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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/2130/2025

DCSO/485/2025 du 04.09.2025 ( PLAINT ) , REJETE

Descripteurs : Minimum vital; revenus; contributions d'entretien enfants
Normes : LP.93
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2130/2025-CS DCSO/485/25

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 4 SEPTEMBRE 2025

 

Plainte 17 LP (A/2130/2025-CS) formée en date du 17 juin 2025 par ETAT DE GENEVE DF-DGFE-DFC, SERVICE DU RECOUVREMENT TRANSVERSAL.

* * * * *

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 4 septembre 2025
à :

- ETAT DE GENEVE DF-DGFE-DFC, SERVICE DU RECOUVREMENT TRANSVERSAL

Rue du Stand 15

Case postale 3937

1211 Genève 3.

- A______

______

______.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Le 11 avril 2025, l'Etat de Genève a requis la continuation de la poursuite n° 1______ introduite à l'encontre de A______ pour un montant de 16'137 fr. 25, plus intérêts et frais.

b. Le 6 mai 2025, l'Office cantonal des poursuites (ci-après: l'Office) a adressé à A______, qui avait été auditionnée dans une saisie précédente le 31 juillet 2024, un avis de saisie pour information. La débitrice était invitée à se présenter à l'Office uniquement en cas de changement de sa situation.

c. Le 6 juin 2025, l'Office a établi un acte de défaut de bien n° 1______. A______, qui avait pour seul revenu la pension alimentaire versée par son ex-époux en 1'250 fr., était insaisissable. Le montant total du découvert s'élevait à 17'284 fr. 92.

B. a. Par acte du 16 juin 2025, l'Etat de Genève a porté plainte contre l'acte de défaut de bien précité, qu'il a reçu le 11 juin 2025. Il fait valoir que l'ex-époux de la débitrice versait à cette dernière une contribution d'entretien de 3'900 fr. par mois qui aurait dû être prise en compte dans les revenus de A______. De plus, cette dernière avait perçu un salaire entre 2016 et 2020. Sa situation financière méritait d'être investiguée et actualisée.

b. Dans son rapport du 2 juillet 2025, l'Office a exposé qu'à réception de la plainte, il avait pris contact avec A______, qui avait déclaré que sa situation n'avait pas changé. Elle n'avait pas d'autre revenu que la pension alimentaire. Elle était aidée par son ami car elle n'arrivait pas "à joindre les deux bouts". Selon l'Office, A______ avait pour seul revenu la contribution d'entretien en sa faveur, en 1'250 fr. Elle était donc insaisissable.

Il a joint à son rapport une copie d'un jugement du Tribunal de première instance du 12 juin 2023, condamnant B______ à payer à A______ des contributions mensuelles à hauteur de 960 fr. et 1'950 fr. pour l'entretien de leurs filles C______, née le ______ 2006, et D______, née le ______ 2010, et à hauteur de 1'250 fr. pour l'entretien de son ex-épouse. B______ devait par ailleurs reverser à A______, respectivement aux deux filles une fois celles-ci devenues majeures, les allocations familiales qu'il percevait pour elles.

Il a aussi transmis un relevé du compte bancaire de A______ pour la période de novembre 2024 à juin 2025, dont il ressortait que B______ lui versait un montant mensuel de 4'600 fr. A______ s'acquittait d'un loyer de 2'468 fr. par mois.

c. Le rapport de l'Office a été communiqué à l'Etat de Genève le 15 juillet 2025, avec l'indication que l'instruction de la cause était close.

EN DROIT

1. Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) la plainte est recevable.

2. 2.1.1 Lorsque le débiteur est sujet à la poursuite par voie de saisie, l'Office, après réception de la réquisition de continuer la poursuite, procède sans retard à la saisie ou y fait procéder par l'office du lieu où se trouvent les biens à saisir (art. 89 LP). L'Office, qui est en charge de l'exécution de la saisie (art. 89 LP), doit déterminer d'office les faits pertinents pour son exécution (ATF 108 III 10). Afin de pourvoir au meilleur désintéressement possible des créanciers, l'Office doit procéder avec diligence, autorité et souci de découvrir les droits patrimoniaux du poursuivi, qui ne sont pas insaisissables en vertu des art. 92 et 93 LP. Il est doté à cette fin de pouvoirs d'investigation et de coercition étendus, "à l'instar d'un juge chargé d'instruire une enquête pénale ou d'un officier de police judiciaire" (Gilliéron, Commentaire de la LP, articles 89-158, 1999, n. 12 ad art. 91).

Il revient à l'office d'interroger le poursuivi, d'inspecter sa demeure, voire les locaux qu'il loue comme bailleur ou locataire, de façon proportionnée aux circonstances (Gilliéron, op. cit., n. 13 et 16 ad art. 91).

La question de savoir si et dans quelle mesure l'enquête officielle menée par l'Office est défectueuse et son résultat inexact ne doit être examinée qu'en ce qui concerne les éléments critiqués par le créancier dans sa plainte (cf. ATF 127 III 572 consid. 3c, JT 2001 II 78).

2.1.2 En cas de séparation, lorsque le parent accueille l’enfant chez lui, il convient, pour déterminer le minimum vital du parent, de prendre en considération l’entier des suppléments pour l’entretien des enfants selon les directives en la matière (ATF 106 III 11 consid. 3a, JdT 1981 II 145). Toutefois, la jurisprudence considère que les contributions d’entretien en faveur des enfants doivent être affectées exclusivement aux besoins de ceux-ci (BlSchK 2007, p. 193 ss). Elles constituent des prestations dont, de par la loi, le parent ne peut pas faire usage pour couvrir ses dettes propres ou pour améliorer son niveau de vie. L’art. 289 al. 1 CC prévoit d’ailleurs que l’enfant est le créancier des prestations d’entretien et celles-ci sont soumises à un régime particulier quant à leur modification (ATF 115 Ia 325 consid. 3, JdT 1992 I 671). Il en va de même des allocations familiales (art. 285a CC), qui sont destinées exclusivement à l’entretien de l’enfant (ATF 137 III 59 consid. 4.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_451/2019 du 28 janvier 2020 consid. 3.3).

Autrement dit, lorsque le débiteur perçoit, pour le compte de ses enfants, une pension alimentaire et des allocations familiales, celles-ci ne doivent pas être ajoutées à ses revenus, mais venir en déduction de la base mensuelle d’entretien des enfants, car il s’agit de prestations qui doivent être exclusivement affectées à leurs besoins (Ochsner, CR LP, 2025, n° 58 ad art. 93 LP). Elles viennent en déduction de l’entretien courant de ces derniers fixé par les lignes directrices (base mensuelle d’entretien); si ces contributions dépassent de loin la mesure usuelle de sorte qu'il subsiste un solde important, après déduction des frais d'entretien de l'enfant, il y a lieu de tenir compte d'une contribution équitable de l'enfant aux charges du ménage, en particulier au loyer (art. 319 al. 1 CC; 104 III 77; DCSO/370/2017 du 13 juillet 2017; Ochsner, CR LP, 2025, n° 103 et 104 ad art. 93 LP).

2.2 En l'espèce, il résulte des investigations effectuées par l'Office que l'intimée perçoit de son ex-époux un montant mensuel de 4'600 fr., lequel comprend une contribution à son propre entretien de 1'250 fr. et des contributions à l'entretien de ses deux filles (1'950 fr. et 960 fr.) auxquelles s'ajoutent des allocations familiales.

La contribution d'entretien perçue par la poursuivie (1'250 fr.) ne couvre pas son minimum vital, composé à tout le moins de sa base mensuelle d'entretien (1'350 fr.) et de son loyer (2'418 fr.), soit 3'768 fr.

Quant aux contributions versées par le père en faveur des enfants, elles ne sauraient être ajoutées aux revenus de la débitrice. Même à considérer qu'une partie de ces contributions (2'910 fr. hors allocations familiales) pourrait servir à couvrir partiellement les charges du ménage de l'intimée, en particulier le loyer, une telle participation ne saurait excéder en l'espèce un montant de 1'700 fr. par mois (2'910 fr. – [2 x 600 fr.], en se limitant à admettre comme charge de chaque enfant le montant de base LP de 600 fr.). Or, avec une telle participation, les charges de l'intimée, réduites à 2'068 fr. par mois (3'768 fr. – 1'700 fr.), sont encore supérieures à ses revenus en 1'250 fr.

Enfin, il n'y a au dossier aucun élément laissant penser que la débitrice a d'autres sources de revenus saisissables. Les montants que son compagnon lui verse pour l'aider ne sont ni fixes ni réguliers et ne sont donc pas saisissables, ce que la plaignante ne soutient du reste pas. C'est par conséquent à juste titre que l'Office a établi l'acte de défaut de biens querellé.

Mal fondée, la plainte sera rejetée.

3. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 16 juin 2025 par l'Etat de Genève contre l'acte de défaut de biens, n° 1______, établi le 6 juin 2025 par l'Office cantonal des poursuites.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Messieurs Alexandre BÖHLER et Anthony HUGUENIN, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

La présidente : La greffière :

Verena PEDRAZZINI RIZZI Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.