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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4392/2020

ATAS/358/2022 du 21.04.2022 ( AVS ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4392/2020 ATAS/358/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 21 avril 2022

5ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à VIRY, FRANCE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Philippe JUVET

 

 

recourant

 

contre

CAISSE DE COMPENSATION DE LA FEDERATION ROMANDE DE METIERS DU BATIMENT, MEROBA N° 111, sise av. Eugène-Pittard 24, Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Eric MAUGUE

 

intimée

 


EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’intéressé ou le recourant) exploite l’entreprise individuelle « B______ » (ci-après l’entreprise), laquelle est affiliée à la Caisse de compensation de la fédération romande de métiers du bâtiment (ci-après : la Caisse ou l’intimée).

b. Monsieur C______, domicilié en France, a collaboré sur des chantiers confiés à l’entreprise dès 2012. Il a établi des factures au nom de la société Presta-Service, sise en France, pour le travail accompli dans ce cadre, que l’entreprise a réglées.

B. a. Par courriel du 4 août 2014 à M. C______, la Caisse lui a rappelé que les sous-traitants indépendants de l’Union européenne devaient fournir à l’entreprise qui les mandatait en Suisse le formulaire A1, qui valait attestation d'affiliation auprès d'une caisse de compensation en Suisse. A défaut, leur revenu était considéré comme provenant d'une activité salariée en Suisse, et soumis aux cotisations paritaires.

b. Par décision du 19 août 2014 notifiée à l’intéressé, accompagnée d’un courrier mentionnant la possibilité de s’y opposer dans les 30 jours, la Caisse a repris les cotisations dues par l’entreprise pour ses salariés, dont un montant de CHF 19'958.45 pour M. C______ pour la période allant du 24 août 2012 au 31 octobre 2013.

c. Dans un échange de courriels avec la Caisse en janvier 2016, laquelle avait demandé des détails sur les salaires versés, l’intéressé a précisé, s’agissant de M. C______, que l’entreprise lui avait réglé les montants ressortant des factures qu’il avait établies. Ces montants incluaient le 13ème salaire, les vacances et les jours fériés.

d. Par décision du 18 janvier 2016, la Caisse a requis de l’intéressé le versement de cotisations paritaires pour M. C______ pour 2014. Selon un décompte établi le 11 juillet 2019, lesdites cotisations s’élevaient à CHF 17'201.40.  

C. a. Par jugement du 3 juin 2020 (JTPH/198/2020), le Tribunal des prud’hommes du canton de Genève a rejeté la demande en paiement interjetée par M. C______ à l’encontre de l’intéressé, portant sur le montant correspondant aux impôts dont il avait dû s’acquitter en 2013 et 2014 et qui auraient dû, selon lui, être prélevés à la source, en sa qualité de travailleur frontalier. Le Tribunal des prud’hommes a retenu que les parties n’étaient pas liées par un contrat de travail, notamment en raison de l’absence de lien de subordination. Son appréciation se fondait notamment sur les faits établis sur la base des déclarations de trois employés de l’entreprise, entendus en qualité de témoins lors d’une audience du 27 janvier 2020.

b. Le 17 août 2020, l’intéressé a adressé à la Caisse le jugement du Tribunal des prud’hommes, dont il inférait qu’il n’aurait pas dû verser de cotisations sociales pour M. C______. Il a demandé la régularisation des cotisations versées à tort.

c. Par courrier du 7 octobre 2020, la Caisse a indiqué à l’intéressé qu’elle n’était pas liée par le jugement du Tribunal des prud'hommes. Sa décision de reprise des cotisations sur les revenus de l’activité exercée par M. C______ était entrée en force, et il n’y avait pas de motif de la reconsidérer ou de la réviser.

d. Le 12 novembre 2020, l’intéressé, par son mandataire, a indiqué à la Caisse qu’il s’opposait au courrier du 7 octobre 2020 - lequel ne mentionnait pas de voie de recours - au vu du jugement du Tribunal des prud’hommes, qui constituait une preuve et un fait nouveau justifiant la restitution des cotisations versées par CHF 19'958.45 et par CHF 17'201.40.

e. Le 2 décembre 2020, la Caisse a précisé que son précédent courrier n’était pas une décision. Elle a répété qu’elle n’était pas liée par le jugement du Tribunal des prud’hommes et que sa décision du 19 août 2014 était entrée en force, faute de contestation. Aucun élément nouveau ne permettait de la reconsidérer ou de la réviser. De plus, le délai de prescription de 5 ans pour la restitution des cotisations était écoulé.

D. a. Par écriture du 24 décembre 2020, l’intéressé a déclaré interjeter recours contre la décision sur opposition de la Caisse du 2 décembre 2020, et subsidiairement recours pour déni de justice contre son refus de rendre une décision. Il a conclu, sous suite de dépens, préalablement à la production du dossier de l’intimée concernant son entreprise, principalement à l’annulation de la décision du 2 décembre 2020, à ce que l’intimée soit condamnée à lui restituer les sommes de CHF 19'958.45 et CHF 17'201.40, avec intérêts à 5 % l'an dès le 17 août 2020 ; subsidiairement à ce que le refus de l’intimée de rendre une décision et le déni de justice ainsi commis soient constatés, à ce qu’il soit constaté que l’intimée devait lui restituer les sommes de CHF 19'958.45 et CHF 17'201.40, avec intérêts à 5 % l'an dès le 17 août 2020, et au renvoi de la cause à l’intimée pour prise de décision au sens des considérants. Il a en substance fait valoir que sa demande de restitution relevait d’une requête en révision, intervenue dans le délai légal puisque le jugement du Tribunal des prud'hommes lui avait été notifié le 4 juin 2020. Ce jugement, et surtout les faits qui y étaient constatés, étaient des éléments nouveaux et une preuve nouvelle susceptibles de modifier la position de l’intimée, qui n’en avait pas connaissance lorsqu’elle avait rendu sa décision. Le recourant n’avait pu produire ces éléments précédemment. Si la chambre de céans retenait que le jugement du Tribunal des prud'hommes était un motif de reconsidération, elle devrait alors voir dans le courrier de l’intimée du 2 décembre 2020 un refus de reconsidérer sa décision, ce qui pouvait faire l’objet d’un recours selon la jurisprudence. La cause devrait être renvoyée à l’intimée afin que celle-ci entre en matière sur la demande de reconsidération. Le recourant a soutenu que les conditions d’une reconsidération – soit l’erreur manifeste et l’importance notable de la rectification – étaient réunies.

b. Dans sa réponse du 29 janvier 2021, l’intimée a conclu au rejet du recours, à ce qu’il soit dit que la décision du 19 août 2014 était entrée en force, à ce qu’il soit constaté que le délai de prescription était échu, à ce qu’il soit nié qu’elle avait commis un déni de justice, à ce que ses conclusions du 7 octobre et du 2 décembre 2020 soient confirmées, à ce qu’il soit constaté que les sommes versées par le recourant pour les cotisations sociales étaient dues et n’avaient pas à être restituées. L’intimée a souligné que sa décision du 19 août 2014 était entrée en force. Elle n’avait pas commis de déni de justice, faute de demande de révision ou de reconsidération. Elle a en outre soutenu que le recourant n’avait pas prouvé que M. C______ était bien indépendant. Les considérants du jugement du Tribunal des prud'hommes ne modifiaient pas sa position. Elle a rappelé plusieurs éléments ressortant notamment de ce jugement, qui démontraient, selon elle, le statut dépendant de M. C______.

c. Par réplique du 10 février 2021, le recourant a persisté dans ses conclusions. Il s’est déterminé sur les moyens de l’intimée et a développé plusieurs arguments démontrant que, selon lui, M. C______ n’était pas salarié de son entreprise.

d. Dans sa duplique du 5 mars 2021, l’intimée a maintenu ses conclusions et a requis l’audition de M. C______.

e. Par observations du 25 mars 2021, le recourant a persisté dans ses conclusions. Il a affirmé que son courrier du 17 août 2020 visait une reconsidération ou une révision. Il est en outre revenu sur les éléments qui prouvaient à ses dires le statut indépendant de M. C______.

f. L’intimée a à son tour déposé des observations le 22 avril 2021, persistant dans ses conclusions. Elle s’est déterminée sur les allégations du recourant et a repris les arguments lui permettant de conclure au statut salarié de M. C______.

g. Le recourant s’est déterminé sur les moyens de l’intimée par écriture du 11 mai 2021 quant au statut indépendant ou non de M. C______.

h. L’intimée a déposé des observations le 3 juin 2021.

i. Le recourant en a fait de même le 14 juin 2021.

j. La chambre de céans a entendu les parties le 13 janvier 2022.

L’intimée a indiqué que les dernières cotisations avaient été versées par le recourant en 2014. Celui-ci a nié la péremption de sa créance en restitution, le jugement du Tribunal des prud'hommes n’ayant pas été pris en compte auparavant et justifiant une reconsidération de la décision du 19 août 2014. L’intimée a pour sa part contesté que ce jugement constitue un motif de reconsidération.

A l’issue de l’audience, les parties ont sollicité un délai pour examiner la possibilité d’un accord.

k. Le 8 février 2022, le recourant a transmis à la chambre de céans les relevés de son compte postal, affirmant que ses paiements relatifs aux cotisations dues pour M. C______ avaient débuté en 2015.

l. Par écriture du 10 février 2022, le recourant a persisté dans ses conclusions.

m. Le 11 février 2022, l’intimée, par son mandataire, a indiqué à la chambre de céans qu’elle n’envisageait pas d’accord avec le recourant.

n. Par écriture du 10 mars 2022, l’intimée a conclu à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son annulation. Les conclusions du recourant tendant à la restitution des cotisations versées étaient irrecevables, la cause ne pouvant qu'être renvoyée à l’intimée en cas d'admission du recours. Elle a ajouté qu’elle n’était pas entrée en matière sur la demande de reconsidération et qu’il n’existait pas de droit à une telle reconsidération. S’agissant de la révision, les faits relevés par le Tribunal des prud'hommes dans son jugement n’étaient pas nouveaux. Le délai absolu de cinq ans pour réclamer la restitution de cotisations versées était périmé, dès lors que les décisions dont la réformation était demandée dataient du 19 août 2014 et du 18 janvier 2016 et portaient sur les exercices 2012, 2013 et 2014.

o. Dans ses observations du 16 mars 2022, le recourant a contesté l’irrecevabilité de ses conclusions condamnatoires, affirmant que la chambre de céans était fondée à statuer sur la restitution des cotisations. Par ailleurs, la demande de révision était motivée par un moyen de preuve qu’il ne pouvait produire auparavant, et le jugement du Tribunal des prud'hommes mettait en évidence des faits inconnus de l’intimée auparavant.

p. La chambre de céans a transmis copie de cette écriture à l’intimée le 18 mars 2022.

q. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

r. Les autres faits seront repris, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             La modification du 21 juin 2019 de la LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2021. Dans la mesure où le présent recours était pendant à cette date, il est soumis à l’ancien droit (art. 82a LPGA a contrario).

3.             Le litige porte sur le point de savoir si c’est à juste titre que l’intimée n’est pas entrée en matière sur la demande du recourant tendant à la restitution des cotisations sociales dont il s’est acquitté pour M. C______ à titre de salarié de son entreprise.

A ce sujet, il convient de souligner que dès lors qu’une éventuelle reconnaissance du statut d’indépendant de M. C______ pourrait avoir une incidence sur l’obligation de ce dernier de verser des cotisations sociales à ce titre, il se justifierait en principe de l’appeler en cause (cf. art. 71 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Toutefois, selon la jurisprudence, un appel en cause n’est pas nécessaire lorsque le domicile de l’intéressé est à l’étranger, comme en l’espèce (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 144/05 du 6 septembre 2006 consid. 3.1).

4.             S’agissant de la recevabilité du recours, outre le fait que les conditions de délai et de forme sont remplies, la chambre de céans relève ce qui suit.

4.1 Dans la procédure juridictionnelle administrative, seuls peuvent en principe être examinés et jugés les rapports juridiques à propos desquels l'autorité administrative compétente s'est prononcée préalablement d'une manière qui la lie, sous la forme d'une décision, en règle générale sur opposition. Dans cette mesure, la décision détermine l'objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de recours. En revanche, si aucune décision n'a été rendue, la contestation n'a pas d'objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être prononcé (ATF 131 V 164 consid. 2.1, arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 12/01 du 9 juillet 2001 consid. 1). Toutefois, à teneur de l’art. 56 al. 2 LPGA, un recours peut être formé lorsque l’assureur, malgré la demande de l’intéressé, ne rend pas de décision ou de décision sur opposition. Le droit de recours en vertu de cette disposition sert à mettre en œuvre l'interdiction du déni de justice formel prévue par l'art. 29 al. 1 de la Constitution (Cst. – RS 101) (arrêt du Tribunal fédéral 9C_687/2008 du 12 mars 2009 consid. 3.1).

4.2 Si la décision n'est pas définie dans la LPGA, elle correspond à la notion contenue à l'art. 5 de la loi fédérale sur la procédure administrative (PA - RS 172.021) (ATF 131 V 42 consid. 2.4). Selon cette disposition, sont considérées comme décisions les mesures prises par les autorités dans des cas d'espèce, fondées sur le droit public fédéral et ayant pour objet : de créer, de modifier ou d'annuler des droits ou des obligations (let. a) ; de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits ou d'obligations (let. b) ; de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c). En droit cantonal, la définition de la décision contenue à l'art. 4 al. 1 LPA reprend presque exactement celle prévue au plan fédéral. Pour déterminer si l'on est ou non en présence d'une décision, il y a ainsi lieu de considérer les caractéristiques matérielles de l'acte. Un acte peut ainsi être qualifié de décision (matérielle), si, par son contenu, il en a le caractère, même s'il n'est pas intitulé comme tel et ne présente pas certains éléments formels typiques d'une décision, telle l'indication des voies de droit (ATF 143 III 162 consid. 2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_646/2017 du 9 mars 2018 consid. 4.2).

4.3 Selon une jurisprudence constante rendue dans le domaine des assurances sociales, la procédure juridictionnelle administrative peut être étendue pour des motifs d'économie de procédure à une question en état d'être jugée qui excède l'objet de la contestation, c'est-à-dire le rapport juridique visé par la décision, lorsque cette question est si étroitement liée à l'objet initial du litige que l'on peut parler d'un état de fait commun, et à la condition que l'administration se soit exprimée à son sujet dans un acte de procédure au moins. Les conditions auxquelles un élargissement du procès au-delà de l'objet de la contestation est admissible sont les suivantes : la question (excédant l'objet de la contestation) doit être en état d'être jugée ; il doit exister un état de fait commun entre cette question et l'objet initial du litige ; l'administration doit s'être prononcée à son sujet dans un acte de procédure au moins ; et le rapport juridique externe à l'objet de la contestation ne doit pas avoir fait l'objet d'une décision passée en force de chose jugée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_678/2019 du 22 avril 2020 consid. 4.4.1 et les références, arrêt du Tribunal fédéral 9C_678/2011 du 4 janvier 2012 consid. 3.1).

5.

5.1 En l’occurrence, les parties ne contestent pas que le statut de salarié de l’entreprise de M. C______ a fait l’objet d’une décision de l’intimée en août 2014, laquelle est entrée en force.

Il y a lieu de rappeler que lorsqu'une décision n'est plus susceptible de recours ordinaire, par exemple lorsque le délai de recours est échu sans avoir été utilisé, elle est définitive et bénéficie de la force de chose décidée. L'application du régime qu'elle établit est conforme à l'ordre juridique même si, en réalité, il est permis de penser que la décision était viciée (Pierre MOOR / Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd., Berne 2011, p. 378). Néanmoins, en vertu de l’art. 53 LPGA, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si l’assuré ou l’assureur découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits auparavant (al. 1). L’assureur peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu’elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (al. 2).

S’agissant en particulier de la révision, la personne assurée ou toute autre partie touchée par la décision ou la décision sur opposition a le droit de présenter une requête de révision à l'assureur social, que celui-ci doit examiner (Margrit MOSER-SZELESS in Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, n. 59 ad art. 53). L'assureur concerné doit statuer sur la demande de révision sous la forme d'une décision formelle susceptible d'opposition (arrêt du Tribunal fédéral 8C_121/2009 du 26 juin 2009 consid. 3.7).

5.2 En l’espèce, la qualité de décision des courriers d’octobre et novembre 2020 de l’intimée est pour le moins douteuse. En effet, ces correspondances ne tranchent pas des droits ou des obligations du recourant, pas plus qu’elles ne constatent ou ne rejettent des demandes dans ce sens, puisqu’elles se contentent de rappeler la décision déjà prise par l’intimée quant à la qualité de salarié de M. C______. Cela devrait en principe conduire à un jugement d’irrecevabilité, dès lors que le recours n’est pas dirigé contre une décision formelle ou matérielle. Cependant, le courrier du recourant du 12 novembre 2020 faisait apparemment valoir un fait et une preuve nouveaux, de sorte qu’il y a lieu d’interpréter ledit courrier comme une demande de révision, même si le recourant n’a pas expressément invoqué ce moyen. Or, l’intimée n’a pas formellement statué sur cette demande. Dans un cas similaire, le Tribunal fédéral a retenu qu’un jugement d’irrecevabilité devait être prononcé en l’absence de décision attaquable, et la cause transmise à l’assureur afin qu’il rende une décision sur la demande de révision conformément à l’art. 49 LPGA (arrêt du Tribunal fédéral 8C_21/2014 du 6 novembre 2014 consid. 5). Cela étant, dans le cas d’espèce, l’intimée n’a jamais formellement contesté la recevabilité du recours avant son écriture du 10 mars 2022, et les parties se sont très largement prononcées sur le fond, aussi bien sur l’existence de motifs de révision et de reconsidération que sur la nature dépendante ou non de l’activité déployée par M. C______ au sein de l’entreprise du recourant. Les conditions d’une extension de l’objet du litige sont donc remplies. Le principe d’économie de procédure justifie que la chambre de céans tranche le litige, plutôt que de déclarer le recours irrecevable faute de décision formelle et de renvoyer la cause à l’intimée pour qu’elle tranche la requête en révision.

Le recours sera ainsi considéré comme recevable, sans qu’il soit besoin de se déterminer sur l’existence d’un déni de justice.

6.              

6.1 Sur la délimitation entre activité indépendante et salariée, la chambre de céans rappelle ce qui suit.

Pour une personne qui exerce une activité lucrative, l'obligation de payer des cotisations dépend, notamment, de la qualification du revenu touché dans un certain laps de temps ; il faut se demander si cette rétribution est due pour une activité indépendante ou pour une activité salariée. Selon l'art. 5 al. 2 LAVS, on considère comme salaire déterminant toute rétribution pour un travail dépendant effectué dans un temps déterminé ou indéterminé ; quant au revenu provenant d'une activité indépendante, il comprend tout revenu du travail autre que la rémunération pour un travail accompli dans une situation dépendante (art. 9 al. 1 LAVS).

6.2 Les rapports de droit civil ou sur le plan fiscal ne sont pas décisifs pour savoir si l'on a affaire, dans un cas donné, à une activité indépendante ou salariée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_302/2016 du 28 février 2017 consid. 5.2). Cette question doit être tranchée en fonction des circonstances économiques concrètes (ATF 140 V 241 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_460/2015 du 18 novembre 2015 consid. 3.2).

6.3 Est réputé salarié, d'une manière générale, celui qui dépend d'un employeur quant à l'organisation du travail et du point de vue de l'économie de l'entreprise, et ne supporte pas le risque économique couru par l'entrepreneur. Ces principes ne conduisent cependant pas à eux seuls à des solutions uniformes, applicables schématiquement. Les manifestations de la vie économique revêtent en effet des formes si diverses qu'il faut décider dans chaque cas particulier si l'on est en présence d'une activité dépendante ou d'une activité indépendante en considérant toutes les circonstances de ce cas. Souvent, on trouvera des caractéristiques appartenant à ces deux genres d'activité ; pour trancher la question, on se demandera quels éléments sont prédominants dans le cas concret (ATF 123 V 161 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 19/06 du 14 février 2007 consid. 3.1). Selon la jurisprudence, les sous-traitants sont réputés exercer une activité dépendante. Leur activité ne peut être qualifiée d'indépendante que lorsque les caractéristiques de la libre entreprise dominent manifestement et que l'on peut admettre, d'après les circonstances, que l'intéressé traite sur un pied d'égalité avec l'entrepreneur qui lui a confié le travail (arrêt du Tribunal fédéral 9C_796/2014 du 27 avril 2015 consid. 3.3).

7.             La procédure de révision procédurale est soumise aux conditions suivantes.

7.1 Sont nouveaux au sens de l'art. 53 al. 1 LPGA les faits qui se sont produits jusqu'au moment où des allégations de faits étaient encore recevables dans la procédure principale, mais qui n'étaient pas connus du requérant malgré toute sa diligence. En outre, les faits nouveaux doivent être importants, c'est-à-dire qu'ils doivent être de nature à modifier l'état de fait à la base de l'arrêt entrepris et à conduire à un jugement différent en fonction d'une appréciation juridique correcte. Les preuves, quant à elles, doivent servir à prouver soit les faits nouveaux importants qui motivent la révision, soit des faits qui étaient certes connus lors de la procédure précédente, mais qui n'avaient pas pu être prouvés, au détriment du requérant (arrêt du Tribunal fédéral 9C_226/2014 du 19 mai 2014 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 175/0 du 29 novembre 2005 consid. 2.2).

7.2 Le moyen de preuve ne doit pas servir à l'appréciation des faits seulement, mais à l'établissement de ces derniers (ATF 138 V 324 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 183/04 du 28 avril 2005 consid. 2.2). Ainsi, il ne suffit par exemple pas qu'une nouvelle expertise donne une appréciation différente des faits; il faut bien plutôt des éléments de fait nouveaux, dont il résulte que les bases de la décision entreprise comportaient des défauts objectifs (arrêt du Tribunal fédéral 8C_368/2013 du 25 février 2014 consid. 5.1). Un moyen de preuve est important lorsqu'il y a lieu d'admettre qu'il aurait conduit à une solution différente si l'assurance en avait eu connaissance dans la procédure principale (ATF 143 V 105 consid. 2.3). La preuve doit établir de manière indiscutable (« eindeutig ») que l'état de fait retenu dans la procédure précédente était erroné (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 561/06 du 28 mai 2007 consid. 6.2 et les références)

7.3 Si les nouveaux moyens sont destinés à prouver des faits allégués antérieurement, le requérant doit aussi démontrer qu'il ne pouvait pas les invoquer dans la précédente procédure (ATF 127 V 353 consid. 5b). Une révision est en effet exclue lorsque le moyen de preuve pouvait être invoqué plus tôt. Il est ainsi uniquement possible d'invoquer un moyen de preuve qui était inconnu ou ne pouvait être produit avant, malgré la diligence du requérant. Il y a lieu de conclure à un manque de diligence lorsque la découverte de faits ou de moyens de preuve nouveaux résulte de recherches qui auraient pu et dû être effectuées dans la procédure précédente. On n'admettra qu'avec retenue qu'il était impossible à une partie d'alléguer un fait déterminé dans la procédure antérieure, car le motif de révision des faux nova ne doit pas servir à remédier aux omissions de la partie requérante dans la conduite de la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 4A_570/2011 du 23 juillet 2012 consid. 4.1). La révision ne doit ainsi pas servir à remédier à une négligence qui aurait pu être évitée (Ueli KIESER, ATSG-Kommentar, 4ème éd. 2020, n. 33 ad 53).  

7.4 Aux termes de l'art. 55 al. 1 LPGA, les points de procédure qui ne sont pas réglés de manière exhaustive aux art. 27 à 54 LPGA ou par les dispositions des lois spéciales sont régis par la PA. Selon l'art. 67 al. 1 PA, la demande de révision doit être adressée par écrit à l'autorité de recours qui a rendu la décision dans les 90 jours dès la découverte du motif de révision, mais au plus tard dans les dix ans dès la notification de la décision. Les règles sur les délais prévues à l'art. 67 PA s'appliquent à la révision procédurale d'une décision administrative selon l'art. 53 al. 1 LPGA (arrêt du Tribunal fédéral 9C_142/2018 du 24 avril 2018 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 465/04 du 16 juin 2005 consid. 1). S'agissant du point de départ du délai de 90 jours, en matière de preuve nouvelle, le requérant doit disposer d'un titre l'établissant ou en avoir une connaissance suffisante pour en requérir l'administration (arrêt du Tribunal fédéral 8F_10/2013 du 29 août 2013 consid. 4). De simples suppositions ou des rumeurs ne suffisent pas à établir une certitude suffisante et ne font ainsi pas courir le délai de révision (arrêt du Tribunal fédéral 4A_277/2014 du 26 août 2014 consid. 3.3).

7.5 En l’espèce, le recourant fait valoir que le jugement du Tribunal des prud’hommes justifierait la révision du statut décidé par l’intimée pour M. C______.

7.6 En tant que tel, le jugement du 3 juin 2020 ne constitue pas un fait nouveau au sens de l’art. 53 al. 1 LPGA. En effet, une décision judiciaire consiste à tirer les conséquences juridiques d’un état de fait déterminé, et relève ainsi de l’appréciation de questions de droit. De plus, la qualification des relations contractuelles entre le recourant et M. C______ par le Tribunal des prud'hommes ne lie pas l’intimée, comme cela ressort de la jurisprudence exposée ci-dessus. Le Tribunal fédéral a du reste expressément souligné dans une affaire où la juridiction des prud’hommes avait nié l’existence d’un contrat de travail que le jugement de cette instance n’avait pas d’incidence sur la qualification du statut par la caisse de compensation, les appréciations du juge civil et de l’AVS pouvant différer sur ce point (arrêt du Tribunal fédéral 9C_946/2009 du 30 septembre 2010 consid. 5.2.2). Partant, l’existence d’une décision divergente du Tribunal des Prud'hommes ne suffit pas à fonder une révision du statut de M. C______.

7.7 Le recourant fait également valoir que ce jugement révélerait des faits nouveaux et constituerait une preuve nouvelle. S’agissant du point de savoir si les témoignages recueillis dans le cadre de la procédure prud’homale relèvent de nouveaux moyens de preuve, on peut se référer par analogie à la jurisprudence fédérale, qui a considéré qu’il était douteux que des déclarations admises par le juge pénal puissent être qualifiées de nouveaux moyens de preuve dans une procédure portant sur la révision d'une décision en matière d'assurance-chômage (arrêt du Tribunal fédéral 8C_453/2007 du 17 mars 2008 consid. 5). Quoi qu’il en soit, cette question peut rester ouverte pour les motifs suivants. En premier lieu, les preuves prétendument nouvelles ressortant du jugement du Tribunal des Prud'hommes découlent des témoignages recueillis le 27 janvier 2020, qui ont fait l’objet de procès-verbaux établis à la même date. Ainsi, le recourant aurait dû requérir la révision de la décision dans les 90 jours après l’audition des témoins. Or, sa première demande en restitution date du 17 août 2020. Même s’il fallait l’assimiler à une requête en révision, elle serait tardive puisqu’elle est intervenue largement après le délai légal de 90 jours. De plus, la condition liée à l’impossibilité d’alléguer les faits nouveaux ou de produire le moyen de preuve en cause plus tôt n’est pas réalisée. En effet, le recourant était parfaitement au fait de l’organisation de l’activité dans l’entreprise, en particulier en ce qui concernait M. C______, puisqu’il la dirigeait. Les déclarations des témoins entendus par le Tribunal des prud'hommes portent ainsi sur des faits dont il avait connaissance à l’époque, et qu’il aurait été en mesure de faire valoir à l’appui d’une opposition à l’encontre de la décision de reprise des cotisations d’août 2014 déjà. On précisera qu’il aurait au besoin pu proposer dans ce cadre l’audition par l’intimée des témoins entendus par le Tribunal des prud’hommes, en vertu de son droit d’être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution (Cst. - RS 101). Cette garantie comprend notamment le droit pour l'intéressé de produire des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêt du Tribunal fédéral 8C_8/2012 du 17 avril 2012 consid. 1.2). Le recourant ne soutient d’ailleurs pas réellement le contraire, puisqu’il se réfère dans son argumentation à des éléments de fait inconnus de l’intimée, sans affirmer qu’il les aurait lui-même ignorés avant la procédure prud’homale.

7.8 Compte tenu de ces éléments, les conditions d’une révision procédurale ne sont pas réalisées.

8.             Par souci de complétude, la chambre de céans précisera ce qui suit au sujet de la reconsidération, que le recourant a également invoquée.

8.1 Par le biais de la reconsidération, on corrigera une application initiale erronée du droit (ATF 146 V 364 consid. 4.2). Une décision est manifestement erronée lorsqu’elle n’applique pas correctement le droit, par exemple lorsqu’elle se fonde sur des dispositions légales erronées. Tel n’est pas le cas lorsque le motif de reconsidération a trait à des conditions matérielles d’octroi, et que le point de savoir si ces conditions sont réalisées implique nécessairement l’exercice d’un certain pouvoir d’appréciation par l’autorité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_575/2007 du 18 octobre 2007 consid. 2.2). Une décision sur le statut d’indépendant ou de salarié n’est ainsi pas manifestement erronée lorsqu’elle concerne un cas-limite, comme c’est le cas lorsqu’un indépendant accomplit régulièrement pour le même mandant des travaux d’une certaine ampleur, lesquels pourraient également être exécutés par des travailleurs salariés (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1094/2009 du 31 mai 2010 consid. 3.7).

8.2 Selon la jurisprudence, l'administration n'est pas tenue de reconsidérer les décisions qui remplissent les conditions fixées. Elle en a simplement la faculté, et ni l'assuré ni le juge ne peuvent l'y contraindre. Cependant, lorsque l'administration entre en matière sur une demande de reconsidération et examine si les conditions requises sont remplies, avant de statuer au fond par une nouvelle décision de refus, celle-ci est susceptible d'être attaquée en justice. Le contrôle juridictionnel dans la procédure de recours subséquente se limite alors au point de savoir si les conditions d'une reconsidération - à savoir inexactitude manifeste de la décision initiale et importance notable de la rectification - sont réunies (arrêt du Tribunal fédéral 8C_82/2020 du 12 mars 2021 consid. 5.1). Une administration refuse d'entrer en matière sur une demande de reconsidération lorsqu'elle se borne à procéder à un examen sommaire de la requête et répète les motifs invoqués dans la décision initiale (ATF 117 V 8 consid. 2b/aa). Dans un tel cas, un recours auprès du juge doit être déclaré irrecevable, ce qui n’est pas contraire aux exigences constitutionnelle et conventionnelle sur l’accès au juge (arrêt du Tribunal fédéral 8C_866/2009 du 27 avril 2010 consid. 3). Malgré ce qui précède, il convient de rappeler que l’art. 41 du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants (RAVS - RS 831.101) précise que celui qui a payé des cotisations qu’il ne devait pas peut les réclamer à la caisse de compensation. Est réservée la prescription prévue à l’art. 16 al. 3 LAVS. Selon un auteur, cette disposition réglementaire confère à la caisse de compensation l’obligation de procéder à une reconsidération lorsqu’un intéressé l’exige (Ueli KIESER, Alters- und Hinterlassenenversicherung in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 3ème éd. 2016, n. 374). La jurisprudence a jusqu’ici laissé ouverte la question de savoir s’il existe un droit à la reconsidération d’une décision portant sur des cotisations AVS (arrêt du Tribunal fédéral 9C_185/2011 du 15 septembre 2011 consid. 3.2).

8.3 En l’espèce, l’analyse du statut de M. C______ reposait sur des éléments exigeant d’être appréciés par l’intimée, qui s’est également fondée sur les particularités en la matière découlant du droit international. Partant, on ne saurait conclure au caractère manifestement erroné de sa décision sur ce point.

Dans ces circonstances, les conditions d’une reconsidération ne sont pas remplies.

9.             Compte tenu de ce qui précède, la chambre de céans n’a d’autre choix que de rejeter le recours.

10.         Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA dans sa teneur jusqu'au 31 décembre 2020).

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

1.        Rejette le recours, dans la mesure de sa recevabilité.

2.        Dit que la procédure est gratuite.

3.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le