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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/584/2024

ATAS/724/2024 du 24.09.2024 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/584/2024 ATAS/724/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 24 septembre 2024

Chambre 10

 

En la cause

A______
représentée par Me François HAY, avocat

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née en Bosnie le ______ 1968, a suivi une école d’aide-soignante dès 1999 en Suède, où elle a travaillé en cette qualité jusqu’à son arrivée en Suisse, au mois de mars 2006. Elle a alors exercé une activité de femme de chambre, puis d’aide-soignante et de serveuse à 100%, en dernier lieu auprès de l’B______ (ci-après : l’employeur), du 17 mars 2017 au 31 août 2020. De nationalité suédoise, l’intéressée est titulaire d’un livret C. Elle est au bénéfice d’une aide financière de la part de l’Hospice général depuis le 1er décembre 2022.

b. Le 27 août 2020, l’assurée a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI), mentionnant souffrir d’une lombosciatique et d’une lombocruralgie.

c. Elle s’est inscrite auprès de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) et un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en sa faveur du 1er septembre 2020 au
30 novembre 2022.

d. Le 13 décembre 2020, l’assurée a glissé dans sa baignoire et a subi une déchirure proximale du ligament collatéral radial de l’articulation interphalangienne proximale (ci-après : IPP) du 4ème doigt de la main gauche et une contusion. L’évolution a été défavorable, marquée par l’apparition d’un syndrome douloureux régional complexe (ci-après : SDRC) et l’intéressée a présenté une incapacité de travail du 14 janvier au 5 juillet 2021. La SUVA, assureur-accidents, a pris en charge les suites du sinistre.

e. L’OAI a reçu plusieurs pièces médicales, notamment des rapports de :

-          la docteure C______, spécialiste FMH en médecine interne générale, des 1er mai et 23 octobre 2020, et 5 juillet 2021 ;

-          de la docteure D______, spécialiste FMH en médecine interne générale, du 12 mars 2020 ;

-          du docteur E______, spécialiste FMH en radiologie, du 22 mai 2020 suite à une infiltration lombaire ;

-          du docteur F______, spécialiste FMH en radiologie, relatif à une IRM lombaire du 19 février 2020 ;

-          du docteur G______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, des 9 décembre 2020, 25 juin 2021, et 25 mai 2022 ;

-          de la docteure H______, spécialiste FMH en radiologie, du
10 mars 2021 suite à une IRM lombo-sacrée ;

-          du docteur I______, spécialiste FMH en radiologie, du 15 janvier 2021 concernant une IRM de la main gauche du 15 janvier 2021.

Il a également obtenu une copie du dossier de la SUVA.

f. Le 3 juin 2021, l’assurée a déposé un nouveau formulaire auprès de l’OAI, faisant état de l’atteinte de la main gauche suite à l’accident.

g. Du 26 mai au 23 juin 2021, l’assurée a séjourné à la clinique romande de réadaptation (ci-après : CRR). Ont été diagnostiqués des douleurs et une raideur chronique de D4 et D5 de la main gauche suite à une chute avec un traumatisme direct de D4 et D5 de la main gauche le 13 décembre 2020, une déchirure du ligament collatéral radial de IPP 4 avec une contusion osseuse de la base de P2 révélée par une IRM du 15 décembre 2020, un probable SDRC de stade 1 intéressant les (3), 4 et 5ème rayon, compatible à la scintigraphie du 8 juin 2021. Ont également été mentionnés à titre de diagnostics secondaires une lombosciatalgie gauche chronique à horaire mécanique sur des troubles dégénératifs et un asthme traité.

h. Par décision du 25 novembre 2022, la SUVA a retenu que l’assurée était à même d’exercer une activité dans différents secteurs de l’industrie à la condition de ne pas porter de charges prolongées ou de manière répétitive de plus de
cinq kilos et de ne pas effectuer de mouvements nécessitant d’empoigner des objets lourds et volumineux. Une telle activité était exigible durant toute la journée et permettrait à l’intéressée de réaliser, au vu de l’enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS), un revenu annuel de CHF 52'145.- (femme, niveau de compétence 1, abattement de 5% en raison des limitations fonctionnelles). Comparé au gain de CHF 51'615.- réalisable sans l’accident, il n'en résultait aucune perte de salaire. Partant, faute de diminution notable de la capacité de gain due à l’accident, le droit à une rente d’invalidité n’était pas ouvert. En outre, d’après l’examen effectué le 4 octobre 2022, il n’y avait pas d’atteinte importante à l’intégrité physique, de sorte que les conditions requises pour l’octroi d’une telle indemnité n’étaient pas remplies.

B. a. Le 13 février 2023, l’OAI a rendu un projet de décision, aux termes duquel l’intéressée avait droit à une rente entière d’invalidité du 1er décembre 2021 au 31 mars 2023. Elle avait présenté deux périodes d’incapacité de travail, la première du 11 février 2020 (début du délai d’attente d’un an) au 17 juillet 2020 en raison d’une maladie. Puis, suite à l’accident du 13 décembre 2020, elle avait à nouveau subi une incapacité totale de travail dans son activité habituelle de serveuse. La première période d’incapacité ayant été interrompue pendant plus de trente jours, un nouveau délai d’attente d’un an avait commencé à courir le
13 décembre 2020. À son échéance, le 13 décembre 2021, l’incapacité de travail et de gain étaient totales, de sorte qu’il y avait lieu de lui reconnaître le droit à une rente entière dès le 1er décembre 2021. Dans une activité adaptée, la capacité de travail était de 100% dès le 5 octobre 2022. Ce changement n’était déterminant qu’à partir du moment où l’on pouvait s’attendre à ce que l’amélioration de l’état de santé se maintienne durant une assez longue période, en l’occurrence
trois mois. Dès lors, l’amélioration de l’état de santé était reconnue dès le
1er février 2023. La comparaison du revenu avec invalidité et sans invalidité ne révélait aucune perte de gain, de sorte que la rente était supprimée au 31 janvier 2023. Enfin, des mesures professionnelles n’étaient pas nécessaires.

b. Les 3 mars et 13 avril 2023, l’assurée a contesté le projet de décision. En substance, elle a nié disposer d’une capacité de travail totale dans une activité adaptée, relevant l’absence d’une amélioration notable de son état de santé. Ses médecins étaient particulièrement réservés sur la possibilité qu’elle puisse retrouver une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée, estimation qui reposait en réalité uniquement sur le dossier de la SUVA. L’OAI n’avait pas tenu compte de ses lombocruralgies et sciatalgies droites, de ses paresthésies de la cuisse droite et de ses troubles psychiques.

L’assurée a joint un certificat établi le 5 avril 2023 par la Dre C______, indiquant suivre la patiente en raison de lombocruralgies et sciatalgies droites depuis janvier 2020, stables depuis 2021 avec des épisodes de recrudescence. L’intéressée présentait des paresthésies de la cuisse droite permanentes. L’IRM réalisée en 2022 montrait un bombement discal venant au contact de la racine L3 droite. Une infiltration n’avait pas apporté d'amélioration notable. La patiente ne pouvait rester plus de 15 minutes dans la même position et était limitée dans son périmètre de marche en fonction de l'intensité des douleurs. Elle souffrait en outre d’une algoneurodystrophie de D4 et D5 gauches développée suite au traumatisme de la main gauche le 13 décembre 2020 avec arrachement du ligament collatéral radial de l’IPP de D4. Les limitations comprenaient une mobilité restreinte du D4 et une diminution de la force de préhension, douloureuse. L’intéressée serait probablement en mesure de bénéficier d’une reconversion professionnelle, mais il faudrait qu'elle puisse être mise en situation par des stages afin d'évaluer clairement ses limitations, qui étaient compensées au quotidien par des adaptations personnelles et l'aide de l'entourage.

Elle a également transmis un rapport du 4 avril 2023 du Dr G______, attestant d’un trouble dépressif récurrent et de séquelles traumatiques dans le contexte de la guerre en Bosnie. La dépression était devenue chronique. La patiente qui avait perdu beaucoup de proches durant et après la guerre, relatait souvent le suicide de son frère et ne voyait plus le sens de continuer à vivre, mais s'accrochait au lien avec ses enfants. Depuis quelques temps, il avait noté une aggravation des symptômes dépressifs et anxieux, exacerbés par la guerre en Ukraine. Le score MADRS effectué le jour même montrait un résultat de 32/60, ce qui constituait une aggravation depuis son dernier rapport. Il avait noté une anhédonie, une aboulie partielle, une baisse de l'élan vital, un trouble du sommeil, une diminution de l'appétit, un trouble de la concentration et de la mémoire. Il devinait en arrière fond des traits de personnalité anxieuse et dépendante. Concernant les limitations fonctionnelles, il relevait de grandes difficultés d'adaptation à des situations nouvelles avec une intolérance au stress et des difficultés de concentration et de la mémoire. Elle demandait à ses proches de lui rappeler ses rendez-vous et chaque tâche quotidienne requérait un effort. Ses proches se chargeaient de la stimuler et de l'encourager. Dans ce contexte, elle ne pouvait pas s'adapter à n'importe quelle situation de travail. Son ancien emploi était très bien rythmé, monotone, et dans une atmosphère familiale. Elle préparait les petits déjeuners dans un hôtel, où son fils et sa fille travaillaient également, de sorte qu’elle pouvait aussi compter sur eux en cas de besoin. Sur le plan psychiatrique, il était évident qu’une réinsertion professionnelle serait très difficile et demanderait un encadrement sérieux. Il faudrait trouver une activité à l'abri du stress, sans objectif de rendement, et avec une augmentation très progressive du temps de travail. En outre, la patiente souffrait également de problèmes physiques qui se surajoutaient. Des mesures adaptées de l'OAI étaient nécessaires.

c. Dans un avis du 2 mai 2023, la docteure J______, médecin au service médical régional de l’OAI (ci-après : SMR), a retenu l’existence de trois atteintes à la santé, soit des lombo et crurosciatalgies sur des troubles dégénératifs étagés, sans déficit sensitivomoteur associés, une atteinte de la main gauche ayant entraîné une incapacité totale de travail de décembre 2020 à octobre 2022, et sur le plan psychiatrique, un trouble dépressif récurrent d’intensité moyenne. Une expertise bidisciplinaire rhumatologique et psychiatrique, avec cas échéant un bilan neuropsychologique incluant des tests de validation des symptômes, était préconisée.

d. L’OAI a confié une expertise médicale au Bureau d’expertises médicales
(ci-après : BEM), laquelle a été réalisée par le docteur K______, spécialiste FMH en médecine interne et rhumatologie, et le docteur M______, psychiatre. Dans leur rapport reçu par l’OAI le 13 septembre 2023, les experts ont diagnostiqué, au plan somatique, un syndrome lombaire et un syndrome irritatif L3 droit sur une protrusion L3-L4 droite, ainsi qu’un status après SDRC type 1 de la main gauche à la suite d’une déchirure proximale du ligament collatéral radial IPP4 et une minime contusion osseuse de la base de P2 après une chute du
13 décembre 2020. En outre, ont été relevés un discret syndrome rotulien et méniscal droit sur une probable chondropathie et une surcharge pondérale, sans impact sur la capacité de travail. Au plan psychique, aucun diagnostic et aucune limitation n’ont été retenus. L’expert somatique a fixé la capacité de travail à 70% depuis février 2020. Au niveau psychique, elle avait toujours été totale. La capacité de travail globale dans l’activité habituelle était de 70%, en raison d’une diminution de la performance de 30% en lien avec une limitation du port de charges. La capacité de travail globale était de 70% dans une activité adaptée, motivée par une diminution de la performance de 30% justifiée par les crises de lombosciatalgies récidivantes et inopinées. Ainsi, la capacité de travail de l’assurée était de 70% depuis le mois de février 2020 dans toute activité, y compris en tant que ménagère.

e. Par avis du 28 septembre 2023, le SMR a proposé de suivre les conclusions de l’expertise et celles de la SUVA, à savoir de reconnaître un état de santé stabilisé dès le 4 octobre 2022 permettant la reprise de toute activité à 70% s’agissant du problème de la main gauche, et d’une capacité de travail de 70% depuis toujours pour les lombalgies. Ainsi, la capacité de travail dans l’emploi habituel de serveuse et dans une activité adaptée avait été de 0% depuis le 13 décembre 2020, puis de 70% à partir du 4 octobre 2022. Les limitations fonctionnelles requéraient l’alternance des positions, l’absence de port de charges fréquent supérieures à dix kilos, les stations assise et debout prolongées, les mouvements en porte-à-faux du tronc, ainsi que ceux nécessitant de la force ou des amplitudes importantes au niveau de la main gauche, des empoignements d’objets lourds ou volumineux. Pour les lombalgies, l’aptitude à la réadaptation remontait à février 2020, et pour la main, au 1er octobre 2022.

f. Par décision du 16 janvier 2024, l’OAI a accordé à la recourante une rente entière d’invalidité du 1er décembre 2021 au 31 janvier 2023, et lui a refusé l’octroi de mesures professionnelles. Suite à la reprise de l’instruction médicale, il reconnaissait une incapacité de travail totale dans l’activité de serveuse dès le
13 décembre 2020, et une capacité de travail de 70% dans toute activité depuis le 4 octobre 2022. L’amélioration de l’état de santé était ainsi reconnue dès le
1er février 2023. À l’échéance du délai d’attente, le 13 décembre 2021, l’incapacité de travail et de gain étant totales, l’intéressée avait droit à une rente entière dès le 1er décembre 2021. Compte tenu de la capacité de travail de 70% dans toute activité, le taux d’invalidité était évalué, dès le 1er février 2023, par comparaison des revenus sans invalidité (CHF 50'961.-) et avec invalidité
(CHF 37'955.-). La perte de gain s’élevant à 26%, le droit à la rente était supprimé au 31 janvier 2023. Enfin, au vu de la capacité de travail exigible de 70% dans toute activité et du profil professionnel de l’assurée, des mesures n’apparaissaient pas de nature à réduire le dommage, n’étaient pas simples et adéquates, et n’étaient pas indiquées.

C. a. Par acte du 16 février 2024, l’assurée, représentée par un avocat, a interjeté recours contre la décision du 16 janvier 2024 auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice. Elle a conclu, sous suite de dépens, préalablement, à l’audition de la Dre C______ et du Dr G______, principalement, à l’annulation de la décision entreprise et à l’octroi d’une rente d’invalidité entière dès le 1er décembre 2021.

La recourante a contesté les conclusions de l’expertise et soutenu que sa capacité de travail demeurait nulle, sans amélioration de son état de santé depuis le
4 octobre 2022. Elle n’était capable que de réaliser quelques activités ménagères avec l’aide de personnes de son entourage, de marcher environ une heure maximum par jour avec son mari, elle ressentait des difficultés pour l’usage de la force avec une sollicitation de la main notamment dans les activités culinaires. Il convenait d’investiguer au regard de l’ensemble des circonstances quelle activité elle pourrait théoriquement exercer, en tenant compte de ses importantes limitations fonctionnelles sur le plan physique. Sur le plan psychique, le résultat était encore plus choquant. De façon radicale et définitive, l’expert avait retenu que tous les médecins consultés jusqu’ici avaient établi au mieux de faux diagnostics, au pire des diagnostics mensongers. L’expert semblait avoir bâclé son travail en n’avait pas pris le temps nécessaire pour établir un diagnostic fiable. Face à de telles contradictions, il convenait d’ordonner l’audition de ses médecins traitants, laquelle permettrait de conclure que sa capacité de gain ou d’accomplir des travaux habituels ne pouvait être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles.

La recourante a notamment produit un rapport 10 février 2024 du Dr G______, qu’elle avait invité à se prononcer sur le rapport d'expertise. Le psychiatre traitant a indiqué que la situation psychiatrique de la patiente était similaire à ce qu’il avait décrit dans son attestation du 4 avril 2023, en particulier que l'échelle de la dépression MADRS restait très élevée. Il avait en outre observé une augmentation d'idées suicidaires sans intention de passage à l'acte, ce qui constituait une aggravation. Il avait donc augmenté l’antidépresseur. Les conclusions de l’expert étaient caricaturales et sans nuance, alors que les classifications diagnostics permettaient des nuances pour chaque trouble, précisant par exemple un degré de gravité impactant ou non la capacité de travail. À suivre l'expert qui estimait que la patiente ne souffrait d'aucun trouble et n’avait jamais souffert d'aucun trouble, il en résultait que l’intéressée avait été traitée durant des années sans aucun motif, à l’étranger et en Suisse. Les médicaments qu'elle prenait n’étaient pas anodins et ne devaient certainement pas être prescrits sans raison. Il était donc particulièrement difficile d'argumenter quoi que ce soit dans ce contexte. La quantité d'informations demandées par un expert que la patiente voyait pour la première fois était très grande et il était important, pour que la personne puisse parler de sa souffrance, de prendre le temps nécessaire à construire une relation. Il ressortait de nombreux passages de l’expertise que la patiente avait essayé d'éviter « d'ouvrir la boîte de pandore ». L’expert avait par exemple noté qu’elle avait perdu au cours des dix dernières années quasiment toute sa famille et déclarait qu’elle n’avait pas envie de se souvenir de tout ça. En outre, l'évaluation d'un trouble dépressif se faisait sur la base des symptômes et d'une durée supérieure à deux semaines. Lorsque l'expert avait évoqué les épisodes dépressifs passés de la patiente, il s’était écarté de la nomenclature internationale, ce qui expliquait au moins en partie leurs divergences de diagnostic. Ainsi, il avait noté, concernant les épisodes que l’intéressée qualifiait de dépressifs, que ceux-ci n’avaient pas entraîné d'incapacité et qu’il ne les retenait pas comme des épisodes dépressifs car la nature, l'intensité et la durée des réactions émotionnelles n’étaient pas sans rapport avec les circonstances. Or, la nomenclature ne prévoyait pas de se demander si les circonstances dramatiques de vies pouvaient suffire ou non à expliquer les symptômes. À de multiples reprises, l'expert avait précisé que la patiente n'avait pas souffert de traumatisme et n'évoquait pas de symptômes à ce sujet. Pourtant il avait écrit que lorsqu'elle repensait à son passé, elle présentait des chaleurs au thorax qui montaient jusqu'à la tête et des palpitations.

Il considérait donc que l'expert avait sous-estimé, lors de son unique entretien, l'importance de la souffrance de la patiente.

Elle a également produit un courriel de la Dre C______ du 9 février 2024, laquelle a indiqué ne pas avoir relevé, à la lecture de la partie somatique de l'expertise, d'incohérence particulière, que ce soit dans l'anamnèse ou l'examen clinique. Elle n’avait pas d'arguments supplémentaires qui pourraient justifier une limitation supérieure à 30% de la capacité de travail. En théorie, effectivement, dans une activité adaptée, la patiente pourrait travailler au moins partiellement. Elle ne s’expliquait en revanche pas pourquoi une reconversion n’était pas proposée.

b. Dans sa réponse du 19 mars, l’intimé a conclu au rejet du recours.

L’expertise du BEM devait se voir une pleine valeur probante. La médecin traitant avait d’ailleurs confirmé la capacité de travail retenue par l’expert rhumatologue. Au niveau psychiatrique, l’expert avait tenu compte de tous les éléments figurant au dossier et expliqué les raisons pour lesquelles il s’éloignait des conclusions du psychiatre traitant. Il n’avait retenu aucune comorbidité ayant une influence sur la capacité de travail. S’agissant du traitement, l’intimé a relevé l’absence d’hospitalisation psychiatrique avec un suivi psychiatrique mensuel, plaidant ainsi indirectement contre un trouble incapacitant, contre une décompensation du trouble de la personnalité et contre des limitations fonctionnelles significatives. L’analyse de la vie quotidienne indiquait en outre qu’il n’existait pas de limitation uniforme dans toutes les activités de la vie quotidienne et montrait que l’intéressée disposait de ressources personnelles préservées. La motivation de la recourante consistait essentiellement à souligner la divergence d’opinions entre les experts et les médecins traitants quant à sa capacité de travail, ce qui ne suffisait pas à remettre en cause les conclusions de l’expertise.

L’intimé a joint un avis du 1er mars 2024 de la docteure L______, médecin du SMR, maintenant les conclusions du SMR du 28 septembre 2023. Elle a souligné qu'une analyse des indicateurs avait été réalisée par les experts, notamment par le psychiatre. Ce dernier avait tenu compte des limitations fonctionnelles dans toutes les domaines comparables de la vie. La recourante, qui avait une journée type bien remplie, disposait de ressources personnelles et sociales préservées, avec une grande capacité de résilience. Elle était bien entourée par sa famille et par ses amis, et rapportait une très bonne entente conjugale, de même qu'avec ses deux enfants. Elle avait évoqué, lors de l'examen, un épisode de dépression avec des idées suicidaires en 1999, alors qu’elle était en Suède, précisant ne pas avoir été en incapacité de travail ni hospitalisée, mais avoir eu un traitement ambulatoire. Elle avait aussi mentionné d'autres épisodes dépressifs en lien avec les décès successifs des membres de sa famille, dont son frère, son oncle, son père, sa mère et son beau-frère, lesquels n’avaient pas non plus engendré d’incapacité de travail, ni d'hospitalisation, mais seulement un suivi ambulatoire. Au status, l'expert n’avait pas constaté la présence de troubles cognitifs ni psychiques. Au niveau somatique, la médecin traitant avait signalé ne pas avoir d'arguments supplémentaires pouvant justifier une limitation supérieure à 30% de la capacité de travail.

c. Par écriture du 19 avril 2024, la recourante a intégralement persisté dans ses conclusions. Elle a reproché à l’intimé et au SMR de ne rien dire quant à l’activité qui pourrait réellement être exercée en tenant compte de ses limitations physiques qui étaient incompatibles avec sa précédente activité de serveuse. Eu égard à son âge et à ses atteintes somatiques avérées, une capacité de travail de 70% ne saurait être retenue dans de nombreuses activités. En outre, l’intimé n’avait pas formulé d’observations concrètes sur les contradictions manifestes entre les positions exprimées par l’expert psychiatre et son psychiatre traitant, alors qu’elle avait relevé plusieurs points concrets mis en exergue par le Dr G______. Enfin, les raisons pour lesquelles l’expert s’était éloigné des diagnostics du psychiatre traitant étaient insuffisamment étayées pour emporter conviction. Suivre la position de l’expert psychiatre au terme d’un bref et unique entretien impliquait que les médecins consultés avaient établi de faux diagnostics et lui avaient prescrit une médication dont elle n’avait aucun besoin. Ceci remettait totalement en cause l’expertise sur le plan psychiatrique.

d. Dans sa duplique du 15 mai 2024, l’intimé a également maintenu ses conclusions, relevant qu’il n’avait pas à démontrer l’existence d’offres de travail concrètes et disponibles correspondant aux limitations fonctionnelles de l’intéressée. Cette dernière disposait d’une capacité de travail de 70% depuis le
4 octobre 2022 dans toute activité, dont la sienne, raison pour laquelle des mesures d’ordre professionnel n’étaient pas indiquées.

e. Copie de cette écriture a été transmise à la recourante le 29 mai 2024.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du
6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

2.              

2.1 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-invalidité, à moins que la loi n’y déroge expressément.

2.2 Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du
19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du
3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961
(RAI – RS 831.201 ; RO 2021 706).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable est celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence).

En l’occurrence, dans sa décision du 16 janvier 2024, l’intimé a accordé à la recourante le droit à une rente d’invalidité entière pour la période limitée du
1er décembre 2021 au 31 janvier 2023, date à laquelle il a supprimé ladite prestation, au motif que le degré d’invalidité était insuffisant. Le litige porte sur la suppression de la rente au 1er février 2023, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.

3.             En l’espèce, le litige porte sur le bien-fondé de la décision litigieuse, par laquelle l’intimé a supprimé à partir du 1er février 2023 la rente d’invalidité entière accordée à la recourante avec effet rétroactif au 1er décembre 2021.

4.             Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 148 V 321 consid. 7.3.1 ; 145 V 209 consid. 5.3 et les références).

4.1 L’art. 17 al. 1 LPGA dispose que la rente d'invalidité est, d'office ou sur demande, révisée pour l'avenir, à savoir augmentée, réduite ou supprimée, lorsque le taux d'invalidité de l'assuré subit une modification d'au moins 5 points de pourcentage (let. a) ou atteint 100% (let. b).

4.2 Tout changement important des circonstances, propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon
l’art. 17 LPGA (ATF 149 V 91 consid. 7.5 et les références). La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important. Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à l'accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 147 V 167 consid. 4.1 et les références).

Une amélioration de la capacité de gain ou de la capacité d'accomplir les travaux habituels de l'assuré n'est déterminante pour la suppression de tout ou partie du droit aux prestations qu'à partir du moment où l'on peut s'attendre à ce que l'amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va de même lorsqu'un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu'une complication prochaine soit à craindre (art. 88a al. 1 RAI). Le fardeau de la preuve quant à cette amélioration de la capacité de travail incombe à l’administration (arrêt du Tribunal fédéral 8C_510/2020 du
15 avril 2021 consid. 2.2 et les références).

5.             Aux termes de l’art. 8 al. 1 LPGA, est réputée invalidité l’incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée.

Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable
(al. 2).

L’art. 16 LPGA dispose que pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré.

Conformément à l’art. 28 LAI, l’assuré a droit à une rente si sa capacité de gain ou sa capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles, s’il a présenté une incapacité de travail d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable et si au terme de cette année, il est invalide à 40% au moins.

5.1 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA.

La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanant d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1; 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté ; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c ; 102 V 165 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I.786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

Dans l'éventualité où des troubles psychiques ayant valeur de maladie sont admis, il y a alors lieu d'évaluer le caractère exigible de la reprise d'une activité lucrative par l'assuré, au besoin moyennant un traitement thérapeutique. À cet effet, il faut examiner quelle est l'activité que l'on peut raisonnablement exiger de lui. Pour admettre l'existence d'une incapacité de gain causée par une atteinte à la santé mentale, il n'est donc pas décisif que l'assuré exerce une activité lucrative insuffisante ; il faut bien plutôt se demander s'il y a lieu d'admettre que la mise à profit de sa capacité de travail ne peut, pratiquement, plus être raisonnablement exigée de lui, ou qu'elle serait même insupportable pour la société
(ATF 127 V 294 consid. 4c ; 102 V 165 ; VSI 2001 p. 224 consid. 2b et les références).

Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources)
(ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence).

5.1.1 Il y a lieu de se fonder sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

Ces indicateurs sont classés comme suit :

I. Catégorie « degré de gravité fonctionnelle »

Les indicateurs relevant de cette catégorie représentent l’instrument de base de l’analyse. Les déductions qui en sont tirées devront, dans un second temps, résister à un examen de la cohérence (ATF 141 V 281 consid. 4.3).

A. Axe « atteinte à la santé »

1. Expression des éléments pertinents pour le diagnostic et des symptômes

Les constatations relatives aux manifestations concrètes de l’atteinte à la santé diagnostiquée permettent de distinguer les limitations fonctionnelles causées par cette atteinte de celles dues à des facteurs non assurés. Le point de départ est le degré de gravité minimal inhérent au diagnostic. Il doit être rendu vraisemblable compte tenu de l’étiologie et de la pathogenèse de la pathologie déterminante pour le diagnostic. Par exemple, sur le plan étiologique, la caractéristique du syndrome somatoforme douloureux persistant est, selon la CIM-10 F45.5, qu’il survient dans un contexte de conflits émotionnels ou de problèmes psycho-sociaux. En revanche, la notion de bénéfice primaire de la maladie ne doit plus être utilisée (consid. 4.3.1.1).

2. Succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à ces derniers

Ce critère est un indicateur important pour apprécier le degré de gravité. L’échec définitif d’un traitement indiqué, réalisé lege artis sur un assuré qui coopère de manière optimale, permet de conclure à un pronostic négatif. Si le traitement ne correspond pas ou plus aux connaissances médicales actuelles ou paraît inapproprié dans le cas d’espèce, on ne peut rien en déduire s’agissant du degré de gravité de la pathologie. Les troubles psychiques sont invalidants lorsqu'ils sont graves et ne peuvent pas ou plus être traités médicalement. Des déductions sur le degré de gravité d’une atteinte à la santé peuvent être tirées non seulement du traitement médical mais aussi de la réadaptation. Si des mesures de réadaptation entrent en considération après une évaluation médicale, l’attitude de l’assuré est déterminante pour juger du caractère invalidant ou non de l’atteinte à la santé. Le refus de l'assuré d'y participer est un indice sérieux d'une atteinte non invalidante. À l’inverse, une réadaptation qui se conclut par un échec en dépit d’une coopération optimale de la personne assurée peut être significative dans le cadre d’un examen global tenant compte des circonstances du cas particulier
(consid. 4.3.1.2).

3. Comorbidités

La comorbidité psychique ne joue plus un rôle prépondérant de manière générale, mais ne doit être prise en considération qu’en fonction de son importance concrète dans le cas d’espèce, par exemple pour juger si elle prive l’assuré de ressources. Il est nécessaire de procéder à une approche globale de l’influence du trouble somatoforme douloureux avec l’ensemble des pathologies concomitantes. Un trouble qui, selon la jurisprudence, ne peut pas être invalidant en tant que tel (consid. 4.3.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_98/2010 du 28 avril 2010
consid. 2.2.2, in : RSAS 2011 IV n° 17, p. 44) n’est pas une comorbidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1040/2010 du 6 juin 2011 consid. 3.4.2.1, in : RSAS 2012 IV n° 1, p. 1), mais doit à la rigueur être pris en considération dans le cadre du diagnostic de la personnalité (ATF 141 V 281 consid. 4.3.2). Ainsi, un trouble dépressif réactionnel au trouble somatoforme ne perd pas toute signification en tant que facteur d’affaiblissement potentiel des ressources, mais doit être pris en considération dans l’approche globale (ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.3).

B. Axe « personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles)

Il s’agit d’accorder une importance accrue au complexe de personnalité de l’assuré (développement et structure de la personnalité, fonctions psychiques fondamentales). Le concept de ce qu’on appelle les « fonctions complexes du
Moi » (conscience de soi et de l’autre, appréhension de la réalité et formation du jugement, contrôle des affects et des impulsions, intentionnalité et motivation) entre aussi en considération. Comme les diagnostics relevant des troubles de la personnalité sont, plus que d’autres indicateurs, dépendants du médecin examinateur, les exigences de motivation sont particulièrement élevées
(consid. 4.3.2).

C. Axe « contexte social »

Si des difficultés sociales ont directement des conséquences fonctionnelles négatives, elles continuent à ne pas être prises en considération. En revanche, le contexte de vie de l’assuré peut lui procurer des ressources mobilisables, par exemple par le biais de son réseau social. Il faut toujours s’assurer qu’une incapacité de travail pour des raisons de santé ne se confond pas avec le chômage non assuré ou avec d’autres difficultés de vie (consid. 4.3.3).

Des ressources préservées ne sauraient être inférées de relations maintenues avec certains membres de la famille dont la personne assurée est dépendante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_55/2020 du 22 octobre 2020 consid. 5.2).

II. Catégorie « cohérence »

Cette seconde catégorie comprend les indicateurs liés au comportement de l’assuré (consid. 4.4).

A. Limitation uniforme du niveau des activités dans tous les domaines comparables de la vie

Il s’agit ici de se demander si l’atteinte à la santé limite l’assuré de manière semblable dans son activité professionnelle ou dans l’exécution de ses travaux habituels et dans les autres activités (par exemple, les loisirs). Le critère du retrait social utilisé jusqu’ici doit désormais être interprété de telle sorte qu’il se réfère non seulement aux limitations mais également aux ressources de l’assuré et à sa capacité à les mobiliser. Dans la mesure du possible, il convient de comparer le niveau d’activité sociale de l’assuré avant et après la survenance de l’atteinte à la santé (consid. 4.4.1).

B. Poids de la souffrance révélé par l’anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation

La prise en compte d’options thérapeutiques, autrement dit la mesure dans laquelle les traitements sont mis à profit ou alors négligés, permet d’évaluer le poids effectif des souffrances. Tel n’est toutefois pas le cas lorsque le comportement est influencé par la procédure assécurologique en cours. Il ne faut pas conclure à l’absence de lourdes souffrances lorsque le refus ou la mauvaise acceptation du traitement recommandé est la conséquence d’une incapacité (inévitable) de l’assuré à reconnaître sa maladie (anosognosie). Les mêmes principes s’appliquent pour les mesures de réadaptation. Un comportement incohérent de l'assuré est là aussi un indice que la limitation fonctionnelle est due à d’autres raisons que l'atteinte à la santé assurée (consid. 4.4.2).

Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l’évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2).

5.1.2 Le Tribunal fédéral a récemment rappelé qu’en principe, seul un trouble psychique grave peut avoir un caractère invalidant. Un trouble dépressif de degré léger à moyen, sans interférence notable avec des comorbidités psychiatriques, ne peut généralement pas être défini comme une maladie mentale grave. S'il existe en outre un potentiel thérapeutique significatif, le caractère durable de l'atteinte à la santé est notamment remis en question. Dans ce cas, il doit exister des motifs importants pour que l'on puisse néanmoins conclure à une maladie invalidante. Si, dans une telle constellation, les spécialistes en psychiatrie attestent sans explication concluante (éventuellement ensuite d'une demande) une diminution considérable de la capacité de travail malgré l'absence de trouble psychique grave, l'assurance ou le tribunal sont fondés à nier la portée juridique de l'évaluation médico-psychiatrique de l'impact (ATF 148 V 49 consid. 6.2.2 et les références).

5.1.3 Le juge vérifie librement si l’expert médical a exclusivement tenu compte des déficits fonctionnels résultant de l’atteinte à la santé et si son évaluation de l’exigibilité repose sur une base objective (consid. 5.2.2 ; ATF 137 V 64
consid. 1.2 in fine).

5.2 En cas d’absence de désignation des activités compatibles avec les limitations du recourant, le Tribunal fédéral a jugé qu'il eût été certainement judicieux que l'office AI donnât au recourant, à titre d'information, des exemples d'activités adaptées qu'il peut encore exercer, mais qu’il convient néanmoins d'admettre que le marché du travail offre un éventail suffisamment large d'activités légères, dont on doit convenir qu'un nombre significatif sont adaptées aux limitations du recourant et accessibles sans aucune formation particulière (arrêt du Tribunal fédéral 9C_279/2008 du 16 décembre 2008 consid. 4).

6.             Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

6.1 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3).

6.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références ; 125 V 351 consid. 3b/bb).

Le but des expertises multidisciplinaires est de recenser toutes les atteintes à la santé pertinentes et d'intégrer dans un résultat global les restrictions de la capacité de travail qui en découlent. L'évaluation globale et définitive de l'état de santé et de la capacité de travail revêt donc une grande importance lorsqu'elle se fonde sur une discussion consensuelle entre les médecins spécialistes participant à l'expertise. La question de savoir si, et dans quelle mesure, les différents taux liés aux limitations résultant de plusieurs atteintes à la santé s'additionnent, relève d’une appréciation spécifiquement médicale, dont le juge ne s'écarte pas, en principe (ATF 137 V 210 consid. 3.4.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_162/2023 du 9 octobre 2023 consid. 2.3 et les références).

Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR
(ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc ; arrêt du Tribunal fédéral I 244/05 du 3 mai 2006 consid. 2.1). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (ATF 125 V 351 consid. 3a ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C/973/2011 du 4 mai 2012
consid. 3.2.1).

On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

7.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ;
125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a ; 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29
al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
(RS 101 - Cst. ; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; 122 V 157 consid. 1d).

Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d’après l’état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue. Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent normalement faire l’objet d’une nouvelle décision administrative (ATF 121 V 366 consid. 1b et les références). Les faits survenus postérieurement doivent cependant être pris en considération dans la mesure où ils sont étroitement liés à l’objet du litige et de nature à influencer l’appréciation au moment où la décision attaquée a été rendue
(ATF 99 V 102 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral I 321/04 du 1
8 juillet 2005 consid. 5).

8.             En l’espèce, l’intimé a retenu, sur la base des conclusions du SMR, elles-mêmes fondées sur celles de la SUVA et du rapport d’expertise du BEM, que la recourante avait été en incapacité totale d’exercer son activité habituelle dès le
13 décembre 2020, début du délai d’attente d’une année, et qu’elle disposait, à compter du 4 octobre 2022, d’une capacité de travail de 70% dans toute activité.

La recourante conteste cette appréciation et se réfère aux rapports de ses médecins traitants. À cet égard, il sied de relever que l’intéressée a produit, dans le cadre de la présente procédure, des documents médicaux postérieurs au prononcé de la décision litigieuse, lesquels se rapportent toutefois aux atteintes à la santé préexistant à ladite décision, de sorte qu’ils doivent être pris en considération.

8.1 Au niveau somatique, la recourante ne fait valoir aucun grief concret à l’encontre de l’appréciation du Dr K______. Elle reproche uniquement à l’intimé de ne pas avoir « investigué » sur les activités qu’elle pourrait théoriquement exercer compte tenu de ses limitations fonctionnelles.

La chambre de céans observe que les diagnostics et restrictions retenus par l’expert correspondent aux éléments contenus dans les rapports de la Dre C______. Par ailleurs, la médecin traitant a indiqué ne pas avoir d’arguments supplémentaires susceptibles de justifier une incapacité de travail supérieure au taux de 30%.

Dans ces conditions, le volet somatique de l’expertise peut se voir attribuer une pleine valeur probante.

8.2 S’agissant du volet psychiatrique de l’expertise, la recourante soulève d’importantes divergences dans les appréciations des Drs M______ et G______, en particulier concernant les diagnostics, les restrictions et la capacité de travail.

La chambre de céans constate tout d’abord que l’expert psychiatre a procédé à une anamnèse approfondie, portant sur les aspects personnels, familiaux, scolaires, professionnels, ainsi que sociaux, relationnels et sentimentaux. L’expertisée a été interrogée sur son dernier poste de travail, sa perception de son avenir professionnel et de ses limitations fonctionnelles, sur le déroulement détaillé d’une journée type, avant et après son incapacité de travail. L’expert a effectué une anamnèse psychiatrique systématique, rapportant précisément les déclarations et plaintes de l’expertisée, qu’il a également questionnée sur ses antécédents psychiatriques et sur le traitement suivi. Il a ensuite livré le résultat de ses constatations objectives, et motivé l’absence de tout diagnostic psychiatrique, en se référant aux critères diagnostics de la CIM-10. Il a dûment expliqué les raisons pour lesquelles il ne pouvait pas retenir de trouble dépressif récurrent, de dysthymie, de trouble de l’adaptation, de trouble de la personnalité, de trouble anxieux caractérisé, de trouble somatoforme douloureux persistant ou encore de douleurs chroniques. Il a discuté les rapports du Dr G______ des
9 décembre 2020, 25 juin 2021, 25 mai 2022 et 4 avril 2023, et y a relevé des imprécisions et des incohérences. À titre d’exemples, il a souligné que le psychiatre de la recourante avait évoqué un trouble dépressif récurrent, sans toutefois mentionner l’intensité de la dépression, et que la chronicité retenue par ce médecin concernant l’épisode dépressif était peu cohérente avec le dosage de Cipralex qui n’avait que très peu augmenté, alors que l’expertisée ne faisait pas état de mauvaise tolérance dudit traitement.

La chambre de céans relèvera en outre une certaine inconséquence dans la position du Dr G______, lequel reproche à l’expert de s’être éloigné de la nomenclature internationale, alors que lui-même ne pose pas de diagnostic en application d’un système de classification reconnu. De plus, si le psychiatre traitant a retenu de nombreux symptômes de la lignée dépressive, notamment une anhédonie, une aboulie partielle, une baisse de l’élan vital, une diminution de l’appétit, des troubles de la concentration et de la mémoire, force est de constater que ses indications ne sont pas du tout étayées, contrairement à celles de l’expert. Ce dernier a noté que l’intéressée ne rapportait pas d’abaissement continu de l’humeur, qui était seulement variable par période. Elle évoquait un intérêt et un plaisir qui étaient conservés, notamment pour les moments passés en famille, avec des amis ou lorsqu’elle était en Bosnie. De nombreuses choses l’intéressaient, notamment la musique et regarder la télévision, étant précisé que la famille avait plus de 300 chaînes, dont des chaînes bosniaques, serbes ou croates. Ils avaient parfois des invités et étaient aussi souvent conviés. Ils pouvaient alors discuter longtemps avec leurs invités et se coucher vers minuit, l’intéressée précisant qu’elle aimait bien être entourée. Elle avait déclaré que son appétit était variable et qu’elle avait pris cinq kilos en deux ans en raison de la ménopause. Au status, l’expert a notamment constaté que le discours était clair, bien construit, fluide, sans manque de mot. Le contenu de la pensée était logique et adapté, l’attention et la concentration étaient normales et stables durant tout l’entretien. Il n’avait observé aucun trouble de la mémoire. L'adaptation aux règles et aux routines était constatée, les activités spontanées demeuraient assez diversifiées et n’étaient pas non plus limitées par un trouble psychique, les capacités de persévérance étaient normales comme en attestait la trajectoire de l'expertisée, notamment au décours des différents deuils qu'elle avait pu traverser. La capacité d'affirmation de soi était normale et avait été constatée au jour de l'examen. Le rapport avec son mari, la famille et les intimes était décrit de tout temps comme étant de bonne qualité. L’intéressée évoquait avec plaisir les souvenirs de sa collaboration avec ses collègues de l'hôtel, même ceux qui n'étaient pas de sa famille, mais qu'elle considérait comme tel. La capacité à prendre soin de soi était normale et avait été constatée au jour de l'examen.

Les conclusions du Dr M______, fondées sur un examen complet et approfondi, et une analyse minutieuse des critères pertinents de chaque diagnostic envisagé, en particulier ceux évoqués par le psychiatre traitant, apparaissent ainsi dûment motivées et convaincantes.

Le Dr G______ ne fait pas état d’éléments objectivement vérifiables, de nature clinique ou diagnostique, qui auraient été ignorés dans le cadre de l’expertise, suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de celle-ci ou établir leur caractère incomplet.

Les critiques du psychiatre traitant à l’encontre du rapport d’expertise apparaissent en réalité peu pertinentes. En particulier, que celui-ci considère que l’état de santé de sa patiente requiert un suivi psychothérapeutique et la prise de médicaments ne signifie pas pour autant que la recourante souffre d’une grave atteinte à la santé qui la rendrait inapte à exercer une activité professionnelle. En outre, il est relevé que l’intéressée a indiqué à l’expert avoir été suivie par une psychologue de 2019 à 2020, à raison d’une séance d’une heure par mois. Suite au départ de cette professionnelle, le suivi a été repris par le psychiatre référent, lequel ne semble pas avoir jugé nécessaire d’augmenter la fréquence des séances, puisqu’il a indiqué, dans son rapport du 25 mai 2022, que les deux dernières consultations remontaient aux 12 avril et 24 mai 2022. Le traitement médicamenteux consiste, depuis 2020, en la prise de Cipralex en goutte, sans que le Dr G______ ait signalé d’augmentation du dosage. Ces éléments ne parlent pas en faveur d’un trouble psychique d’une certaine gravité. Il sied encore de souligner que le psychiatre traitant n’a pas évalué la capacité de travail de sa patiente en application des principes développés par la jurisprudence.

Partant, contrairement à ce que soutient la recourante, les conclusions du
Dr M______ apparaissent parfaitement cohérentes. Une pleine valeur probante peut donc également être reconnue aux conclusions de l’expertise psychiatrique.

8.3 Eu égard aux considérations qui précèdent, l’intimé était fondé à retenir, conformément aux conclusions de la SUVA, que la recourante avait présenté une incapacité de travail totale dans toute activité du 13 décembre 2020, date de l’accident, au 4 octobre 2022, date de l’examen médical ordonné par
l’assureur-accidents, et qu’elle disposait depuis lors d’une capacité de travail de 70% dans toute activité. Il pouvait donc conclure à l’existence d’une amélioration de l’état de santé à compter du 1er février 2023.

8.4 La recourante reproche à l’intimé de ne pas avoir « investigué » sur les activités qu’elle pourrait théoriquement exercer compte tenu de ses limitations fonctionnelles.

Conformément à la jurisprudence précitée, l'intimé n’était pas tenu d’examiner quelle activité concrète était adaptée aux restrictions de la recourante. De surcroît, il est rappelé que l’expert a retenu une capacité de travail de 70% dans toute activité, y compris dans le dernier emploi exercé par l’intéressée. La diminution du taux de 30% est motivée par les limitations fonctionnelles de la recourante, qui concernent essentiellement les positions statiques prolongées, le périmètre de marche, le port de charge et les travaux impliquant une force de préhension de la main gauche. Dès lors, il n’est pas contestable que la recourante est apte à exploiter économiquement sa capacité de gain résiduelle sur le marché du travail.

8.5 Compte tenu de l’existence d’une capacité de travail de 70% dans toute activité, y compris dans l’activité habituelle, la recourante ne peut effectivement plus prétendre à l’octroi d’une rente d’invalidité à compter du 1er février 2023.

9.             Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

10.         Il convient de renoncer à la perception d'un émolument, la recourante étant au bénéfice de l'assistance juridique (art. 69 al. 1bis LAI et 13 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.      Le rejette.

3.      Renonce à percevoir un émolument.

4.      Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Joanna JODRY

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le