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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/918/2024

ATAS/756/2024 du 03.10.2024 ( AVS ) , IRRECEVABLE

*** ARRET DE PRINCIPE ***
Descripteurs : OPPOSITION(PROCÉDURE);DÉCISION SUR OPPOSITION;DÉCISION DE RENVOI
Normes : LPGA.52.al1
Résumé : Après avoir rappelé notamment que la procédure d’opposition préalable au recours est obligatoire, que l’annulation sur recours d’une décision sur opposition ne fait pas renaître la décision sujette à opposition, puisqu’elle l’a remplacée, et que le renvoi de la cause à l’autorité administrative met à néant l’entier de la première procédure administrative, la chambre de céans a retenu qu’en règle générale, on ne saurait considérer qu’une autorité condamnée par un arrêt de renvoi à rendre une nouvelle décision peut éluder la procédure d’opposition en rendant directement une décision sur opposition.
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/918/2024 ATAS/756/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 3 octobre 2024

 

En la cause

A______

représenté par Me Marie-Josée COSTA, avocate

 

 

recourant

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. L’association « B______ » (ci-après : l’association) a été inscrite au registre du commerce (ci-après : RC) de Genève le 11 juin 2012. Elle avait pour but la fourniture d’opportunités de travail et de formation à des adultes, afin de leur permettre d’acquérir une expérience significative et des compétences pour intégrer le monde professionnel. Madame C______ (ci-après : la présidente) a été inscrite en cette qualité au RC dès le 30 mai 2013, jusqu’à la faillite de l’association. Monsieur A______ (ci-après : le trésorier ou le recourant) a été inscrit au RC en qualité de membre trésorier titulaire de la signature collective à deux du 30 mai 2013 au 18 décembre 2014.

b. L’association a été affiliée en qualité d’employeur à la caisse cantonale genevoise de compensation (ci-après : la caisse ou l’intimée) dès le 1er mai 2012.

c. Selon une attestation des salaires pour 2014 partiellement manuscrite du 17 avril 2015, reçue par la caisse le 20 avril suivant, les salaires soumis à l’AVS s’élevaient à CHF 30'656.90, dite attestation renvoyant à des annexes. Un document dactylographié intitulé « Association B______ - Attestation des salaires versés durant 2014 », mentionnant également d’autres employés, reçu par la caisse à la même date, faisait état d’une masse salariale totale de CHF 602'603.24.

d. La caisse a adressé la facture finale de cotisations de 2014 à l’association le 20 avril 2015, portant sur un montant de CHF 92'623.80, soit CHF 55'680.80 compte tenu des versements déjà opérés à hauteur de CHF 36'943.-. La masse salariale soumise à cotisations s’élevait à CHF 602'603.25.

e. Le 20 juin 2016, la caisse cantonale vaudoise de compensation AVS (ci-après : la caisse vaudoise) a fait savoir à la caisse que l’association était affiliée auprès de sa caisse d’allocations familiales pour les employés travaillant dans le canton de Vaud, et ne lui avait pas retourné les documents nécessaires à l’établissement des cotisations pour 2014 et 2015. Elle a invité la caisse à lui faire parvenir les pièces nécessaires à cet effet, si elle en disposait.

f. Le 24 juin suivant, la caisse lui a transmis l’attestation des salaires de l’association pour 2014, en soulignant que celle-ci ne distinguait pas entre les employés de Genève et ceux dans le canton de Vaud.

g. En date du 31 août 2016, le Tribunal de première instance du canton de Genève a prononcé la faillite de l’association.

h. Le 7 mars 2017, la caisse vaudoise a adressé à l’association une sommation relative aux cotisations dues pour 2014, qui s’élevaient à CHF 12'543.-, montant auquel s’ajoutait une taxe de sommation de CHF 100.-.

i. Selon un rapport de la caisse du 13 juillet 2017, l'office des faillites lui a fait parvenir le procès-verbal d’interrogatoire du 29 novembre 2016, les bilans et les comptes de pertes et profits pour les années 2012, 2013 et 2015, ainsi que le grand livre pour 2015. Seuls les salaires de 2015 avaient pu être vérifiés.

j. L’état de collocation a été déposé le 14 novembre 2017.

k. La procédure de faillite a été clôturée par jugement du 16 août 2018.

l. Par décision du 5 février 2019, la caisse vaudoise a requis la réparation par la présidente du dommage correspondant aux cotisations paritaires non versées de 2014 à 2016, et aux intérêts, frais de sommation et de poursuite, soit CHF 20'958.-. Dite décision relevait que l’association avait été affiliée auprès de cette caisse en qualité d’employeur avec personnel du 1er mai 2012 au 31 août 2016.

m. Par décision du 1er novembre 2019, la caisse a réclamé au trésorier un montant de CHF 102'909.90, représentant les cotisations paritaires impayées, y compris les frais et les intérêts moratoires, soit le dommage subi en raison du non-respect de ses obligations en tant qu’organe de l’association.

n. Le même jour, la caisse a adressé une décision à la teneur identique à la présidente.

o. Par courriers du 18 novembre 2019, la présidente et le trésorier ont chacun fait opposition aux décisions du 1er novembre 2019, invoquant en substance que sans la maladie de la présidente, l’association n’aurait pas fait faillite, ce qui impliquait qu’ils n’étaient pas responsables du dommage.

p. La caisse a rejeté les oppositions du trésorier et de la présidente par deux décisions distinctes du 11 mai 2021.

q. La présidente et le trésorier ont tous deux interjeté recours contre ces décisions auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans), qui a ordonné la jonction des procédures le 15 juin 2021 sous le numéro de cause A/1998/2021.

r. Par arrêt du 18 août 2022 (ATAS/715/2022), la chambre de céans a, au chiffre 7 de son dispositif, partiellement admis le recours du trésorier en tant qu’il portait sur le montant du dommage et la période pour laquelle il était responsable, et renvoyé la cause à la caisse pour nouveau calcul du dommage imputé au trésorier, excluant les cotisations sociales de l'année 2015 ainsi que, pour l'année 2014, les cotisations impayées découlant de la loi instituant une assurance en cas de maternité et d'adoption du 21 avril 2005 (LAMat - J 5 07) et les intérêts moratoires, les frais administratifs et les frais de poursuite s'y rapportant, et nouvelle décision. Elle a rejeté son recours pour le surplus et confirmé sa responsabilité pour 2014. La chambre de céans a en substance reconnu au trésorier la qualité d’organe matériel de l’association, qui lui imposait de veiller au paiement des cotisations sociales, ce qu’il n’avait pas fait, sans motif justificatif. Le trésorier invoquait son licenciement avec effet au 31 décembre 2014, et le RC révélait la radiation de ses pouvoirs au 18 décembre 2014. Il n’avait pas perçu de salaire en 2015, ce qui confirmait la fin de son activité dès le 1er janvier 2015. Il ne pouvait ainsi être tenu responsable que du dommage lié au défaut de paiement des cotisations entre son entrée au conseil d'administration et la fin de ses fonctions, de sorte que sa responsabilité ne courait que jusqu’au 18 décembre 2014. S’agissant du montant des cotisations sociales réclamées, la caisse avait admis sur le principe le grief quant à son caractère erroné, puisqu’elle avait indiqué dans ses écritures qu’elle communiquerait prochainement sa détermination sur le « montant de la masse salariale contestée par les recourants », avant de relever dans son écriture du 15 novembre 2021 qu’il existait une différence « peu sensible », pour les cotisations paritaires pour 2014 et que le montant final « n’était de loin pas choquant » et ne « pouvait plus être contesté ». À ce sujet, la chambre de céans a relevé que la décision de taxation définitive pour 2014 n’était pas opposable au trésorier, qui avait déjà quitté ses fonctions lors de sa notification à l’association. Dans un tel cas, une décision de cotisations pouvait être réexaminée lors de l’établissement du dommage, conformément à la jurisprudence. Partant, la caisse devait démontrer l’exactitude de ses calculs pour les cotisations sociales concernant la masse salariale 2014, ce d’autant plus qu’elle admettait la possibilité d’une différence.

B. a. Le 1er février 2023, la caisse a indiqué à la mandataire du trésorier qu’elle avait « opéré les modifications requises par la (chambre de céans) ». Elle a retenu que les salaires pour 2014 s’élevaient à CHF 567'531.65 après déduction de CHF 28'573.60 et CHF 6'498.- d'indemnités non assujetties à l’AVS. Les cotisations sur ce montant s’élevaient à CHF 53'845.-. Le dommage pour 2014 correspondait ainsi à CHF 53'279.60, une fois déduits les cotisations LAMat par CHF 465.40 et un montant forfaitaire de CHF 100.- pour les intérêts moratoires liés. Le trésorier était redevable de cette somme, et la caisse l’invitait à en déduire les dépens alloués par la chambre de céans.

b. Par courriel du 23 février 2023, la caisse, se référant à sa précédente correspondance électronique avec le trésorier, a soutenu que les arguments invoqués par celui-ci tendant à une diminution de la masse salariale avaient été écartés par la chambre de céans. Les déductions dans les calculs du trésorier n’étaient pas exactes, et même si elles l’étaient, elles n’avaient pas lieu d’être. Selon la jurisprudence, une créance en réparation du dommage n’était examinée que si des éléments permettaient de conclure à une inexactitude évidente. La caisse considérait que les « derniers mails [étaient] désormais des manœuvres dilatoires afin d’éviter le paiement des montants du dommage (…) ».

c. Le trésorier ayant derechef invité par courriel du 24 février 2023 la caisse à démontrer l’exactitude de ses calculs, celle-ci lui a répété le 1er mars 2023 que ses arguments avaient été purement et simplement écartés par la chambre de céans, et qu’il interprétait son arrêt de manière « plus qu’erronée ».

d. La caisse a fait établir un commandement de payer à l’encontre du trésorier, notifié le 10 mars 2023, portant sur un montant de CHF 40'000.- correspondant à une partie du dommage subi selon l'arrêt de la chambre de céans du 18 août 2022, frais de poursuite en sus, auquel le trésorier a fait opposition.

e. Par prononcé du 12 janvier 2024, la justice de paix du district de Nyon a rejeté la requête de mainlevée de l’opposition à la poursuite intentée par la caisse.

f. Par arrêt du 20 décembre 2023 (ATAS/1029/2023), la chambre de céans a déclaré irrecevable la demande d’interprétation de son arrêt du 18 août 2022 déposée par la caisse, en raison de sa tardiveté.

g. Par décision du 16 février 2024, intitulée « Décision sur opposition », la caisse a exigé le versement par le trésorier de CHF 53'279.60, reprenant son calcul du dommage du 1er février 2023.

C. a. Par écriture du 18 mars 2024, le trésorier a interjeté recours contre la décision de la caisse auprès de la chambre de céans. Il a conclu, sous suite de dépens, à son annulation et au renvoi à l’intimée pour nouveau calcul. Il a soutenu que la version dactylographiée de l’attestation de salaires pour 2014 annonçant des salaires à hauteur de CHF 602'603.25 était d'auteur inconnu. Il ressortait des extraits du compte postal de l’association, qu’il a produits dans une version caviardée, que celle-ci avait versé des salaires à hauteur de CHF 529'485.15 en 2014, montant dont les indemnités non assujetties à l'AVS de CHF 35'071.60 (CHF 28'573.60 et CHF 6'498.-) devaient être déduites. La masse salariale en résultant s’élevait ainsi tout au plus à CHF 464'413.55 pour 2014, soit un montant largement inférieur à celui retenu par l’intimée. Les cotisations relatives à la LAMat et tous les montants s'y rapportant devaient en être exclus, conformément à l’arrêt du 18 août 2022. Les cotisations relatives aux allocations familiales s’élevant à CHF 12'543.30 pour 2014 devaient également être retranchées, puisqu’elles avaient été intégralement facturées par la caisse vaudoise, qui avait notifié une décision de réparation à la présidente, et qu’elles ne pouvaient être facturées à double. Le recourant ne supportait pas l’éventuel conflit de compétence entre caisses. Les dépens alloués par la chambre de céans au recourant, soit CHF 3'100.- (sic) au total, devaient également être déduits du dommage.

b. Dans sa réponse du 24 avril 2024, l’intimée a exposé qu’en application de l’arrêt du 18 août 2022, elle avait déduit les montants qui ne devaient pas faire partie de la masse salariale 2014 et opéré les déductions relatives à la LAMat. Le dommage réclamé au recourant avait été calculé seulement sur la base des cotisations relatives à 2014. L’intimée a soutenu que la chambre de céans n’avait pas évoqué d’autres déductions et avait écarté celles requises par le recourant. Après une énième procédure d'encaissement infructueuse, l’intimée avait mis en œuvre l’arrêt de la chambre de céans du 18 août 2022 par décision sur opposition. Le recourant n’avait jamais pu apporter d’éléments concrets démontrant que les salaires communiqués par l'association n'avaient pas été versés et que la masse salariale devait être réduite. L’intimée considérait s’être parfaitement conformée à l’arrêt de renvoi du 18 août 2022. Elle a ajouté que « la partie recourante, via son conseil, [faisait] preuve d'une indifférence hémiplégique certaine en ce qui [concernait] les faits incontestés qui [ressortaient] de la présente procédure et du jugement rendu par la Cour de Justice (sic) ». L’argument du recourant selon lequel un jugement ne fixant aucun montant ne pouvait « servir à [le] condamner à payer une somme d'argent, [était] une ultime divagation juridico-judiciaire sans fondement, destinée à repousser sans raison le remboursement d'un dommage établi par un juge cantonal (sic) ». La modification d'une masse salariale pouvait avoir des implications importantes puisque dans un tel cas, en l’absence de versement, l’intimée était dans l'obligation de modifier les comptes individuels des employés pour supprimer les cotisations sociales enregistrées à tort. Les travailleurs pourraient ainsi être sensiblement pénalisés par cette démarche.

c. Dans sa réplique du 17 mai 2024, le recourant a persisté dans ses conclusions. Il a soutenu que la fixation précise de la masse salariale ordonnée par l'arrêt du 18 août 2022 ne se limitait pas à déduire les indemnités non assujetties à l'AVS. Il a contesté ne pas avoir démontré que les salaires n’avaient pas été versés, soutenant qu’il n’avait cessé de produire des pièces, lesquelles n’avaient jamais été analysées par l'intimée. La masse salariale 2014 devait correspondre aux salaires versés. Le recourant a souligné les propos discourtois de l’intimée, qu’il invitait à rester factuelle dans ses écritures.

d. Par duplique du 10 juin 2024, l’intimée a répété que le recourant n’avait jamais démontré quels montants devaient être exclus de la masse salariale communiquée. De plus, son calcul était erroné, la soustraction de CHF 35'071.60 du montant de CHF 529'485.15 aboutissant à un montant de CHF 494'413.55, et non CHF 464'413.55. L'extrait du compte postal n’était pas clair, et l’intimée se demandait pourquoi certains destinataires de versements avaient été caviardés. Elle invitait la chambre de céans à requérir, si elle l’estimait nécessaire, l'extrait du compte postal complet non caviardé. L’intimée a souligné que la présidente avait fait l’objet d’une ordonnance pénale du 11 mars 2016, qu’elle a produite, pour violation de l’obligation de renseigner. L’intimée n’avait pu contrôler les comptes à l’époque et s’en était tenue aux montants communiqués par les administrateurs de l’association. Il n’existait aucun élément permettant de conclure à une inexactitude évidente des montants fixés et de modifier la masse salariale. L’intimée persistait dans les termes de sa décision sur opposition.

e. Le recourant s’est déterminé le 19 juin 2024. Il a reconnu l’erreur de plume de son calcul de la masse salariale. Il a une nouvelle fois soutenu avoir produit tous les documents pertinents pour le calcul du dommage, citant l’extrait de compte postal qu’il avait caviardé pour des motifs de protection des données mais qu’il tenait à la disposition de la chambre de céans dans son intégralité. Il a pour le surplus repris les arguments déjà développés.

f. La chambre de céans a transmis cette écriture à l’intimée le 19 juin 2024.

g. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             En préambule, et bien que la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) ne prévoie pas de sanction particulière en cas d’écriture inconvenante, contrairement à ce qui prévaut par exemple en procédure civile (cf. art. 132 du code de procédure civile du 19 décembre 2008 [CPC - RS 272]), la chambre de céans relève que la formulation de certains propos de l’intimée, mentionnant une « indifférence hémiplégique certaine » du recourant et une « divagation juridico-judiciaire » en lien avec son opposition au commandement de payer notifié, est incompatible avec les obligations d’une autorité chargée de tâches de droit public, qui se doit de conserver une attitude neutre et impartiale et de communiquer sa position sans connotations inutilement dépréciatives.

Il convient ainsi d’inviter l’intimée à respecter ses devoirs en la matière.

3.             Il y a lieu d’examiner la recevabilité du recours.

3.1 Selon l'art. 52 al. 1 LPGA, les décisions peuvent être attaquées dans les 30 jours par voie d'opposition auprès de l'assureur qui les a rendues.

L’opposition constitue un véritable moyen juridictionnel (ATF 125 V 188 consid. 1b). Dans ce cadre, l’assureur peut procéder à des clarifications supplémentaires (ATF 131 V 407 consid. 2.1.2.1). La procédure d’opposition donne la possibilité à l'assureur de réexaminer complètement sa décision avant une procédure judiciaire éventuelle. La décision sur opposition remplace alors la décision initiale et clôt la procédure administrative (ATF 143 V 295 consid. 4.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_767/2023 du 30 janvier 2024 consid. 5.1). Cette voie de droit vise à décharger les tribunaux (arrêt du Tribunal fédéral C 119/05 du 15 septembre 2005 consid. 3.3)

La procédure d'opposition préalable au recours est obligatoire (arrêt du Tribunal fédéral C 273/06 du 25 septembre 2007 consid. 3.2). Ainsi, lorsque la voie de l’opposition est ouverte, les parties ne peuvent pas convenir d’y renoncer (Valérie DEFAGO GAUDIN in Commentaire romand LPGA, n. 7 ad art. 52 LPGA). L’assureur doit également respecter la procédure d’opposition lorsqu’il procède à la reconsidération d’une décision sur opposition entrée en force au sens de l’art. 53 al. 2 LPGA. Dans un tel cas, il doit rendre une nouvelle décision, elle-même sujette à opposition (arrêt du Tribunal fédéral 8C_121/2009 du 26 juin 2009 consid. 3.6).

Malgré ce qui précède, on notera que le Tribunal fédéral des assurances a considéré qu’une caisse de compensation, à qui le juge cantonal avait renvoyé la cause en lui ordonnant de rendre une nouvelle décision « sujette à recours », avait à bon droit annulé sa décision sur opposition par une décision ouvrant directement la voie du recours devant la juridiction cantonale (arrêt du Tribunal fédéral H 154/00 du 22 août 2000 consid. 1).

3.2 En l’espèce, dans son arrêt de renvoi du 18 août 2022, la chambre de céans a annulé la décision du 11 mai 2021 (chiffre 6 du dispositif) et renvoyé la cause à l’intimée pour nouveau calcul du dommage et nouvelle décision (chiffre 7 du dispositif), sans l’enjoindre à rendre directement une décision sujette à recours. On ne se trouve ainsi pas ici dans la situation visée par l’arrêt du Tribunal fédéral des assurances du 22 août 2000, où la bonne foi imposerait d’admettre que seule une décision sujette à recours soit rendue par l’intimée. C’est ici le lieu de rappeler que le renvoi de la cause à l'autorité administrative ne fait pas renaître la décision initiale, mais met à néant l'entier de la première procédure administrative, de sorte que la seconde doit repartir du début. L'issue de la procédure est totalement ouverte, et la nouvelle décision est attaquable de la même manière que l'était la première (ATF 137 V 314 consid. 3.1 et arrêt du Tribunal fédéral 9C_457/2013 du 26 décembre 2013 consid. 10.2).  

Or, l’intimée a directement rendu une décision sur opposition à la suite de l’arrêt de renvoi. La correspondance qu’elle a adressée au recourant le 1er février 2023 ne peut pas être considérée comme une décision, faute notamment d’être désignée comme telle et de mentionner les voies de droit (cf. art. 49 al. 3 LPGA). Il faut en outre souligner que l’annulation sur recours d’une décision sur opposition ne fait pas renaître la décision sujette à opposition, puisqu’elle l’a remplacée. Partant, en règle générale, on ne saurait considérer qu’une autorité condamnée par un arrêt de renvoi à rendre une nouvelle décision peut éluder la procédure d’opposition en rendant directement une décision sur opposition. Le fait que le recourant ne se soit pas plaint de ce procédé dans le cas d’espèce ne permet pas de faire abstraction du caractère obligatoire de la procédure d’opposition, dont l’observation n’est pas laissée à l’appréciation des parties.

3.3 Compte tenu de ces éléments, la décision attaquée doit être considérée comme une décision sujette à opposition. Il s’ensuit que le recours est prématuré et doit être déclaré irrecevable.

Conformément à l’art. 11 al. 3 LPA, si l'autorité décline sa compétence, elle transmet d'office l'affaire à l'autorité compétente et en avise les parties.

Partant, le recours doit être transmis à l'intimée comme objet de sa compétence, afin qu’elle rende une décision sur opposition.

3.4 Au vu des circonstances, la chambre de céans rappellera toutefois que l’intimée reste tenue de se conformer au chiffre 7 du dispositif de l’arrêt du 18 août 2022 dans la décision qu’elle rendra.

3.5 Par ailleurs, il convient de l’inviter à examiner la portée de la décision du 5 février 2019 de la caisse vaudoise afférente à un dommage résultant de cotisations non versées par l’association – portant apparemment sur les cotisations dues en vertu de la loi fédérale sur les allocations familiales du 24 mars 2006 (loi sur les allocations familiales, LAFam - RS 836.2), si l’on se réfère au courrier du 20 juin 2016 de cette caisse à l’intimée –, eu égard au principe selon lequel des cotisations sociales ne doivent en règle générale pas être prélevées deux fois sur les mêmes salaires (arrêts du Tribunal fédéral 9C_647/2009 du 15 avril 2010 consid. 5.2.2 et H 394/01 du 19 novembre 2003 consid. 5.2).

3.6 La cause est transmise à l’intimée afin qu’elle statue sur opposition.

Dans ce cadre, il semble opportun de rappeler au recourant qu’il lui est loisible de compléter ses offres de preuve tendant à l’établissement de la masse salariale pour 2014.

4.              

4.1 Compte tenu de ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable, car prématuré.

4.2 Au vu de l’issue de la procédure, le recourant n’a pas droit à des dépens.

4.3 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant conformément à l’art. 133 al. 2 LOJ

1.        Déclare le recours irrecevable, car prématuré.

2.        Transmet la cause à l’intimée, comme objet de sa compétence, pour statuer sur opposition.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Julia BARRY

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le