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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/4080/2023

JTAPI/622/2024 du 24.06.2024 ( ICCIFD ) , ADMIS PARTIELLEMENT

ATTAQUE

Descripteurs : DÉDUCTION SOCIALE(DOUBLE IMP.);OBLIGATION D'ENTRETIEN;IMPÔT SUR LA FORTUNE;ACTION(PAPIER-VALEUR)
Normes : LIFD.35.al1; LIFD.33.al1.letc; LIPP.39.al1; LIPP.33; LIPP.49
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4080/2023 ICCIFD

JTAPI/622/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 24 juin 2024

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______

 

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Le litige concerne la taxation 2020 de Madame A______ et Monsieur B______.

Selon la base de données de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM), en 2020, ils résidaient à la route C______ à D______.

2.             Le précité est père de quatre enfants, à savoir E______ (né le ______ 1991), F______ (née le ______ 1998), G______ (née le ______ 2005) et H______ (né le ______ 2010).

Les contribuables détiennent, à eux deux, l’intégralité du capital-actions du « I______ SA » (ci-après : la société), non cotée en bourse, et dont M. B______ est l’unique administrateur.

3.             Par jugement du 15 mars 2007 (cause C/1______), le Tribunal de première instance a notamment donné acte à M. B______ de son engagement à verser mensuellement à Madame J______, mère de G______, à titre de contribution pour l’entretien de celle-ci, les montants suivants :

-     CHF 1'200.- du 1er février 2006 jusqu’à l’âge de dix ans ;

-     CHF 1'250.- de dix à quinze ans ;

-     CHF 1'500.- de quinze ans à la majorité voire au-delà, mais au plus tard jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans, en cas de poursuite d’une formation professionnelle ou d’études sérieuses et régulières.

4.             Dans leur déclaration fiscale 2020, les contribuables ont évalué leur participation dans la société à sa valeur nominale, à savoir CHF 100'000.-.

À titre de charge de famille, ils ont mentionné H______, à qui ils avaient versé une prestation de CHF 6'000.-, ainsi que F______ et G______.

5.             Le 2 septembre 2022, les contribuables ont répondu à une demande de renseignements de l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) du 27 juillet précédent.

6.             Par bordereaux datés du 16 septembre 2022, l’AFC-GE a taxé les contribuables pour l’année 2020.

Pour l’IFD, elle a admis une charge de famille pour F______. Pour l’ICC, elle a accordé une demi-charge de famille pour celle-ci car cette dernière avait perçu un revenu compris entre CHF 15'303.- et CHF 22'955.-. Pour l’ICC et l’IFD, elle a accepté, au niveau de leur revenu, une déduction de CHF 6'000.- à titre de contribution d’entretien de H______. Les charges de famille pour G______ et H______ ne pouvaient, en revanche être admises, pas plus que les déductions y relatives, étant donné que le contribuable ne faisait pas ménage commun avec eux au 31 décembre 2020.

La société avait été évaluée à CHF 1'494'500.-, en application de la circulaire n° 28 de la Conférence suisse des impôts intitulée « Instructions concernant l'estimation des titres non cotés en vue de l'impôt sur la fortune » (ci-après : la circulaire n° 28).

7.             Le 5 octobre 2022, les contribuables ont élevé réclamation à l’encontre de ces bordereaux. Ils ont contesté le refus de l’AFC-GE de considérer G______ et H______ comme des charges de famille, ainsi que la valorisation de la société.

8.             Le 3 mars 2023, l’AFC-GE a remis au contribuable la feuille d’estimation des titres de la société, effectuée d’après la circulaire n° 28.

9.             Par pli du 14 juin 2023, les contribuables ont maintenu leur réclamation, expliquant de manière détaillée la raison pour laquelle, selon eux, la société n’avait qu’une valeur symbolique.

10.         Par décisions du 31 octobre 2023, l’AFC-GE a rejeté la réclamation.

L’évaluation de la société avait été effectuée conformément aux dispositions légales en vigueur et à la circulaire n° 28. Dès lors, elle avait abouti à une valeur de CHF 14'945.- par action.

Selon les données officielles de l’OCPM, H______ et G______ n’étaient pas officiellement domiciliés à l’adresse des contribuables. Il convenait de partir du principe que celui-ci ne faisait pas ménage commun avec eux. Il pouvait uniquement défalquer les contributions d’entretien prévues par jugement. Faute de justificatifs bancaires relatifs aux montants versés à G______, aucune pension alimentaire ne pouvait être acceptée en déduction.

11.         Par acte du 4 décembre 2023, les contribuables ont interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal).

L’analyse effectuée par l’AFC-GE relative à la déduction des frais d’entretien de G______ était contestée. Sa mère n’avait jamais accepté qu’il « participe à l’autorité parentale ». Toutefois, il l’avait hébergée durant de nombreuse années, ainsi qu’il découlait de documents annexés. H______ n’avait jamais résidé chez lui. Il lui versait une pension alimentaire mensuelle de CHF 500.-.

Ils critiquaient également l’évaluation de la société à hauteur de CHF 1.4 million. Cette dernière ne pouvait être comparée à une entreprise libérale, étant donné que les médecins étaient soumis à la clause du besoin instaurée par l’État et en raison de l’existence du TARMED. Sans son engagement à travailler bénévolement en tant que médecin de famille, elle tomberait en faillite. Il n’avait pratiquement rien gagné en 2020 et avait continué à pratiquer pour des raisons de déontologie médicale, voulant que les patients ne soient pas laissés à l’abandon.

12.         Dans sa réponse du 6 février 2024, l’AFC-GE a conclu à ce qu’il lui soit donné acte qu’elle acceptait d’accorder aux recourants une charge de famille entière pour F______ et qu’elle admettait une déduction à titre de contribution d’entretien de CHF 2'032.20 pour G______.

Les attestations scolaires de celle-ci mentionnaient certes que son adresse se trouvait chez les recourants, mais cela ne prouvait pas qu’elle y était domiciliée, ni qu’elle y aurait fait ménage commun avec eux. Il pourrait s’agir d’une simple adresse de correspondance. Ces documents ne permettaient pas de renverser la présomption d’absence de domicile chez les contribuables, qui découlait de l’inscription dans les registres de l’OCPM. Seule une contribution d’entretien serait déductible. Or, le contribuable n’avait jamais démontré qu’il avait versé des contribution d’entretien à sa fille.

Les contributions d’entretien versées pour H______, en CHF 6'000.-, avaient été intégralement déduites de leur revenu. Leur taxation étaient ainsi justifiées sur ce point.

Enfin, les griefs qu’ils invoquaient au sujet de l’évaluation des titres de la société ne constituaient pas un motif justifiant d’exclure l’application de la circulaire n° 28.  

13.         Par réplique du 1er mars 2024, les contribuables ont fait valoir que les registres de l’OCPM n’étaient plus d’actualité. Ils n’avaient jamais pu faire modifier l’adresse de G______, étant donné que sa mère détenait seule l’autorité parentale. En outre, il résultait de l’état de fait d’une action alimentaire déposée le 6 avril 2023 par G______ – soit pour elle sa curatrice – que celle-ci vivait avec son père.

14.         Dans sa duplique du 22 mars 2024, l’AFC-GE a fait valoir que G______ ne pouvait constituer une charge de famille pour le recourant, du moment que celui-ci lui avait versé une contribution d’entretien de CHF 2'032.30, qui avait été admise en déduction.

15.         Le détail des pièces et des arguments des parties sera repris, ci-après, dans la mesure utile.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 49 LPFisc et 140 LIFD.

3.             Dans sa réponse du 6 février 2024, l’AFC-GE conclut à ce qu’il lui soit donné acte de ce qu’elle accepte d’accorder aux recourants une charge de famille entière pour F______ (pour l’ICC) et qu’elle admet une contribution d’entretien de CHF 2'032.30 pour G______.

Le recours doit dès lors être admis partiellement sur ce point.

4.             Le litige porte en premier lieu sur la manière dont H______ et G______ doivent être pris en considération dans le cadre de la taxation des recourants.

5.             Aux termes de l’art. 35 al. 1 LIFD, sont déduits du revenu CHF 6'500.- pour chaque enfant mineur ou faisant un apprentissage ou des études, dont le contribuable assure l’entretien (let. a).

Au niveau cantonal, à teneur de l’art. 39 al. 1 de la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), sont déduits du revenu CHF 9'980.- pour chaque charge de famille et CHF 4'990.- pour chaque demi-charge de famille.

L’art. 39 al. 2 LIPP dispose notamment que constituent des charges de famille chaque enfant mineur sans activité lucrative ou dont le gain annuel ne dépasse pas CHF 15'303.- (charge entière) ou CHF 22'955.- (demi-charge), pour celui des parents qui en assure l’entretien (let. a).

Les art. 33 al. 1 let. c LIFD et 33 LIPP prévoient la déductibilité de la pension alimentaire versée au conjoint divorcé, séparé judiciairement ou de fait, ainsi que les contributions d’entretien versées à l’un des parents pour les enfants sur lesquels il a l’autorité parentale, à l’exclusion toutefois des prestations versées en exécution d’une obligation d’entretien ou d’assistance fondée sur le droit de la famille.

6.             Selon le texte même des art. 33 al. 1 let. c LIFD et 33 LIPP, ce ne sont que les contributions que le contribuable a effectivement versées qui peuvent être déduites de son revenu imposable (arrêt du Tribunal fédéral 5A_298/2015 du 30 septembre 2015 consid. 2.1.1). Une pension alimentaire est ainsi déductible des revenus de son débiteur au moment de son paiement effectif (arrêt du Tribunal fédéral 2A.219/2005 du 20 avril 2005 consid. 2.2). Ainsi, un jugement ou une convention fixant des pensions et contributions d'entretien ne suffisent pas à eux seuls à justifier leur déduction ; encore faut-il qu'elles aient été effectivement versées (arrêt du Tribunal fédéral 2C_585/2014 du 13 février 2015 consid. 5.1), la preuve incombant à la personne débitrice de ces aliments (arrêt du Tribunal 2C_242/2010 du 30 juin 2010 consid. 2.3.1).

7.             En règle générale, les pensions alimentaires sont versées en espèces sous forme de paiements directs périodiques. Toutefois, ces prestations peuvent également prendre la forme de paiements indirects périodiques, tels que le règlement de primes d'assurance-maladie, d'impôts, d'intérêts hypothécaires ou de loyers. Les contributions alimentaires sous forme de prestations en nature sont également possibles (arrêt du Tribunal fédéral 2C_502/2015 du 29 février 2016 consid. 4.2).

Ainsi, constituent une contribution d’entretien non seulement les prestations périodiques versées directement au parent bénéficiaire, mais également les paiements indirects, soit le règlement, par le parent astreint à contribution, de charges telles les primes d’assurance-maladie ou l’écolage de l’enfant (Christine JAQUES, in Yves NOËL, Florence AUBRY GIRARDIN, Commentaire romand de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct, 2ème édition, 2017, art. 33, n. 38, p. 731).

8.             Lorsque l'un des parents verse une pension alimentaire à l'autre, l'assimilation de cette pension aux ressources du parent qui la reçoit aux fins d'entretien de l'enfant désigne ce dernier comme le contribuable qui assure l'entretien de l'enfant. À cet égard, la situation créée par la garde alternée n'est pas sensiblement différente de celle qui existait précédemment lorsque le parent débiteur de la pension exerçait son droit de visite plus ou moins élargi (parfois jusqu'à un mi-temps) pendant lequel il subvenait à l'entretien de l'enfant sans avoir droit à une déduction supplémentaire. Ainsi, les dépenses d'entretien direct consenties par le parent débiteur de la pension alimentaire lors de la garde alternée ne font pas l'objet d'abattements sociaux particuliers. Il importe peu sous cet angle que la garde alternée soit, ou non, d'égale importance, le statut créé par l'existence d'une pension alimentaire l'emporte (ATF 133 II 305 consid. 8.4).

9.             En l’espèce, selon la base de données de l’OCPM, H______ n’a jamais été domicilié à la route C______, à D______, adresse des recourants. Par ailleurs, dans leur recours, ils confirment que ce dernier n’a jamais résidé chez eux.

Dès lors qu’au stade de la taxation, l’AFC-GE a admis en déduction la contribution versée en faveur de H______ par le recourant, dans la mesure déclarée par ce dernier (soit CHF 6'000.-), son fils ne peut constituer une charge de famille pour lui.

10.         En ce qui concerne G______, le contribuable fait valoir que sa fille vivait avec lui en 2020 et qu’il lui a versé diverses prestations totalisant CHF 12'960.50, qui sont listées dans une lettre qu’il a adressée à l’AFC-GE, le 23 septembre 2023. Or, dès l’instant où il a obtenu une déduction à titre de contribution d’entretien en faveur de cette dernière, comme c’est le cas en l’espèce, G______ ne peut représenter une charge de famille pour lui. L’AFC-GE a, en effet, accepté que les contribuables puissent défalquer de leur revenu une somme de CHF 2'032.30, en se fondant sur une attestation de la caisse maladie ______ établie en 2020 pour G______ et adressée au recourant. S’agissant des autres montants composant le total de CHF 12'960.50, l’intéressé n’a pas établi à satisfaction de droit qu’il les aurait acquittés. En conséquence, seule une somme de CHF 2'032.30 peut être acceptée à titre de contribution d’entretien déductible.

11.         En second lieu, les recourants contestent l’évaluation des titres de la société.

12.         Selon l'art. 49 LIPP, l’état de la fortune mobilière et immobilière est établi au 31 décembre de l’année pour laquelle l’impôt est dû (al. 1). La fortune est estimée en général à la valeur vénale (al. 2).

13.         La circulaire n° 28 est reconnue, selon la jurisprudence, comme présentant une méthode adéquate et fiable pour l'estimation de la valeur vénale des titres non cotés, même s'il n'est pas exclu que d'autres méthodes d'évaluation reconnues puissent, isolément, s'avérer appropriées (arrêt du Tribunal fédéral 2C_954/2020 du 26 juillet 2021 consid. 5.3). Les autorités ne s'en écartent que dans la mesure où elles contreviennent au sens et au but de la loi (ATF 136 I 129 consid. 6.4).

14.         La circulaire n° 28 prévoit une méthode d'estimation générale des titres non cotés en bourse, qui s'applique aux sociétés commerciales, industrielles et aux sociétés de services.

La valeur des titres correspond à la moyenne pondérée entre la valeur de rendement, doublée, et la valeur intrinsèque déterminée selon le principe de la continuation (ch. 34 de la circulaire n° 28). La valeur de rendement s'obtient par la capitalisation du bénéfice net des exercices déterminants augmenté ou diminué des reprises ou déductions (ch. 8.1 de la circulaire n° 28). Les contrats de droit privé, comme les conventions d'actionnaires qui restreignent la transmissibilité des titres, restent sans influence sur l'estimation de ceux-ci (chap. A/2, ch. 4 de la circulaire n° 28), tout comme les engagements que les parties prennent volontairement (commentaire 2020 de la circulaire n° 28, p. 7).

Si, dans des cas exceptionnels, une entreprise ne peut être aliénée, ou est difficilement aliénable à la valeur de rendement, en particulier si son rendement repose exclusivement ou presque sur la performance d’une personne unique détenant la totalité ou la majorité des droits de participation de celle-ci et que la création de valeur de l’entreprise est obtenue uniquement par le détenteur d’une participation majoritaire et si l’entreprise n’emploie pas d’autres personnes hormis quelques-unes occupées à des tâches d’administration et de logistique, l’autorité fiscale peut prendre en considération cette situation par une pondération simple de la valeur de rendement, c’est-à-dire non doublée, et de la valeur de substance (arrêt du Tribunal fédéral 2C_866/2019 du 27 août 2020 consid. 4.5). La circulaire n° 28 réserve toutefois des situations où seule la valeur substantielle de la société est prise en compte, ce qui est le cas des sociétés nouvellement constituées (ch. 32 de la circulaire), des sociétés holding, de gestion de fortune et de financement, ainsi que les sociétés immobilières (ch. 38 et 42 de la circulaire n° 28).

15.         S’agissant de l’évaluation des sociétés commerciales, industrielles et de services, le ch. 34 prescrit que la valeur de l'entreprise résulte de la moyenne pondérée entre la valeur de rendement (ch. 7 à 10) qui est doublée, d’une part, et la valeur substantielle (ch. 11 à 14) déterminée selon le principe de continuation de l’exploitation, d’autre part.

La circulaire n° 28 connaît deux modèles à disposition pour déterminer la valeur de rendement, à savoir le modèle 1, dans lequel les comptes annuels (n) et (n-1) servent de base pour le calcul, et le modèle 2, dans lequel les comptes annuels (n), (n-1) et (n-2) servent de base pour le calcul (ch. 7.1). La valeur de rendement s’obtient par la capitalisation du bénéfice net des exercices déterminants augmenté ou diminué des reprises ou déductions mentionnées sous le ch. 9 (ch. 8.1). Dans le modèle 1, le bénéfice net du dernier exercice (n) est pris en considération deux fois. Dans le modèle 2, les bénéfices nets de chacun des trois exercices (n, n-1 et n-2) sont pris en considération une fois (ch. 8.2) (ch. 8.3).

16.         Les principes d'estimation de la circulaire doivent être choisis de telle manière que le résultat se rapproche au mieux de la réalité économique. Les instructions de ladite circulaire reposent sur la constatation empirique que la valeur vénale dépend du rendement passé et à venir sous la forme de dividendes et autres participations au bénéfice ainsi que de la rentabilité de la société, et qu'elle est influencée par d'autres facteurs comme par exemple la fortune, les liquidités, la stabilité de la marche des affaires, etc. (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1082/2013 du 14 janvier 2015 consid. 5.5).

17.         Si l'estimation de titres non cotés en bourse est effectuée sur la base de la circulaire, il convient alors de supposer que l'estimation aboutit à une valeur vénale correcte et que, par ce calcul, le fisc a apporté une preuve suffisante. Si un contribuable est d'un avis contraire, il lui appartient dès lors d'apporter ses propres preuves (arrêt du Tribunal fédéral 2C_954/2020 du 26 juillet 2021 consid. 7.2).

En l’espèce, dans leur recours, les contribuables font valoir que la société ne peut être comparée à une entreprise libérale, étant donné que les médecins sont soumis à la clause du besoin instaurée par l’État et en raison de l’existence du TARMED. Par ailleurs, sans son engagement à travailler bénévolement en tant que médecin de famille, elle tomberait en faillite. L’intéressé fait en outre remarquer qu’il n’a pratiquement rien gagné en 2020 et a continué à pratiquer pour des raisons de déontologie médicale, voulant que ses patients ne soient pas laissés à l’abandon.

Ils invoquent également le fait qu’ils se trouvent en concurrence avec les Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) et la K______, qui a installé un centre médical à la gare de L______, qui a acquis la pharmacie M______ et la chaîne de fitness N______, présente dans toute la Suisse.

18.         Les recourants ne peuvent être suivis.

Il résulte de la feuille d’estimation des titres de la société pour l’année 2020, datée du 18 juin 2021, que l’AFC-GE a évalué cette entreprise en se fondant sur la moyenne entre la valeur substantielle et la valeur de rendement, doublée, cette dernière étant calculée d’après les résultats des exercices 2017, 2018 et 2019. Cette méthode correspond à celle décrite dans la circulaire n° 28.

Puisqu’ils contestent l’évaluation effectuée par l’autorité intimée, il leur incombe d’en apporter la démonstration. Or, ils ne prouvent pas en quoi l’existence de la clause du besoin et l’obligation d’appliquer le TARMED – qui s’applique à tous les médecins – impliquerait qu’une estimation des titres de la société ne refléterait pas la valeur vénale. Ils ne démontrent pas non plus en quoi la mise en concurrence des cabinets médicaux avec d’autres entités, telles les HUG et la K______, ainsi que la baisse de revenus des généralistes aurait pour effet que la circulaire n° 28 ne permettrait pas d’évaluer leur société à sa valeur vénale. Il apparaît bien au contraire que ladite circulaire permet de tenir compte des mauvais résultats réalisés par une entreprise, par le biais de la prise en compte de sa valeur de rendement, qui s’obtient en capitalisant son bénéfice net.

19.         Au vu de ce qui précède, le recours doit être admis partiellement, dans le sens des considérants.

20.         En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument réduit s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Le solde de l’avance de frais de CHF 200.- leur sera restitué.

Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 4 décembre 2023 par Madame A______ et Monsieur B______ contre les décisions sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 31 octobre 2023 ;

2.             l’admet partiellement, dans le sens des considérants ;

3.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             ordonne la restitution aux recourants du solde de l’avance de frais de CHF 200.- ;

5.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST, présidente, Pascal DE LUCIA et Philippe FONTAINE, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière