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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4133/2023

ATAS/389/2024 du 29.05.2024 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4133/2023 ATAS/389/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 mai 2024

Chambre 4

 

En la cause

 

Madame A______

recourante

 

contre

 

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : la bénéficiaire ou la recourante) est née le ______ 1967 et domiciliée à Genève. Elle est mère de deux enfants majeurs et veuve depuis le 16 décembre 2021 suite au décès de son époux, feu Monsieur B______. Selon la base de données Calvin de l'office cantonal de la population et des migrations (OCPM), le nom de famille de la bénéficiaire était B______ jusqu'au 7 décembre 2023 et a été remplacé par A______ dès cette date.

b. Le 16 novembre 2011, feu l'époux de la bénéficiaire a déposé une demande de prestations auprès du service des prestations complémentaires de Genève
(ci-après : le SPC ou l'intimé).

c. Par courrier du 28 janvier 2013, adressé au SPC dans le cadre de cette demande, feu l'époux de la bénéficiaire a indiqué que son épouse souffrait de diabète et qu'elle avait subi un infarctus deux ans auparavant, de sorte qu'elle était « sous l'emprise de médicaments ». Il a précisé qu'après la prise de ceux-ci, cette dernière était complètement abattue et dans l'incapacité de se concentrer. Un certificat médical du 25 janvier 2013, attestant d'une incapacité de travail totale du 1er au 31 janvier 2013, était joint à ce courrier.

d. Le 28 février 2013, la bénéficiaire a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité auprès de l'office de l'assurance-invalidité (ci-après : OAI). Dans le formulaire idoine, elle a précisé avoir travaillé comme professeur d'école primaire de 1987 à 1991 en Haïti, puis quelques mois en 2008 à Genève auprès de l'agence de placement H______, être atteinte de diabète, avoir souffert d'un infarctus en 2010 et ressentir des douleurs dorsales. L’OAI ne lui a pas octroyé de rente, considérant sur la base d’un avis de son service médical régional (ci‑après : le SMR) du 5 décembre 2014 qu’elle n’avait pas d’atteinte durablement incapacitante.

e. Selon une décision du SPC du 19 avril 2016, la bénéficiaire a déposé une nouvelle demande de prestations le 1er avril 2016. Le SPC a refusé d'entrer en matière sur celle-ci au motif qu'elle n'était pas au bénéfice de prestations de l'AVS ou de l'AI.

f. Le 6 décembre 2021, la bénéficiaire a déposé une nouvelle demande de prestations auprès de l'OAI. Elle présentait une symptomatologie dépressive avec anxiété, faisant l'objet d'une prise en charge spécialisée. Sur le plan somatique, elle souffrait de la maladie de Ménière avec crises de vertiges importants depuis 2019, en sus des atteintes déjà connues (diabète, hypertension et status
post-infarctus).

g. Par décision du 4 mars 2022, l'office cantonal des assurances sociales
(ci-après : OCAS) a accordé à la bénéficiaire une rente mensuelle AVS de veuve de CHF 1'378.- dès le 1er janvier 2022.

h. Le 27 mai 2022, le centre d'action sociale de Vernier a déposé une demande d'aide sociale auprès du SPC pour le compte de la bénéficiaire, précisant qu'une aide régulière lui était accordée par l'Hospice général depuis le 1er avril 2012.

i. Par décision du 30 mars 2023, le SPC a refusé d'accorder des prestations d'aide sociale à la bénéficiaire pour la période dès le 1er avril 2023. Il ressort du tableau de calcul annexé à cette décision que le SPC a retenu un revenu hypothétique de CHF 13'400.-.

B. a. Le 27 mai 2022, la bénéficiaire a déposé une demande de prestations complémentaires à l'AVS/AI auprès du SPC.

b. Le 9 juin 2022, la bénéficiaire a informé le SPC qu'en raison de ses soucis de santé, elle percevait l'aide de l'Hospice général et ne s'était pas inscrite auprès de l'office régional de l'emploi dès lors qu'elle était au bénéfice de certificats médicaux faisant état d'une incapacité de travail totale. Elle avait fait une demande de prestations auprès de l'OAI au mois de septembre 2021 et l'instruction de son dossier était en cours.

À l'appui de son courrier, elle a, entre autres, adressé copie des documents suivants:

-          Une décision de cotisations personnelles pour personnes sans activité lucrative établie par l'OCAS le 11 octobre 2021, fixant le montant des cotisations pour l'année 2020 à CHF 520.80.

-          Un certificat du docteur C______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie auprès du Centre Médical de Lancy, du 17 janvier 2022, indiquant que la bénéficiaire avait travaillé en qualité de maîtresse de maison dès 2008, mais qu'elle avait dû arrêter pour des raisons de santé. Elle avait ensuite contracté la maladie de Ménière. Sur le plan psychiatrique, la bénéficiaire évoquait un abaissement thymique depuis la fin de l'année 2018, mais principalement à partir de janvier 2019 à la suite de l'incarcération et de l'expulsion du territoire de son fils. Concernant l'épisode actuel, elle évoquait des symptômes dans les registres émotionnels et comportementaux qui, selon ses dires, avaient commencé en janvier 2021 alors qu'elle rencontrait une grande souffrance psychologique. Dans ces circonstances, elle avait développé une symptomatologie réactionnelle avec de la tristesse, une anxiété anticipatrice, des troubles du sommeil et des difficultés dans la gestion de son quotidien, nécessitant un suivi de la part de son médecin traitant. Ce dernier attestait d'ailleurs d'un diagnostic de trouble dépressif et avait décidé de lui adresser sa patiente. Depuis le début de sa prise en charge, l'état clinique de la bénéficiaire avait été marqué par une fluctuation de son état thymique en lien avec sa situation socio-familiale.

-          Une attestation médicale du 17 janvier 2022 de la docteure D______, spécialiste FMH en endocrinologie et diabétologie, ainsi qu'en médecine interne, auprès de la Clinique de Carouge, indiquant qu'elle suivait la bénéficiaire depuis 2018 pour un diabète de type II
insulino-requérant très instable malgré un traitement médicamenteux important (insuline et antidiabétiques oraux). Elle présentait des complications sévères de son diabète, à savoir une rétinopathie diabétique, une insuffisance rénale chronique et une cardiopathie ischémique, cette dernière ayant provoqué un infarctus myocardique en 2010. Elle souffrait en outre d'hypertension artérielle, également instable, qui avait motivé une intensification constante de son traitement, ainsi que de douleurs ostéoarticulaires chroniques. Enfin, elle était connue pour un état anxio-dépressif chronique, actuellement en décompensation-

-          Un certificat du 18 janvier 2022 du docteur E______, spécialiste FMH en médecine interne à Genève, indiquant qu'il suivait la bénéficiaire depuis 2008. À titre d'antécédents médicaux notables, il relevait un infarctus majeur en mars 2010, un diabète insulino-dépendant difficile à contrôler, une maladie de Ménière avec crises de vertiges importants depuis 2019, une hypertension artérielle labile et parfois symptomatique, ainsi qu'un état anxio-dépressif sévère depuis 2018, avec exacerbation en lien avec des problèmes de son fils et l'état de santé de son mari décédé récemment. Son état général semblait en nette détérioration en rapport avec son état anxio-dépressif, ses comorbidités et les effets du stress de la première période Covid de mars 2020. Cette situation constituait un changement majeur de l'état de santé de la bénéficiaire au regard du suivi depuis 2008. Dans ce contexte, le Dr E______ préconisait une évaluation médicale somatique et psychiatrique par les services médicaux de l'assurance-invalidité (ci-après : AI) pour confirmer que la bénéficiaire ne jouissait pas d'une santé habituelle pour son âge.

-          Sa demande de prestations adressée à l'OAI le 6 décembre 2021.

c. Par décision du 30 mars 2023, le SPC a reconnu à la bénéficiaire le droit aux prestations complémentaires cantonales (ci-après : PCC) à hauteur de CHF 535.- par mois du 1er janvier au 31 décembre 2022, puis à hauteur de CHF 533.- du 1er janvier au 31 mars 2023. Dès le 1er avril 2023, elle avait droit à des PCC d'un montant de CHF 488.10 par mois et à des prestations complémentaires fédérales (ci-après : PCF) à hauteur de CHF 553.30 par mois. Selon les tableaux de calculs joints à cette décision, le SPC a retenu un revenu hypothétique de CHF 13'073.- pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2022 et un montant de CHF 13'400.- pour la période postérieure au 1er janvier 2023. Il était précisé que ces montants étaient pris en compte à hauteur de 80%.

d. Le 20 avril 2023, la bénéficiaire s'est opposée à cette décision. Elle a, en substance, contesté les montants de CHF 13'073.- et de CHF 13'400.- retenus par le SPC à titre de revenus hypothétiques au motif qu'elle était en incapacité de travail depuis 2018 tel que l'attestaient les certificats médicaux du Dr C______ du 17 janvier 2022, de la Dre D______ du 17 janvier 2022 et ceux du Dr E______ du 18 janvier 2022 et du 14 avril 2023. Dans ces circonstances, ses revenus devaient être calculés sans tenir compte d'un quelconque gain hypothétique.

e. Le 7 novembre 2023, le SPC a demandé à l'OAI de lui transmettre le dossier de la bénéficiaire.

f. Le 9 novembre 2023, l'OAI a transmis au SPC le dossier demandé.

g. Les documents suivants, tirés du dossier de l'OAI, ont été produits par le SPC dans le cadre de la présente procédure :

-          Un avis médical du SMR du 26 janvier 2022, selon lequel, sur la base du rapport du Dr C______ du 17 janvier 2022 et de celui du Dr E______, le SMR considérait que la bénéficiaire avait rendu plausible l'aggravation de son état de santé.

-          Un rapport du Dr C______ du 3 février 2023, à teneur duquel ce spécialiste retenait, à titre de diagnostic ayant un impact sur la capacité de travail, un épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques (code F32.2 de la 10ème édition de la classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes de l’Organisation mondiale de la santé de 2008 [ci-après : CIM-10]). S'agissant de la capacité de travail dans l'activité habituelle, le spécialiste indiquait que, depuis 2008, la bénéficiaire n'avait plus eu d'activité professionnelle. Ses limitations fonctionnelles étaient un découragement, un sentiment d'incapacité avec évitement de la tâche, une démotivation, une procrastination et une indécision. Quant à la capacité de travail dans une activité adaptée, le Dr C______ a indiqué « la patiente nous dit ne pas pouvoir exercer aucune activité à cause de son état de santé ».

-          Un rapport du 22 février 2022 du docteur F______, spécialiste FMH en oto-rhino-laryngologie (ORL), qui avait retenu les diagnostics, avec répercussion sur la capacité de travail, de maladie de Ménière et de déficit vestibulaire droit. La maladie de Ménière s'était calmée depuis mi-2020 et le déficit vestibulaire droit était ancien et compensé, mais irréversible. Les limitations fonctionnelles étaient l'absence de travail en hauteur et les mouvements répétés de la tête.

-          Un rapport du 28 février 2022 du docteur G______, spécialiste FMH en cardiologie et médecine interne générale à Genève, à teneur duquel les diagnostics avec répercussion sur la capacité de travail étaient un status après infarctus inféro-apical, une hypertension artérielle avec chutes orthostatiques et un diabète de type II. Le pronostic était qualifié de moyen en raison de la maladie coronarienne chez une patiente à risque secondaire élevé. L'évolution était stable, mais la bénéficiaire restait très limitée sur le plan physique. S'agissant des limitations fonctionnelles, la bénéficiaire avait de la difficulté à se mobiliser en raison de son obésité et faisait fréquemment des malaises en raison de son diabète très difficile à équilibrer. Sur le plan cardiologique, elle avait une capacité de travail à temps partiel dans l'activité habituelle. Dans une activité adaptée, sa capacité de travail serait de 25% à 50% « d'ici quelques mois ».

-          Un rapport du Dr E______ du 28 février 2022, qui retenait une incapacité totale de travail dans toute activité ;

-          un rapport de la Dre D______ du 2 mars 2022, selon lequel la bénéficiaire présentait, à titre de diagnostics ayant une répercussion sur la capacité de travail, un diabète très instable, des épisodes fréquents de malaises d'origine multifactorielle, des douleurs musculaires et articulaires avec diminution de la force des membres inférieurs (possible lien avec son diabète de longue date), une forte fluctuation de sa tension artérielle avec des pics tensionnels importants aggravant l'état des organes cibles (cœur, rein et cerveau), mais aussi avec des épisodes d'hypotension orthostatique engendrant des vertiges et des chutes. Enfin, elle présentait aussi un état anxio-dépressif sévère. Selon la spécialiste, le pronostic était très réservé au vu de la longue évolution du diabète (20 ans), de l'instabilité de celui-ci et des nombreuses complications engendrées, notamment cardiologiques, néphrologiques et neurologiques. La bénéficiaire était dans l'incapacité totale de travailler, que ce soit dans une activité habituelle ou dans une activité adaptée.

-          Un rapport du Dr F______ du 29 septembre 2022, selon lequel la bénéficiaire était limitée dans toute activité en hauteur, sur sol mou, irrégulier ou instable, ainsi que dans les mouvements répétés de la tête et les changements réguliers de position. Sa capacité de travail était entière dans une activité adaptée.

-          Un rapport du Dr C______ du 5 octobre 2022, à teneur duquel la bénéficiaire était, sur le plan psychiatrique, capable d'exercer une activité professionnelle adaptée.

-          Un rapport du Dr G______ du 17 octobre 2022. Sur le plan cardiologique, la bénéficiaire était capable d'exercer une activité adaptée. Toutefois, en y associant les problèmes de diabète et d'obésité, un travail régulier était très peu envisageable, même à temps partiel, en raison de la fatigabilité marquée, des variations de la glycémie et de la pression artérielle.

-          Un rapport de la Dre D______ du 14 février 2023, selon lequel, depuis sa prise en charge en juin 2020, elle avait constaté une nette diminution de l'état général de la bénéficiaire, tant physique que psychique. Son diabète, qui avait initialement bien répondu au traitement antidiabétique prescrit, présentait une forte décompensation depuis plus de six mois. Elle présentait un état anxio-dépressif sévère, un manque de désir de se prendre en charge sur le plan médical, une baisse de l'acuité visuelle (rétinopathie diabétique et cataracte opérée des deux côtés avec malvoyance résiduelle) engendrant une instabilité à la marche renforcée par sa polyneuropathie diabétique sévère. Le diabète fortement décompensé et son hypertension artérielle labile aggravaient de manière significative son état. Au vu de son état dépressif sévère, elle n'était pas en mesure d'exercer une activité professionnelle, même à taux réduit, étant précisé qu'une demande d'hospitalisation auprès de la Clinique de Montana était en cours en raison de cet état anxio-dépressif sévère.

-          Un avis médical du SMR du 23 mai 2023, indiquant qu'au vu des différents certificats médicaux, il ne pouvait pas se positionner sur la capacité de travail exigible à retenir et adressait donc un questionnaire au psychiatre traitant afin que ce dernier précise certains points. Il s'agissait également de demander à la diabétologue le résultat de l'électromyogramme des membres inférieurs dès lors qu'elle avait fait état, dans son dernier rapport, d'une polynévrite des membres inférieurs.

h. Par décision du 16 novembre 2022 [recte : 2023], le SPC a rejeté l'opposition du 20 avril 2023, considérant, en substance, que le rapport du Dr E______ du 18 janvier 2022 et celui de la Dre D______ du 17 janvier 2022 n'avaient pas une force probante suffisante et que l'examen du dossier de la bénéficiaire était toujours en cours d'instruction à ce jour par l'OAI. Le SMR n'était pas en mesure de déterminer à quel taux il était exigible qu'elle exerce une activité rémunérée. Il n'en demeurait pas moins que trois sur cinq médecins avaient évalué qu'il lui était encore possible de travailler, le cas échéant à temps partiel ou dans une activité adaptée, et que le gain potentiel retenu dans le calcul des prestations correspondait à un salaire annuel bien inférieur à celui qui pourrait être réalisé à 50% dans une activité ne requérant pas de qualifications particulières. Par conséquent, il convenait de maintenir le revenu hypothétique pris en compte dans le calcul des prestations. À réception de la décision de l'OAI, le SPC reprendrait le calcul de ses prestations, compte tenu de son éventuelle nouvelle situation, le cas échéant rétroactivement.

C. a. Le 11 décembre 2023, la bénéficiaire, agissant en personne, a formé recours contre cette décision. Elle a fait valoir que l'argumentaire du SPC se fondait sur des rapports médicaux de médecins consultés pour des problèmes spécifiques, de sorte que leurs rapports respectifs concernaient uniquement leur propre discipline et non pas son état de santé pris dans sa globalité. Les Drs E______ et D______ la suivaient régulièrement, ce qui expliquait qu'ils aient conclu à une capacité de travail nulle dans toute activité. Faute de moyens pour « payer sa part de 10% » depuis le mois de mars 2023, elle avait arrêté de consulter ses médecins et de prendre certains médicaments qu'elle prenait depuis 2010. Elle consultait uniquement le Dr E______, son médecin généraliste, qui connaissait le mieux son état de santé.

b. Le 5 janvier 2024, l'intimé a conclu au rejet du recours.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 
( LPC -RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             En matière de prestations complémentaires fédérales (ci-après : PCF), les décisions sur opposition sont sujettes à recours dans un délai de 30 jours (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA ; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC - J 4 20]) auprès du tribunal des assurances du canton de domicile de l’assuré (art. 58 al. 1 LPGA).

S’agissant des prestations complémentaires cantonales (ci-après : PCC), l’art. 43 LPCC ouvre les mêmes voies de droit.

Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable.

3.             Dans le cadre de la réforme de la LPC, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, de nombreuses dispositions ont été modifiées (Message du Conseil fédéral relatif à la modification de la loi sur les prestations complémentaires [Réforme des PC] du 16 septembre 2016, FF 2016 7249 ; RO 2020 585).

Dans la mesure où le recours porte sur le droit aux prestations complémentaires dès le 1er janvier 2022, soit une période postérieure au 1er janvier 2021, le présent litige est soumis au nouveau droit. Les dispositions légales seront donc citées ci-après dans leur teneur en vigueur dès le 1er janvier 2021.

4.             Le litige porte sur l'étendue du droit de la recourante à des prestations complémentaires dès le 1er janvier 2022, singulièrement sur la question de savoir si un revenu hypothétique peut être pris en considération dans le calcul des prestations à titre de revenu déterminant de l'activité lucrative.

5.              

5.1  

5.1.1 Au plan fédéral, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions (personnelles) prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui perçoivent une rente de veuve ou de veuf de l'AVS tant qu'elles n'ont pas atteint l'âge de la retraite au sens de l'art. 21 de la loi fédérale du 20 décembre 1946 sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS – RS 831.10), conformément à l'art. 4 al. 1 let. abis LPC.

Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d'invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L'art. 9 al. 1 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

Ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes dont le revenu annuel déterminant n'atteint pas le revenu minimum cantonal d'aide sociale applicable (art. 4 LPCC). Le revenu déterminant est en principe calculé conformément aux règles fixées dans la loi fédérale et ses dispositions d'exécution (art. 5 LPCC).

5.1.2 Dans le cadre de la réforme de la LPC, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, le législateur a introduit un nouvel art. 11a LPC traitant spécifiquement de la renonciation à des revenus ou parts de fortune, qui stipule que si une personne renonce volontairement à exercer une activité lucrative que l’on pourrait raisonnablement exiger d’elle, le revenu hypothétique correspondant est pris en compte comme revenu déterminant. La prise en compte de ce revenu est réglée par l’art. 11 al. 1 let. a LPC.

5.1.3 Il sied de relever que la LPC prévoit la prise en compte d’un revenu hypothétique dans d’autres hypothèses, à savoir pour les assurés partiellement invalides, dont les modalités sont réglées à l’art. 14a de l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 2917 (OPC-AVS/AI – RS 831.301), ainsi que pour les veuves non invalides qui n’ont pas d’enfants mineurs, tel que le prévoit
l'art. 14b OPC-AVS/AI. S'agissant des personnes veuves non invalides qui n’ont pas d’enfants mineurs, le revenu de l’activité lucrative correspond au moins aux deux tiers du montant maximum destiné à la couverture des besoins vitaux selon l’art. 10 al. 1 let. a ch. 1 LPC entre la 51ème et la 60ème année
(art. 14b let. c OPC-AVS/AI). En 2022, ce montant était de CHF 19'610.- (art. 10 al. 1 let. a ch. 1 LPC, dans sa teneur en vigueur au 1er janvier 2022), soit un revenu minimum de CHF 13'073.-. En 2023, ce montant était de CHF 20'100.- (art. 10 al. 1 let. a ch.1 LPC, dans sa teneur en vigueur au 1er janvier 2023), soit un revenu minimum de CHF 13'400.-.

Selon la jurisprudence, qui conserve sa validité sous l'égide de l'art. 11a al. 1 LPC (Réforme des PC, FF 2016 7249, p. 7322), les solutions schématiques consacrées aux art. 14a al. 2 et 14b OPC-AVS/AI ne sont applicables aux personnes invalides partielles ou aux veuves que si elles sont effectivement en mesure de tirer parti de leur capacité de gain, ce qu'il y a lieu de présumer.

Cela étant, les revenus hypothétiques provenant d'une activité lucrative au sens de l’art. 11a LPC ou fixés schématiquement aux art. 14a et 14b OPC-AVS/AI représentent une présomption juridique que le bénéficiaire ou l'assuré peut renverser en apportant la preuve qu'il ne lui est pas possible de réaliser de tels revenus ou qu'on ne peut l'exiger de lui.

5.1.4 Pour examiner la question de savoir si l'assuré peut exercer une activité lucrative et si on est en droit d'attendre de lui qu'il le fasse, il convient de tenir compte, conformément au but des prestations complémentaires, de toutes les circonstances objectives et subjectives qui entravent ou compliquent la réalisation d'un tel revenu. Les critères décisifs ont notamment trait à l'âge de la personne, à son état de santé, à ses connaissances linguistiques, à sa formation professionnelle, à l'activité exercée jusqu'ici, au marché de l'emploi, et le cas échéant, au temps plus ou moins long pendant lequel elle aura été éloignée de la vie professionnelle (ATF 117 V 290 consid. 3a ; arrêts du Tribunal fédéral P/17/01 du 16 juillet 2001 consid. 1c et P 88/01 du 8 octobre 2002 consid. 2.1).

S’agissant plus particulièrement du critère ayant trait à l'état de santé de l’assuré, il faut rappeler que les organes d'exécution en matière de prestations complémentaires ne disposent pas des connaissances spécialisées pour évaluer l'invalidité d'une personne. C'est notamment pour ce motif qu'ils sont liés par les évaluations de l'invalidité effectuées par les organes de l'assurance-invalidité lorsqu'ils fixent le revenu exigible des assurés partiellement invalides au sens de l'art. 14a OPC-AVS/AI (ATF 117 V 202 consid. 2b). Il n'en demeure pas moins que cette jurisprudence sur la force obligatoire de l'évaluation de l'invalidité par les organes de l'assurance-invalidité ne s'applique qu'à la condition que ceux-ci aient eu à se prononcer sur le cas et que l'intéressé ait été qualifié de personne partiellement invalide par une décision entrée en force. Mais même dans ce cas, les organes d'exécution en matière de prestations complémentaires doivent se prononcer de manière autonome sur l'état de santé de l'intéressé lorsqu'est invoquée une modification intervenue depuis l'entrée en force du prononcé de l'assurance-invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_68/2007 du 14 mars 2008 consid. 5.3 ; ATAS/377/2022 consid. 4.2 ; ATAS/312/2018 consid. 6b).

Aussi, les organes d'exécution en matière de prestations complémentaires ne sont-ils pas fondés à se prévaloir d'un manque de connaissances spécialisées pour écarter d'emblée toute mesure d'instruction au sujet de l'état de santé d'une personne (arrêt du Tribunal fédéral 8C_172/2007 du 6 février 2008, consid. 7.2).

On rappellera qu’une différence entre l'assurance-invalidité et les prestations complémentaires réside dans le fait que l'assurance-invalidité se base sur un marché du travail équilibré pour déterminer le degré d'invalidité - au sens d'un élément de fait objectif - alors que dans le domaine des prestations complémentaires, il faut se baser sur la situation réelle, non seulement de la personne ayant droit aux prestations complémentaires, mais aussi du marché du travail (ATF 140 V 267 consid. 5.3 et les références).

5.1.5 Selon le ch. 3424.07 des directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (DPC – état au 1er janvier 2022), aucun revenu hypothétique n’est pris en compte chez le bénéficiaire de prestations complémentaires à l’une ou l’autre des conditions suivantes : (i) si, malgré tous ses efforts, sa bonne volonté et les démarches entreprises, l’intéressé ne trouve aucun emploi. Cette hypothèse peut être considérée comme réalisée lorsqu’il s’est adressé à un office régional de placement (ORP) et prouve que ses recherches d’emploi sont suffisantes qualitativement et quantitativement ; (ii) lorsqu’il touche des allocations de chômage ; (iii) s’il est établi que sans la présence continue de l’intéressé à ses côtés, l’autre conjoint devrait être placé dans un home ou un établissement hospitalier ; (iv) si l’intéressé a atteint sa 60e année.

5.2 Dans l’arrêt 8C_172/2007 du 6 février 2008, le Tribunal fédéral s’est prononcé sur la valeur probante d’un rapport établi par le médecin traitant de l’épouse d’un bénéficiaire de prestations complémentaires et produit par celui-ci à l’appui de son opposition à une décision par laquelle des prestations avaient été calculées compte tenu d’un revenu hypothétique. Il a jugé que dans le cas particulier, ce rapport médical contenait tous les renseignements nécessaires pour se prononcer au sujet de la capacité de travail de l’intéressée. En effet, ce document indiquait les différentes affections, en particulier celles qui avaient une incidence sur la capacité de travail, et précisait la durée de travail exigible. En outre, il contenait un pronostic sur l’évolution des affections, ainsi que les facteurs personnels susceptibles d’influencer les possibilités de l’intéressée de retrouver un emploi (arrêt du Tribunal fédéral 8C 68/2007 du 14 mars 2008 consid. 5.2.4).

5.3 Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 et les références).

Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références ; ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

Selon la jurisprudence, le juge appelé à connaître de la légalité d'une décision rendue par les organes de l'assurance sociale doit apprécier l'état de fait déterminant existant au moment où la décision sur opposition litigieuse a été rendue (ATF 121 V 366 consid. 1b et les arrêts cités ; ATF 131 V 407 consid. 2.1.2.1).

6.             En l'espèce, il convient de déterminer si l'exercice d'une activité lucrative est exigible de la part de la recourante dès le 1er janvier 2022 permettant à l'intimé de retenir un revenu hypothétique dans le calcul des prestations.

6.1 La recourante fait grief à l’intimé d’avoir retenu un revenu hypothétique sans avoir tenu compte de son état de santé, notamment au vu des certificats médicaux établis par ses médecins traitants, ainsi que de ceux figurant au dossier de l'OAI et produits par l'intimé.

6.1.1 À titre liminaire, il est relevé que l'OAI a été saisi d'une demande de prestations de la part de la recourante le 6 décembre 2021 et qu'au jour de la décision entreprise, il ne s'était pas prononcé quant au degré d'invalidité de l'assurée, étant précisé que, selon l'avis du SMR du 26 janvier 2022, la recourante avait rendu plausible l'aggravation de son état de santé depuis la première demande de prestations de l'assurance-invalidité déposée en février 2013.

Ainsi, au moment où la décision litigieuse a été rendue (30 mars 2023), l'OAI n'avait pas encore statué sur la demande de prestations susvisée, de sorte que l'intimé n'était pas en mesure de se fonder sur un degré d'invalidité dûment établi par une décision en force de l'autorité d'exécution de l'assurance-invalidité.

Par conséquent, en application de la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 8C_68/2007 du 14 mars 2008 consid. 5.3 ; ATAS/377/2022 du 27 avril 2022 consid. 4.2 ; ATAS/312/2018 du 9 avril 2018 consid. 6b), l'intimé devait se prononcer de manière autonome, au vu des éléments figurant au dossier.

L'intimé s'est cependant uniquement référé à l'avis du SMR du 23 mai 2023 pour fonder la décision litigieuse. Il a ainsi conclu qu'il se justifiait de retenir un revenu hypothétique dans le calcul des prestations complémentaires dès lors que trois des médecins, sur les cinq qui s'étaient déterminés sur l'état de santé de la recourante, avaient retenu une capacité de travail dans une activité adaptée, tout en relevant que le SMR n'était pas parvenu à déterminer à quel taux cette capacité de travail serait exigible en l'état du dossier.

6.2 Il s'agit donc d'apprécier, conformément au but des prestations complémentaires, la situation d'ensemble de la recourante, en tenant compte de toutes les circonstances objectives et subjectives susceptibles d'entraver l'exercice d'une activité lucrative.

6.2.1 En premier lieu, s'agissant de l'état de santé de la recourante, il convient d'examiner les rapports médicaux produits par cette dernière et ceux figurant au dossier de l'OAI et produits par l'intimé.

Selon l'intimé, il est justifié de retenir un revenu hypothétique dans le calcul des prestations complémentaires dès lors que les Drs C______, F______ et G______ ont retenu une capacité de travail, à tout le moins partielle.

Il ressort toutefois du rapport du Dr C______ du 17 janvier 2022 que ce dernier ne se prononce pas sur la capacité de travail de la recourante. Par ailleurs, dans son rapport du 3 février 2022, s'agissant de la capacité de travail dans l'activité habituelle, il indique que la recourante n'a plus d'activité professionnelle depuis 2008. Concernant la capacité de travail dans une activité adaptée, il se limite à indiquer « la patiente nous dit ne pas pouvoir exercer aucune activité à cause de son étant de santé ». Enfin, dans son dernier rapport du 5 octobre 2022, ce spécialiste retient une capacité de travail dans une activité adaptée sur le plan psychiatrique, sans toutefois en préciser le taux et depuis quand cette capacité de travail devrait être retenue.

S'agissant de l'appréciation médicale du Dr F______, il ressort de son rapport du 22 février 2022 qu'il n'avait pas interrogé la recourante sur sa journée-type, ni sur la répercussion de ses atteintes à la santé dans les domaines courants de la vie ou sur ses ressources. Il a en outre précisé qu'il ignorait si la recourante était en mesure de reprendre une activité professionnelle dès lors qu'il n'avait pas évoqué cet aspect lors de la consultation. Il a tout de même retenu une capacité de travail entière dans une activité adaptée, sans en préciser le taux et depuis quand. Dans son rapport suivant du 29 septembre 2022, le Dr F______ a constaté des épisodes de vertiges et d'hypoacousie droite depuis 2018, ainsi qu'une fluctuation auditive à gauche en 2020 et des symptômes compatibles avec un vertige positionnel paroxystique bénin (VPPB) en 2022. Il a précisé que la recourante était limitée pour toute activité en hauteur, sur sol mou, irrégulier ou instable, dans les mouvements répétés de la tête et les changements réguliers de position. Retenant à nouveau une capacité de travail entière dans une activité adaptée, il n'en a toutefois pas précisé le taux ni depuis quand cette capacité de travail devrait être retenue.

Force est de constater que les appréciations des Drs C______ et F______ susmentionnées ne sauraient être considérées comme probantes.

Concernant l'appréciation du cas par le Dr G______, ce dernier a retenu, à titre de diagnostics avec répercussion sur la capacité de travail, un status après infarctus inféro-apical, une hypertension artérielle avec chutes orthostatiques et un diabète de type II. Quant aux limitations fonctionnelles, la recourante avait de la difficulté à se mobiliser en raison de son obésité et faisait des malaises fréquents en raison de son diabète très difficile à équilibrer. Selon le spécialiste, une activité professionnelle à plein temps était exclue et une activité à temps partiel pouvait se discuter, mais serait très difficile dès lors que la recourante était passablement limitée par sa pression très variable et son diabète instable. Il retenait, sur le plan cardiologique, une capacité de travail dans une activité adaptée d'un taux de
25%-50% dans quelques mois (cf. rapport du Dr G______ du 28 février 2022). Dans son rapport suivant, le Dr G______ a précisé que « sur le plan cardiologique, la bénéficiaire était capable d'exercer une activité adaptée. Toutefois, en y associant les problèmes de diabète et d'obésité, un travail régulier était très peu envisageable, même à temps partiel, en raison de la fatigabilité marquée, des variations de la glycémie et de la pression artérielle » (cf. rapport du Dr G______ du 17 octobre 2022). Ainsi, contrairement à ce que soutient l'intimé, il ne peut être inféré de l'avis médical du Dr G______ que ce dernier a retenu une capacité de travail dans une activité adaptée. Il apparait en effet que si son appréciation, limitée au plan cardiologique, lui avait permis, dans un premier temps, de retenir une capacité de travail partielle (25%-50%) éventuelle dans une activité adaptée, il a ensuite précisé qu'une appréciation globale du cas, à savoir en tenant compte des problèmes de diabète et d'obésité dont souffre la recourante, ne lui permettait pas de retenir une quelconque capacité de travail, même à temps partiel.

En sus de l'appréciation du Dr G______ susvisée, il ressort également des rapports des Drs E______ et D______ que la recourante présente une incapacité de travail totale, que ce soit dans son activité habituelle ou dans une activité adaptée.

Ainsi, dans son rapport du 18 janvier 2022, le Dr E______, qui suit la recourante depuis 2008, a relevé les diagnostics de diabète insulino-dépendant difficile à contrôler, une maladie de Ménière avec des crises de vertiges importants depuis 2019, une hypertension artérielle labile et parfois symptomatique, ainsi qu'un état anxio-dépressif sévère depuis 2018 avec exacerbation en lien avec des problèmes de son fils et l'état de santé de feu son époux décédé récemment. Son état général semblait en nette détérioration en rapport avec son état anxio-dépressif, ses comorbidités et les effets de stress dus à la première vague de Covid de mars 2020. Cette situation constituait un changement majeur de l'état de santé de la recourante au regard du suivi par ce spécialiste depuis 2008. Dans un rapport du 28 février 2022, ce médecin a aussi retenu une incapacité de travail dans toute activité depuis 2009 jusqu'à ce jour.

Quant à l'avis médical de la Dre D______, il ressort de son rapport du 17 janvier 2022 qu'elle suivait la recourante depuis 2018 pour un diabète de type II insulino-requérant, très instable malgré un traitement médicamenteux important. Cette dernière présentait en outre des complications sévères de son diabète, à savoir une rétinopathie diabétique, une insuffisance rénale chronique, ainsi qu'une cardiopathie ischémique ayant provoqué un infarctus myocardique en 2010. Elle présentait en outre des douleurs ostéo-articulaires chroniques et une intensification constante de son traitement avait été motivée par une hypertension artérielle instable. De plus, la recourante était connue pour un état anxio-dépressif chronique, actuellement en décompensation. Dans un rapport ultérieur du 2 mars 2022, la spécialiste a relevé que la recourante présentait, à titre de diagnostics ayant une répercussion sur la capacité de travail, un diabète très instable, des épisodes fréquents de malaises d'origine multifactorielle, des douleurs musculaires et articulaires avec diminution de la force des membres inférieurs, probablement en lien avec son diabète de longue date, une forte fluctuation de sa tension artérielle avec des pics tensionnels importants et aggravant l'état des organes cibles (cœur, rein et cerveau), ainsi que des épisodes d'hypotension orthostatique engendrant des vertiges et des chutes. Le pronostic était très réservé au vu de la longue évolution du diabète (20 ans), de l'instabilité de celui-ci et des nombreuses complications engendrées, notamment cardiologiques, néphrologiques et neurologiques. Elle présentait donc une incapacité de travail totale, que ce soit dans son activité habituelle ou dans une activité adaptée. La chambre de céans constate que ces deux rapports de la Dre D______ sont fondés sur un examen de la recourante et qu'ils contiennent les diagnostics retenus, un pronostic détaillé, ainsi qu'une conclusion claire, de sorte qu'ils doivent se voir reconnaître une valeur probante.

Il est par ailleurs relevé que, par courrier du 28 janvier 2013, l'ex-époux de la recourante avait déjà informé le SPC des problèmes de santé de cette dernière, indiquant que celle-ci souffrait de diabète et qu'elle avait subi un infarctus deux ans auparavant. Il est ainsi démontré, au degré de la vraisemblance prépondérante, que les problèmes de santé de la recourante remontent à au moins dix ans.

Au surplus, la chambre de céans relève que les Drs D______ et G______ ont effectué, dans leurs rapports respectifs susvisés, une appréciation globale de la capacité de travail de la recourante, en tenant compte de ses différentes atteintes, de sorte que, pour ce motif également, leurs appréciations respectives doivent se voir reconnaître une plus grande valeur probante que celles des médecins qui ne se sont prononcés qu’en tenant compte d’une partie des atteintes.

Dans ces circonstances, il doit déjà être retenu, au degré de la vraisemblance prépondérante, une incapacité de travail totale de la recourante dans toute activité en raison de ses nombreux problèmes de santé, ce que l'examen des autres critères développés ci-dessous vient confirmer. À réception de la décision de l'OAI, qui lie l’intimé, celui-ci pourra en tenir compte pour réexaminer la situation de la recourante.

6.2.2 En ce qui concerne le critère de l'âge, la recourante était âgée de 54 et 55 ans durant la période litigieuse (de janvier 2022 au 23 avril 2023), soit un âge encore éloigné de celui à partir duquel la jurisprudence considère généralement qu’il n’existe plus de possibilité réaliste d’exploiter la capacité résiduelle de travail sur le marché supposé équilibré (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_789/2016 du 5 avril 2017 ; ATAS/312/2018 du 9 avril 2018). Ce facteur n’est donc en soi pas propre à rendre illusoire l’exercice d’une activité adaptée. Il convient toutefois d’admettre qu’il s’agit déjà d’un âge relativement avancé qui réduisait ses chances de trouver un emploi dans le marché ordinaire. En outre, cumulé aux autres critères développés par la jurisprudence, le critère de l'âge peut être de nature à restreindre considérablement la possibilité de trouver un emploi.

6.2.3 S’agissant de la formation, il ressort des pièces produites que la recourante a suivi une formation de professeur d'école primaire de 1987 à 1991 en Haïti, mais qu'elle a exercé comme monitrice préscolaire de 1991 à 2004 dans ce pays, avant sa venue en Suisse en 2006. Elle n’a ainsi jamais été en mesure d’exploiter à Genève les connaissances spécifiques acquises dans son pays d’origine, étant au surplus précisé qu'il n'est pas établi que sa formation ait été reconnue en Suisse. Par conséquent, seul un métier peu qualifié ne requérant pas de formation préalable pourrait, en théorie, être exigé de sa part.

6.2.4 Force est toutefois de constater que la recourante s'est trouvée éloignée du marché du travail depuis plusieurs années. Elle n’a, en effet, plus travaillé depuis 2008, année durant laquelle elle a exercé une activité rémunérée que durant une courte période. Il appert donc que la recourante n’a, en définitive, plus été en mesure de mettre à profit sa capacité de travail depuis près de 15 ans.

6.3 En procédant à une analyse globale de la situation de la recourante, notamment de son état de santé précaire attesté par plusieurs médecins, de son absence de qualification professionnelle pouvant être valorisée sur le marché ordinaire du travail et de sa longue période d’inactivité, il convient d'admettre, au degré de la vraisemblance prépondérante requis, que la recourante n’est pas en mesure d'exercer, même à temps partiel, une quelconque activité lucrative.

Par conséquent, l'intimé n'était pas fondé à prendre en compte un revenu hypothétique dans le calcul du droit aux prestations complémentaires fédérales et cantonales de la recourante.

7.             Au vu de ce qui précède, le recours sera admis, la décision querellée annulée et la cause renvoyée à l’intimé pour nouveaux calculs et nouvelle décision.

Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure à la recourante, qui n'est pas assistée d'un conseil et qui n’a pas fait valoir de frais engendrés par la procédure (art. 61 let. g LPGA).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Annule la décision sur opposition du 30 mars 2023.

4.        Renvoie la cause à l'intimé pour nouvelle décision au sens des considérants.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le