Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/532/2024 du 27.06.2024 ( AI ) , REJETE
En droit
RÉpublique et | 1.1canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/1872/2023 ATAS/532/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 27 juin 2024 Chambre 3 |
En la cause
A______ représenté par l’Association suisse des assurés (ASSUAS), soit pour elle Mme Hani GULED, mandataire
| recourant |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né en 1969, d’origine portugaise, est arrivé en Suisse en juin 2008. Ce père de deux enfants, séparé, a travaillé comme monteur d'échafaudages à plein temps.
b. Le 4 avril 2022, il a déposé une demande de prestations auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'OAI), en invoquant une incapacité de travail totale depuis le 4 juin 2021.
c. L'instruction du dossier a permis de recueillir un certain nombre de documents.
- Dans un rapport rédigé le 31 mai 2022 par le département des neurosciences cliniques, service de neurochirurgie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), le docteur B______ a retenu le diagnostic de myélopathie cervicale en 2021. Le médecin a fait état de bonnes suites post-opératoires, malgré des déficits moteurs qualifiés de légers aux membres supérieurs (parésie des membres supérieurs, trouble de la coordination des mains, trouble sensitif au niveau des membres supérieurs). Il est fait état d’une bonne évolution post-chirurgie, avec une diminution des douleurs et une amélioration des troubles sensitivomoteurs. Le médecin a préconisé d'éviter le port de charges lourdes, de tenir compte des troubles de la motricité fine des doigts et des troubles de la coordination des mains pour les gestes de la vie quotidienne. Il ne s’est en revanche pas prononcé sur la capacité de travail de l'assuré.
- Le 5 novembre 2022, la docteure C______, spécialiste en médecine interne et gériatrie, a fait état d'une atteinte cardiaque en juin 2021, ayant entraîné une totale incapacité de travail. Le médecin a toutefois précisé que, probablement depuis janvier 2022, le patient avait recouvré une pleine capacité à exercer une activité adaptée tenant compte des limitations fonctionnelles orthopédiques, neurochirurgicales et cardiovasculaires. Il a été expliqué que l’assuré souffrait d'un déconditionnement physique et cardiovasculaire avec des douleurs musculaires à l'effort et un port de charges limité à 5 kg, qu’il rencontrait aussi des limitations de la mobilité cervicale et des membres supérieurs, une force diminuée à 4/5, des contractures musculaires étagées aux niveaux des cervicales, des dorsales et des lombaires, ainsi que dans les membres inférieurs. Les diagnostics retenus étaient les suivants : myélopathie cervicale d'origine compressive en C4-C5, sténose canalaire, déconditionnement physique et cardiovasculaire, myalgies d'origine médicamenteuse et limitations fonctionnelles dégénératives des épaules et post-opératoires aux niveaux cervical et lombaire. Le médecin a estimé que si son patient était dans l’incapacité de reprendre son activité antérieure, il était en revanche apte à exercer un emploi adapté ne nécessitant aucun effort. Les limitations fonctionnelles suivantes devaient être respectées : éviter le port de charges supérieures à 5 kg, limitation de la marche à une heure à une vitesse adaptée, limitation de la conduite à vingt minutes, limitation de l'abduction des membres supérieurs à 50-55°, de la rotation des cervicales à 45-0-45, perte de dextérité tactile. Le médecin a évoqué une capacité de travail de 8 h./jour dans une activité adaptée, tout en indiquant que la limitation des mobilités articulaires cervicale et lombaire et les séquelles de la myélopathie pouvaient constituer des obstacles à une réadaptation.
- Dans un bref rapport du 5 mars 2023, le Service médical régional de l’AI (SMR) a conclu à une pleine capacité de travail depuis le 1er février 2022 au plus tard dans une activité légère sédentaire, s'exerçant principalement en position assise, permettant l'alternance des positions au gré de l'assuré, sans manipulation de charges de plus de 5 kg, sans position du rachis en porte-à-faux, à répartir harmonieusement sur cinq jours ouvrables. Ont été retenues comme atteintes à la santé des cervicalgies sur troubles dégénératifs, ainsi qu'un angor instable, traité par pontage coronarien sans complications.
d. Par décision du 3 mai 2023, l’OAI a nié à l’assuré le droit à toute prestation, que ce soit sous la forme d'une rente d'invalidité ou de mesures professionnelles.
L'OAI a considéré que depuis le 2 juin 2021, début du délai d'attente d'une année, la capacité de travail de l'assuré était effectivement considérablement restreinte dans l'activité habituelle, mais qu’en revanche, dans une activité adaptée respectant strictement les limitations fonctionnelles, l'assuré avait recouvré une capacité de travail médico-théorique raisonnablement exigible de 100%, sans baisse de rendement, depuis le 1er février 2022 au plus tard.
L’OAI a procédé au calcul du degré d'invalidité en comparant le revenu que l'assuré aurait réalisé sans atteinte à sa santé, soit CHF 67'967.-, à celui qu'il aurait pu obtenir malgré celle-ci, soit CHF 65'322.-, ce qui l'a conduit à un degré d'invalidité de 3.89% arrondi à 4%, insuffisant pour ouvrir droit à une mesure de reclassement professionnel.
Pour le surplus, l’OAI a constaté que même si un droit aux prestations avait pu être reconnu à l’assuré, il n’aurait pu s'ouvrir qu'à compter du 1er octobre 2022, sa demande ayant été déposée le 4 avril 2022.
B. a. Par écriture du 2 juin 2023, l'assuré a interjeté recours contre cette décision en concluant à ce que lui soit reconnue une totale incapacité de gain, à l'octroi d'une rente d'invalidité, ainsi qu'à celui de mesures professionnelles sous la forme, notamment, d'une réadaptation professionnelle, avec suite de frais et dépens.
Le recourant invoque le rapport de la Dre C______ et en tire la conclusion qu’il présente des atteintes à la santé importantes et que son état de santé l'empêche de reprendre son activité professionnelle.
b. Invité à se déterminer, l'intimé, dans sa réponse du 3 juillet 2023, a conclu au rejet du recours.
c. Par écriture du 8 août 2023, l'assuré a persisté dans ses conclusions.
Il rappelle qu'il a subi un double pontage coronarien en 2021, qu'il souffre de cervicobrachialgies gauches avec des paresthésies des mains, d'une diminution de la force du mouvement de la pince de la main gauche, de troubles de la coordination des mains, ainsi que d'une double discopathie C4-C5 et C5-C6 avec sténose canalaire sévère. Il note que le SMR a retenu plusieurs limitations fonctionnelles et en tire la conclusion qu'il devrait donc se voir reconnaître une invalidité lui ouvrant le droit à une rente, « dans la mesure où plusieurs des atteintes dont il souffre sont dégénératives, impliquant donc une évolution négative de son état de santé ».
Le recourant émet des doutes quant à sa capacité à exercer une activité, même adaptée. Il allègue qu'il n'est pas en mesure de s'orienter par ses propres moyens et demande à pouvoir bénéficier d'une orientation professionnelle.
A l’appui de sa position, le recourant produit, notamment :
- une lettre de sortie des HUG du 11 juin 2021 retenant les diagnostics d'angor instable sur maladie coronarienne ; une coronarographie pratiquée le 3 juin 2021 a mis en évidence une sténose critique d'allure thrombotique du tronc commun distal avec une sténose angiographiquement significative, qui a conduit à un double pontage aorto-coronarien sans complications ; il est fait mention d'une bonne évolution et de suites opératoires simples ;
- un examen électroneuromyographique (ENMG) pratiqué le 1er juillet 2021, concluant à un syndrome du tunnel carpien du côté droit en lésion radiculaire du côté gauche ; la symptomatologie est expliquée par un début d'atteinte du nerf médian dans le cadre d'un syndrome du tunnel carpien étroit ;
- un rapport d'échographie de l'épaule gauche pratiquée le 14 juillet 2021 concluant à une tendinopathie insertionnelle des tendons supra et infra épineux avec des signes d'une bursite sous acromiale et un conflit sous acromial direct ayant conduit à une infiltration ;
- un rapport d'imagerie par résonance magnétique (IRM) cervicale du 14 juillet 2021 concluant à un canal cervical étroit à partir de C3, avec des éléments dégénératifs en C4-C5 et une hernie discale médiane comprimant le cordon médullaire avec des signes de myélopathie et des éléments dégénératifs en C5-C6 conduisant à un rétrécissement du canal rachidien ainsi qu'à une discopathie dégénérative multi étagée principalement en C4-C5 ;
- un rapport de sortie des HUG du 16 novembre 2021 mettant en avant le diagnostic de double discopathie C4-C5 et C5-C6 avec sténose canalaire sévère et hypersignal T2 en regard de C4-C5 sur myélopathie compressive ; l'examen physique de sortie montrait une hypoesthésie et une paresthésie au membre supérieur gauche ;
- un rapport des HUG du 6 avril 2022 indiquant que, du point de vue de la colonne cervicale, le patient avait bien récupéré, avec toutefois des paresthésies au bout des doigts des deux côtés, une marche sûre et stable, l’absence de déficit moteur aux quatre membres, une rotation de l'épaule gauche douloureuse avec des douleurs au niveau du processus coracoïde ; l'évolution post-opératoire à trois mois était tout à fait favorable ; il était laissé au médecin traitant le soin d'évaluer la capacité de travail.
d. Par écriture du 5 septembre 2023, l'intimé a persisté dans ses conclusions en rejet du recours.
L'intimé constate que le SMR a tenu compte de l'ensemble des éléments médicaux pour fonder son appréciation de la capacité de travail, laquelle doit être considérée comme convaincante, d'autant plus que le médecin traitant retient lui aussi une capacité de travail entière dans une activité adaptée. Aucun élément médical objectif, voire aucun élément clinique ou diagnostique qui aurait été ignoré n'est apporté par le recourant, qui permettrait de douter de ces conclusions.
L’assuré peut prétendre exercer de nombreuses activités respectant les limitations fonctionnelles énoncées. En effet, un marché équilibré du travail offre un nombre significatif d'activités simples et légères accessibles sans aucune formation particulière.
e. Par écriture du 29 septembre 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions.
Il relève que la Dre C______ a réservé son pronostic quant à une réadaptation fonctionnelle, en raison des limitations articulaires cervicales des épaules et de la myélopathie.
Il reproche au SMR d'avoir écarté certaines limitations fonctionnelles énoncées par son médecin, à savoir les limitations touchant ses membres supérieurs (abduction limitée à 50 sur 55° et perte de la dextérité des mains).
Il en tire la conclusion que la synthèse des renseignements médicaux à laquelle s'est livré le SMR est lacunaire.
Enfin, il fait valoir qu'on ne saurait se fonder sur des possibilités de travail irréalistes. Selon lui, l'OAI et le SMR ont minimisé son état de santé et mal évalué sa situation.
f. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie "en droit" du présent arrêt.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Le délai de recours est de 30 jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).
Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.
2.
2.1 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.
2.2 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI ‑ RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.
En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).
En l’occurrence, le droit aux prestations s’ouvrirait en octobre 2022, de sorte que le nouveau droit s’applique.
3. Le litige porte sur le droit du recourant à des prestations de l’assurance-invalidité, en particulier à une mesure d’orientation professionnelle.
4.
4.1 Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).
4.2 A droit à une rente d’invalidité, l’assuré dont la capacité de gain ou la capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles, qui a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable et qui, au terme de cette année, est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins (art. 28 al. 1 LAI).
4.3 Selon l’art. 8 al. 1er LAI, les assurés invalides ou menacés d’une invalidité (art. 8 LPGA) ont droit à des mesures de réadaptation pour autant que ces mesures soient nécessaires et de nature à rétablir, maintenir ou améliorer leur capacité de gain ou leur capacité d’accomplir leurs travaux habituels (let. a) et que les conditions d’octroi des différentes mesures soient remplies (let. b). Le droit aux mesures de réadaptation n’est pas lié à l’exercice d’une activité lucrative préalable. L’art. 8 al. 3 let. b LAI dispose que les mesures de réadaptation comprennent les mesures d’ordre professionnel (orientation professionnelle, formation professionnelle initiale, reclassement, placement, aide en capital).
4.3.1 Selon l'art. 15 LAI, l'assuré auquel son invalidité rend difficile le choix d'une profession ou l'exercice de son activité antérieure a droit à l'orientation professionnelle. L’orientation professionnelle, qui inclut également les conseils en matière de carrière, a pour but de cerner la personnalité des assurés et de déterminer leurs capacités et leurs dispositions qui constitueront la base permettant de choisir une activité professionnelle appropriée ou une activité dans un autre domaine, voire un placement adéquat. Y ont droit les assurés qui, en raison de leur invalidité, sont limités dans le choix d’une profession ou dans l’exercice de leur activité antérieure et qui ont dès lors besoin d’une orientation professionnelle spécialisée (Circulaire sur les mesures de réadaptation professionnelle, CMRP, p. 16, nos 2001 et 2002). Le Tribunal fédéral a rappelé que l'orientation professionnelle se démarque des autres mesures d'ordre professionnel (art. 16 ss LAI) par le fait que, dans le cas particulier, l'assuré n'a pas encore fait le choix d'une profession. L'art. 15 LAI suppose que l'assuré soit capable en principe d'opérer un tel choix, mais que seule l'invalidité l'en empêche, parce que ses propres connaissances sur les aptitudes exigées et les possibilités disponibles ne sont pas suffisantes pour choisir une profession adaptée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_882/2008 du 29 octobre 2009 consid. 5.1 et les références).
4.3.2 Selon l’art.17 LAI, l’assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée (al. 1er). La rééducation dans la même profession est assimilée au reclassement (al. 2). Sont considérées comme un reclassement les mesures de formation destinées à des assurés qui en ont besoin, en raison de leur invalidité, après achèvement d'une formation professionnelle initiale ou après le début de l'exercice d'une activité lucrative sans formation préalable, pour maintenir ou pour améliorer sensiblement leur capacité de gain (art. 6 al. 1 RAI).
Par reclassement, la jurisprudence entend l’ensemble des mesures de réadaptation de nature professionnelle qui sont nécessaires et suffisantes pour procurer à l’assuré une possibilité de gain à peu près équivalente à celle que lui offrait son ancienne activité. La notion d'équivalence approximative entre l'activité antérieure et l'activité envisagée ne se réfère pas en premier lieu au niveau de formation en tant que tel, mais aux perspectives de gain après la réadaptation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_644/2008 du 12 décembre 2008 consid. 3).
4.3.3 On rappellera qu'il n'existe pas un droit inconditionnel à obtenir une mesure professionnelle (voir par ex. l'arrêt du Tribunal fédéral 9C_385/2009 du 13 octobre 2009). Il faut également relever que si une perte de gain de 20% environ ouvre en principe droit à une mesure de reclassement dans une nouvelle profession (ATF 139 V 399 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_500/2020 du 1er mars 2021 consid. 2 et les références), la question reste ouverte s'agissant des autres mesures d'ordre professionnel prévues par la loi (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_464/2009 du 31 mai 2010).
4.4 La notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).
4.5 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).
4.5.1 Selon l’art. 54a LAI, les services médicaux régionaux (ci-après : SMR) établissent les capacités fonctionnelles de l’assuré qui sont déterminantes pour l’assurance-invalidité en vertu de l’art. 6 LPGA, pour l’exercice d’une activité lucrative raisonnablement exigible ou pour l’accomplissement des travaux habituels (al. 3).
Lors de la détermination des capacités fonctionnelles, la capacité de travail attestée médicalement pour l’activité exercée jusque-là et pour les activités adaptées est évaluée et justifiée en tenant compte, qualitativement et quantitativement, de toutes les ressources et limitations physiques, mentales et psychiques (art. 49 al. 1bis RAI).
4.5.2 Selon le principe de la libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).
4.5.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.
Dans une procédure portant sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurances sociales, lorsqu'une décision administrative s'appuie exclusivement sur l'appréciation d'un médecin interne à l'assureur social et que l'avis d'un médecin traitant ou d'un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes, même faibles, quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l'un ou sur l'autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l'art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 139 V 225 consid. 5.2 et les références ; 135 V 465 consid. 4).
Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).
En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).
4.5.4 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités revêtent une importance significative ou entrent raisonnablement en considération (ATF 144 V 427 consid. 3.2 ; 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).
5. En l’occurrence, le recourant émet des doutes quant à sa capacité à exercer pleinement une activité lucrative adaptée.
Pourtant, la Dre C______, à laquelle il se réfère, a bel et bien conclu à une pleine capacité de travail dans une telle activité, qu’elle a décrite comme devant respecter les limitations suivantes : éviter le port de charges supérieures à 5 kg, limitation de la marche à une heure, limitation de la conduite à vingt minutes, limitation de l'abduction des membres supérieurs à 50-55°, de la rotation des cervicales à 45-0-45, perte de dextérité tactile. Dans un emploi respectant ces limitations, le médecin a répété qu’une capacité de travail de 8 h./jour était exigible.
Il est vrai qu’elle a relevé que la limitation des mobilités articulaires cervicale et lombaire et les séquelles de la myélopathie pourraient constituer des obstacles à une réadaptation. Cela étant, cela ne l’a pas conduite à diminuer pour autant son évaluation de la capacité de travail de l’assuré.
Le recourant reproche au SMR d'avoir écarté certaines limitations fonctionnelles énoncées par son médecin, à savoir celles touchant ses membres supérieurs (abduction limitée à 50 sur 55° et perte de dextérité des mains).
Certes, le SMR, dans son avis du 5 mars 2023, a évoqué une activité légère sédentaire, s'exerçant principalement en position assise, permettant l'alternance des positions au gré de l'assuré, sans manipulation de charges de plus de 5 kg, sans position du rachis en porte-à-faux, à répartir harmonieusement sur cinq jours ouvrables. Il est vrai que le SMR n’a pas fait expressément référence aux deux limitations évoquées par le recourant. Il n’en demeure pas moins que la Dre C______, sur le rapport de laquelle s’est basé essentiellement le SMR, a conclu à une pleine capacité de travail en tenant compte desdites limitations. Le grief du recourant tombe donc à faux.
Quant à l’argument selon lequel, dans la mesure où plusieurs des atteintes dont il souffre sont dégénératives, cela impliquerait une évolution négative de son état de santé, il est dénué de pertinence. En effet, si la situation devait se péjorer dans le futur, il serait loisible au recourant de déposer une nouvelle demande, motivée par la nouvelle situation. En l’état, on ne saurait reprocher à l’intimé de n’avoir pas tenu compte d’une hypothétique péjoration dont il est impossible de dire si elle interviendra, quand et quelles seraient ses conséquences en termes de perte de gain.
Enfin, au recourant qui argue qu’on ne saurait se fonder sur des possibilités de travail irréalistes, il convient de rappeler qu’à maintes reprises, le Tribunal fédéral a jugé qu’il convient d'admettre que le marché du travail offre un éventail suffisamment large d'activités légères, dont on doit convenir qu'un nombre significatif sont adaptées à des limitations telles que celles présentées par le recourant, et accessibles sans aucune formation particulière (par ex. arrêt du Tribunal fédéral 9C_279/2008 du 16 décembre 2008 consid. 4).
La notion de marché équilibré du travail, au sens de l’art. 16 LPGA, est une notion théorique et abstraite qui sert de critère de distinction entre les cas tombant sous le coup de l'assurance-chômage et ceux qui relèvent de l'assurance-invalidité. Elle implique, d'une part, un certain équilibre entre l'offre et la demande de main d'œuvre et, d'autre part, un marché du travail structuré de telle sorte qu'il offre un éventail d'emplois diversifiés, tant au regard des exigences professionnelles et intellectuelles qu'au niveau des sollicitations physiques. Il n'y a donc pas lieu d'examiner la question de savoir si un assuré peut être placé eu égard aux conditions concrètes du marché du travail, mais uniquement de se demander s'il pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail sur un marché où les places de travail disponibles correspondent à l'offre de main d'œuvre (arrêt du Tribunal fédéral 9C_248/2018 du 19 septembre 2018 consid. 6.2 et les références). En d’autres termes, il n'y a pas lieu de poser des exigences excessives à la concrétisation des possibilités de travail et des perspectives de gain, au regard en particulier des postes permettant l'exécution de travaux peu exigeants du point de vue physique et sous l'angle des qualifications ou connaissances professionnelles requises. Restent ainsi exigibles une activité ou un poste de travail qui requièrent une certaine obligeance de la part de l'employeur, le marché du travail équilibré comprenant aussi de telles places de travail, dites « de niche » (arrêt du Tribunal fédéral 8C_772/2020 du 9 juillet 2021 consid. 3.3 et les références).
La jurisprudence a par ailleurs admis que les possibilités de travail sur un marché du travail équilibré sont suffisamment concrétisées dans la mesure où entrent en considération, comme exemples d'activités exigibles, des travaux simples de surveillance ou de contrôle, l'utilisation et la surveillance de machines (semi-) automatiques ou d'unités de production, ainsi que l'activité de surveillant de musée ou de parking (arrêt du Tribunal fédéral 8C_772/2020 du 9 juillet 2021 consid. 3.3 et les références).
Eu égard aux considérations qui précèdent, c’est à juste titre que l’intimé a retenu une pleine capacité de l’assuré à exercer une activité adaptée aux limitations énoncées par la Dre C______.
Le calcul du degré d’invalidité auquel s’est livré l'intimé n’apparaît pas critiquable et n’est d’ailleurs pas contesté en tant que tel par le recourant. Le taux d’invalidité auquel il conduit est insuffisant pour ouvrir le droit à un reclassement. Quant à une orientation professionnelle, il n’apparaît pas non plus que les conditions d’octroi en soient réunies, l’invalidité n’étant pas telle qu’elle interdise au recourant de trouver un poste adapté aux limitations énoncées.
En conséquence, le recours est rejeté.
***
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Met un émolument de CHF 200.- à la charge du recourant.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Diana ZIERI |
| La présidente
Karine STECK
|
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le