Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/1074/2024 du 31.10.2024 ( LCI ) , REJETE
REJETE par ATA/480/2025
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 31 octobre 2024
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dans la cause
Madame A______ et Monsieur B______, représentés par Me Bastien GEIGER, avocat, avec élection de domicile
contre
Madame C______
DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC
1. Madame C______ est propriétaire de la parcelle n˚ 1______ de la commune de D______ (ci-après : la commune) où sont érigés un garage et une villa ayant pour adresse le 2______, chemin des E______.
2. Madame A______ et Monsieur B______ (ci-après : les époux B______) sont propriétaires de la parcelle n° 3______ de la commune, sise 4______, chemin des E______. Ils y vivent dans une villa avec leurs enfants.
3. Les deux parcelles, situées en 5ème zone, sont directement voisines, séparées par le chemin des E______.
4. Le 30 avril 2019, Mme C______ a déposé auprès du territoire (ci-après : le département) une demande d’autorisation de construire portant sur l’agrandisse-ment de sa villa par le changement d’affectation d’un garage, modification des façades, aménagement d’un patio et l’abattage d’arbres. Le mode de chauffage au mazout devait être démantelé et remplacé par une pompe à chaleur (ci-après : PAC) extérieure proche de la façade. Deux places de stationnement à l’extérieur, sur pavés gazon, de même que l’installation ou la construction d’un objet destiné à occuper le sous-sol de façon permanente ou provisoire étaient également prévus.
À cette demande était notamment joint un formulaire d’attestation du respect des exigences de protection contre le bruit pour PAC air/eau avec comme sous-titres « Évaluation des immissions de bruit d’une PAC avec une puissance de chauffe jusqu’à 40 kW » et « Évaluation pour la période de nuit », de l’association Cercle bruit (ci-après : formulaire Cercle bruit) ; il en résulte que le modèle de PAC devant être installé était une Alpha Innotec NP-AW 20-16.
5. Lors de l’instruction de cette demande, enregistrée sous la référence DD 5______, les préavis suivants ont notamment été délivrés :
- favorable, le 5 novembre 2019, de la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) de l’office des autorisations de construire (ci-après : OAC), sous conditions notamment que « les pièces en sous-sol ne pourront en aucun cas être habitables » ;
- favorable, le 12 novembre puis le 5 décembre 2019, du service de l’air, du bruit et des rayonnements non ionisants (ci-après : SABRA). L’installation d’une PAC était une installation nouvelle au sens de l’art. 7 de l’ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB - RS 814.41). Le niveau d’évaluation (Lr) devait être déterminé au milieu de la fenêtre ouverte des locaux à usage sensible au bruit de l’habitation voisine la plus proche. Les valeurs de planification définies dans l’annexe 6 de l’OPB devaient être respectées, comme indiqué dans le formulaire Cercle bruit fourni par la requérante. Les exigences minimales de la norme SIA 181 (2006) devaient être respectées (art. 32 OPB). Le degré de sensibilité (ci-après : DS) II était attribué à la parcelle selon le plan d’attribution des degrés de sensibilité au bruit de la commune et les valeurs limites étaient donc : Lr jour ≤ 60 décibels (dB(A)[A]) et Lr nuit ≤ 50 dB(A). Il n’y avait pas de source de bruit routier, ferroviaire ou aérien à proximité susceptible de générer un dépassement de ces valeurs limites.
Les préavis des autres instances consultées étaient tous favorables au projet, pour plusieurs d’entre eux sous conditions.
6. Par décision globale du ______ 2020 publiée dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour, le département a délivré l’autorisation de construire DD 5______.
7. Par acte du 3 mars 2020, les époux B______ ont recouru contre cette autorisation auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant à son annulation sous suite de frais et dépens. Préalablement, ils ont requis qu’un transport sur place ainsi qu’une expertise, à confier à un ingénieur acousticien, soient ordonnés.
Leur recours était dirigé contre l’autorisation DD 5______ en tant qu’elle autorisait la PAC à un emplacement faisant entièrement face à leur villa, à une quinzaine de mètres, sans aucune mesure constructive destinée à prévenir le bruit. La PAC, dont le fonctionnement générait en puissance maximale jusqu’à 62 dB(A) de jour et 56 dB(A) de nuit selon les données du constructeur, avait été mise en service durant quelques jours, plusieurs semaines avant l’octroi de l’autorisation litigieuse, avant d’être arrêtée sur ordre du département. Ils avaient alors pu réaliser quelle était concrètement l’importance des nuisances sonores de l’installation qui affectait leur environnement de vie et péjorait la valeur de leur bien immobilier.
Les art. 11 al. 2 de la loi fédérale sur la protection de l’environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01) et 7 al. 1 let. a OPB avaient été violés. La protection contre le bruit devait être assurée, pour les nouvelles installations, par l’application cumulative des valeurs de planification et du principe de la limitation préventive des émissions. Ces principes n’avaient pas été respectés : la requérante avait déterminé l’emplacement de la PAC dans l’optique de n’avoir elle-même pas à en supporter les nuisances. Elle avait défini son emplacement dans la portion de son jardin qu’elle destinait à devenir un parking. En l’adossant à un mur et en la bordant de véhicules placés perpendiculairement, le bruit de cette PAC serait renforcé en direction de leur habitation, située à moins de 20 m. Il suffisait de l’installer de l’autre côté du garage, dans un saut de loup, voire de compléter l’installation par une paroi phono-absorbante pour en réduire les nuisances. On pouvait enfin s’interroger sur la pertinence du choix de cette PAC compte tenu de sa puissance énergétique pour une villa d’environ 170 m2. D’autres modèles auraient pu être installés.
8. Dans ses observations du 3 juin 2020, Mme C______ a conclu au rejet du recours. Préalablement, elle a demandé le retrait de l’effet suspensif au recours pour les travaux non litigieux de la DD, soit ceux qui ne concernaient pas la PAC.
9. Par décision du ______ 2020 (DITAI/6______), le tribunal a rejeté la demande de retrait de l’effet suspensif précitée.
10. Par jugement du ______ 2020 (JTAPI/7______), le tribunal a rejeté le recours.
11. Par acte du 21 octobre 2020, les époux B______ ont interjeté recours contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant à son annulation et à celle de l’autorisation de construire DD 5______. Préalablement, ils ont requis qu’un transport sur place et qu’une expertise soient ordonnés.
12. En décembre 2020, un huissier de justice, mandaté par les recourants, a dressé un procès-verbal de constat relatif à la PAC.
13. Par arrêt du ______ 2021 (ATA/8______), la chambre administrative a admis le recours, annulé le jugement entrepris, annulé la décision DD 5______ en ce qu’elle concernait la PAC et retourné le dossier au département au sens des considérants.
Il ne pouvait être considéré qu’en raison du respect des valeurs de planification, le principe de prévention était de fait respecté. Il appartenait au tribunal de vérifier si le département s’était assuré qu’une réduction des émissions pouvait être exigée dans les limites des art. 11 al. 2 et 7 al. 1 let. a OPB, d’autant que les recourants faisant des propositions concrètes s’agissant de l’emplacement de la PAC et qu’ils mettaient en évidence le risque d’une augmentation des nuisances du fait de la présence d’un parking perpendiculaire à la PAC. Or, il ne ressortait pas du dossier que le département, qui à teneur de ses écritures indiquait partager le point de vue du tribunal, aurait procédé de la sorte. Il en résultait qu’à défaut d’avoir démontré, dans la mesure que permettaient l’état de la technique et les conditions d’exploitation et pour autant que cela fût économiquement supportable, qu’il n’était en l’espèce pas possible d’exiger une réduction supérieure des émissions de bruit engendrées par la PAC, le département avait violé le principe de prévention. L’arrêt rendait sans objet la demande de retrait partiel de l’effet suspensif au recours formulée par l’intimée.
Non contesté, cet arrêt est entré en force.
14. Le ______ 2021, le département a enregistré, sous la référence DD 5______/2, une demande d’autorisation de construire définitive complémentaire pour l’instal-lation d’une PAC sur la parcelle n° 1______.
15. Dans ce cadre, par préavis du 17 septembre 2021, le SABRA a requis la fourniture des pièces complémentaires, soit le plan de localisation de la PAC, le formulaire d’attestation pour le bruit des PAX (H03) et un rapport rapport acoustique démontrant notamment la prise en compte du principe de prévention.
16. Le 24 septembre 2021, le département a invité Mme C______ à lui remettre les pièces requises dans le préavis du SABRA du 17 septembre 2021.
17. Le 8 octobre 2021, par l’intermédiaire de son mandataire, un ingénieur civil, Mme C______ a répondu que plusieurs possibilités avaient été étudiées quant à la position de la PAC. Celle retenue correspondait au point le plus éloigné de l’ensemble des voisins et se situait sur une façade aveugle. En outre, elle était positionnée au plus près des ballons d’ECS et de chauffage basse température, ce qui améliorait le rendement de l’installation et diminuait donc le temps et la puissance de fonctionnement, et l’éventuelle nuisance sonore, pour une même température de consigne dans la maison. Une abondante végétation, réalisée sur le terrain, contribuait à diminuer l’impact visuel. Aucune mesure supplémentaire d’atténuation de bruit n’avait dû être prise, le modèle choisi étant particulièrement silencieux et aucun capot additionnel n’ayant été prévu par le constructeur.
18. Par préavis du 7 décembre 2021, le SABRA a requis la modification du projet et la fourniture de pièces complémentaires, soit l’indication du caisson de la PAC sur les plans ainsi que la mise à jour du formulaire Cercle Bruit devant indiquer, d’une part, que le principe de prévention avait bien été pris en compte et, d’autre part, qu’un caisson acoustique serait mis en place.
19. Le 18 janvier 2022, par le biais de son mandataire, Mme C______ a expliqué que, s’agissant des possibles mesures pour atténuer le bruit engendré par la PAC, selon son constructeur, il n’était pas possible de poser un caisson sur les PAC de version extérieure car elles devaient travailler dans un environnement libre, un caisson anti-bruit pouvant entrainer des pertes de charge que le ventilateur n’arrivait pas à compenser. D’autre part, lors du dégivrage de la PAC, une grande quantité de vapeur d’eau s’échappait de l’évaporateur et devait pouvoir se dégager dans l’air. Si ce phénomène se produisait dans le caisson, il y avait des risques de détérioration de la PAC. Ainsi, le constructeur proposait de poser des parois anti-bruit tout en respectant l’espace nécessaire autour de la pompe.
20. Le 15 mars 2022, le SABRA a émis un préavis requérant la modification du projet et la fourniture de pièces complémentaires. Mme C_____ était ainsi invitée à mettre à jour le formulaire H03 pour l’emplacement choisi et à remettre deux formulaires H03 complémentaires pour deux emplacements alternatifs en vue de vérifier la prise en compte du principe de prévention. Pour chacun d’eux, la bonne distance au local à usage sensible devait être prise en compte ainsi que les réflexions du bruit et la réduction du bruit liée à la mise en place des mesures de protections choisies. Mme C______ devait aussi produire un plan avec les trois emplacements potentiels et la distance aux locaux à usage sensible les plus exposés et les mesures de protections autour de la PAC.
Le SABRA a ajouté que le constat d’huissier ne pouvait pas être considéré comme une expertise validée par un expert en acoustique et qu’aucun formulaire H03 ne l’accompagnait.
21. Le 24 avril 2022, par le biais de son mandataire, Mme C______ a ainsi soumis trois positions possibles pour la PAC, la position une, qui correspondait à son actuel emplacement, étant la plus éloignée des voisins immédiats (à savoir 17 m contre 15 m pour les alternatives présentées).
Dans ce cadre, elle a notamment produit :
- un plan de situation avec emplacement de la PAC aux trois positions possibles, dont il ressort, s’agissant de la position une, une distance aux voisinages de respectivement 17 m et 18 m ;
- trois formulaires Cercle bruit, complétés selon une distance jusqu’au récepteur de respectivement 15 m, 17 m et 18 m. Il ressort du formulaire Cercle bruit du 6 avril 2022 que le bruit généré à 17 m en fonctionnement de nuit était de 37,40 dB(A) sans mesure technique d’atténuation additionnelle, la valeur limite de 45 dB(A) étant ainsi respectée, et que le principe de prévention avait été pris en compte ;
- un rapport relatif à un écran pour PAC établi le 19 avril 2022 par le bureau BATJ, acousticien mandaté par l’intimée, dont il ressort notamment qu’un écran anti-bruit d’une hauteur de 1,50 m, installé sur au moins trois côtés et à une distance de 1 m de la PAC atténuait de 7,70 dB(A) le bruit de cette installation par rapport au droit des ouvrants sensibles au bruit situés sur la parcelle des recourants. Enfin, un Lr de 34 dB(A) de nuit était indiqué pour le voisin le plus exposé.
22. Le 16 juin 2022, le SABRA a rendu un préavis favorable, sous condition de la « mise en place de l’écran de protection anti-bruit pour la PAC ».
Ce préavis spécifiait qu’il ne concernait que l’installation de la PAC, les autres conditions devant être respectées selon l’autorisation accordée par le département. La requérante avait indiqué que la mise en place d’un caisson acoustique n’était, selon le fournisseur, techniquement pas faisable, de sorte qu’une paroi proche de l’installation était privilégiée. À sa demande, le dimensionnement de cette paroi avait été modifié pour protéger l’ensemble du voisinage du bruit de l’installation avec une réduction évaluée entre 6,10 et 7,70 dB(A) selon le voisin considéré. L’étude acoustique (expertise du bureau BATJ) fournie par la requérante mentionnait un Lr de 34 dB(A) pour le voisin le plus exposé. Il était rappelé que les emplacements à prendre en compte pour évaluer le principe de prévention devaient respecter l’aide à l’exécution 6.21 « Évaluation acoustique des PAC air/eau » (Cercle bruit, 2019), dont il ressortait que, si les composantes bruyantes de la PAC ou le saut-de-loup se trouvaient à proximité de la façade d’une maison familiale, ils devaient être placés à un endroit où :
- il n’y avait pas de fenêtres de locaux sensibles au bruit ;
- la distance jusqu’aux fenêtres des locaux sensibles au bruit était la plus grande possible ;
- les locaux sensibles au bruit disposaient d’une autre fenêtre sur un côté opposé à la PAC.
Dans un souci de bon sens de l’application des règles de l’art. 11 LPE, le SABRA a relevé les points suivants :
- la PAC était située contre une des façades de la villa de la requérante, dans une configuration optimisée par rapport aux locaux sensibles du voisinage. Il était raisonnablement difficile de trouver un emplacement plus adéquat au regard de la nuisance pour le voisinage, à moins de faire réaliser une étude par un bureau d’expert, au bénéfice d’un logiciel professionnel de simulation acoustique. Les résultats seraient à son expérience, au regard du cas d’espèce, peu significatifs sur la réduction de bruit obtenue pour le voisinage. Cette mesure n’était pas jugée économiquement supportable (art. 11 al. 2 LPE). La requérante avait toutefois montré que les distances aux voisins pour les deux emplacements alternatifs étaient sensiblement les mêmes ;
- la façade choisie était exempte de fenêtre donnant sur un local sensible, contrairement aux deux autres emplacement considérés. Ainsi, la requérante était au mieux protégée du bruit de sa propre installation, ce qui répondait aussi au principe de prévention de l’art. 11 LPE ;
- l’art. 11 al. 1 LPE demandait que des mesures soient prises à la source pour limiter le bruit. Ainsi, la mise en place d’une mesure technique d’atténuation de bruit (paroi proche) permettrait de répondre de même à l’art. 11 al. 3 LPE, qui demandait que les émissions de bruit soient limitées plus sévèrement, s’il y avait lieu de présumer que les atteintes seraient nuisibles ou incommodantes.
23. Le 22 août 2022, par le biais de son mandataire, Mme C______ a encore précisé que l’emplacement alternatif proposé par les époux B______ n’était pas une « façade aveugle », mais l’entrée principale de la maison qui était pourvue d’une porte d’entrée semi vitrée, de deux fenêtres au rez-de-chaussée et d’une fenêtre au premier étage. En outre, cet emplacement se situait à 15 m du voisin immédiat.
24. Par décision du ______ 2022 publiée dans la FAO du même jour, le département a délivré l’autorisation de construire complémentaire DD 5______/2.
En son point 5, cette décision stipulait que les conditions figurant dans le préavis du SABRA du 16 juin 2022 devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de l’autorisation.
25. Par acte du 7 octobre 2022, sous la plume de leur conseil, les époux B______ ont recouru contre cette décision auprès du tribunal, concluant à son annulation, sous suite de frais et dépens. Préalablement, ils ont requis qu’une expertise, à confier à un ingénieur acousticien, soit ordonnée.
La décision querellée violait les art. 11 al. 2 LPE et 7 al. 1 let. a OPB (principe de prévention) compte tenu, d’une part, de l’emplacement inadéquat choisi et, d’autre part, du fait que les mesures préventives prises visant à prévenir la propagation du bruit étaient inappropriées, au regard des décibels, des fréquences et gammes de bruit que générait effectivement l’installation litigieuse.
Le 28 septembre 2022, avec leur accord, l’intimée avait mis en fonction sa PAC, en installant une cloison provisoire. Malgré cet écran, plus haut que celui validé par le SABRA, le bruit engendré par la PAC s’était avéré supérieur au bruit de fond nocturne, la rendant audible non seulement aux fenêtres de leur habitation, mais également depuis leur lit et ceux de leurs enfants. Ils avaient alors soumis la mesure préventive approuvée par le SABRA à un expert acousticien. Dans son rapport, ce dernier se montrait particulièrement critique quant à l’efficience de la paroi définie par l’intimée.
Le département s’était basé sur les données théoriques et les informations, pour partie inexactes et incomplètes, transmises pas l’intimée, sans effectuer aucun transport sur place ni des mesures acoustiques. L’emplacement initialement approuvé était le seul à être directement situé face aux fenêtres de leur habitation, qui plus était à proximité immédiate d’un ouvrant que l’intimée entendait installer dans le cadre de l’autorisation qu’elle avait requise et obtenue. Or, il existait un emplacement plus adapté au regard de l’ensemble des locaux à usage sensible au bruit, notamment en termes de vis-à-vis et de distance, situé à l’arrière de la villa de l’intimée. En l’état, ils encouraient le risque de se voir imposer une installation permanente et bruyante proches de leurs chambres, péjorant leur qualité de vie et diminuant la valeur économique de leur bien. Il se justifiait ainsi d’ordonner une expertise visant à effectuer l’examen préventif et objectif qui n’avait pas été fait par l’autorité intimée, ce en dépit des considérants de la chambre administrative. Une telle expertise permettrait de déterminer les mesures préventives propres à préserver les intérêts des parties et de leurs autres voisins ainsi que de répondre à l’exigence de célérité.
Ils ont produit diverses pièces à l’appui de leur recours, dont notamment une clé USB contenant, à leurs dires, un enregistrement du bruit engendré par la PAC audible aux fenêtres de leur habitation, depuis leur lit et ceux de leurs enfants.
26. Dans ses observations du 22 novembre 2022, l’intimée a conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens. Elle a produit un chargé de pièces.
Le département avait procédé avec une grande application à l’examen de sa demande, exigeant moult pièces complémentaires durant les onze mois s’étant écoulés jusqu’à la délivrance de l’autorisation litigieuse. Elle avait présenté trois solutions possibles, soit deux emplacements différents pour la PAC et un maintien en place avec un mur anti-bruit et une véritable étude acoustique à l’appui. Le 6 juin 2022, le SABRA avait émis un avis favorable au maintien en place de la PAC avec un mur anti-bruit. Suite à la délivrance de l’autorisation querellée, elle avait fait installer un mur anti-bruit de dimension supérieure à celui ayant fait l’objet de l’étude acoustique, puisqu’il mesurait 1,80 m de large et 1,80 m de haut (au lieu de 1,50 m x 1,50 m), et l’avait fait placer face à l’hélice de la PAC, de sorte qu’il présentait un masque de vue et de bruit complet. La PAC avait été mise en route le 24 septembre 2022. Son rendement « de plus de trois » permettait de chauffer la maison et de produire de l’eau chaude en consommant trois fois moins d’énergie par calorie produite. S’agissant des nouvelles allégations des recourants, le seul élément objectif à disposition était un enregistrement sur une clé USB, mais rien ne prouvait que celui-ci ait été réalisé de nuit depuis l’habitation des recourants.
27. Dans ses observations du 9 décembre 2022, le département a conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens, s’en rapportant à la justice quant à la recevabilité de ce dernier.
Il s’opposait à l’expertise sollicitée par les recourants, celle-ci n’apparaissant pas nécessaire vu les pièces du dossier qui permettaient d’appréhender l’emplacement de la PAC et son implantation sur la parcelle ainsi que les emplacements alternatifs. De plus, les vérifications des valeurs annoncées avaient été dûment effectuées par le SABRA et les différents formulaire et documents nécessaires avaient été versés au dossier.
Au fond, le SABRA avait analysé le plan des différents emplacements possibles et constaté que les distances indiquées étaient incorrectes, mais cela n’influençait pas la solution retenue. Dans son préavis du 16 juin 2022, il avait en effet constaté que l’intimée avait démontré que les distances aux voisins étaient, pour les deux emplacements alternatifs proposés, sensiblement les mêmes, l’étude acoustique du bureau BATJ démontrant, par ailleurs, un Lr de 34 dB(A) pour le voisin le plus exposé, ce qui était en-dessous de la valeur de planification qui était, en zone DS II, de 55 dB(A) de jour et de 45 dB(A) de nuit. En outre, après avoir étudié la possibilité de mettre un caisson ou une paroi anti-bruit, le SABRA avait validé, comme mesure technique supplémentaire, la mise en place d’une protection anti-bruit, telle que présentée dans le rapport BATJ, soit sur trois côtés, impliquant un effet d’écran de 7,70 dB(A). La paroi provisoire mise en place ne permettait aucunement d’apprécier l’effet d’écran prévisible. Non seulement, elle n’était pas construite avec le matériel adéquat et n’était disposée que sur une face, mais ce positionnement pouvait, au contraire, provoquer des effets rebonds du bruit ; l’enregistrement sonore effectué ne pouvait donc être retenu.
S’agissant de la façade choisie, qui était actuellement exempte de fenêtre donnant sur un local sensible, les recourants relevaient que l’autorisation initiale DD 5______ permettait la transformation du garage en une chambre, soit que la façade pourrait comporter un local à usage sensible au bruit. Le calcul de l’évaluation du niveau acoustique d’une PAC s’était fondé sur la directive Cercle bruit relative à l’évaluation acoustique des PAC air/eau du 22 décembre 2017, aide à l’exécution 6.21 du 16 juin 2022, et sur le formulaire standardisé d’attestation du respect des exigences de protection contre le bruit pour PAC air/eau qu’elle contenait. Or, en page 7, elle indiquait, pour les PAC de maisons familiales individuelles, où devaient être placés, dans la mesure du possible, les composants bruyants. Après avoir listé les trois endroits à choix, elle précisait que si au moins l’une de ces mesures était mise en œuvre, il pouvait être admis que l’exposition au bruit serait tout au plus faible, de sorte qu’il n’était pas nécessaire de déterminer un niveau d’évaluation quantitatif pour la maison familiale individuelle. En l’espèce, même après la transformation du garage, la chambre bénéficierait d’une fenêtre d’un côté et d’une porte-fenêtre de l’autre, ce qui correspondait à la troisième possibilité d’endroit suggéré, soit que les locaux à usage sensible au bruit disposaient d’une autre fenêtre sur un côté opposé à la PAC.
Enfin, l’office cantonal de l’environnement (ci-après : OCEV) avait publié une aide à l’exécution pour l’évaluation du bruit des PAC le 21 septembre 2022. En pages 4 et 5, il avait précisé les mesures préventives à prendre en lien avec l’art. 11 LPE. Pour l’al. 1 de cette disposition, lorsqu’une PAC se situait à l’extérieur, la mesure préventive visant à la mise en place d’un écran proche anti-bruit était considérée comme suffisante en tant que telle comme mesure prise à la source. En l’espèce, un écran était prévu proche de la façade et permettait une diminution du bruit de 7,70 dB(A). L’al. 1 était ainsi déjà respecté avec cette mesure. L’installation de la paroi, dont l’efficacité était estimée à – 7,70 dB(A) permettait de réduire le bruit d’un niveau largement supérieur à la solution préconisée par les recourants, qui n’offrait qu’une diminution de 1 dB(A). Pour ces derniers, le gain en confort était nettement plus élevé (34,80 - 7,70, soit 27,10 dB(A)), ce qui était difficilement perceptible. L’emplacement proposé par les recourants se trouvait à une distance, pour le local à utilisation sensible (ci-après: LUS) le plus proche, de 21,80 m. Toutefois, dans le cas d’un emplacement situé à moins de 5 m d’un angle rentrant d’une façade (ce qui était le cas ici), la réflexion du bruit passait de 6 dB(A) à 9 dB(A) selon l’aide à l’exécution 6.21 : Évaluation acoustique des PAC air/eau. Ainsi, la diminution de bruit liée à la distance pour un placement à cet endroit était compensée par cette réflexion et provoquait un accroissement du Lr, qui passerait de 35,20 à 38,20 dB(A) (+ 3 dB(A)). Pour l’al. 2, l’installation pouvait être silencieuse en correspondance avec l’état de la technique. Or, en l’espèce, renseignements pris auprès du SABRA, le modèle choisi était bon par rapport à l’état de la technique et peu bruyant. L’al. 3 tenait compte de l’environnement sonore dans lequel se situait la PAC, lequel devait être inférieur à 30 dB(A), ce qui était le cas en l’espèce, le niveau sonore s’élevant à 24,90 dB(A) déjà à 18 m (36,90 - 10 - 2 = 24,90 dB(A)), les 12 dB(A) soustraits correspondant aux facteurs de correction). Or, il convenait de soustraire 7,70 dB(A) pour l’atténuation due à l’écran. On arrivait ainsi à une valeur de 17,20 dB(A), résultat particulièrement bas.
En conclusion, non seulement le principe de prévention avait été largement respecté, mais le projet querellé permettait le respect des valeurs de planification avec une grande marge.
28. Le 16 décembre 2022, les recourants ont sollicité du tribunal qu’il invite l’intimée à arrêter immédiatement l’installation litigieuse puisqu’elle avait, malgré le dépôt du présent recours, remis en marche la PAC. Ils ont produit un bordereau de pièces complémentaires.
Par décision du 03 février 2023 (DITAI/2023), après des échanges d’écritures des parties, le tribunal a admis la demande de retrait de l’effet suspensif au recours formée par l’intimée jusqu’au 10 avril 2023 inclus.
29. Le 13 janvier 2023, les recourants ont répliqué sur le fond et produit un bordereau de pièces complémentaires.
L’autorité intimée avait statué sans considérer ni évaluer la faisabilité d’une installation complète de la PAC à l’intérieure de la maison de l’intimée, violant de la sorte le principe de prévention. En effet, le SABRA n’avait à aucun moment évalué si une telle installation intérieure était techniquement possible ou exclue et l’intimée n’avait jamais apporté la preuve d’une impossibilité technique. Or, la villa litigieuse disposait d’un sous-sol excavé sur 70 m2, dont l’intimée avait retiré ou allait retirer la précédente chaufferie et une volumineuse citerne à mazout, et dont les pièces ne pouvaient « en aucun cas être habitables » selon préavis de la DAC du 5 novembre 2019, de sorte qu’il y avait de l’espace disponible à cet effet. En outre, la paroi légère proposée par l’intimée ne prévoyait pas d’absorption du bruit à l’arrière de la PAC, placée devant un mur plein, qui réverbérait ledit bruit en direction de leurs fenêtres. De plus, sa hauteur n’était pas adaptée, étant quasiment égale à celle de la PAC sur son socle et ne pouvant dès lors faire écran au bruit propagé en direction des fenêtres situées à l’étage de leur maison.
30. Dans sa duplique du 8 février 2023, l’intimée a ajouté, s’agissant de l’installation d’une PAC au sous-sol, avoir un escalier en béton entièrement ouvert depuis le sous-sol jusqu’au premier étage entre trois murs en béton constituant une cage de résonnance qui produisait une réverbération considérable jusqu’aux chambres du premier étage, de sorte qu’elle subissait déjà des nuisances sonores provenant de la machine à laver et sécher le linge, même avec les portes fermées, d’autant que sa villa avait de simples dalles en béton plein sans isolation phonique entre les trois niveaux ainsi que des portes en bois creuses. Elle y avait aménagé deux bureaux-bibliothèque, une cave de 4 m2 occupée par deux ballons d’eau chaude (sanitaire et chauffage au sol), aveugle et non ventilée vers l’extérieur, une buanderie exiguë et indispensable ainsi qu’une salle de douche rénovée de 4 m2.
31. Dans sa duplique du 9 février 2023, le département a précisé que le SABRA s’était livré à l’examen requis par la chambre administrative en examinant les différents emplacements suggérés et en vérifiant les facteurs d’atténuation liés à la pose d’une paroi anti-bruit. Il était arrivé à la conclusion que, non seulement les valeurs de planification étaient respectées, mais qu’avec la pose de la paroi anti-bruit, le DS était respecté avec une grande marge et sans émerger du bruit de fond. La mise en place d’une PAC en sous-sol permettrait de gagner en général 5 dB(A) grâce au saut-de-loup, alors que, à elle seule, la protection anti-bruit produisait un effet d’écran de 7,70 dB(A). Enfin, la paroi avait été correctement prise en compte quant au calcul de la réverbération du bruit, dont il avait tenu compte avec la projection de bruit la plus défavorable.
32. Par écriture spontanée du 23 février 2023, les recourants ont souligné l’attitude de l’intimée consistant à restreindre elle-même le choix de l’emplacement dans le cadre de l’instruction de l’autorisation de construire, ayant installé sa PAC sans autorisation, rappelé que le montant des coûts liés à la démolition d’un équipement extérieur non autorisé et à son remplacement par un modère intérieur, telle que préconisé, n’avait qu’une importance limitée par rapport à l’intérêt privé et public tendant au respect du principe de précaution, ce d’autant que l’intimée avait fait du sous-sol un étage supplémentaire chauffé, surexploitant ainsi la PAC litigieuse dont la puissance était prévue pour chauffer deux et non trois étages.
Enfin, le département devait évaluer s’il était possible d’installer une PAC à l’intérieur de la villa et ce, quand bien même le projet d’installation extérieure respecterait, ce qui était contesté, les valeurs limites.
33. Le 15 juin 2023, le tribunal a procédé à un transport sur place.
Il a en premier lieu visité le sous-sol de la villa de l’intimée qui se compose de cinq pièces affectées en local technique, chambres, salle de bains et buanderie. Le recourant a affirmé qu’une PAC pouvant aisément être installée à l’intérieur de sa villa, il devait en être de même pour celle de l’intimée, ces deux villas ayant été construites par le même architecte. Il proposait que la PAC soit installée dans le local technique ou dans la buanderie, relevant que les PAC pour l’intérieur étaient moins bruyantes que celles extérieures ; c’était essentiellement le compresseur qui créait les nuisances sonores. L’intimée a déclaré avoir un sous-sol non habitable dans sa villa, dans lequel était installée l’ancienne citerne à mazout. Le bruit émis par sa machine à laver et son sèche-linge était très important, même porte fermée, la partie centrale étant une vraie caisse de résonnance. Son compagnon a expliqué qu’il n’y avait jamais eu de saut de loup dans le local technique, d’environ 6 m2. Si la PAC y serait installée, les sorties seraient au même emplacement que la PAC actuelle. Pour arriver à l’emplacement proposé par les recourants, il faudrait passer sous le garage attenant, mais cet emplacement serait problématique pour les voisins, en terme de réverbération, compte-tenu de l’angle du mur à l’arrière. Une sortie sous la terrasse n’était pas envisageable, car cela impliquerait de traverser la maison. Monsieur F______, ingénieur en géomatique au SABRA et non acousticien, a déclaré ne pas avoir les compétences techniques pour dire si l’installation d’une PAC dans le sous-sol de la villa de l’intimée était techniquement faisable, même si cela lui semblait compliqué au vu de l’espace disponible et dans la mesure où le local ne disposant pas d’ouverture vers l’extérieur, il faudrait créer deux sauts de loup, l’un pour la sortie du ventilateur nécessaire à la bonne utilisation de la PAC, l’autre pour l’évacuation de l’air. Le bruit était généré par le ventilateur lié à la PAC. Il ne pouvait dire précisément si l’installation d’une PAC à cet endroit occasionnerait des nuisances sonores à l’intérieur de la maison. La différence de bruit perceptible pour le voisinage entre une PAC installée à l’intérieur ou à l’extérieur était estimée à 5 dB(A) ; en cas d’installation d’une PAC intérieure, l’élément de détermination du bruit était la sortie de l’extraction d’air et du ventilateur. Dans la pièce servant de buanderie, il y avait effectivement un saut de loup, mais il ignorait s’il était de la taille adéquate pour les sorties de la PAC. Le fait que la terrasse se situe juste au-dessus pourrait être problématique : en général, on évitait d’avoir des sorties à proximité d’ouvrants.
Le tribunal s’est ensuite rendu à l’extérieur de la villa, à la hauteur des sauts de loup de la salle de bain et de la buanderie du sous-sol. Le recourant a déclaré que le modèle choisi par l’intimée n’était pas le moins bruyant du marché. Il ne passerait plus l’examen du cercle de bruit, comme cela ressortait d’une pièce qu’il versait à la procédure. Les modèles de PAC intérieures faisaient 44 dB(A) alors que le modèle en cause faisait jusqu’à 62 dB(A). L’intimée et son compagnon ont indiqué que le modèle de PAC choisi avait été validé dans le cadre de l’instruction de l’autorisation de construire querellée. Il n’y avait pas de raison qu’ils doivent subir des nuisances importantes pour diminuer celle des voisins si le modèle et l’emplacement choisis étaient considérés comme admissibles par le département. La future paroi anti-bruit permettrait d’obtenir une diminution du bruit de 7 dB(A). Le saut de loup de la buanderie se situait à la hauteur de leur terrasse et en face de celle d’autres voisins. M. F______ a déclaré que la différence en terme de bruit était effectivement énorme entre les deux modèles discutés. Cela étant, le département n’avait pas à imposer aux parties un modèle de PAC particulier ; ce dernier devait pouvoir être avalisé et respecter les valeurs de planification et le principe de prévention. La distance entre le saut de loup et la façade du bâtiment voisin était d’environ une quinzaine de mètres, soit inférieure à celle entre l’emplacement actuel de la PAC et la villa des recourants. La réduction de bruit serait de 5 dB(A) si la PAC était installée à l’intérieur plutôt qu’à l’extérieur, et ce quel que soit le modèle.
Le tribunal s’est enfin déplacé jusqu’à la PAC. Le recourant a fait valoir que depuis l’installation de cette dernière en juillet 2019, le mur avait été doublé, de sorte que la PAC devrait être déplacée puisque la condition de la distance de 35 cm entre la PAC et le mur, selon la notice du constructeur, n’était plus remplie, cette distance étant à ce jour de 19 cm. Il avait expérimenté la PAC en fonction : c’était un bruit continu jour et nuit, vraisemblablement parce que les trois étages de la villa étaient chauffés avec cette dernière. Fenêtres ouvertes, le bruit du compresseur était problématique et la paroi anti-bruit ne permettrait pas, selon son acousticien qui avait entendu le bruit enregistré sur la clé USB, de le diminuer. Dans la mesure où la PAC devrait être déplacée, il devrait être réfléchi à un nouvel emplacement. L’emplacement initialement envisagé n’était plus possible puisque le mur sur lequel la PAC devait s’appuyer avait été détruit. À son avis, la paroi anti-bruit ne tenait pas compte du socle sur lequel reposait la PAC ; sa hauteur était donc insuffisante. L’intimée et son compagnon ont indiqué que le constructeur de la PAC, venu sur place, avait connaissance des travaux envisagés sur le mur, de sorte qu’il avait placé la PAC à cet endroit en toute connaissance de cause. Il y avait toujours la place suffisante à l’arrière pour la tuyauterie et la PAC pourrait, si besoin, être déplacée de quelques centimètres. Ils contestaient le rapport de l’expert acousticien mandaté par le recourant, qui ne contenait aucune mesure objective de bruit. Ils étaient disposés à augmenter la hauteur de la paroi anti-bruit, voire même à en installer une à l’arrière de la PAC. La possibilité d’installer un caisson a été écartée car cela aurait eu un impact sur l’utilisation de la PAC. Quand bien même on retournerait la PAC à 80°, la perception des basses fréquences serait la même ; le bruit pourrait en revanche être plus gênant pour les autres voisins. M. F______ a indiqué ne pas être mesure de se déterminer au sujet de la distance entre la PAC, haute de 1,42 m, et le mur. Une réduction de 7 dB(A) faisait une nette différence pour le voisinage ; cette réduction pourrait être un peu plus élevée pour le voisinage le plus éloigné, ce qui serait notamment le cas pour le recourant, du fait de la diffraction du bruit. Les mesures préconisées dans l’expertise acoustique étaient suffisantes pour permettre la réduction de bruit escomptée. M. F______ a expliqué l’analyse des différents emplacements envisagés pour la PAC, y compris celui proposé par les recourants. Le premier emplacement qui faisait face à l’immeuble sise 10_____, chemin des E______ avait été d’emblée exclu du fait de la distance de 16,60 m avec les locaux sensibles au bruit. S’agissant de l’emplacement proposé par les recourants, la situation ne serait pas meilleure pour le voisinage, la distance à prendre en compte étant à peu près équivalente ; il fallait en outre tenir compte de l’angle situé à l’arrière qui faisait un écho et rajoutait l’équivalent de 3 dB(A). Le troisième emplacement sur la façade de la villa pourrait être un peu plus favorable, à raison de 1 dB(A). Dans un tel cas, il n’aurait cependant pas demandé la pose d’une paroi anti-bruit. Au final le gain pour le voisinage le plus important était l’emplacement actuel de la PAC, avec la paroi permettant une diminution de 7 dB(A). Il vérifierait si le socle avait été pris en compte au moment du calcul de la hauteur de la paroi anti-bruit. Plus la paroi était haute, plus la réduction était perceptible pour le voisinage et les pièces situées en hauteur. Il confirmait les dires de l’intimée quant au caisson de la PAC. L’orientation de la PAC n’était pas prise en compte lors des calculs, même s’il était exact qu’elle pouvait avoir un impact, toutefois minime, soit de 1 à 2 dB(A) de moins. Les véhicules parqués à proximité de la PAC n’étaient pas non plus pris en compte. La mise en place d’une paroi à l’arrière de la PAC permettrait une réduction de 3 dB(A) pas forcément supplémentaire mais une réduction quand même.
34. Le 10 juillet 2023, le département a fait valoir que les informations obtenues lors du transport sur place permettaient de constater que l’emplacement autorisé de la PAC était conforme au principe de prévention. M. F______ avait en effet mis en évidence le fait qu’un mur de protection était plus bénéfique en matière de réduction sonore qu’une installation en sous-sol. Il était également apparu que la solution avec la construction d’un mur de protection était, parmi l’ensemble des solutions proposées, celle apparaissant être la plus acceptable s’agissant du bruit lié à la PAC. Il prenait note que les recourants et l’intimée étaient disposé à discuter des mesures pouvant être mises en œuvre au sujet de la PAC afin que le bruit lié à sa mise en service soit réduit au maximum
35. Par décision du 20 juillet 2023 (DITAI/324/2023), le tribunal a prononcé la suspension de la procédure, d’entente entre les parties.
36. Le 13 juin 2024, l’intimée a sollicité la reprise de l’instruction de la procédure. Les recourants et elle-même avaient mandaté un acousticien qui avait procédé, lors d’une nuit sans vent ni pluie, à partir de 23h00, à une série de mesures selon le protocole qu’il avait lui-même défini. À teneur de son rapport du 5 avril 2024, le fonctionnement de la PAC était inaudible en régime de nuit et très légèrement audible en régime de jour, au niveau de la fenêtre de la chambre enfant au 1er étage. Dans les deux cas, ce bruit n’émergeait pas suffisamment du bruit de fond ambiant, résultant de la circulation routière sur les axes à proximité, pour évaluer la situation. La réalisation de mesures lors d’une période plus calme de la nuit, lorsque la circulation routière était plus faible, devait être envisagée pour évaluer correctement la situation. Un autre acousticien qu’elle avait consulté avait retenu que d’après les mesures effectuées, la gêne due au bruit provoquée par la PAC n’était pas caractérisée dans la propriété des recourants. Ainsi, sauf preuve objective du contraire, sa PAC était conforme à la législation en vigueur, tant en matière d’émission acoustique que de mesures préventives.
Elle a versé diverses pièces à la procédure.
37. Le 22 juin 2024, le tribunal a communiqué aux parties de procès-verbal du transport sur place ainsi que les photographies y relatives et leur a imparti un délai de trois semaines pour se déterminer sur celui-ci et le retourner signé, ainsi que pour verser toutes pièces utiles.
38. Le 8 juillet 2024, le département a persisté dans ses conclusions. Les valeurs de planification étaient respectées et M. F______ avait confirmé que la solution autorisée était la plus adaptée, tant au niveau de son emplacement extérieur que de la mise en place d’un mur anti-bruit. Il avait indiqué que les distances entre les différents emplacements proposés et leurs points d’immission étaient, pour les meilleurs, quasiment identiques, avec un gain de 1 dB(A) au maximum, et que l’installation de la PAC à l’intérieur de la villa induirait une réduction de 5 dB(A) tandis que l’érection d’un mur anti-bruit, tel que proposé dans le projet autorisé, impliquerait un gain de plus de 7 dB(A).
39. Le 9 juillet 2024, par le biais de leur nouveau conseil, les recourants ont consenti à la reprise de la procédure, sollicité la comparution des parties et rappelé que l’ordre d’arrêt de la PAC demeurait en force.
Ils ont formulé des griefs contre l’intimée dont le comportement avait empêché l’acousticien de mesurer l’impact sonore de la PAC sans l’ajout de la paroi qui avait été fixée de manière durable et qui ne pouvait pas être retirée. Cet acousticien n’avait pas non plus pu effectuer des mesures des valeurs d’immissions de la PAC sans l’existence du bruit du trafic du début ou de la fin de nuit de la route de G______, alors que c’était précisément durant ces heures, de minuit et 5h00, que le fond sonore était réduit et que les nuisances de la PAC se faisaient ressentir. Un acousticien tiers avait confirmé que son confrère n’avait pas été en capacité de réaliser des mesures fiables s’agissant du bruit de la PAC ; une pièce a été produite à cet égard.
L’intimée perdait de vue qu’il ne s’agissait pas ici de constater si les nuisances sonores de sa PAC entraient dans le cadre de la norme, mais, compte tenu du caractère illicite de l’emplacement de celle-ci, d’en réduire au maximum les nuisances, conformément à l’avis exprimé par la chambre administrative. Ainsi que rappelé par le Tribunal fédéral, les PAC devaient, sauf exception motivée, trouver leur place à l’intérieur des bâtiments, précisément pour éviter les nuisances qu’elles généraient.
40. Le 17 juillet 2024, l’intimée a répondu aux griefs formulés par les recourants et a ensuite fait valoir que l’objectif de réduire au maximum le bruit n’était pas à prendre au pied de la lettre, sauf à faire fi du rapport explicatif concernant la modification de l’OPB dont l’un des objectifs était de limiter la portée du principe de prévention en terme de rapport coût financier/ bénéfice acoustique. Elle a précisé que les mesures de l’acousticien avaient été effectuées avec la PAC en régime maximum, contrairement aux consignes du ch. 34 de l'annexe 6 OPB. Elle considérait illusoire de vouloir faire une troisième mesure à 3h00 du matin car ils ne vivaient pas dans des chambres sourdes mais à moins de 200 m de deux routes passantes à toute heure du jour et de la nuit. Elle avait déconnecté la PAC de son système de production d'eau chaude et de chaleur en attendant le jugement.
41. Les parties ont encore transmis des courriers au tribunal le 19 et 26 septembre 2024 en lien avec l’utilisation de la PAC.
1. Il a déjà été retenu que le recours était recevable (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 - LCI - L 5 05).
2. À titre préliminaire, les recourants sollicitent la réalisation d’une expertise judiciaire, à confier à un ingénieur acousticien, ainsi qu’une comparution des parties.
3. Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités).
Toutefois, le juge peut renoncer à l’administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l’authenticité n’est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsqu’il parvient à la conclusion qu’elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu’elles ne pourraient l’amener à modifier son opinion. Ce refus d’instruire ne viole le droit d’être entendu des parties que si l’appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a ainsi procédé, est entachée d’arbitraire (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_68/2023 du 2 avril 2024 consid. 5.2.1 ; 1C_662/2023 du 2 avril 2024 consid. 2.1.1).
L’avis d’un ingénieur civil mandaté par une partie recourante ne constitue qu’un simple allégué de partie (ATF 142 II 355 consid. 6 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_507/2022 du 13 juin 2022 consid. 3.2) et ne saurait, à lui seul, rendre insoutenable l’appréciation des preuves opérée par l’instance spécialisée.
Le droit d’être entendu ne confère pas celui de l’être oralement, ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_392/2022 du 26 octobre 2022 consid. 4.2 ; cf. aussi art. 41 in fine LPA). Dans la règle, l’audition d’un membre d’une instance spécialisée ne se justifie pas lorsque cette instance a émis un préavis versé à la procédure (ATA/1279/2023 du 28 novembre 2023 consid. 2.1 ; ATA/934/2019 du 21 mai 2019 consid. 2, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1 et 3.2).
4. En l’espèce, le tribunal considère disposer d’un dossier complet, lequel comporte d’ailleurs un rapport d’un acousticien daté du 5 avril 2024 établi à la demande des parties, lui permettant de trancher le présent litige en toute connaissance de cause. L’avis de nouvel expert acousticien mandaté par les recourants ne constituerait par ailleurs qu’un simple allégué de partie, étant noté que le projet litigieux a été soumis à l’examen minutieux du SABRA, en sa qualité d’instance spécialisée, qui a rendu un préavis favorable détaillé. Dans ces circonstances, procédant à une appréciation anticipée des preuves, le tribunal considère qu’une énième expertise judiciaire ne seraient pas de nature à influer sur l’issue du litige.
S’agissant de la demande de comparution personnelle, le tribunal relève que les parties ont eu l’occasion de s’exprimer par écrit, d’exposer leur point de vue et de produire toutes les pièces qu’elles estimaient utiles à l’appui de leurs allégués par le biais des écritures usuelles. En outre, un transport sur place a eu lieu au cours duquel elles ont pu s’exprimer par oral. Un représentant du SABRA était présent sur place à cette occasion à qui elles ont pu poser toutes leurs questions et demander des clarifications. Partant, il n'apparaît pas nécessaire de procéder à leur comparution personnelle.
En conséquence, les mesures d’instruction requises, en soi non obligatoires, seront rejetées.
5. Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.
Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 146 V 16 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_706/2022 du 5 décembre 2023 consid. 6.1.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).
6. Les arguments formulés par les parties à l’appui de leurs conclusions respectives seront repris et discutés dans la mesure utile (ATF 145 IV 99 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 1C_136/2021 du 13 janvier 2022 consid. 2.1 et les références citées), étant rappelé que, saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office et que s’il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/1331/2023 du 12 décembre 2023 consid. 3).
7. Les recourants invoquent une violation du principe de prévention garanti aux art. 11 al. 2 LPE et 7 al. 1 let. a OPB, compte tenu, d’une part, de l’emplacement inadéquat choisi de la PAC litigieuse, estimant que l’installation d’une PAC intérieure n’avait pas été évaluée et, d’autre part, du fait que les mesures préventives prises visant à prévenir la propagation du bruit seraient inappropriées, au regard des décibels, des fréquences et gammes de bruit que générait effectivement celle-ci.
8. Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu’un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/1205/2023 du 7 novembre 2023 consid. 4.3 et les références citées). Néanmoins, lorsque la consultation d’une instance de préavis est imposée par la loi, son préavis a un poids certain dans l’appréciation qu’est amenée à effectuer l’autorité de recours et il convient de ne pas le minimiser (ATA/456/2022 du 3 mai 2022 consid. 4b ; ATA/1633/2019 du 5 novembre 2019 consid. 6b).
9. Selon une jurisprudence bien établie, les autorités de recours observent une certaine retenue pour éviter de substituer leur propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Elles se limitent à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/1205/2023 du 7 novembre 2023 consid. 4.3 et les références citées).
10. À teneur de l’art. 1 al. 1 let. a LCI, sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation. Au sens de l’art. 1 let. d du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01), sont réputées constructions ou installations toutes choses immobilières ou mobilières édifiées au-dessus ou au-dessous du sol ainsi que toutes leurs parties intégrantes et accessoires, soit notamment les ascenseurs et monte-charges, les installations de chauffage, de distribution d’eau, de gaz ou d’électricité et les antennes électromagnétiques.
11. L’art. 14 al. 1 LCI prévoit que le département peut refuser les autorisations prévues à l’art. 1 LCI lorsqu’une construction ou installation peut être la cause d’inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public (let. a) ; ne remplit pas les conditions de sécurité et de salubrité qu’exige son exploitation ou son utilisation (let. b) ; ne remplit pas des conditions de sécurité et de salubrité suffisantes à l’égard des voisins ou du public (let. c) ; offre des dangers particuliers (notamment incendie, émanations nocives ou explosions), si la surface de la parcelle sur laquelle elle est établie est insuffisante pour constituer une zone de protection (let. d) ; peut créer, par sa nature, sa situation ou le trafic que provoque sa destination ou son exploitation, un danger ou une gêne durable pour la circulation (let. e). L’art. 14 al. 2 LCI réserve l’application de l’OPB.
12. Le bruit constitue une atteinte au sens de l’art. 1 al. 1 LPE (art. 7 al. 1 LPE). Le bruit est dénommé émission au sortir de l’installation et immission au lieu de son effet (art. 7 al. 2 LPE).
13. L’art. 11 al. 1 LPE prévoit que les pollutions atmosphériques, le bruit, les vibrations et les rayons doivent être limités par des mesures prises à la source (limitation des émissions).
14. Selon l’art. 13 al. 1 LPE, le Conseil fédéral édicte par voie d’ordonnance des valeurs limites d’immissions applicables à l’évaluation des atteintes nuisibles ou incommodantes. Pour ce qui est du bruit, ces valeurs limites d’immissions figurent aux annexes 3 et suivantes de l’OPB. L’art. 23 LPE prévoit que, aux fins d’assurer la protection contre le bruit causé par de nouvelles installations fixes et en vue de la planification de nouvelles zones à bâtir, le Conseil fédéral établit des valeurs limites de planification inférieures aux valeurs limites d’immissions.
15. Les valeurs limites d’immissions s’appliquant au bruit et aux vibrations sont fixées de manière que, selon l’état de la science et l’expérience, les immissions inférieures à ces valeurs ne gênent pas de manière sensible la population dans son bien-être (art. 15 LPE). De nouvelles installations fixes ne peuvent être construites que si les immissions causées par le bruit de ces seules installations ne dépassent pas les valeurs de planification dans le voisinage ; l’autorité qui délivre l’autorisation peut exiger un pronostic de bruit (art. 25 al. 1 LPE).
16. L’OPB a pour but de protéger contre le bruit nuisible ou incommodant (art. 1 al. 1). Elle régit, entre autres, la limitation des émissions de bruit extérieur produites par l’exploitation d’installations nouvelles ou existantes au sens de l’art. 7 de la LPE (art. 1 al. 2 let. a).
17. L’art. 2 OPB prévoit que les installations fixes sont les constructions, les infrastructures destinées au trafic, les équipements des bâtiments et les autres installations non mobiles dont l’exploitation produit du bruit extérieur (al. 1 1ère phr). Les limitations d’émissions sont des mesures techniques, de construction, d’exploitation, ainsi que d’orientation, de répartition, de restriction ou de modération du trafic, appliquées aux installations, ou des mesures de construction prises sur le chemin de propagation des émissions. Elles sont destinées à empêcher ou à réduire la formation ou la propagation du bruit extérieur (al. 3). Les valeurs limites d’exposition sont des valeurs limites d’immission, des valeurs de planification et des valeurs d’alarme. Elles sont fixées en fonction du genre de bruit, de la période de la journée, de l’affectation du bâtiment et du secteur à protéger (al. 5). Les locaux à usage sensible au bruit sont notamment les pièces des habitations, à l’exclusion des cuisines sans partie habitable, des locaux sanitaires et des réduits.
18. Selon l’art. 7 al. 1 OPB, les émissions de bruit d’une nouvelle installation fixe seront limitées conformément aux dispositions de l’autorité d’exécution : dans la mesure où cela est réalisable sur le plan de la technique et de l’exploitation et économiquement supportable, et (let. a) de telle façon que les immissions de bruit dues exclusivement à l’installation en cause ne dépassent pas les valeurs de planification (let. b).
19. Les immissions de bruit sont déterminées sous forme de niveau d’évaluation Lr ou de niveau maximum Lmax sur la base de calculs ou de mesures (art. 38 al. 1 OPB). Pour les bâtiments, les immissions de bruit seront déterminées au milieu de la fenêtre ouverte des locaux à usage sensible au bruit. Les immissions de bruit des avions peuvent aussi être déterminées à proximité des bâtiments (art. 39 al. 1 OPB).
20. À teneur de l’art. 40 al. 1 OPB, l’autorité d’exécution évalue les immissions de bruit extérieur produites par les installations fixes sur la base des valeurs limites d’exposition selon les annexes 3 et suivantes. Les valeurs limites d’exposition sont valables pour les bâtiments comprenant des locaux à usage sensible au bruit (art. 41 al. 1 OPB).
21. L’art. 43 al. 1 let. b OPB dispose que le degré de sensibilité II est à appliquer dans les zones où aucune entreprise gênante n’est autorisée, notamment dans les zones d’habitation ainsi que celles réservées à des constructions et installations publiques.
22. Pour le bruit produit par les installations de chauffage, de ventilation et de climatisation dans une zone où s’applique le degré de sensibilité II, l’annexe 6 de l’OPB fixe la valeur de planification Lr à 55 dB(A) de jour et 45 dB(A) de nuit. La valeur limite d’immission est de Lr 60 dB(A) de jour et de Lr 50 dB(A) de nuit.
23. Une PAC air/eau utilise l’air ambiant comme source de chaleur et transmet la chaleur obtenue à un système de chauffage traditionnel ou à une installation de chauffage d’eau. L’air ambiant est amené à la PAC par des conduits d’air ; l’air ambiant utilisé, refroidi de quelques degrés, est à nouveau expulsé par des conduits d’air (cf. Office fédéral de l’énergie [OFEN], Énergie Suisse, brochure « Le chauffage par PAC - sûr, efficace, durable », 2018, p. 6). Dans le cas des PAC air/eau, le bruit perceptible dans le voisinage est dans la plupart des cas causé par le ventilateur. Malgré l’importance généralement accordée au bruit du ventilateur, il ne faut pas négliger les autres sources de bruit, comme les émissions sonores du compresseur, les bruits d’écoulement, l’excitation du balourd, les bruits électriques et les bruits de commutation lors du dégivrage (arrêt du Tribunal fédéral 1C_389/2019 du 27 janvier 2021 consid. 3.2 ; Ralf DOTT [et al.], Wärme-pumpen : Planung, Optimierung, Betrieb, Wartung, éd. OFEN, 5e édition 2018, ch. 7.2 p. 64 s.). On distingue en principe les trois types de construction suivants pour les PAC air/eau : les installations pour une installation intérieure, celles pour une installation extérieure et les installations split avec une unité intérieure et une unité extérieure (cf. DOTT, op. cit., ch. 4.1 p. 27).
24. Dans l’ATF 141 II 476 (consid. 3.2), le Tribunal fédéral rappelle qu’une PAC ne peut être construite, en vertu des art. 25 al. 1 LPE et 7 al. 1 let. b OPB, que si les immissions sonores (cf. art. 7 al. 2 in fine LPE : bruit au lieu de son effet) qu’elle engendre ne dépassent pas les valeurs de planification fixées à l’annexe 6 de l’OPB.
Dans le même arrêt, le Tribunal fédéral souligne ensuite que les émissions de bruit, à savoir celles au sortir de l’installation, doivent être limitées par des mesures préventives en tant que cela est réalisable sur le plan de la technique et de l’exploitation et économiquement supportable au sens des art. 11 al. 2 LPE et 7 al. 1 let. a OPB. Le Tribunal fédéral précise que la protection contre le bruit est assurée par l’application cumulative des valeurs de planification et du principe de la limitation préventive des émissions. Dès lors que les valeurs de planification ne constituent pas des valeurs limites d’émissions au sens de l’art. 12 al. 1 let. a LPE, leur respect ne signifie pas à lui seul que toutes les mesures de limitation imposées par le principe de prévention des émissions ont été prises et que le projet en cause satisfait à la législation sur la protection de l’environnement. Selon la Haute Cour, il faut bien davantage examiner chaque cas d’espèce à la lumière des critères définis par les art. 11 al. 2 LPE et 7 al. 1 let. a OPB pour déterminer si le principe de prévention exige une limitation supplémentaire des émissions (ATF 124 II 517 consid. 4b). Dans ce cadre, le principe de prévention impose, lors du choix de l’emplacement d’une nouvelle installation, de tenir compte des émissions que celle-ci produira et de la protection des tiers contre les atteintes nuisibles et incommodantes ; il commande ainsi de choisir l’emplacement le moins bruyant. Alors même que les valeurs de planification sont respectées, une réduction supérieure des émissions peut toutefois être exigée, à titre préventif dans la mesure où l’état de la technique le permet (consid. 3.4.1).
25. Dans un autre arrêt (1C_418/2019 du 16 juillet 2020 in DEP 2021-1 p. 89), le Tribunal fédéral a encore souligné que concernant les installations respectant les valeurs de planification prévues par la législation sur la protection contre le bruit, des mesures supplémentaires de protection contre le bruit à titre préventif n’entrent en considération que si un investissement relativement faible permet d’obtenir une réduction supplémentaire substantielle des émissions. Dans le cas qu’il avait à juger, il a considéré que les investigations entreprises par les autorités cantonales spécialisées concernant l’emplacement de la PAC air/eau semblaient plausible ; dès lors, le refus par l’instance inférieure d’un emplacement à l’intérieur du bâtiment en raison de la hauteur des frais d’installation n’avait pas à être critiqué. En revanche, le fait que l’instance inférieure ait généralement considéré comme disproportionnées des mesures visant à réduire le bruit prises sur l’installation elle-même, sans étudier plus avant les mesures concrètes et leurs coûts, n’est pas compatible avec le principe de prévention. C’est pourquoi il appartenait à la première instance d’examiner si une limitation de la durée d’exploitation, l’installation d’une pompe munie d’un mode silencieux ou d’autres mesures techniques étaient économiquement supportables (consid. 5.2 et 5.3).
26. Dans l’arrêt cité par les recourants (1C_389/2019 du 27 janvier 2021), le Tribunal fédéral a précisé que, dans le cadre du choix de l’emplacement d’une PAC, les sites intérieurs alternatifs doivent en principe être pris en compte. Cela ne s’applique pas seulement lorsque l’installation extérieure projetée respecte tout juste les valeurs de planification par rapport aux immeubles voisins, mais aussi lorsqu’elle le fait clairement. Lors du choix du site, il convient ainsi d’examiner non seulement les sites extérieurs alternatifs, mais aussi les sites intérieurs. Il convient toutefois de noter que les PAC installées à l’intérieur ne sont pas nécessairement plus silencieuses que celles installées à l’extérieur (cf. Cercle Bruit, aide à l’exécution 6.21 : Évaluation des PAC air/eau au regard du droit du bruit, édition du 7 juin 2019, ch. 1.1). En règle générale, la possibilité technique et la viabilité économique d’une PAC sur un site intérieur ne sont pas évidentes. Par conséquent, dans une demande de permis de construire pour une installation extérieure, il convient d’exposer en complément, au moins sommairement, la faisabilité technique et la viabilité économique d’une installation d’une puissance comparable sur des sites alternatifs intérieurs et extérieurs. Dans un tel cas, il suffit d’évaluer la plausibilité de l’exclusion des sites alternatifs. En revanche, il est contraire au droit fédéral d’omettre tout examen de sites alternatifs intérieurs pour une installation extérieure, ne serait-ce que parce que cette dernière respecte nettement les valeurs de planification. Dans le cas qu’il avait à juger, le Tribunal fédéral a considéré que, l’autorité cantonale spécialisée ne s’étant pas exprimée sur les sites intérieurs, et alors que rien n’indiquait qu’une PAC sur un site intérieur était techniquement exclue d’emblée, l’instance inférieure avait violé le principe de précaution, n’ayant pas procédé à un examen approfondi des sites intérieurs pour la PAC litigieuse (consid. 4.3).
27. En l’espèce, il est constant que la PAC litigieuse est une installation fixe et que, s’agissant de la 5ème zone, le DS II s’applique, de sorte que les valeurs limites d’immission - à savoir du bruit au lieu de ses effets - sont de Lr jour 60 dB(A) et de Lr nuit 50 dB(A). Quant aux valeurs de planification, elles ne doivent pas dépasser 55 dB(A) de jour et 45 dB(A) de nuit.
Le département, se référant en particulier au préavis du SABRA du 16 juin 2022 ainsi qu’aux éléments exposés lors du transport sur place, souligne que le principe de prévention est respecté. À ce sujet, après avoir sollicité à plusieurs reprises la modification du projet, le SABRA l’a préavisé favorablement sous conditions. Elle a notamment relevé que l’installation prévue respecte les exigences de l’OPB et le principe de prévention, sous réserve de l’installation d’un écran de protection anti-bruit.
Les éléments du dossier, dont en particulier ceux résultant du transport sur place, mettent en évidence que différents emplacements pour la PAC litigieuse ont été effectivement étudiés par le SABRA, puis par le département, et qu’il est apparu que l’emplacement actuel constitue la meilleure solution par rapport aux autres. En effet, il ressort des documents fournis par le mandataire de l’intimée que des trois possibilités analysées en profondeur, celle retenue correspond au point le plus éloigné de l’ensemble des voisins. Quant au SABRA, il relève que la PAC litigieuse est située dans une configuration optimisée par rapport aux locaux sensibles du voisinage et qu’il est raisonnablement difficile de trouver un emplacement plus adéquat au regard de la nuisance pour le voisinage. S’il est certes regrettable qu’il n’avait pas expressément motivé sa position sur la question d’un éventuel emplacement intérieur de la PAC, cela ne signifie pas pour autant qu’il n’a pas procédé à un examen circonstancié et rigoureux de la situation ni fait porter son examen sur celui-ci. En tout état, les dires de son représentant, M. F______, lors du transport sur place confirme que le gain pour le voisinage le plus important est l’emplacement actuel de la PAC, avec une paroi permettant une diminution de 7 dB(A), ce qui est plus favorable qu’une PAC intérieure (diminution de 5 dB(A), quel que soit le modèle). Il ressort aussi des explications fournies par l’intimée, accompagnées des plans de la villa et de photographies, que l’installation d’une PAC, entièrement à l’intérieure, en sous-sol nécessiterait la réalisation de travaux structurels importants en raison notamment de l’existence d’un escalier en béton entièrement ouvert depuis le sous-sol jusqu’au premier étage ; le tribunal a d’ailleurs pu le constater de visu lors de son déplacement sur les lieux. En outre, les explications apportées par le département permettent de conclure qu’une telle solution ne permettrait pas d’obtenir une réduction plus importante que celle résultant d’une paroi anti-bruit. Enfin, même s’il existe d’autres modèles de PAC intérieure, même moins bruyants, cela ne change rien au fait que le sous-sol de la villa de l’intimée n’est en l’état pas adapté à l’installation d’une telle PAC. Ainsi, au vu de ces éléments, l’exclusion de sites alternatifs intérieurs est admissible et les recourants ne démontrent pas le contraire. À cela s’ajoute que le formulaire Cercle bruit mentionne que la valeur de planification de 45 dB(A) est respectée, que le principe de prévention a été pris en compte et qu’entre 19h00 et 7h00 le régime de nuit avec baisse sonore et réduction des fréquences est respecté.
Il ressort ainsi de ces éléments que, contrairement à l’opinion des recourants, le département ne s’est pas contenté de suivre la proposition de l’intimée mais qu’il a examiné les différents emplacements mis en évidence pour la PAC litigieuse et retenu que l’emplacement actuel présentait des avantages particuliers par rapport aux autres. En outre, des mesures supplémentaires de protection contre le bruit ont été étudiées et analysées par le bureau BAJT. À cet égard, il ressort du préavis du SABRA que si l’installation litigieuse respecte les valeurs de planification au niveau du logement le plus exposé, en application du principe de prévention de l’art. 11 LPE, cette autorité a conditionné son préavis favorable à l’installation d’un écran de protection anti-bruit. Les mesures effectuées avec un tel écran ont d’ailleurs, à la lumière du rapport du 5 avril 2024, pour résultat que le fonctionnement de la PAC en régime maximum est inaudible en régime de nuit et très légèrement audible en régime de jour, ce qui démontre le bien-fondé de l’exigence posée par le SABRA.
28. En conclusion, mal fondé, le recours sera dès lors rejeté.
29. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 2’000.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.
La recourante agissant en personne et n’alléguant pas avoir engagé des frais pour la défense de ses intérêts, aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 7 octobre 2022 par Madame A______ et Monsieur B______ contre la décision du département du territoire du ______ 2022 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 2’000.-, lequel est partiellement couvert par l’avance de frais ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Siégeant :Marielle TONOSSI, présidente, Diane SCHASCHA et Carmelo STENDARDO, juges assesseurs.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Marielle TONOSSI
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.
Genève, le |
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La greffière |