lui, sirène et feux bleus enclenchés. Il avait agi de même à l'intersection entre l'avenue Pictet-de-Rochemont et la route de Chêne, où une voiture de police faisait barrage au milieu de la route.

Parvenu sur la route de Chêne, il avait été bloqué dans la circulation et avait dû attendre que des voitures se déplacent pour repartir; il n'avait rattrapé le véhicule de B______ qu'à l'endroit où ce dernier était accidenté.

b.b. A la police, C______ a fait des déclarations similaires à celles de X______. En particulier, il a indiqué s'être chargé de communiquer à la CECAL qu'un automobiliste refusait d'obtempérer et prenait la fuite. B______ avait commencé à accélérer sur le quai du Seujet; durant la course-poursuite, il avait violé de nombreuses règles de la circulation routière et mis en danger les autres usagers de la route. Leur véhicule était resté bloqué dans la circulation sur la route de Chêne.

Rapport de l'Inspection générale des services (IGS) du 9 octobre 2018

c.a. Il ressort des enregistrements des communications de la police que la CECAL a été informée à 13h34 par la patrouille n° 1______, composée de X______ et C______, qu'un véhicule immatriculé en France refusait de s'arrêter sur le quai du Seujet. La progression des voitures impliquées a été rapportée tout au long de la course poursuite qui s'en est suivie à travers la ville de Genève.

c.b. D'après le journal des événements de la police, la course-poursuite entre B______ et la police a notamment été rejointe par la patrouille composée de D______ et F______ (voiture de police n° 3______) à la rue Pierre-Fatio. B______ circulait à vive allure en direction de Chêne, avait franchi des lignes de sécurité simples et doubles, circulé à gauche de celles-ci et omis à plusieurs reprises de respecter la signalisation lumineuse. A la hauteur de l'avenue Pictet-de-Rochemont et de la route de Chêne, un barrage avait été mis en place mais le dispositif "stop stick" n'avait pas pu être déployé car le matériel était défectueux. B______ avait évité le barrage sans hésiter à accélérer en direction des policiers qui se trouvaient en dehors de leur véhicule, manquant de peu de les percuter. Il avait ensuite obliqué sur la route de Chêne et s'était retrouvé devant la partie avant droite du véhicule de service n° 3______. A la hauteur du 11, route de Chêne, il avait perdu la maîtrise de son véhicule.

Il ressort encore du journal des événements qu'un véhicule de police participant à la course-poursuite, dans lequel se trouvaient les policiers G______ et H______, a circulé à contresens sur le quai du Général-Guisan en direction du pont du Mont-Blanc, avant de se retrouver face au véhicule de B______ arrivant à vive allure.

c.c. Les images de vidéosurveillance provenant de caméras étatiques ont été versées à la procédure. On peut y voir plusieurs séquences de la course-poursuite, dont il ressort que B______ a mené un véritable rodéo routier dès la fin du quai du Seujet, commettant de nombreuses infractions au code de la route, sans égard pour les autres usagers.

c.d.a. Les données de l'enregistreur numérique RAG 2000+ (RAG) équipant la voiture de police n° 1______ indiquent que X______ a circulé avec la sirène et les feux bleus enclenchés sur les 4400 derniers mètres parcourus, à savoir sur l'intégralité de la course-poursuite.

c.d.b. S'agissant des vitesses enregistrées (sans déduction de la marge de sécurité de 14 km/h), il importe de relever ce qui suit:

-       durant la course-poursuite, X______ a circulé à des vitesses comprises entre 4 et 92 km/h;

-       une pointe à 109 km/h a été relevée entre les 4400 et 2900 derniers mètres parcourus, soit probablement sur le tronçon entre le quai du Seujet et le quai Turrettini, où la vitesse est limitée à 50 km/h;

-       il a circulé à une vitesse de plus de 94 km/h sur environ 300 mètres, soit entre les mètres 3'200 et 2'900, et durant environ 10 à 11 secondes;

-       au plus fort de cette pointe de vitesse, il a circulé jusqu'à 109 km/h, roulant au-delà de 104 km/h sur 71 mètres, durant 2 secondes et demi;

-       à environ 300 mètres du point d'arrêt, la vitesse du véhicule était quasi nulle, puis elle a rapidement augmenté pour atteindre 80 km/h à 200 mètres de la fin du parcours;

-       sur les 200 derniers mètres, la vitesse était comprise entre 92 km/h et 77 km/h, excepté les 40 derniers mètres, sur lesquels le véhicule a décéléré jusqu'à l'arrêt complet.

d. Entendu le 17 août 2018 par l'IGS, X______ a confirmé ses précédentes déclarations. Il avait suivi le véhicule de B______ durant tout son trajet. Les avertisseurs sonores et les feux bleus de son véhicule étaient enclenchés tout au long de la course-poursuite. Il ne pouvait pas dire avec exactitude quelle avait été sa vitesse, mais il l'avait adaptée aux conditions de la route, à savoir qu'il avait roulé à faible allure lorsqu'il y avait de la circulation et plus vite sur les tronçons où la voie était libre et dégagée, par exemple sur le quai du Seujet. Sa vitesse était adaptée à la poursuite d'un fuyard. Il n'arrivait pas à dire s'il avait atteint la vitesse de 109 km/h sur le quai du Seujet. Les conditions de la route étaient bonnes.

Il estimait que sa course en urgence était justifiée et adéquate au vu des graves infractions à la loi sur la circulation routière commises par B______ sur le point de Saint-Georges, soit le dépassement d'une file de voitures à contresens, le franchissement d'un carrefour sans égards aux autres usagers de la route et sa vitesse inadaptée, infractions commises avant même que la poursuite ne soit engagée. En outre, B______ avait clairement et gravement mis en danger les usagers de la route lors de sa fuite, et ce depuis le point de Saint-Georges. Son but était de le stopper. Il ne l'avait pas poussé à mettre en danger la circulation.

En arrivant sur la route de Chêne, il avait dû freiner peu avant un barrage formé par un véhicule de police, car il s'était retrouvé bloqué par un autre véhicule.

Procédure dirigée contre X______ et D______ (P/4______)

e. Le 20 novembre 2018, le Ministère public a ordonné l'ouverture d'une procédure pénale contre X______ et D______, leur reprochant d'avoir enfreint des règles de la circulation routière durant la course-poursuite du 28 mars 2018.

f.a. Entendu au Ministère public le 26 février 2019, X______ a confirmé ses précédentes déclarations.

Le jour des faits, C______ et lui se rendaient dans le quartier des Pâquis pour une opération en lien avec un trafic de stupéfiants. Ils n'étaient pas en déplacement urgent. Alors qu'ils étaient arrêtés à un feu rouge sur le pont de Saint-Georges, B______ avait dépassé la file dans laquelle se trouvait leur véhicule et franchi le feu au rouge, sans ralentir. En les dépassant, il se trouvait sur une voie de circulation en sens inverse. Il avait mis la sirène et les feux bleus et s'était lancé à sa poursuite. Il avait également fait des appels de phare, pensant qu'il pouvait s'agir d'un conducteur âgé et désorienté. C______ avait allumé le panneau "stop police", mais B______ avait continué sa route sans y prêter attention, à une vitesse qui n'était pas excessive. La charge de trafic était modérée. Sur le pont de Sous-Terre, ils avaient pu se porter à sa hauteur et avaient vu qu'il s'agissait d'un homme d'une trentaine d'années. L'intéressé n'avait pas réagi aux gestes de C______ qui lui intimait de s'arrêter; sur le quai du Seujet, il avait accéléré "pied au plancher".

C______ et lui n'avaient perdu que peu de temps et avaient pu garder B______ à vue, sans le "coller". Il avait conscience d'avoir roulé vite sur ce tronçon, mais ne pensait pas avoir atteint la vitesse de 109 km/h.

C______ s'était chargé de faire l'annonce à la CECAL.

B______ avait ensuite suivi l'itinéraire décrit dans le rapport de la BRA du 31 juillet 2018 (point B.a.b. supra), notamment en effectuant un dérapage non contrôlé, en empruntant plusieurs petites rues à contresens, en dépassant un petit train touristique alors qu'il y avait très peu d'espace pour le faire, en contournant un véhicule de police et en heurtant un car stationné.

C______ et lui s'étaient arrêtés au début de la route de Chêne, à hauteur d'un véhicule de police arrêté face à eux; derrière ce véhicule se trouvait une policière avec un "stop-stick" à la main, qu'elle n'avait pas encore déployé. Ils avaient perdu du temps à cet endroit et d'autres véhicules de police les avaient dépassés.

Ils avaient décidé de poursuivre B______ car ce dernier avait fait courir un danger aux autres usagers de la route en passant au rouge l'intersection entre le pont de Saint-Georges et le quai Ernest-Ansermet. Il avait également fait courir un risque important aux piétons qui se trouvaient sur les trottoirs en dérapant dans le virage de la rue du Temple et en roulant trop vite dans les petites rues du quartier de Saint-Gervais.

f.b. Entendu comme témoin au Ministère public, C______ a confirmé ses déclarations faites à la police le 28 mars 2018. B______ avait pris de la vitesse sur le quai du Seujet. Il avait signalé la poursuite à la CECAL, d'une part pour indiquer qu'ils étaient occupés, d'autre part pour demander de l'aide.

f.c. Egalement entendu comme témoin au Ministère public, I______ a déclaré avoir observé la scène depuis une fenêtre de l'immeuble sis 11, route de Chêne. Il avait notamment vu plusieurs véhicules de police à la hauteur de l'avenue de Chamonix, dont un qui arrivait en sens inverse par la voie descendante.

g.a. D______ a été condamné par ordonnance pénale du 11 mai 2021, à l'encontre de laquelle il n'a pas formé opposition, pour violations graves des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR) à une peine pécuniaire de 75 jours-amende, pour avoir, lors de la course-poursuite du 28 mars 2018, sur la route de Chêne, omis d'observer la prudence nécessaire en roulant à une vitesse supérieure à 80 km/h, atteignant notamment 96 km/h, sur un tronçon où la vitesse était limitée à 50 km/h, et heurté volontairement à plusieurs reprises l'arrière du véhicule de B______ avec son propre véhicule, dont le pare-chocs avant était équipé de tampons poussoirs.

g.b. Quant à X______, il a formé opposition à l'ordonnance pénale le concernant.

Procédure dirigée contre B______ (P/5______)

h.a. Au Ministère public, B______ a notamment indiqué que le jour des faits, il avait vu les gyrophares de la police une fois arrivé à hauteur de l'hôtel Mandarin Oriental. Il avait pris peur car sa voiture n'avait pas passé le contrôle technique et il craignait qu'elle soit emmenée à la fourrière, alors qu'il en avait besoin pour travailler. Il avait paniqué et était parti, sous le coup de l'adrénaline. Il ne se souvenait pas d'avoir commis des infractions à la loi sur la circulation routière. Avant les faits, il avait consommé du haschich dans le but de se calmer car il était nerveux. Il prenait également des médicaments pour calmer ses angoisses et sa dépression. Il regrettait ce qu'il avait fait.

h.b. Egalement entendu au Ministère public dans le cadre de cette procédure, X______ a ajouté qu'au moment des faits, B______ représentait un danger pour ses collègues et pour tout le monde dans les alentours, en raison de sa vitesse et des nombreux changements de direction qu'il effectuait, en ce sens qu'il n'avait pas de ligne de conduite claire et pouvait braquer à tout moment pour prendre une rue perpendiculaire.

i. Par jugement du 5 mars 2019, définitif et exécutoire, le Tribunal de police a déclaré B______ coupable de lésions corporelles par négligence (art. 125 al. 1 CP), de mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 CP), d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 CP), de violations fondamentales des règles de la circulation (art. 90 al. 2 et 3 LCR), de conduite malgré une incapacité (art. 91 al. 2 let. b LCR) et d'infraction à l'art. 19 al. 1 let. d LStup.

L'infraction de mise en danger de la vie d'autrui pour laquelle B______ a été condamné concernait le fait d'avoir, notamment, à la hauteur de l'avenue de la Gare-des-Eaux-Vives, donné un coup de volant alors que la voiture de police de D______ était parvenue à sa hauteur et qu'ils roulaient à vive allure.

Quant aux violations fondamentales des règles de la circulation, elles concernaient les faits commis depuis le quai Turrettini, où il était reproché à B______ d'avoir circulé à vive allure, jusqu'au choc avec le cycliste E______.

C.a. Lors de l'audience de jugement, à titre préjudiciel, le Tribunal a retenu que la vidéo amateur figurant au dossier ainsi que les déclarations des parties et des témoins y relatives étaient inexploitables et devaient être retirées de la procédure.

b. X______ a confirmé qu'il admettait les faits reprochés, mais pas leur qualification juridique.

Il ne contestait notamment pas la mesure de la vitesse selon le RAG. Il était d'accord avec l'estimation selon laquelle il avait roulé à plus de 80 km/h, marge de sécurité déduite, sur environ 300 mètres durant environ 10 secondes. D'après son Conseil, cette vitesse avait plutôt été atteinte sur 200 à 250 mètres.

Au moment des faits, la route était mouillée et la circulation était fluide. Alors qu'il était arrêté au feu rouge sur le pont de Saint-Georges, B______ l'avait doublé sur la gauche à vitesse excessive, franchissant une double ligne de sécurité, sans prêter aucune attention au feu qui était au rouge, ni aux véhicules qui pouvaient se trouver au carrefour, ni même au véhicule de police.

Il s'était alors détourné de son but premier, soit l'affaire de stupéfiants, pour prendre en chasse B______. Il estimait que l'infraction commise par ce dernier était grave, en ce sens que s'il y avait eu un véhicule roulant normalement au carrefour, il y aurait eu une collision.

C'était pour cette raison qu'il s'était cru autorisé à appliquer le coefficient x2 et à rouler à 100 km/h au maximum, conformément à l'Ordre général du Ministère public à la police concernant les courses officielles urgentes et courses officielles nécessaires pour des raisons tactiques, dans sa version du 24 janvier 2017 (Ordre du MP concernant les courses officielles urgentes), dont il avait connaissance. En outre, ce n'était pas lui qui avait initié la course-poursuite, contrairement à ce qui arrivait généralement lorsque la police se lançait à la poursuite d'un individu ayant commis d'autres infractions que des violations de la LCR. Dans le cas d'espèce, B______ avait déjà un comportement mettant en danger la vie d'autrui avant d'avoir vu la voiture de patrouille. Son coéquipier et lui ne savaient pas à qui ils avaient affaire; il pouvait s'agir d'une personne âgée désorientée. Ils avaient enclenché l'avertisseur sonore et les feux bleus pour éviter que ce conducteur provoque une collision et pour avertir les autres usagers de la route.

Il a confirmé ses déclarations à l'IGS selon lesquelles il ne connaissait pas sa vitesse exacte durant la course-poursuite, ajoutant qu'il était difficile de connaître sa vitesse sur des tronçons en particulier, mais qu'il savait tout de même qu'il n'avait pas excédé 100 km/h, même sans déduire la marge de sécurité.

Il n'a pas répondu à la question de savoir s'il contestait ou admettait avoir circulé à contresens sur la route de Chêne et avoir croisé deux véhicule descendants.

Il a confirmé s'être presque arrêté à l'intersection entre l'avenue Pictet-de-Rochemont et la route de Chêne, avant de s'engager sur cette dernière en roulant à environ 40 km/h, car une collègue se trouvait au milieu de la route, emmêlée dans son "stop-stick" et non protégée par un véhicule; en outre, elle s'apprêtait à déployer un "stop-stick" à l'amorce d'un virage, ce qui n'était pas recommandé. Vu ces dangers, il avait attendu que la situation se débloque. Il avait été dépassé par d'autres collègues qui avaient fait une autre appréciation de la situation.

Confronté au fait que lors de son audition à la police le 28 mars 2018, il avait indiqué s'être arrêté sur la route de Chêne car il était bloqué dans la circulation, il a répondu que c'était également correct.

D. X______, de nationalité suisse, est né le ______1989. Il est célibataire et a deux enfants à charge. Il vit en France avec sa compagne et ses enfants. Il a exercé comme pompier avant de devenir policier en 2011. Il a effectué deux ans de stages obligatoires avec un passage dans huit postes de police différents, puis a exercé deux ans au poste de police de Chêne. Il est affecté à la brigade de sécurité publique depuis 2016.

Il n'a jamais été sanctionné sous l'angle administratif durant sa carrière de policier. A sa connaissance, sa hiérarchie n'a pas ouvert de procédure disciplinaire à son encontre pour les faits visés par la présente procédure.

Il réalise un salaire mensuel net moyen de CHF 8'974.-, treizième salaire compris. Ses dépenses mensuelles moyennes sont composées de sa prime d'assurance-maladie (CHF 153.-), du remboursement d'une dette envers le CREDIT MUTUEL (CHF 1'100.-) et de frais de crèche en Suisse (CHF 1'289.-).

A teneur de l'extrait du casier judiciaire, il n'a pas d'antécédent.

EN DROIT

Culpabilité

1. A titre liminaire, le Conseil du prévenu a plaidé que les données du RAG ne pouvaient pas être exploitées, dans la mesure où X______ n'avait pas causé l'accident final, soit le heurt survenu entre le véhicule de B______ et E______.

1.1.1. A teneur de l'art. 139 al. 1 CPP, les autorités pénales mettent en œuvre tous les moyens de preuves licites qui, selon l'état des connaissances scientifiques et l'expérience, sont propres à établir la vérité.

Selon l'art. 141 al. 2 CPP, les preuves administrées d'une manière illicite ou en violation de règles de validité par les autorités pénales ne sont pas exploitables, à moins que leur exploitation soit indispensable pour élucider des infractions graves.

1.1.2. Aux termes de l'art. 102 de l'Ordonnance concernant les exigences techniques requises pour les véhicules routiers du 19 juin 1995 (OETV; RS 741.41), les véhicules munis de feux bleus et d'un avertisseur à deux sons alternés doivent être équipés d'un enregistreur de données (al. 1). Durant les 30 secondes précédant un événement (collision, etc.) ou sur les 250 derniers mètres parcourus, l'enregistreur de données doit enregistrer, notamment, la vitesse (al. 2 let. a).

1.1.3. D'après l'art. 7 de l'Ordonnance de l'OFROU concernant l'ordonnance sur le contrôle de la circulation routière du 22 mai 2008 (OOCCR-OFROU; RS 741.013.1), lors d'un contrôle de la durée du travail, de la conduite et du repos ou lors d'une déclaration d'accident, des dépassements de vitesse peuvent être constatés au moyen d'enregistrements de tachygraphes, d'enregistreurs de fin de parcours ou d'enregistreurs de données (al. 1). Les mesures de vitesse effectuées au moyen d'un véhicule-suiveur sans système de mesure calibré doivent être limitées aux cas de dépassement de vitesse massifs (al. 3).

Pour les enregistrements de tachygraphes et d'enregistreurs de fin de parcours ainsi que d'enregistreurs de données, il convient de déduire de la vitesse enregistrée 14 km/h, s'il s'agit d'enregistreurs de données au sens de l'art. 102 OETV (art. 8 al 2 let. c OOCCR-OFROU).

Les Instructions concernant les contrôles de vitesse par la police et la surveillance de la circulation aux feux rouges édictées par l'OFROU le 22 mai 2008 (Instructions de l'OFROU) précisent, au sujet de l'art. 7 OOCCR, que lorsque la police constate, en examinant un enregistreur de données au sens de l'art. 102 OETV, en vue d'élucider un accident, que d'autres infractions ont été commises (par exemple un dépassement de la vitesse maximale autorisée), elle peut utiliser ces enregistrements pour engager une action pénale ou pour infliger une amende d'ordre au conducteur fautif (pt. 19).

1.1.4. L'Ordre de service de la police "Véhicules prioritaires-conduite en urgence" (OS PRS.07.09) prévoit que si un véhicule en course urgente est impliqué dans un accident, les enregistrements sont prélevés (pt. 7).

Selon l'Ordre de service de la police "Accidents de la circulation avec un véhicule de service" (OS PRS.17.03), dans les cas donnant lieu à l'établissement d'un rapport d'accident, l'enregistreur de données numériques ou l'enregistreur de fin de parcours numérique est prélevé et examiné (pt. 2.4).

D'après l'Ordre de service de la police "Contrôle de vitesse" (OS PRS.07.08), figurent à titre de moyens de contrôle accessoires les enregistreurs de données numériques, notamment le RAG. Son prélèvement est effectué par un enquêteur et le GTE procède à l'analyse et à l'archivage des données (pt. 3.4). Il est abusif de procéder en tous temps à des contrôles systématiques inconditionnels de la vitesse sur la base de l'enregistrement d'un tachygraphe. Par contre, lors d'un constat visuel et manifeste de l'infraction, la poursuite demeure possible. L'utilisation de données numériques du véhicule de service, dans le but de poursuivre un dépassement de vitesse d'un véhicule suivi est proscrite. Il n'est pas admis de procéder à des contrôles de vitesse au moyen d'un véhicule qui précède le véhicule contrôlé (pt. 4).

1.1.5. Le Tribunal fédéral a jugé qu'en vertu du principe de la libre appréciation des preuves, il était possible d'utiliser les données du tachygraphe d'un chauffeur professionnel, à l'origine prélevées dans le but de contrôler les temps de travail et de repos, afin de poursuivre également un excès de vitesse découvert lors de l'analyse des données enregistrées (ATF 112 IV 43 consid. 1).

Dans un arrêt du 30 mars 2022 (AARP/82/2022), la Cour a eu à juger un policier ayant commis des infractions au code de la route dans le cadre d'une course officielle urgente. Elle a retenu que dans la mesure où les données du RAG avaient été prélevées à la suite d'un accident, soit le contact entre un véhicule de police et une moto, mais aussi à la suite de la chute ultérieure du motard, cette dernière chute justifiait à elle seule d'analyser les données du RAG, notamment dans le but de déterminer si le véhicule de police avait une responsabilité dans l'accident. Ainsi, il ne pouvait être considéré que l'appelant avait fait l'objet d'un contrôle abstrait effectué sans soupçon préalable ("fishing expedition").

1.2. S'il est exclu de procéder à une "fishing expedition" en examinant les données du RAG des véhicules de police de manière aléatoire, dans le but de rechercher tous les excès de vitesse éventuellement commis par des policiers, sans qu'il n'existe de soupçon sérieux et préalable, force est de constater que tel n'a pas été le cas en l'espèce.

En effet, même s'il a finalement été établi que le comportement du prévenu n'était pas la cause directe de l'accident survenu entre le véhicule de B______ et le cycliste et des lésions subies par ce dernier, la course-poursuite à laquelle le prévenu a participé dès le début s'est achevée par un accident, événement permettant à lui seul d'exploiter les données du RAG de tous les véhicules de police ayant participé à la course-poursuite, ceci dans le but d'élucider les faits. Dans ce cas et conformément aux dispositions légales précitées, si un excès de vitesse est constaté, il peut être poursuivi, quand bien même il n'a pas en lui-même causé d'accident.

L'exploitation des données du RAG du véhicule conduit par le prévenu n'ayant pas été effectuée suite à un contrôle aléatoire, mais bien après un évènement dont il convenait de comprendre la cause, les données en question sont exploitables.

2.1.1. Conformément à l'art. 90 al. 2 LCR, est punissable celui qui, par une violation grave d'une règle de la circulation, crée un sérieux danger pour la sécurité d'autrui ou en prend le risque.

D'un point de vue objectif, la violation grave d'une règle de circulation au sens de l'art. 90 al. 2 LCR suppose que l'auteur ait mis sérieusement en danger la sécurité du trafic. Il y a création d'un danger sérieux pour la sécurité d'autrui non seulement en cas de mise en danger concrète, mais déjà en cas de mise en danger abstraite accrue. Subjectivement, l'état de fait de l'art. 90 al. 2 LCR exige, selon la jurisprudence, un comportement sans scrupules ou gravement contraire aux règles de la circulation, c'est-à-dire une faute grave et, en cas d'acte commis par négligence, à tout le moins une négligence grossière.

Dans le domaine des excès de vitesse, la jurisprudence a établi que l'élément objectif et subjectif du cas grave au sens de l'art. 90 al. 2 LCR est en principe réalisé, sans égard aux circonstances concrètes, en cas de dépassement de la vitesse autorisée de 25 km/h ou plus à l'intérieur des localités (ATF 143 IV 508 consid. 1.3 in SJ 2018 I 277; 132 II 234 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_973/2020 du 25 février 2021 consid. 2.1).

2.1.2. Selon l'art. 26 LCR, chacun doit se comporter, dans la circulation, de manière à ne pas gêner ni mettre en danger ceux qui utilisent la route conformément aux règles établies (devoir de prudence) (al. 1). Une prudence particulière s'impose à l'égard des enfants, des infirmes et des personnes âgées, et de même s'il apparaît qu'un usager de la route va se comporter de manière incorrecte (al. 2). Chacun doit en outre se conformer aux signaux et aux marques ainsi qu'aux ordres de la police (art. 27 al. 1 LCR), notamment aux limitations de vitesse. Outre les limitations de vitesse fixées par le Conseil fédéral, la vitesse doit toujours être adaptée aux circonstances, notamment aux particularités du véhicule et du chargement, ainsi qu'aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité (art. 32 LCR). Les véhicules circuleront toujours à droite des lignes de sécurité tracées sur la chaussée (art. 34 al. 2 LCR). Les dépassements se font à gauche (art. 35 al. 1 LCR).

2.1.3. L'art. 100 ch. 4 LCR prévoit que si le conducteur d'un véhicule du service du feu, du service de santé, de la police ou de la douane enfreint les règles de la circulation ou des mesures spéciales relatives à la circulation lors d'une course officielle urgente ou nécessaire pour des raisons tactiques, il n'est pas punissable s'il fait preuve de la prudence imposée par les circonstances. Lors de courses officielles urgentes, le conducteur n'est pas punissable uniquement s'il a donné les signaux d'avertissement nécessaires; il n'est exceptionnellement pas nécessaire de donner ces signaux d'avertissement si ceux-ci compromettent l'accomplissement de la tâche légale. Si le conducteur n'a pas fait preuve de la prudence imposée par les circonstances ou s'il n'a pas donné les signaux d'avertissement nécessaires lors d'une course officielle urgente, la peine peut être atténuée.

Dans des cas d'excès de vitesse très importants commis par des particuliers qui invoquaient pour leur défense l'état de nécessité (art. 17 CP), même si le bien en péril est aussi précieux que la vie ou l'intégrité corporelle d'autrui, il est pratiquement exclu de justifier par un gain de quelques instants le risque d'accident mortel auquel les occupants du véhicule et les autres usagers de la route sont exposés en conséquence d'un excès de ce genre. Les signaux d'avertissement sonores et optiques d'un véhicule de la police circulant à vitesse très élevée ne sont que peu aptes à réduire le risque d'un accident parce qu'en raison de l'approche rapide de ce véhicule, les tiers exposés au danger ne jouissent que d'un temps réduit pour percevoir ces signaux, y réagir et adapter leur propre comportement. Un excès de vitesse très important ne se justifie donc pas davantage en cas de course urgente selon l'art. 100 ch. 4 LCR que dans le cas d'un déplacement exécuté en état de nécessité avec un véhicule privé (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1224/2019 du 24 janvier 2020 consid. 3.1 in SJ 2020 I 273; 6B_1102/2016 du 12 décembre 2017 consid. 6.1).

Le conducteur qui crée un grand risque d'accident pouvant entraîner de graves blessures ou la mort, en atteignant une vitesse largement supérieure à la limite autorisée, en pleine nuit et dans une zone d'habitation, ne peut pas prétendre à une impunité fondée sur l'art. 100 ch. 4 LCR. Le fait que l'excès de vitesse litigieux soit limité dans l'espace et le temps ne saurait non plus conduire à un autre résultat, étant observé que le danger créé est d'autant moins justifiable qu'il pouvait au mieux lui faire gagner quelques instants (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1224/2019 du 24 janvier 2020 consid. 2.5).

L'art. 100 ch. 4 LCR ne révèle pas dans quelles configurations une atténuation de la peine entre en ligne de compte. Dans son Message du 6 mars 2015 concernant la modification de la loi sur les douanes, le Conseil fédéral précisait que si, "pour des raisons particulières", le conducteur n'avait pas fait preuve de la prudence imposée par les circonstances, les autorités pénales devaient avoir "la possibilité d'atténuer la peine encourue". Il indiquait également que ces motifs d'atténuation de la peine devaient être "moins restrictifs que ceux mentionnés à l'art. 48 CP", et que ladite peine ne pourrait être atténuée si le conducteur n'avait "nullement fait preuve de la prudence imposée par les circonstances" (Message du Conseil fédéral du 6 mars 2015, FF 2015, 2701; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1231/2020 du 12 mai 2021 consid. 1.1.2 et les références citées).

2.1.4. A teneur de la Notice d'utilisation des feux bleus et des avertisseurs à deux sons alternés du Département fédéral de l'Environnement, des Transports, de l'Energie et de la Communication du 6 juin 2005 (Notice du DETEC), sont réputées urgentes les courses qui, dans les cas graves, ont lieu pour permettre à la police d'intervenir aussi rapidement que possible, afin de sauver des vies humaines, d'écarter un danger pour la sécurité ou l'ordre public, de préserver des choses de valeur importante ou de poursuivre des fugitifs. La notion d'urgence doit être comprise dans le sens étroit. Ce qui est déterminant, c'est la mise en danger de biens juridiquement protégés, dont les dommages peuvent être considérablement aggravés par une petite perte de temps. Pour apprécier le degré d'urgence, les conducteurs de véhicules et les chefs de services d'intervention doivent ou peuvent se fonder sur la situation telle qu'elle se présente à eux au moment de l'intervention. Les conditions de trafic doivent être telles que l'on risque d'être considérablement retardé dans l'intervention si l'on ne déroge pas aux règles de circulation ou si l'on ne fait pas usage du droit spécial de priorité.

L'Ordre du MP concernant les courses officielles urgentes retient que le policier ne peut être mis au bénéfice de l'art. 100 ch. 4 LCR que s'il a fait usage simultanément des deux avertisseurs spéciaux, soit les feux bleus et l'avertisseur à deux sons alternés, et qu'ils ont été enclenchés suffisamment tôt. Il précise que, la vitesse admissible étant régie par le principe de proportionnalité, doivent être mis en balance l'importance du bien juridique protégé dont la sauvegarde justifie la course officielle urgente, d'une part, et le risque créé pour les usagers de la route, d'autre part. Il considère ainsi que la prudence a été respectée lorsque la vitesse n'excède pas 1.5 fois la limitation de vitesse, soit en cas d'une conduite à 80 km/h en zone limitée à 50 km/h. Exceptionnellement, lorsque la course officielle a pour but de sauver des vies humaines ou de poursuivre un fugitif suspecté d'avoir porté atteinte à la vie humaine, une vitesse atteignant deux fois la limitation peut être entreprise. Ces barèmes étant indicatifs, le principe de proportionnalité reste applicable dans tous les cas (points B.a.2 et B.a.4).

2.1.5. Plusieurs arrêts genevois ont été rendus en matière de courses officielles urgentes impliquant des policiers, notamment les deux arrêts pertinents suivants:

L'AARP/70/2022 du 22 mars 2022 dans lequel la Cour a rappelé que l'Ordre général du MP concernant les courses officielles urgentes, bien qu'étant une simple directive, était largement raisonnable lorsqu'il prévoyait qu'un policier pouvait circuler à deux fois la limite autorisée lorsqu'il s'agissait de sauver des vies humaines ou de poursuivre un fugitif suspecté d'avoir porté atteinte à la vie humaine. Les faits concernaient un policier ayant circulé à 103.9 km/h (marge de sécurité déduite) sur un tronçon limité à 50 km/h. La Cour a laissé ouverte la question de savoir si, dans le cas d'espèce, la fuite du véhicule poursuivi par le policier pouvait, en elle-même, être considérée comme une source de risque pour l'intégrité corporelle ou la vie d'autrui au vu de la vitesse à laquelle avait circulé le fuyard sur un tronçon très chargé, dans la mesure où le policier avait circulé à plus de deux fois la limite autorisée (consid. 2.3.2.1). L'intéressé a été condamné pour infraction à l'art. 90 al. 3 LCR et la peine a été atténuée en application de l'art. 100 ch. 4 in fine LCR.

L'AARP/82/2022 du 30 mars 2022 traitant du cas d'un policier ayant commis un excès de 48.5km/h (marge de sécurité déduite) sur un tronçon limité à 50km/h alors qu'il poursuivait un motard. La Cour l'a condamné pour infraction à l'art. 90 al. 2 LCR et a retenu une atténuation de la peine en application de l'art. 100 ch. 4 in fine LCR, relevant que bien que le motard poursuivi avait créé un danger pour la circulation en roulant à une vitesse inadaptée, le policier n'était pas lui-même autorisé à engendrer un même danger dans le seul but de rattraper le fuyard. Le danger créé était d'autant moins justifiable qu'il ne pouvait au mieux faire gagner au policier que quelques instants. Ainsi, ce dernier restait punissable (consid. 3.4).

2.2.1. En l'espèce, le Tribunal tient pour établi, au vu des données du RAG du véhicule de patrouille n° 1______, que le 28 mars 2018 vers 13h30, le prévenu a roulé à plus de 94km/h – soit plus de 80km/h, marge de sécurité déduite – sur environ 300 mètres, entre le quai du Seujet et le quai Turrettini, soit un tronçon où la vitesse est limitée à 50 km/h.

La durée de cette pointe de vitesse à plus de 80 km/h, marge de sécurité déduite, a été de 10 à 11 secondes. Le prévenu a atteint la vitesse maximale de 109 km/h (soit 95km/h, marge de sécurité déduite) et a roulé au-delà de 104 km/h (soit au-delà de 90 km/h, marge de sécurité déduite) sur 71 mètres, soit durant 2 secondes et demi.

Le prévenu a ainsi commis un excès de vitesse maximal de 45 km/h, lorsqu'il circulait à 95km/h, marge de sécurité déduite. Ce faisant, il a sciemment mis en danger la sécurité d'autrui, ou à tout le moins en a pris le risque.

L'excès de vitesse reproché est constitutif d'une violation grave d'une règle de la circulation routière au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, infraction dont les conditions objectives et subjectives sont réalisées.

2.2.2. Il convient ensuite de déterminer si le prévenu est punissable en application de l'art. 100 ch. 4 LCR.

Il est établi que le prévenu a agi dans le cadre d'une course officielle urgente et que les feux bleus et l'avertisseur à deux sons alternés de son véhicule étaient enclenchés pendant toute la durée de cette course.

Il est également établi que le but de la course en question était de poursuivre un fuyard ayant commis des infractions à la loi sur la circulation routière, cela avant même le début de la course-poursuite. L'objectif du prévenu était également d'écarter un danger pour la sécurité publique, le comportement de B______ étant de nature à créer un danger pour les autres usagers de la route. Au surplus, rien n'indique – et le prévenu ne prétend pas l'avoir pensé – que le fuyard avait porté atteinte à la vie humaine, ou comptait le faire, outre le danger constitué par sa conduite.

A cet égard, comme indiqué ci-dessus (chiffre 2.1.5. supra), dans un cas, la Cour a laissé ouverte la question de savoir si la fuite d'un chauffard pouvait en elle-même être considérée comme une source de risque pour la vie ou l'intégrité corporelle, au motif que le policier roulait à plus de deux fois la vitesse maximale autorisée, et dans un autre, elle a retenu que le policier n'était pas lui-même autorisé à engendrer un danger similaire à celui créé par le motard poursuivi, dans le seul but de rattraper ce dernier.

Dans le cas d'espèce, il est établi par les première déclarations du prévenu à la police le 28 mars 2018 que B______ a commis des infractions relativement graves à la loi sur la circulation routière, notamment en effectuant un dépassement sur la voie opposée après avoir franchi une double ligne de blanche, donc en roulant à contresens sur le pont de Saint-Georges, puis en traversant un carrefour alors que le feu était rouge.

Le Tribunal relève que lors de ses premières déclarations, le prévenu n'a pas indiqué que B______ conduisait à une vitesse excessive sur le pont de Saint-Georges déjà; en effet, il a déclaré que l'intéressé avait pris de la vitesse sur le quai du Seujet seulement, soit après le début de la course-poursuite. Rien n'indique non plus que des véhicules auraient dû freiner pour éviter une collision sur le carrefour.

En toute hypothèse, il est établi que le but du prévenu au moment de démarrer la course officielle urgente était d'intercepter B______. A ce moment-là, et encore lorsqu'il circulait sur le quai du Seujet, il ne pouvait pas savoir que l'intéressé commettrait par la suite – lors de la course-poursuite – des infractions très graves, mettant effectivement en danger la vie d'autrui.

Ainsi, en application de la Notice du DETEC et de l'Ordre du MP concernant les courses officielles urgentes (chiffre 2.1.4. supra), le prévenu était fondé à excéder la vitesse autorisée (soit 50 km/h) en appliquant le coefficient x1.5, soit en roulant au maximum à 80 km/h, marge de sécurité déduite, mais n'était pas légitimé à excéder cette vitesse maximale. En particulier, rien ne justifiait qu'il applique le coefficient x2, réservé aux seuls cas où la course officielle urgente a pour but de sauver des vies humaines ou de poursuivre un fuyard suspecté d'avoir porté atteinte à la vie humaine.

Le Tribunal rappelle que même si B______ créait un danger pour la circulation et les autres usagers de la route en roulant à une vitesse inadaptée, parfois à contresens, en zigzaguant notamment entre des véhicules sur le pont du Mont-Blanc, le prévenu n'était pas lui-même autorisé à engendrer un même danger dans le seul but de le rattraper, comme l'a relevé la Cour dans l'AARP/82/2022 du 30 mars 2022. Cela est d'autant plus vrai que B______ a certainement accéléré, à partir du pont du Seujet, dans le but d'échapper à ses poursuivants, augmentant ainsi le danger créé.

Force est de constater qu'en conduisant à plus de 80 km/h, marge de sécurité déduite, sur le tronçon situé entre le quai du Seujet et le quai Turrettini, où la vitesse était limitée à 50 km/h, le prévenu n'a pas pleinement fait preuve de la prudence nécessaire lors de sa course officielle urgente, quand bien même il a activé ses avertisseurs sonores et visuels, la vitesse atteinte par son véhicule n'étant pas proportionnée aux circonstances.

Partant, le prévenu ne peut pas bénéficier de l'impunité prévue à l'art. 100 ch. 4 LCR. La peine sera toutefois atténuée, en application de l'art. 100 ch. 4 in fine LCR.

2.3. S'agissant de la seconde partie de l'accusation, soit le reproche fait au prévenu d'avoir circulé à contresens sur la route de Chêne, à vive allure, alors que des véhicules circulaient normalement sur la voie descendante, force est de constater qu'aucun élément du dossier ne permet de l'étayer.

En effet, le seul témoignage de I______, qui a uniquement indiqué avoir vu un véhicule indéterminé rouler à contresens sur la route de Chêne, ne suffit pas à retenir qu'il s'agissait du véhicule du prévenu, ni que ce dernier roulait trop vite et que d'autres véhicules circulaient en sens inverse.

X______ sera dès lors acquitté pour ces faits.

Peine

3.1.1. L'art. 47 CP prévoit que le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravite de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerne, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

3.1.2. Le juge qui atténue la peine n’est pas lié par le minimum légal de la peine prévue pour l’infraction (art. 48a al. 1 CP). Il peut prononcer une peine d’un genre différent de celui qui est prévu pour l’infraction mais il reste lié par le maximum et par le minimum légal de chaque genre de peine (art. 48a al. 2 CP).

3.1.3. Dans l'AARP/82/2022 du 30 mars 2022, la Cour a rappelé que la qualification juridique ne constitue que l'un des aspects de la fixation de la peine et que la faute commise, composante essentielle dans le cadre de la fixation de la peine, est une question subjective pour laquelle la qualification juridique objective n'est pas le critère déterminant lorsque le juge peut procéder à une atténuation libre de la peine, comme c'est le cas en application de l'art. 100 ch. 4 in fine LCR (consid. 4.5).

3.1.4. Sauf disposition contraire de la loi, le montant maximum de l'amende est de CHF 10'000.- (art. 106 al. 1 CP). Le juge prononce dans son jugement, pour le cas où, de manière fautive, le condamné ne paie pas l'amende, une peine privative de liberté de substitution d'un jour au moins et de trois mois au plus (art. 106 al. 2 CP). Le juge fixe l'amende et la peine privative de liberté de substitution en tenant compte de la situation de l'auteur afin que la peine corresponde à la faute commise (art. 106 al. 3 CP).

3.1.5. À teneur de l'Ordre du MP concernant les courses officielles urgentes, si le conducteur n'a pas fait preuve de la prudence imposée par les circonstances et qu'il convient donc d'atténuer la peine, la sanction sera réduite pour ne punir que la différence entre la vitesse mesurée et la vitesse considérée comme proportionnelle (point B.a.5). D'après la Cour, ces prescriptions n'ont qu'une valeur indicative mais jouent cependant un rôle dans l'appréciation subjective de la faute (AARP/82/2022 du 30 mars 2022, consid. 4.4).

3.1.6. La Directive B.5 édictée par le Procureur général (Barème LCR) préconise entre autres le prononcé d'une peine pécuniaire de 60 jours-amende pour les dépassements de 30 à 34 km/h en localité et le prononcé d'une amende de CHF 400.- pour les dépassements de 16 à 20 km/h en localité, tandis qu'un dépassement de la vitesse autorisée de 15 km/h en localité relève de l'amende d'ordre (art. 9.1).

D'après l'Ordonnance fédérale sur les amendes d'ordre du 16 janvier 2019 (OAO; RS 314.11), une amende de CHF 250.- s'applique pour un dépassement de 15 km/h en localité (annexe 1, ch. 303.1.c).

3.1.7. La Chambre pénale d'appel et de révision du canton de Genève a récemment rendu plusieurs arrêts concernant des infractions à l'art. 90 al. 3 et 4 LCR pour les trois premiers et à l'art. 90 al. 2 LCR pour le dernier, dans lesquels elle a retenu une atténuation de la peine en application de l'art. 100 ch. 4 in fine LCR:

Dans l'AARP/326/2020 du 24 septembre 2020, la Cour a condamné un policier ayant commis un excès de 70km/h (marge de sécurité déduite) sur un tronçon limité à 50km/h, de nuit et en l'absence de trafic, à un travail d'intérêt général de 360 heures, soit l'équivalent de 90 unités pénales. Cette peine a été jugée adéquate par le Tribunal fédéral, lequel a rappelé que le législateur n'avait pas fixé de restriction quant à l'importance de l'atténuation de la peine susceptible d'être opérée en application de l'art. 100 ch. 4 LCR, et que dans le cas d'espèce, l'excès de vitesse, limité dans le temps et l'espace, avait été commis dans le contexte particulier d'une course officielle urgente (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1231/2020 du 12 mai 2021, consid. 1.6.1).

Dans l'AARP/175/2021 du 1er juin 2021, la Cour a condamné une policière ayant commis un excès de vitesse de 52km/h (marge de sécurité déduite) sur un tronçon limité à 50km/h, également de nuit et en l'absence de trafic, à un travail d'intérêt général de 280 heures, soit l'équivalent de 70 unités pénales.

Dans l'AARP/70/2022 du 22 mars 2022, concernant un policier ayant circulé à 103.9 km/h (marge de sécurité déduite) sur un tronçon limité à 50 km/h, la Cour a fixé la peine à 150 jours-amende, retenant que l'excès de vitesse en question, commis en plein été, au centre-ville et en présence de nombreux piétons, avait provoqué un risque important, mais également que la vitesse maximale atteinte n'avait dépassé le seuil de l'art. 90 al. 4 LCR que de 3.9km/h au maximum, que l'excès de vitesse commis au-delà de 100km/h avait été très bref (1.03 seconde) et que les avertisseurs spéciaux étaient en outre enclenchés.

Enfin, dans l'AARP/82/2022 du 30 mars 2022, la Cour a condamné le policier ayant effectué un excès de vitesse de 48.5km/h (marge de sécurité déduite) sur un tronçon limité à 50km/h à une amende de CHF 400.-, précisant que la durée (restreinte ou non) de l'excès de vitesse n'était pas pertinente dans le cadre de l'examen de la culpabilité du prévenu, mais pouvait être prise en compte dans le cadre de la fixation de la peine (consid. 3.4).

3.2. En l'espèce, la faute du prévenu est de gravité moyenne. En circulant à une vitesse de 95 km/h sur un tronçon limité à 50 km/h, il a créé – ou à tout le moins a pris le risque de créer – un sérieux danger pour la sécurité d'autrui.

L'excès de vitesse commis au-delà de 80 km/h a duré une dizaine de secondes, avec un pic de plus de 90 km/h durant deux secondes et demie, soit une durée brève, mais pas autant que dans les cas récemment jugés par la Cour (AARP/70/2022 du 22 mars 2022 et AARP/82/2022 du 30 mars 2022), dans lesquels l'excès commis au-delà de la vitesse considérée comme proportionnelle avait été très bref. A cela s'ajoute qu'en l'espèce, l'excès de vitesse a eu lieu entre le quai du Seujet et le quai Turrettini, à savoir un tronçon bordé d'une piste cyclable et de trottoirs, et à 13h30, heure de possible affluence.

Il sied toutefois de retenir également que le prévenu a agi lors d'une course officielle urgente, soit dans le cadre de son travail, en ayant enclenché les feux bleus et la sirène de son véhicule sur la totalité du parcours, et que la circulation était fluide, même si la route était humide.

La collaboration du prévenu peut être qualifié de bonne. Il a notamment répondu de façon détaillée aux questions du Ministère public.

Sa prise de conscience est également bonne, à l'aune de sa conviction d'avoir agi licitement.

Le prévenu n'a pas d'antécédent, élément qui a un effet neutre sur la fixation de la peine.

Au vu de l'infraction retenue par le Tribunal, soit une violation de l'art. 90 al. 2 LCR, le prévenu est théoriquement passible d'une privative de liberté de trois ans ou d'une peine pécuniaire.

Cependant, comme le prévoit l'art. 48a CP, le juge qui atténue la peine n'est pas lié par le minimum légal de la peine prévue pour l'infraction retenue et peut prononcer une peine d'un genre différent, et, comme rappelé par la Cour dans l'AARP/82/2022 du 30 mars 2022, la qualification juridique ne constitue que l'un des aspects de la fixation de la peine, la faute commise en étant une composante essentielle. Ainsi, le Tribunal peut envisager de prononcer une amende.

Conformément à l'Ordre du MP concernant les courses officielles urgentes et à la jurisprudence de la Cour, il convient de ne punir que la différence entre la vitesse considérée comme proportionnelle, soit en l'espèce 80 km/h, et la vitesse mesurée, ici 95 km/h. C'est ainsi la différence de 15 km/h qui détermine la quotité de la peine.

Selon la Directive B.5 du Ministère public, qui ne prend pas en compte la durée de l'excès de vitesse, un dépassement de la vitesse maximale de 15 km/h en localité relève de l'amende d'ordre (CHF 250.- selon l'OAO) et, juste au-delà, l'excès de 16 à 20 km/h est sanctionné d'une amende de CHF 400.-. A cet égard, il sied de relever que le Tribunal n'est pas lié par ces directives, qui constituent toutefois une indication importante.

Le Tribunal relève encore qu'un conducteur ordinaire commettant un excès de vitesse de 30 km/h en localité (vitesse autorisée de 50 km/h) est puni, selon la Directive B.5 du Ministère public, d'une peine pécuniaire de 60 jours-amende, tandis qu'un policier commettant le même excès dans le cadre d'une couse officielle urgente est acquitté, après application du coefficient de x1.5 permettant de déterminer la vitesse maximale proportionnée. Il apparait dès lors, aux yeux du Tribunal, qu'un dépassement de 15 km/h de plus – soit un dépassement total de 45 km/h en localité –, pour un policier effectuant une course-poursuite, impose de renoncer à une peine pécuniaire au profit d'une amende au sens de l'art. 106 CP.

Compte tenu des éléments qui précèdent, et en particulier de la durée de l'excès de vitesse commis par le prévenu, dite amende sera fixée à CHF 600.-.

Indemnités et frais

4.1. A teneur de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

4.2. Vu l'acquittement partiel du prévenu, il sera indemnisé conformément à la note d'honoraire produite, l'activité déployée étant nécessaire à sa défense, sous réserve de l'activité déployée en septembre 2018, laquelle concernait la procédure pénale dirigée contre B______, et l'activité liée à l'expertise, qui ne concernait que D______. Le montant ainsi réduit sera admis pour moitié, le prévenu étant condamné pour un seul des deux états de fait qui lui étaient reprochés.

5. Les frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'551.-, y compris un émolument de jugement de CHF 500.-, seront mis pour moitié à la charge du prévenu, afin de tenir compte de son acquittement partiel (art. 426 al. 1 CPP). Le solde sera laissé à la charge de l'Etat (art. 423 al. 1 CPP). Les frais de fourrière, qui ne concernaient que D______, seront également laissés à la charge de l'Etat.

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DE POLICE

statuant contradictoirement :

Déclare X______ coupable de violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR).

Acquitte X______ de violation grave des règles de la circulation routière s'agissant des faits visés au point 1, 2ème tiret de l'acte d'accusation (art. 90 al. 2 LCR).

Condamne X______ à une amende de CHF 600.- (art. 106 al. 1 CP et 100 ch. 4 in fine LCR).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 6 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée (art. 106 al. 2 CP).

Condamne l'Etat de Genève à verser à X______ CHF 10'918.90, à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (art. 429 al. 1 let. a CPP).

Rejette pour le surplus les conclusions en indemnisation de X______ (art. 429 CPP).

Condamne X______ à la moitié des frais de la procédure, soit CHF 775.50 (art. 426 al. 1 CPP).

Laisse le solde des frais de la procédure à la charge de l'Etat (art. 423 al. 1 CPP).

Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Service cantonal des véhicules, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).

Informe les parties que, dans l'hypothèse où elles forment un recours à l'encontre du présent jugement ou en demandent la motivation écrite dans les dix jours qui suivent la notification du dispositif (art. 82 al. 2 CPP), l'émolument de jugement fixé sera en principe triplé, conformément à l'art. 9 al. 2 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale (RTFMP; E 4.10.03).

 

La Greffière

Karin CURTIN

La Présidente

Sabina MASCOTTO

 

Vu les annonces d'appel formées par le prévenu et le Ministère public, lesquelles entraînent la motivation écrite du jugement (art. 82 al. 2 let. b CPP).

LE TRIBUNAL DE POLICE

Condamne X______ à payer la moitié de l'émolument complémentaire de CHF 1'000.- à l'Etat de Genève, soit CHF 500.-.

 

La Greffière

Karin CURTIN

La Présidente

Sabina MASCOTTO

 


 

Voies de recours

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

Si le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit conteste également son indemnisation, il peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours dès la notification du jugement motivé, à la Chambre pénale d'appel et de révision contre la décision fixant son indemnité (art. 396 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

 

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

935.00

Convocations devant le Tribunal

CHF

45.00

Frais postaux (convocation)

CHF

14.00

Emolument de jugement

CHF

500.00

Etat de frais

CHF

50.00

Frais postaux (notification)

CHF

7.00

Total

CHF

1'551.00 (pour moitié à la charge de l'Etat)

==========

Emolument complémentaire

CHF

1'000.- (pour moitié à la charge de l'Etat)

Frais de fourrière (OPMP/6______: D______) CHF 17'332.50 (à la charge de l'Etat)

 

 

Notification à X______ et au Ministère public, par voie postale.