Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/612/2024 du 13.08.2024 ( CHOMAG ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/2006/2023 ATAS/612/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 13 août 2024 Chambre 15 |
En la cause
A______ | recourante |
contre
OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI
| intimé |
A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née le ______ 1998, s’est inscrite à l’office régional de placement (ci-après : ORP) le 27 avril 2023.
b. L'assurée a été convoquée par courriel du 28 avril 2023 à un premier entretien qui devait se dérouler le 3 mai 2023 à 14h00.
c. Elle ne s’est pas présentée à l’entretien et ne s’est pas excusée.
d. Par courriel du 5 mai 2023, l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) a donné à l’assurée la possibilité de faire part de ses observations quant à son absence audit entretien.
e. Par écrit du 8 mai 2023, l’assurée a indiqué s’être inscrite à l’OCE le 28 avril 2023 et avoir ensuite reçu un courriel l’invitant à son premier entretien à l’ORP le 12 mai 2023. La personne de l’accueil lui avait indiqué que cela prendrait une semaine pour qu’on lui donne le premier rendez-vous. Il devait y avoir un malentendu.
f. Le 8 mai 2023, le service juridique de l’OCE a prononcé une décision de suspension du droit à l’indemnité de chômage de l’assurée d’une durée de douze jours pour avoir manqué un entretien à l’ORP. La sanction tenait compte de la gravité de la faute et du fait qu’il s’agissait de la troisième sanction prononcée contre l’assurée.
g. Par écrit du 10 mai 2023, l'assurée a déclaré former opposition contre la décision précitée, au motif qu’elle n’avait pas reçu, lors de son inscription le 28 avril 2023 à l’ORP, de lettre pour sa première convocation le 3 mai 2023. En revanche, elle avait reçu un email, le 5 mai 2023, pour son premier entretien à l’ORP le 12 mai 2023 à 9h00.
h. Par décision sur opposition du 30 mai 2023, l'OCE a rejeté l'opposition de l'assurée et a confirmé la décision de sanction du 8 mai 2023.
B. a. Par acte du 12 juin 2023, l’assurée a recouru contre cette décision en insistant sur le fait qu’elle n’avait jamais reçu la convocation à l’entretien du 3 mai 2023 et qu’il était indiqué dans la convocation à l’entretien du 12 mai 2023 qu’il s’agissait de la convocation à son premier entretien.
b. Par réponse du 11 juillet 2023, l’OCE a persisté dans sa décision et a produit des pièces du dossier.
c. Sur demande de la chambre de céans, l’OCE a produit les décisions de sanctions préalables. Il s’agissait d’une décision du 30 novembre 2021 par laquelle l’OCE avait suspendu le droit de l’assurée durant huit jours, au motif que cette dernière n’avait pas fait de recherches d’emploi avant son inscription (période de septembre et d’octobre 2021) et d’une décision de sanction de huit jours datée du 9 février 2022 pour absence non excusée à un entretien.
d. Les parties ont été convoquées à une audience, en date du 18 juin 2024. La recourante ne s’est pas présentée. Contactée par la chambre de céans, elle a expliqué avoir reçu la convocation, mais avoir oublié de se rendre à l’audience. Elle n’était pas disponible, car elle était occupée en tant qu’interprète. L’OCE a persisté dans ses conclusions et a notamment indiqué qu’en sus du courriel que le conseiller de l’ORP adresse aux assurés pour les convoquer, un sms était envoyé automatiquement aux assurés pour les prévenir de l’envoi d’un courriel.
e. L’OCE a fait parvenir à la chambre de céans, dans le délai accordé à cet effet lors de l’audience du 18 juin 2024, la preuve de l’envoi du sms à l’assurée afin de la prévenir qu’elle avait reçu un courriel de sa conseillère.
f. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Interjeté dans les formes et délai requis, le recours est recevable.
2. Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de l'intimé de suspendre pour douze jours le droit à l'indemnité de la recourante, au motif qu’elle ne s'est pas présentée à l'entretien du 3 mai 2023.
3.
3.1 L'assuré qui fait valoir des prestations d'assurance doit, avec l'assistance de l'office du travail compétent, entreprendre tout ce qu'on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l'abréger. Il lui incombe, en particulier, de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu'il exerçait précédemment. Il doit pouvoir apporter la preuve des efforts qu'il a fournis (art. 17 al. 1 LACI). En vue de son placement, l’assuré est tenu de s’inscrire personnellement aussitôt que possible, mais au plus tard le premier jour pour lequel il prétend à l’indemnité de chômage; il doit ensuite se conformer aux prescriptions de contrôle édictées par le Conseil fédéral (art. 17 al. 2 LACI).
Selon l'art. 17 al. 3 let. b LACI, l'assuré a l'obligation, lorsque l'autorité compétente le lui enjoint, de participer aux entretiens de conseil, aux réunions d'informations et aux consultations spécialisées.
L'art. 20a de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (ci-après : OACI), prévoit que l’office compétent mène un premier entretien de conseil et de contrôle avec l’assuré dans les 15 jours qui suivent la date d’inscription (art. 19 al. 3).
Selon l'art. 21 al. 2 et 3 OACI, l'office compétent consigne les jours où un entretien de conseil et de contrôle a eu lieu et dresse un procès-verbal de l’entretien. L’assuré doit garantir qu’il peut être atteint par l’office compétent dans le délai d’un jour ouvré.
Le courriel de convocation à un entretien de conseil précise que toute absence injustifiée entraîne une suspension de l'éventuel droit de l'assuré aux indemnités de chômage et qu'en cas d'empêchement, il faut avertir le conseiller en personnel au moins vingt-quatre heures à l'avance.
4.
4.1 En l’espèce, il n’est pas contesté que la recourante ne s’est pas présentée au premier entretien conseil pour lequel elle avait été convoquée par courriel du 28 avril 2023.
4.2 La recourante allègue ne pas avoir reçu le courriel en vue de ce premier entretien et avoir cru, en recevant un courriel subséquent le 3 mai 2023, que son premier entretien aurait lieu le 12 mai 2023.
4.3 La chambre de céans constate cependant que tous les courriels de la conseillère en personnel de l’ORP ont été adressés à la recourante à la même adresse de courriel, à savoir l’adresse que cette dernière avait communiquée lors de son inscription. La recourante admet avoir reçu un courriel le 3 mai 2023 en vue d’une convocation à un entretien et n’a pas soutenu avoir eu un problème pour recevoir ces courriels. Au contraire, l’on constate qu’elle a répondu au courriel envoyé le 5 mai 2023 en vue de faire valoir son droit d’être entendu et les courriels suivants. Rien ne permet dès lors de douter qu’elle a reçu le courriel du 28 avril 2023 auquel elle devait s’attendre, dans la mesure où s’étant inscrite à l’ORP, la recourante était informée qu’elle serait convoquée par courriel à un premier entretien. Par ailleurs, la recourante a reçu en même temps que le courriel contenant la convocation un sms pour l’en avertir. Dans ces circonstances, force est d’admettre que la recourante a été dûment convoquée à l’entretien du 3 mai 2023 et ne s’y est pas présentée sans excuse.
La décision de sanction s’imposait donc à l’intimée.
5. Reste à vérifier si la sanction prononcée est conforme et proportionnée à la faute commise.
5.1 Selon l'art. 30 al. 3 3ème phrase LACI, la durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute de l'assuré et ne peut excéder, par motif de suspension, 60 jours. Selon l'art. 45 al. 2 OACI, la durée de la suspension est de un à quinze jours en cas de faute légère, de seize à trente jours en cas de faute de gravité moyenne et de trente et un à soixante jours en cas de faute grave.
La durée de la suspension du droit à l'indemnité de chômage est fixée compte tenu non seulement de la faute mais également du principe de proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 254/06 du 26 novembre 2007 consid. 5.3).
5.2 En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème indicatif à l'intention des organes d'exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour ces organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances - tant objectives que subjectives - du cas concret, notamment des circonstances personnelles, en particulier celles qui ont trait au comportement de l'intéressé au regard de ses devoirs généraux d'assuré qui fait valoir son droit à des prestations (arrêt du Tribunal fédéral 8C_601/2012 du 26 février 2013 consid. 4.1). Elles ne lient ni les administrés, ni le juge, ni même l'administration qui pourront, le cas échéant, aller en dessous du minimum prévu par le barème indicatif (arrêt du Tribunal fédéral 8C_708/2019 consid. 4.1).
Selon la barème (Bulletin LACI IC/D79) établi par le SECO, lorsque l'assuré ne se présente pas à un entretien de conseil ou à une séance d'information sans motif valable, la sanction se situe entre cinq et huit jours s'il s'agit du premier manquement (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_777/2017 du 2 août 2018 consid. 6.2) et de neuf à quinze jours en cas de second manquement.
En effet, si l'assuré est suspendu de façon répétée dans son droit à l'indemnité, la durée de suspension est prolongée en conséquence. Les suspensions subies pendant les deux dernières années (période d'observation) sont prises en compte dans le calcul de la prolongation (art. 45 al. 5 OACI) (D63).
5.3 La quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 8C_194/2013 du 26 septembre 2013 consid. 5.2). Le juge ne s'écarte de l'appréciation de l'administration que s'il existe de solides raisons. Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d'appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 123 V 150 consid. 2).
6. En l’occurrence, l’assurée a été sanctionnée préalablement à deux reprises dont une fois pour absence à un entretien. La sanction de douze jours de suspension est donc conforme au barème précité. Elle apparaît clémente, dans la mesure où l’intimé pouvait prononcer une sanction supérieure à quinze jours pour tenir compte d’une précédente faute identique (absence à un entretien de conseil en 2022) et d’une première sanction pour un fait différent (absence de recherches d’emploi préalable).
La sanction prononcée ne prête ainsi pas le flanc à la critique.
Le recours ne peut dès lors qu’être rejeté.
Pour le surplus la procédure est gratuite.
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Dit que la procédure est gratuite.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Nathalie KOMAISKI |
| La présidente
Marine WYSSENBACH |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le