Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/537/2025 du 01.07.2025 ( LPP ) , ADMIS
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/3093/2024 ATAS/537/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 1er juillet 2025 Chambre 10 |
En la cause
SERVISA FONDATION COLLECTIVE | demanderesse |
contre
A______
|
défenderesse |
A. a. La société A______ (ci-après : la société), inscrite au Registre du commerce le 19 juillet 2017, sise au B______, 1207 Genève, est active dans la représentation de clients dans le cadre de procédures devant les tribunaux et autres autorités, ainsi que le conseil juridique et stratégique et l'exercice de tout mandat. Son associé gérant est C______, lequel dispose d'une signature individuelle (cf. extrait du Registre du commerce au 3 juin 2025).
b. La société a conclu un contrat d'affiliation avec entrée en vigueur le 1er janvier 2018 (contrat n° 5______) avec SWISSCANTO FONDATION COLLECTIVE DES BANQUES CANTONALES (ci-après : SWISSCANTO), devenue SERVISA FONDATION COLLECTIVE (ci-après : SERVISA) institution de prévoyance collective inscrite au registre de la prévoyance professionnelle.
c. Le 16 mars 2023, la société et SWISSCANTO ont signé un plan d'amortissement portant sur le contrat de prévoyance du personnel n° 1______, mentionnant que la « créance en principal » de SWISSCANTO était fixée à
CHF 66'998.- au 14 mars 2023 et que les intérêts courus du 1er janvier au
14 mars 2023 se montaient à CHF 777.50. Sous réserve de paiements, la créance, majorée des intérêts, s'accroitrait à CHF 143'702.90 au 31 décembre 2023, et ferait encore l'objet d'un intérêt de 5% à partir du 1er janvier 2024. La société reconnaissait sans réserve l'exactitude de l'ensemble de la créance et s'engageait à régler les arriérés, par le biais de neuf versements intervenant le dernier jour de chaque mois, de mars à novembre 2023, les deux premiers à hauteur de CHF 8'000.- et les sept autres à concurrence de CHF 18'355.-. La société demeurait toutefois libre d'effectuer des paiements partiels plus élevés ou de s'acquitter du reliquat de la créance à tout moment. Enfin, demeuraient réservées les créances supplémentaires pour des montants qui n'avaient pas encore été facturés ou n'étaient pas encore dus au 14 mars 2023, ou les réductions de créances qui n'étaient pas encore prises en compte à la même date.
d. Le 6 février 2024, SERVISA a envoyé à la société une sommation portant sur des arriérés de cotisations au 5 février 2024 pour un montant total de CHF 82'257.55 et une indemnité pour les frais de gestion supplémentaires conformément au règlement pour frais de gestion, débités le 5 février 2024, à hauteur de CHF 300.-, soit un total de CHF 82'557.55. Elle a relevé que malgré son rappel, ses cotisations dues étaient toujours impayées, qu'elle avait pris en compte tous les paiements effectués jusqu'au 5 février 2024 et que le taux actuel des intérêts moratoires s'élevait à 5%. En l'absence du paiement de ce montant en souffrance dans les 14 jours, elle se verrait dans l'obligation d'exiger la somme par la voie juridique et de facturer une nouvelle indemnité pour frais de gestion supplémentaires de CHF 500.-. En outre, conformément au chiffre 7.3 de la convention collective d'affiliation, elle était en droit de résilier ladite convention avec effet immédiat. Un plan d'amortissement pouvait être envisagé en cas de problème de trésorerie temporaire et la société était invitée à la contacter à ce sujet.
e. Le 24 avril 2024, SERVISA a adressé trois factures à la société, soit les factures n° 2______, n° 3______ et n° 4______, mentionnant le solde dû par l’entreprise résultant d’anciens mouvements de compte, ainsi que les nouvelles contributions.
f. Par courrier du 25 avril 2024, SERVISA a résilié le contrat de prévoyance du personnel n°5______ de la société au 30 avril 2024, conformément au chiffre 7.3 de ses dispositions contractuelles. Elle a rappelé que le compte d'encaissement de la société présentait toujours un solde en sa faveur et lui a enjoint de payer le montant dû de CHF 99'577.65 (selon l'extrait de compte joint plus les intérêts de CHF 1'330.80) avant le 8 mai 2024. À défaut, une action en justice serait engagée afin de recouvrer la totalité du montant dû.
g. Sans versement dans le délai imparti, SERVISA a introduit une poursuite le 22 mai 2024 (poursuite n° 6______) mentionnant, à titre de créances, les primes de prévoyance professionnelle, contrat n° 5______, pour la somme de CHF 99'637.30 avec intérêts à 5% dès le 13 mai 2024.
h. Le 9 juillet 2024, la société a formé opposition totale à la poursuite.
B. a. Par acte du 19 septembre 2024, SERVISA a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice d’une demande en paiement contre la société portant sur les cotisations pour la prévoyance professionnelle obligatoire. Elle a conclu, sous suite de frais et dépens, à ce que la défenderesse soit condamnée à lui payer une créance en capital de CHF 99'637.30, avec intérêts à 5% sur la créance à partir du 13 mai 2024, ainsi qu'une indemnité de procédure de CHF 500.-. Elle a également requis le prononcé de la mainlevée définitive dans la poursuite n° 6______ à concurrence de la créance précitée (hormis les frais du commandement de payer qui pouvaient être décomptés préalablement de ces paiements).
À l'appui de sa demande, la demanderesse a produit des extraits de la Feuille officielle suisse du commerce (ci-après : FOSC) la concernant, le contrat d'affiliation n° 5______, sa lettre de résiliation du 25 avril 2024, un décompte de cotisations du 24 avril 2024, une attestation collective du 24 avril 2024, un extrait du compte de la défenderesse du 1er janvier au 31 décembre 2023 et un extrait dudit compte au 5 janvier 2024, « des justificatifs des chargements des coûts », le commandement de payer, poursuite n° 6______, ainsi que le plan d'amortissement signé le 16 mars 2023.
b. En date du 20 septembre 2024, la chambre de céans a accordé à la défenderesse un délai au 18 octobre 2024 pour lui faire parvenir sa réponse et son dossier.
c. Par courrier du 17 octobre 2024, la défenderesse, soit pour elle son associé gérant, a sollicité la prolongation du délai au 15 novembre 2024, faisant valoir que suite à un très récent déménagement, les recherches des documents dans les archives étaient « matériellement plus ardues que prévues ».
d. Le 22 octobre 2024, la chambre de céans a prolongé au 15 novembre 2024 le délai imparti à la défenderesse pour produire son écriture.
e. Par courrier du 25 novembre 2024, elle a rappelé à la défenderesse qu'aucune réponse ne lui était parvenue. Elle lui a fixé un délai au 9 décembre 2024 pour répondre à la demande, étant précisé qu’aucune prolongation de délai ne serait accordée.
f. La défenderesse n’a pas réagi dans le délai imparti.
g. La chambre de céans a fixé une audience de comparution personnelle des parties, laquelle a été annulée à la demande de la demanderesse, laquelle a souligné l’absence de toute manifestation de la part de la défenderesse.
h. Sur demande de la chambre de céans, la demanderesse a précisé le montant de la créance invoquée. Suite à la résiliation du contrat, le montant réclamé avait été adapté afin de tenir compte de la modification de salaire d’une employée, de la sortie d’une collaboratrice et de la réception d’une prestation de libre passage de l’institution précédente concernant une autre employée. Avant l’introduction de la procédure de poursuite, la créance en capital s’élevait à CHF 98'246.85, auxquels avaient été ajoutés les intérêts courus de CHF 1'390.45 au 13 mai 2024, de sorte que la créance, composée de primes de risque et d’épargne impayées, de frais de rappel et de poursuite, ainsi que des intérêts, s’élevait à CHF 99'637.30. Les extraits de compte n’avaient jamais été contestés par la défenderesse.
Elle a notamment transmis l’extrait du compte de la défenderesse, daté du
14 avril 2025 et portant sur la période du 1er janvier au 13 mai 2024, le relevé des intérêts du compte du 1er janvier au 13 mai 2024 établi le 14 avril 2025, les factures n° 2______, n° 3______ et n° 4______ du 24 avril 2024, ainsi que des rappels et sommations relatives aux primes impayées depuis 2022.
i. Par courrier du 29 avril 2025, la chambre de céans a octroyé à la défenderesse un délai au 9 mai 2025 pour se déterminer sur cette écriture et ses annexes.
j. La défenderesse a sollicité la prolongation de ce délai.
k. Par courrier du 12 mai 2025, la chambre de céans lui a rappelé les délais déjà accordés pour répondre à la demande et produire son dossier, et que l’échéance fixée au 9 décembre 2024 était restée sans réponse, malgré une relance. Elle a toutefois accepté de prolonger au 29 mai 2025 le délai pour se déterminer.
l. Par courrier du 28 mai 2025, la défenderesse a requis une nouvelle prolongation d’un mois dudit délai, au motif que son comptable avait démissionné.
m. En date du 13 juin 2015, la défenderesse a indiqué s’en rapporté à justice.
n. Sur ce, la cause a été gardée à juger.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce ou de dissolution du partenariat enregistré, ainsi qu’aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du Code des obligations
[CO - RS 220] ; art. 52, 56a, al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982
[LPP - RS 831.40] ; ancien art. 142 du Code civil [CC - RS 210]).
Aux termes de l'art. 73 LPP, chaque canton désigne un tribunal qui connaît, en dernière instance cantonale, des contestations opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit (al. 1, 1ère phrase). Le for de l'action est au siège ou domicile suisse du défendeur ou au lieu de l'exploitation dans lequel l'assuré a été engagé (al. 3).
1.2 En l’espèce, la présente cause oppose une institution de prévoyance professionnelle à un employeur, dont le siège se situe dans le canton de Genève, en lien avec les cotisations dues par celui-ci.
La compétence de la chambre de céans pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.
2.
2.1 L'ouverture de l'action prévue à l'art. 73 al. 1 LPP n'est soumise, comme telle, à l'observation d'aucun délai (ATAS/630/2023 du 23 août 2023 ; ATAS/929/2017 du 18 octobre 2017 consid. 2 et les références citées).
La demande respecte en outre la forme prévue à l’art. 89B al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) qui régit la procédure en matière de prévoyance professionnelle à Genève.
2.2 Partant, elle est recevable.
3.
3.1 En matière de prévoyance professionnelle, le juge saisi d’une action doit se prononcer sur l’existence ou l’étendue d’un droit ou d’une obligation dont une partie prétend être titulaire contre l’autre partie (arrêt du Tribunal fédéral B 91/05 du 17 janvier 2007 consid. 2.1).
L’objet du litige devant la juridiction cantonale est déterminé par les conclusions de la demande introduite par l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral B 72/04 du
31 janvier 2006 consid. 1.1). C’est ainsi la partie qui déclenche l’ouverture de la procédure qui détermine l’objet du litige (maxime de disposition). L’état de fait doit être établi d’office selon l’art. 73 al. 2 LPP seulement dans le cadre de l’objet du litige déterminé par la partie demanderesse. La maxime inquisitoire ne permet pas d’étendre l’objet du litige à des questions qui ne sont pas invoquées
(ATF 129 V 450 consid. 3.2). Le juge n’est toutefois pas lié par les conclusions des parties ; il peut ainsi adjuger plus ou moins que demandé à condition de respecter leur droit d’être entendu (arrêt du Tribunal fédéral B 59/03 du
30 décembre 2003 consid. 4.1).
3.2 Le litige porte sur le bien-fondé de la requête de la demanderesse, par laquelle cette dernière réclame le paiement de CHF 99'637.30 (comportant les primes impayées au 13 mai 2024 [CHF 98'246.85] et les frais de rappel [CHF 1'390.45]) avec intérêts à 5% sur la créance à partir du 13 mai 2024, ainsi qu'une indemnité de procédure de CHF 500.-. Elle a également requis le prononcé de la mainlevée définitive dans la poursuite n° 6______ à concurrence de la créance précitée.
4. La LPP institue un régime d'assurance obligatoire des salariés (art. 2 al. 1 LPP).
Selon l’art. 11 al. 1 LPP, tout employeur occupant des salariés soumis à l’assurance obligatoire doit être affilié à une institution de prévoyance inscrite dans le registre de la prévoyance professionnelle.
À teneur de l’art. 66 LPP, l’institution de prévoyance fixe dans ses dispositions réglementaires le montant des cotisations de l’employeur et de celles des salariés. La somme des cotisations (contribution) de l’employeur doit être au moins égale à la somme des cotisations de tous les salariés. La contribution de l’employeur ne peut être fixée plus haut qu’avec son assentiment (al. 1). L’employeur est débiteur de la totalité des cotisations envers l’institution de prévoyance. Celle-ci peut majorer d’un intérêt moratoire les cotisations payées tardivement (al. 2). L’employeur déduit du salaire les cotisations que les dispositions réglementaires mettent à la charge du salarié (al. 3). Il transfère à l’institution de prévoyance sa contribution ainsi que les cotisations des salariés au plus tard à la fin du premier mois suivant l’année civile ou l’année d’assurance pour laquelle les cotisations sont dues (al. 4).
4.1 La convention dite d'affiliation d'un employeur à une fondation collective ou à une fondation commune est un contrat sui generis fondé sur l'art. 11 LPP
(ATF 120 V 299 consid. 4a et les références).
L'employeur affilié à une institution de prévoyance par un tel contrat est tenu de verser à celle-ci les cotisations qu'elle fixe dans ses dispositions réglementaires.
4.2 Le taux d’intérêt se détermine en premier lieu selon la convention conclue par les parties dans le contrat de prévoyance et, à défaut, selon les dispositions légales sur les intérêts moratoires des art. 102 ss CO (SVR 1994 BVG n. 2 p. 5
consid. 3b/aa ; RSAS 1990 p. 161 consid. 4b).
Aux termes de l'art. 102 CO, le débiteur d'une obligation exigible est mis en demeure par l'interpellation du créancier (al. 1). Lorsque le jour de l'exécution a été déterminé d'un commun accord, ou fixé par l'une des parties en vertu d'un droit à elle réservé et au moyen d'un avertissement régulier, le débiteur est mis en demeure par la seule expiration de ce jour (al. 2).
L’art. 104 CO dispose que le débiteur qui est en demeure pour le paiement d’une somme d’argent doit l’intérêt moratoire à 5% l’an, même si un taux inférieur avait été fixé pour l’intérêt conventionnel (al. 1). Si le contrat stipule, directement ou sous la forme d’une provision de banque périodique, un intérêt supérieur à 5 %, cet intérêt plus élevé peut également être exigé du débiteur en demeure (al. 2).
Ainsi, le débiteur qui est en demeure pour le paiement d'une somme d'argent doit l'intérêt moratoire à 5% l'an, dans la mesure où un taux d'intérêt plus élevé n'a pas été convenu par contrat (ATF 130 V 414 consid. 5.1 ; 127 V 377 consid. 5e/bb et les références).
Selon l’art. 105 al. 3 CO, des intérêts ne peuvent être portés en compte pour cause de retard dans le paiement des intérêts moratoires.
Cette interdiction de l’anatocisme n’est pas applicable aux contrats de compte courant. Le Tribunal fédéral a toutefois précisé que les intérêts ne sont susceptibles de rapporter eux-mêmes des intérêts que si, par novation, ils sont devenus des éléments du capital. À défaut de reconnaissance du solde, les intérêts ne peuvent donc pas porter intérêts. La doctrine considère, au sujet de l'art. 105
al. 3 CO, que les parties peuvent convenir que les paiements partiels effectués par le débiteur éteignent tout d'abord la créance principale avant d'éteindre la dette en intérêts moratoires ; dans ce cas, une fois la dette principale éteinte, l'intérêt moratoire échu se transforme par novation en un montant en capital, sur lequel l'intérêt moratoire convenu est dû. Il doit toutefois y avoir entente des parties à cet égard ; une simple comptabilisation en compte courant n'est pas suffisante
(ATF 130 III 694 consid. 2.2.3 et les références).
4.3 Le contrat d’affiliation, signé par la défenderesse le 14 décembre 2017 et entré en vigueur le 1er janvier 2018, prévoit des échéances au 1er janvier pour les primes de risque et primes de renchérissement, et au 31 décembre pour les bonifications de vieillesse et contributions au fond de garantie. Le point G dudit contrat stipule en outre que le plan de prévoyance et le contrat font partie de la convention d'affiliation.
La Convention d’affiliation mentionne notamment que l’entreprise s’engage à verser l’ensemble des cotisations facturées par la Fondation. Les adaptations de cotisations demeurent réservées, en particulier en raison [de] modifications des bases de calcul actuarielles ainsi que de cotisations supplémentaires. Elle s'engage à retenir les contributions réglementaires sur les salaires des employés et à les verser régulièrement (au moins chaque trimestre) (ch. 5.1).
Le jour d'effet est le 1er janvier. Les adaptations du salaire, des prestations et des cotisations sont effectuées en règle générale au jour d'effet (ch. 5.2).
Les cotisations pour les prestations de risque, celles pour l'adaptation de celles-ci à l'évolution des prix et celles pour les frais ainsi que les cotisations éventuelles prélevées par la Fondation pour la constitution de provisions techniques sont payables au début de l'année, respectivement dès l'admission d’un collaborateur à la prévoyance du personnel. Les bonifications de vieillesse ainsi que les cotisations pour le fonds de garantie viennent à échéance en fin d'année, et, en cas de sortie, à la date à laquelle la dissolution des rapports de travail devient effective (ch. 5.3).
Un crédit d'intérêts est accordé pour les paiements effectués avant l'échéance, tandis que des intérêts débiteurs sont facturés pour des paiements effectués avec retard, même sans procédure de recouvrement. La Fondation a le droit de fixer des taux d'intérêt conformes aux conditions du marché. Les taux d'intérêts peuvent être adaptés en tout temps aux nouvelles conditions. La Fondation ne débite cependant aucun intérêt pour autant que les cotisations, exigibles au début de l'année, respectivement à l'admission d'un collaborateur à la prévoyance en faveur du personnel, soient versées dans les 30 jours qui suivent leur échéance. Tout solde en faveur de la Fondation à la fin d'une année, ainsi que les intérêts débiteurs, sont reportés à l'année civile suivante à titre de créance en capital. Tout solde en faveur de l'entreprise affiliée, y compris les intérêts créditeurs éventuels, est comptabilisé à titre de paiement d'acompte des contributions de l'année suivante. Pour la fin de l'année civile, la Fondation établit un extrait du « compte d'encaissement ». Le solde indiqué sur cet extrait sera considéré comme approuvé dans la mesure où l'entreprise affiliée ne le conteste pas par écrit dans un délai de 4 semaines après réception de l'extrait (ch. 5.4).
En cas de retard de paiement ou en cas de non-respect des obligations concernant la coopération, la Fondation a le droit de résilier cette convention avec effet immédiat. Ce droit est également garanti si la Commission de prévoyance ordonne des dispositions ou des décisions qui sont contraires au but et aux principes de la Fondation, ou qui vont contre les dispositions du règlement de prévoyance ou du plan de prestations et de financement convenu, et que la Commission de prévoyance persiste malgré le rappel à l'ordre de la part de la Fondation (ch. 7.3).
Le règlement en matière de frais de gestion, annexé à la Convention d’affiliation et auquel renvoie également le contrat d’affiliation (point I. Durée du contrat), prévoit expressément le montant des frais relatifs pour travaux administratifs spéciaux, dont les frais de sommation par lettre signature en rapport avec le paiement de cotisations arriérées (CHF 300.-), les frais d’un plan d’amortissement (CHF 250.-), les frais de poursuites (non compris les frais officiels), dont
CHF 500.- pour la réquisition de poursuite, CHF 500.- pour la réquisition de continuer la poursuite, CHF 500.- pour la réquisition de poursuite ou de réalisation de gage, ainsi que des frais de dépenses spéciales pour des prestations de service non comprises dans les frais administratifs courants selon le coût.
4.4 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération
(ATF 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 360 consid. 5b ; 125 V 195 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).
En matière de prévoyance professionnelle, la maxime inquisitoire est applicable. Elle ne dispense toutefois pas les parties de leur obligation de collaborer et en conséquence d’apporter à la procédure, dans la mesure où cela apparait raisonnablement exigible, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués (ATF 139 V 176 consid. 5.2 ; 138 V 86 consid. 5.2.3 ; voir également en ce qui concerne l’art. 43 LPGA : ATF 145 V 90 consid. 3.2). En outre, la maxime inquisitoire ne libère pas les parties du principe du fardeau de la preuve ; autrement dit, en cas d'absence de preuve d’un fait, c'est à la partie qui en a le fardeau d'en supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver ce fait peut être imputée à la partie adverse (ATF 139 V 176 consid. 5.2 ; 117 V 261 consid. 3b ; 115 V 133 consid. 8a).
Dans cette optique, il est possible de s’inspirer du principe général consacré à l’art. 8 CC selon lequel chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit (en ce sens : ATF 146 V 51 consid. 5.1 ; 145 V 90 consid. 3.2 ; 115 V 133 consid. 8a ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_412/2011, du 30 avril 2012 consid. 3.2). En conséquence, la partie qui fait valoir un droit doit prouver les faits fondant ce dernier, tandis que le fardeau de la preuve relatif aux faits supprimant le droit, respectivement l'empêchant, incombe à la partie qui affirme la perte du droit ou qui conteste son existence ou son étendue (ATF 141 III 241 consid. 3 ; 139 III 13 consid. 3.1.3.1 ; 139 III 7 consid. 2.2).
4.5 En sa qualité d'employeur occupant des salariés, la défenderesse devait être affiliée à une caisse de prévoyance professionnelle.
Il ressort des pièces produites par la demanderesse et de l'absence de toute réaction et contestation de la défenderesse que cette dernière a signé un contrat d’affiliation le 14 décembre 2017, lequel est entré en vigueur le 1er janvier 2018 et a été résilié pour le 30 avril 2024.
En sa qualité d’employeur, la défenderesse était donc dans l’obligation de verser les primes convenues avec la demanderesse durant cette période.
4.6 S’agissant de la somme de CHF 99'637.30 réclamée dans le cadre de la présente demande, elle correspond au montant figurant dans le décompte du
14 avril 2025 faisant état d’un solde de CHF 98'246.85 au 13 mai 2024, ainsi qu’aux intérêts de retard de CHF 1'390.45 jusqu’au 13 mai 2024.
La défenderesse n’a formulé aucune remarque à l’encontre de ce décompte. La chambre de céans observera en particulier que la société n’a pas contesté les trois factures du 24 avril 2024, dont il ressort que le solde encore à sa charge s’élevait à CHF 83'161.55 et que les nouvelles contributions dues se montaient à
CHF 1'005.50 au 1er avril 2024 (facture n° 2______), CHF 920.30 au 1er mai 2024 (facture n° 3______) et CHF 13'159.50 au 1er mai 2024 (facture n° 4______), portant ainsi la somme de la créance à CHF 98'246.85. Elle n’a pas davantage critiqué l’extrait du compte d’encaissement joint au courrier de résiliation du
25 avril 2024, courrier qui fait état d’un solde de CHF 99'577.65 (soit une créance de CHF 98'246.85 et des intérêts de CHF 1'330.80). Par conséquent, il doit être admis que la défenderesse a reconnu cette créance, à tout le moins tacitement, en l’absence de toute contestation du compte d’encaissement dans un délai de quatre semaines. Il ressort en outre de l’extrait de compte de la défenderesse que cette dernière n’a procédé à aucun versement en 2024. À toutes fins utiles, il sera encore constaté que les différents frais retenus par la demanderesse en 2023 et 2024 sont effectivement prévus dans le règlement en matière de frais de gestion (CHF 300.- de frais de rappel, CHF 500.- de frais de poursuite, et frais de poursuite effectifs), de sorte que celle-ci était en droit de les retenir sans avoir à démontrer l'ampleur du dommage subi. La défenderesse est donc tenue de payer la créance de CHF 98'246.85.
Quant aux intérêts (CHF 1'390.45 au 13 mai 2024) sur la créance en capital, ils sont dus en vertu des art. 66 al. 2 LPP et 104 al. 1 CO. Dès lors que la convention d’affiliation prévoit une échéance au 1er janvier pour le paiement des cotisations, sous réserve des adaptations de cotisations qui sont venues à échéance dès le jour des modifications, les intérêts sont dus dès cette date sans qu’une interpellation ne soit nécessaire. Le taux de 5% appliqué est conforme à la loi. Enfin, la transformation des intérêts en créance est prévue par la convention d’affiliation, de sorte que la demanderesse est fondée à réclamer des intérêts sur une créance partiellement composée d’intérêts. Partant, la défenderesse doit également s’acquitter du montant de CHF 1'390.45.
S’agissant de l'intérêt moratoire de 5% auquel conclut la demanderesse, il est conforme à la loi et la date du 13 mai 2024 est postérieure au terme du délai octroyé pour le paiement de la créance et des intérêts, selon le courrier de résiliation du 25 avril 2024.
L’ « indemnité des procédés » de CHF 500.- demandée en sus par la défenderesse correspond aux frais engendrés par la présente procédure et est conforme au montant prévu dans le règlement en matière de frais de gestion en cas de réquisition de faillite ou de poursuite en réalisation de gage (ch. 2.1), de sorte que la conclusion de la demanderesse tendant à son paiement ne prête pas le flanc à la critique.
Enfin, les frais de poursuite de CHF 90.- sont d'office supportés par le débiteur lorsque la poursuite aboutit (JdT 1974 III 32).
La défenderesse, qui ne s’est pas acquittée du montant des cotisations, des indemnités et des intérêts dus, n’a fait valoir aucune justification à l’absence de tout paiement et n’a jamais contesté les sommes exigées. En outre, elle n'a soulevé aucune des exceptions énumérées à l'art. 81 LP (extinction de la dette, obtention d'un sursis ou de la prescription).
4.7 Partant, la chambre de céans tiendra pour établi que la défenderesse doit à la demanderesse un montant de CHF 99'637.30, comprenant les contributions et frais impayés jusqu’à la mise en demeure et les intérêts de CHF 1'390.45 jusqu’au
13 mai 2024, avec intérêts à 5% dès le 13 mai 2024, ainsi que des frais de traitement pour la présente demande en paiement de CHF 500.-, et de poursuite de CHF 90.-.
5. Reste à examiner la conclusion de la demanderesse tendant à l'obtention de la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 6______.
5.1 Les décisions des autorités administratives fédérales portant condamnation à payer une somme d'argent sont exécutées par la voie de la poursuite pour dettes et sont, une fois passées en force, assimilées à des jugements exécutoires au sens de l'art. 80 al. 2 ch. 2 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du
11 avril 1889 (LP - RS 281.1 ; Pierre-Robert GILLIÉRON, Commentaire de la LP, 1999, p. 1226, ch. 45).
Il en est de même des décisions passées en force des autorités administratives cantonales de dernière instance qui statuent, dans l'accomplissement de tâches de droit public à elles confiées par la Confédération, en application du droit fédéral, mais qui ne statuent pas définitivement en vertu du droit fédéral – autrement dit, dont les décisions sont susceptibles d'un recours administratif auprès d'une autorité fédérale ou d'un recours de droit administratif (GILLIÉRON, op. cit.,
p. 1227 ; Carl JEAGER, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 1999 p. 621). Par autorités administratives fédérales, et par extension autorités administratives cantonales de dernière instance, il faut entendre les tribunaux fédéraux et les autres autorités ou organisations indépendantes de l'administration fédérale en tant qu'elles statuent dans l'accomplissement de tâches de droit public à elles confiées par la Confédération (art. 1 al. 2 let. b et e de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 [PA - RS 172.021]).
La chambre des assurances sociales statuant en dernière instance cantonale et dans l'accomplissement de tâches de droit public peut, selon ce qui précède, prononcer la mainlevée définitive d'une opposition à un commandement de payer puisque, statuant au fond, la condamnation au paiement est assimilée à un jugement exécutoire. Cette solution est d'ailleurs la conséquence du fait que, dans les matières qui sont de son ressort, le juge des assurances est effectivement le juge ordinaire selon l'art. 79 LP et qu'il a qualité pour lever une opposition à la poursuite en statuant sur le fond (ATF 109 V 51).
5.2 À teneur de l’art. 88 al. 2 LP, le droit du créancier de requérir la continuation de la poursuite se périme par un an à compter de la notification du commandement de payer (1ère phrase) ; si opposition a été formée, ce délai ne court pas entre l'introduction de la procédure judiciaire ou administrative et le jugement définitif (2ème phrase).
5.3 En l'occurrence, le commandement de payer, poursuite n° 6______, a été notifié à la défenderesse le 9 juillet 2024, date à laquelle le délai de péremption d’un an a commencé à courir (ATF 125 III 45 consid. 3b). Par conséquent, la poursuite n'était pas périmée lorsque la demanderesse a saisi la chambre de céans de la demande de mainlevée d’opposition, le 19 septembre 2024.
La mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer, poursuite
n° 6______, sera ainsi prononcée à concurrence de CHF 99'637.30, avec intérêts à 5% dès le 13 mai 2024, montant ayant fait l'objet de ladite poursuite.
À toutes fins utiles, il sera rappelé que les frais de traitement relatifs à l’introduction de la présente demande en paiement (CHF 500.-) n’ont pas fait l’objet de la poursuite précitée. Quant aux frais de poursuite (CHF 90.-), ils sont d'office supportés par le débiteur lorsque la poursuite aboutit (JdT 1974 III 32). Il n'y a donc pas lieu de prononcer la mainlevée définitive pour les frais du commandement de payer, dont le sort suit celui de la poursuite (art. 68 LP ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_8/2008 du 11 avril 2008 consid. 4).
6. Enfin, la demanderesse conclut à ce que la défenderesse soit condamnée aux frais et dépens de la procédure.
6.1 L'art. 73 al. 2 LPP précise que les cantons doivent prévoir une procédure simple, rapide et, en principe, gratuite.
L'art. 89H al. 1 LPA prévoit que la procédure est gratuite pour les parties, sous réserve de l'al. 4 (relatif à l'assurance-invalidité). Toutefois, les débours et un émolument peuvent être mis à la charge de la partie qui agit de manière téméraire ou témoigne de légèreté. Une indemnité est allouée au recourant qui obtient gain de cause (art. 89H al. 3 LPA).
En sa qualité d'institution chargée d'une tâche de droit public, la demanderesse n'a en principe pas droit à des dépens. Toutefois, les assureurs sociaux qui obtiennent gain de cause en procédure cantonale et sont représentés par un avocat ou, d'une autre manière, par une personne qualifiée, peuvent prétendre à des dépens lorsque l'adverse partie procède à la légère ou de manière téméraire (ATF 128 V 323 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_927/2010 du 4 août 2011 consid. 6 et les références citées).
6.2 En l'espèce, la demanderesse agit par l'intermédiaire de ses propres organes et n'est pas assistée par un avocat indépendant. Elle agit en qualité d'organisme chargé de tâches de droit public et n'a pas droit à des dépens. En outre, une témérité de la part de la défenderesse ne sera pas retenue, de sorte que celle-ci ne sera pas condamnée au paiement d’un émolument.
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. L'admet.
3. Condamne la défenderesse à payer à la demanderesse les sommes suivantes :
- CHF 99'637.30, avec intérêts à 5% dès le 13 mai 2024 ;
- CHF 90.- à titre de frais de poursuite ;
- CHF 500.- à titre de frais de traitement pour l'introduction de la présente demande en justice.
4. Prononce la mainlevée définitive de l’opposition faite au commandement de payer dans la poursuite n° 6______ pour le montant de CHF 99'637.30, avec intérêts à 5% dès le 13 mai 2024.
5. Dit que la procédure est gratuite.
6. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Adriana MALANGA |
| La présidente
Joanna JODRY |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le