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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2030/2021

ATAS/304/2022 du 28.03.2022 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2030/2021 ATAS/304/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 28 mars 2022

6ème Chambre

 

En la cause

 

Monsieur A______, domicilié ______, à BELLEGARDE SUR VALSERINE, FRANCE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Thierry STICHER

 

recourant

 

contre

 

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, sise Fluhmattstrasse 1, LUCERNE, comparant avec élection de domicile en l’étude de Maître Didier ELSIG

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en 1968, a travaillé en tant que coursier pour le compte d'B______Sàrl (ci-après : B______) à compter du 16 juillet 2013. À ce titre, il a été assuré contre le risque d’accidents auprès de la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (ci-après : la SUVA ou l’assureur).

b. Le 24 novembre 2014, l’assuré est tombé dans un trou non signalé alors qu’il se rendait à pied chez un client. L’accident a entraîné un traumatisme de la cheville droite et une incapacité totale de travailler. Le cas a été pris en charge par la SUVA.

c. L’assuré a séjourné aux Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) du 24 novembre au 9 décembre 2014, afin de traiter une fracture tri-malléolaire complexe de la cheville droite, soit une fracture des deux malléoles et du bord postérieur du tibia. Lors de son séjour, il a notamment subi, en date du 3 décembre 2014, une ostéosynthèse de la cheville avec mise en place d’une plaque, de deux vis proximales et une vis distale. Suite à une gêne consécutive à cette intervention, il a encore subi une ablation de matériel d’ostéosynthèse (ci-après AMO) le 3 mars 2015.

d. Le 19 août 2015, l’assuré a été examiné par le docteur C______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et médecin d’arrondissement de la SUVA. Dans son rapport subséquent, le médecin a diagnostiqué une fracture tri-malléolaire cheville droite luxée, une raideur post-ostéosynthèse et une possible algodystrophie. Une nette limitation de la mobilité articulaire et des douleurs importantes à la marche persistaient, contraignant l'assuré à se déplacer avec une béquille. Un séjour à la Clinique romande de réadaptation de Sion était proposé (ci-après : CRR).

e. Du 15 septembre au 14 octobre 2015, l’assuré a séjourné à la CRR. À sa sortie, les médecins ont retenu que l’évolution était favorable mais que l’état de santé n’était pas stabilisé, notamment en raison d’une algoneurodystrophie du pied droit. La capacité de travail dans l’activité habituelle de coursier demeurait nulle et les limitations fonctionnelles suivantes étaient retenues : port de charges, accroupissements, agenouillements, position debout prolongée, marche et déplacements répétitifs même sur de courtes distances.

f. Le 28 octobre 2016, suite à des douleurs, l’assuré a subi une nouvelle AMO afin d’ôter la plaque latérale ainsi que certaines des vis fixées sur la cheville droite.

g. Suite à un litige entre les parties sur le calcul du montant de l’indemnité journalière, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après la chambre de céans) s’est déterminée par arrêt du 27 février 2017 (ATAS/149/2017). Elle a considéré qu’au moment de l’accident, l’assuré n’entendait pas rester au service d’B______ et qu’il avait notamment postulé auprès de ROLEX en tant que gestionnaire dans les ateliers de la société, ainsi qu’auprès de l’administration des douanes. En outre, même s’il était finalement demeuré à son poste auprès d’B______, il n’apparaissait pas, au degré de la vraisemblance prépondérante, que le taux d’occupation de l’intéressé et son salaire horaire eussent été augmentés sans l’accident. Il n’avait donc pas le droit à l’augmentation de son indemnité journalière, laquelle resterait calculée sur un gain assuré de CHF 27'040.-.

h. Le 31 janvier 2017, le Dr C______ a considéré, au terme de l’examen final requis par l’assureur, que l’état de l’assuré était désormais stabilisé. Il estimait qu’une activité adaptée était exigible à la journée entière, sans baisse de rendement.

i. Par pli du 10 mars 2017, l’assureur a mis un terme à la prise en charge des soins médicaux et des indemnités journalières avec effet au 31 juillet 2017.

j. Dès le 1er août 2017, l’assuré a bénéficié de mesures professionnelles, et donc d’indemnités journalières par l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI). Dans le cadre de ces mesures il a notamment effectué une formation de polissage auprès de l’IFAGE de février à septembre 2018 ainsi que des stages en entreprise à 50% auprès de D______ Sàrl (du 1er octobre 2018 au 26 juin 2019) puis auprès de E______ (du 26 août 2019 au 30 juin 2020).

k. Le 23 mars 2018, l’assuré s’est présenté à la consultation du pied de la CRR à la demande de la SUVA. Le diagnostic d’algodystrophie chronique forme froide était confirmé. L’évolution stagnait et il était recommandé de reprendre progressivement l’ergothérapie et la physiothérapie pour diminuer les douleurs à la cheville et permettre la mise en charge et le déroulement progressif du pied.

l. Par courrier du 13 juillet 2020 adressé à la SUVA, l’assuré a sollicité la reprise du versement des indemnités journalières LAA, vu la fin du stage professionnel et du versement des indemnités journalières AI au 30 juin 2020.

Il a transmis par la même occasion à l’assureur un courriel de la personne responsable des ressources humaines de E______SA à l’attention de l’OAI indiquant que, durant le stage en entreprise, la qualité du travail était bonne et le comportement excellent, mais la rapidité d’exécution était problématique, de sorte qu’il ne saurait prétendre à un « contrat traditionnel ».

Il lui a également communiqué une expertise judiciaire du 7 février 2020 du Professeur F______, spécialiste en chirurgie orthopédique, établie dans le cadre de la procédure civile pendante par-devant le Tribunal de première instance à l’encontre du propriétaire du terrain où s’était déroulé l’accident. Il ressortait notamment de l’expertise que :

-          L’assuré souffrait d’une algodystrophie sévère chronicisée accompagnée d’une gonalgie gauche et de lombalgies en lien avec une boiterie du membre inférieur droit.

-          Le lien de causalité entre ces troubles et l’accident était certain.

-          La capacité de travail était nulle dans une activité « de force » et s’élevait à 50% dans une activité sédentaire.

-          Il était possible d’espérer une amélioration de la capacité de travail mais il était difficile de formuler un pronostic.

m. Par pli du 24 juillet 2020, l’assureur a rappelé à l’assuré qu’à teneur de l’avis de son médecin d’arrondissement du 30 janvier 2017, son état était stabilisé depuis lors. Vu la fin des mesures professionnelles et des indemnités journalières de l’OAI, le droit à une rente LAA en sa faveur pouvait désormais être examiné.

n. Le 14 septembre 2020, le cas a été à nouveau soumis au médecin d’arrondissement pour un bilan final. L’assuré a été examiné le 1er décembre 2020 par le docteur G______, spécialiste en chirurgie orthopédique, lequel a délivré son rapport le lendemain. Il a retenu les diagnostics de fracture-luxation tri-malléolaire de la cheville droite et de CRPS (complex regional pain syndrome, soit un syndrome douloureux régional complexe) chronique du pied droit. La situation médicale objective était superposable à celle appréciée le 30 janvier 2017, lors de laquelle l’état était déjà considéré comme stabilisé. Les limitations fonctionnelles demeuraient les mêmes, de sorte que si l’activité antérieure à l’accident n’était plus exigible, l’activité actuelle de polisseur, ou toute autre activité sédentaire, l’était en revanche à temps complet et sans déficit de rendement. Concernant les troubles de gonalgie gauche, les lombalgies et l’état variqueux du membre inférieur gauche, tous mentionnés par le Pr F______ dans son expertise, le Dr G______ a considéré que leur lien de causalité naturelle avec l’accident était uniquement possible.

o. L’assuré a commencé à travailler comme polisseur à 50% auprès de D______ Sàrl du 2 novembre 2020 au 31 janvier 2021. Les rapports de travail ont pris fin pour des motifs économiques.

p. Depuis le 1er avril 2021, il travaille à un taux de 50% en tant que polisseur auprès de l’entreprise H______, ce pour une durée indéterminée. Durant les six premiers mois de travail, il a bénéficié d’une allocation d’initiation au travail de la part de l’OAI.

B. a. Par décision du 9 février 2021, la SUVA a octroyé à l’assuré une indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) en CHF 18'900.- correspondant à un déficit de 15%. Elle lui a en revanche nié tout droit à une rente, le degré d’invalidité s’élevant à 3% uniquement. Le gain d’invalide en CHF 65'009.- avait été calculé sur la base de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) pour un homme, niveau de compétence 2 avec un abattement de 10% lié aux limitations fonctionnelles, à savoir l’impossibilité de porter des charges et la nécessité de travailler assis. Le revenu réalisable sans accident était évalué à CHF 67'082.-.

b. L’assuré a formé opposition à cette décision le 15 mars 2021. Il a conclu à l’octroi d’une rente correspondant à un degré d’invalidité de 100% ainsi qu’à une IPAI de 30% au minimum, s’agissant d’une arthrose grave. Il a rappelé qu’à teneur de l’expertise judiciaire du Pr F______, sa capacité de travail dans une activité sédentaire était de 50%. La prise de morphine à raison de 0,2 mg de Temgesic le matin et 0,4 mg en début d’après-midi l’empêchait totalement de travailler l’après-midi et diminuait en outre probablement son rendement le matin. Cette diminution avait d’ailleurs été constatée lors de son stage auprès de E______SA. L’intéressé a également contesté le calcul de son revenu avec et sans invalidité. Il a rappelé qu’à teneur d’un courrier de son employeur de juin 2016 joint à l’opposition, il aurait pu prétendre, sans l’accident, à un salaire de CHF 72'960.- par an (valeur 2016). Quant au revenu d’invalide, il était nul ou pour le moins largement inférieur à celui retenu par la SUVA qui s’était basée sur des statistiques comprenant bon nombre d’activités non exigibles de sa part, et ne prenant en compte aucune diminution de rendement et aucun abattement. Le degré d’invalidité devait ainsi être corrigé et fixé à 100%.

L’assuré a produit un certificat médical de la Dresse I______ indiquant qu’il prenait du Temgesic deux fois par jour à raison de 0,4 mg et une fois par jour à raison de 0,2 mg. Il consommait également un Dafalgan le soir, en alternance avec un Co-Dafalgan, ainsi que du Lyrica à raison de 200 mg 3 fois par jour contre la douleur. La morphine pouvait occasionner des symptômes tels que ralentissement, somnolence ou fatigue. La capacité de travail de 50% dans une activité sédentaire semblait convenable. La Dresse I______ a considéré qu’il lui était difficile d’évaluer une diminution de rendement. Elle pouvait « imaginer une diminution de son rendement notamment de 10% liée à l’utilisation des dérivés de morphine ».

L’assuré a encore déposé une copie du jugement du 10 décembre 2020 du Tribunal de première instance (JTPI/15323/2020), considérant notamment l’expertise du Pr F______ comme probante en ce qu’elle indiquait que l’intéressé était en incapacité de travail à 50% et que cette incapacité se trouvait dans un rapport de causalité naturelle et adéquate avec l’accident.

c. Le 21 avril 2021, l’assuré a déposé, en complément à son opposition, un certificat du 14 avril 2021 du Docteur J______, spécialiste en traitement interventionnel de la douleur auprès de la clinique de la douleur, confirmant le diagnostic de CRPS, objectivé par les critères de Budapest, avec une évolution décrite comme longue et défavorable.

d. Le 12 mai 2021 l’assureur a rendu une décision sur opposition confirmant sa décision du 9 février 2021. L’évaluation du revenu sans invalidité selon les données salariales de l’ESS (branche H, 49-53, transports et entreposage) était justifiée, l’intéressé n’ayant pas rendu vraisemblable qu’il aurait perçu un gain supérieur. Quant au revenu d’invalide, il avait été fixé sur la base des données de l’ESS pour un homme, niveau de compétence 2, soit celui correspondant à l’activité de polisseur. Selon le médecin d’arrondissement, une telle activité était en parfait accord avec les limitations fonctionnelles retenues en 2017 déjà et était donc exigible à 100% sans perte de rendement. L’assureur avait en outre procédé à un abattement de 10% en raison des limitations fonctionnelles liées à son état de santé.

L’évaluation de l’IPAI était par ailleurs conforme au barème fixé par le Conseil fédéral, l’assuré se situant, sur la base de l’examen médical du Dr C______ du 30 janvier 2017, dans un cas analogue à un cas d’arthrose de gravité intermédiaire

C. a. L’assuré, représenté par un avocat, a formé recours contre cette décision le 9 juin 2021. Il a développé les mêmes griefs que dans l’opposition du 15 mars 2021, évaluant son invalidité à 88%, ouvrant un droit à une rente de 80%. La capacité de travail était de 50% dans une activité sédentaire. Il convenait encore de procéder sur celle-ci à un abattement de 25% et enfin de prendre en compte, toujours sur la capacité résiduelle, une perte de rendement de 50%. Concernant l’IPAI, au vu de la prise d’antalgiques puissants au quotidien, l’atteinte devait être considérée comme grave, ce qui justifiait une indemnité de 30%. Même si par impossible elle devait être considérée comme de gravité moyenne, le caractère sévère de l’atteinte et des douleurs, constaté par l’expertise judiciaire et la Clinique de la douleur, justifiait une IPAI de 30%, le cas se situant à la limite entre une arthrose moyenne et grave. Le recourant a enfin sollicité, au titre de conclusion préalable, qu’une expertise judiciaire soit ordonnée sous la forme de mesures d’observations professionnelles.

b. L’intimée a répondu au recours le 1er juillet 2021, persistant dans les termes de la décision entreprise. Tant les gains hypothétiques de valide et d’invalide que l’IPAI avaient été calculés de manière conforme au droit. Pour ce qui était du gain sans invalidité, il était justifié de le calculer sur la base des données de l’ESS, niveau de compétence 1, respectivement celui d’un transporteur/entreposeur. Le recourant n’avait pas démontré que ses revenus auraient augmenté s’il avait été en mesure de continuer à travailler pour l’entreprise B______. En outre, sa profession de coursier s’exerçant exclusivement à pied et en transports publics, elle ne permettait pas de retenir le niveau de compétence 2 de l’ESS. Concernant ensuite le gain d’invalide, l’intimée rappelait que, selon le rapport du Dr G______ du 1er décembre 2020, les gonalgies, lombalgies et l’état variqueux du membre inférieur gauche n’entraient pas dans un rapport de causalité avec l’accident. La prise d’antalgiques dérivés de la morphine n’avait pas d’incidence sur sa capacité de travail ou sur son rendement. L’abattement de 10% appliqué était donc bien conforme aux limitations fonctionnelles. Enfin, il se justifiait de retenir le niveau de compétence 2 des statistiques de l’ESS pour l’évaluation du gain avec invalidité, vu notamment que ce niveau correspondait à diverses tâches pratiques et que le recourant était au bénéfice de plusieurs certificats d’aptitude professionnelle (CAP).

Quant à l’IPAI, le recourant ne démontrait pas, du point de vue médical, que l’arthrose dont il souffrait justifiait de retenir un taux supérieur à celui de 15% évalué par le médecin d’arrondissement.

c. Par réplique du 30 août 2021, le recourant a persisté dans les conclusions de son recours. Il a souligné que les médicaments qu’il prenait avaient chez lui des effets secondaires importants et limitaient concrètement sa capacité de travail résiduelle, comme attesté par un certificat médical de la Dresse I______ du 27 août 2021 qu’il a produit à la procédure.

d. Par duplique du 13 septembre 2021, l’intimée a maintenu sa décision sur opposition. Concernant les effets secondaires des médicaments, leur impact réel sur la capacité de travail et le rendement n’était pas prouvé.

e. Par ordonnance du 18 janvier 2022, la chambre de céans a requis de l’OAI la production du dossier du recourant, lequel lui a été remis le 24 janvier 2022. Il en est ressorti qu’en dernier lieu, à teneur de la motivation de la décision transmise le 21 décembre 2021 à la caisse suisse de compensation, l’OAI a considéré que la capacité de travail était entière dans une activité adaptée, dès le 30 janvier 2017. Le revenu avec invalidité retenu par l’OAI s’élevait à CHF 69'984.-. Il était calculé sur la base de l’ESS 2018 pour un homme, ligne 26. Le recourant, en ne travaillant qu’à 50%, n’exploitait pas sa pleine capacité de travail résiduelle dans une activité adaptée. Quant au revenu sans invalidité, il était fondé sur les mêmes statistiques, lignes 49-53, et s’élevait à CHF 67'082.-. Il n’y avait donc aucune perte de gain.

f. Invitée à se déterminer sur le contenu du dossier de l’OAI, l’intimée a persisté dans ses conclusions par courrier du 4 février 2022. Ses médecins et l’OAI étaient en effet unanimes sur la capacité totale de travailler du recourant dans une activité adaptée. Son choix de n’œuvrer qu’à 50% ne relevait ainsi pas de la responsabilité de l’assureur-accidents.

g. Par pli du 22 février 2022, le recourant a également persisté dans les termes et conclusions de son recours. Il ne pouvait pas travailler à un taux plus élevé que 50%, comme cela ressortait d’ailleurs de l’expertise judiciaire du Pr F______.

h. La cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2017 est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015 de la LAA. Dans la mesure où l'accident est survenu avant cette date, le droit du recourant aux prestations d'assurance est soumis à l'ancien droit (cf. dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront citées ci-après dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2016.

4.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

5.             Le litige porte sur le taux d’invalidité du recourant, singulièrement sur sa capacité de travail, le calcul de ses gains avec et sans invalidité ainsi que sur l’évaluation de son IPAI.

6.             Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA; ATF 129 V 402 consid. 2.1, ATF 122 V 230 consid. 1 et les références).

7.             La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1; ATF 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

7.1 Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé : il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1, ATF 119 V 335 consid. 1 et ATF 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement « post hoc, ergo propter hoc » ; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb ; RAMA 1999 n° U 341 p. 408, consid. 3b). Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré.

7.2 Les notions de syndrome douloureux régional complexe (CRPS - Complex regional pain syndrome en anglais), algodystrophie ou maladie de Suedeck appartiennent aux maladies neurologiques, orthopédiques et traumatologiques et constituent ainsi une atteinte à la santé physique, respectivement corporelle (arrêt du Tribunal fédéral 8C_955/2008 du 29 avril 2009 consid. 6). Ils désignent, en médecine, un état maladif post-traumatique, qui est causé par un traumatisme bénin, qui se transforme rapidement en des douleurs importantes et individualisées avec des sensations de cuisson, qui s’accompagnent de limitations fonctionnelles de type moteur, trophique ou sensori-moteur. Toute une extrémité ou une grande partie d’une zone du corps est touchée. Les causes peuvent non seulement être une distorsion d’une articulation mais aussi, par exemple, un infarctus. La discordance entre le traumatisme à l’origine, qui peut en réalité être qualifié de bagatelle, et les conséquences est importante. L’étiologie et la pathogenèse de ce syndrome ne sont pas claires. C’est pourquoi, selon la jurisprudence, pour qu’un tel syndrome puisse constituer la conséquence d’un accident, les trois critères suivants doivent être réalisés : a) la preuve d'une lésion physique (comme par exemple un hématome ou une contusion) après un accident ou l'apparition d'une algodystrophie à la suite d'une opération nécessitée par l'accident; b) l'absence d'un autre facteur causal de nature non traumatique (comme par exemple : état après infarctus du myocarde, après apoplexie, après ou lors de l’ingestion de barbituriques, lors de tumeurs, de grossesses; etc.) et une courte période de latence entre l'accident et l'apparition de l'algodystrophie, soit au maximum six à huit semaines (arrêts du Tribunal fédéral 8C_871/2010 du 4 octobre 2011 consid. 3.2 et 8C_384/2009 du 5 janvier 2010 consid. 4.2.1 in SVR 2010 UV n° 18 p. 69). Pour admettre un lien de causalité naturelle, il n'est pas déterminant que le diagnostic ait été posé dans les six à huit semaines après l’accident, mais que sur la base de constatations médicales fournies en temps réel, on puisse conclure que durant cette période de latence l'assuré a souffert au moins en partie des symptômes typiques de ce diagnostic. La causalité naturelle peut également être admise si le syndrome fait suite à une opération en lien avec l'accident (arrêt du Tribunal fédéral 8C_27/2019 du 20 août 2019 consid. 6.4.2 et les références citées).

7.3 Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2 et ATF 125 V 456 consid. 5a et les références). En présence d'une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose toutefois guère, car l'assureur-accidents répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l'expérience médicale (ATF 118 V 286 consid. 3a et ATF 117 V 359 consid. 5d/bb; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 351/04 du 14 février 2006 consid. 3.2).

8.             Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b).

8.1 Le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 125 V 351 consid. 3b/aa et les références).

8.2 Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Etant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Dans une procédure portant sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurances sociales, lorsqu'une décision administrative s'appuie exclusivement sur l'appréciation d'un médecin interne à l'assureur social et que l'avis d'un médecin traitant ou d'un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes suffisants quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l'un ou sur l'autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l'art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 135 V 465 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 9C_301/2013 du 4 septembre 2013 consid. 3).

8.3 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C/973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

8.4 On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. A cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; SVR 2008 IV n. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_751/2010 du 20 juin 2011 consid. 2.2).

9.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

10.         Si l'assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite de l'accident, il a droit à une rente d'invalidité (art. 18 al. 1 LAA). Le droit à la rente prend naissance dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de l'assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l'assurance-invalidité ont été menées à terme (art. 19 al. 1, 1ère phrase, LAA).

11.         Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA). En règle ordinaire, il s'agit de chiffrer aussi exactement que possible ces deux revenus et de les confronter l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité. Dans la mesure où ils ne peuvent être chiffrés exactement, ils doivent être estimés d'après les éléments connus dans le cas particulier, après quoi l'on compare entre elles les valeurs approximatives ainsi obtenues (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 29 consid. 1 ATF 130 V 343 consid. 3.4). Dans ce contexte, on évaluera le revenu que l'assuré pourrait encore réaliser dans une activité adaptée avant tout en fonction de la situation concrète dans laquelle il se trouve. Lorsqu'il a repris l'exercice d'une activité lucrative après la survenance de l'atteinte à la santé, il faut d'abord examiner si cette activité est stable, met pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle et lui procure un gain correspondant au travail effectivement fourni, sans contenir d'élément de salaire social. Si ces conditions sont réunies, on prendra en compte le revenu effectivement réalisé pour fixer le revenu d'invalide (ATF 129 V 472 consid. 4.2.1 5; ATF 126 V 75 consid. 3b/aa).

12.         Aux termes de l'art. 24 LAA, si par suite d'un accident, l'assuré souffre d'une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique, il a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l'intégrité (al. 1). L'indemnité est fixée en même temps que la rente d'invalidité ou, si l'assuré ne peut prétendre une rente, lorsque le traitement médical est terminé (al. 2). D'après l'art. 25 LAA, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité est allouée sous forme de prestation en capital (al. 1, 1ère phrase); elle ne doit pas excéder le montant maximum du gain annuel assuré à l'époque de l'accident et elle est échelonnée selon la gravité de l'atteinte à l'intégrité (al. 1, 2ème phrase). Elle est également versée en cas de maladie professionnelle (cf. art. 9 al. 3 LAA). Le Conseil fédéral édicte des prescriptions détaillées sur le calcul de l'indemnité (al. 2).

L'indemnité pour atteinte à l'intégrité est une forme de réparation morale pour le préjudice immatériel (douleurs, souffrances, diminution de la joie de vivre, limitation des jouissances offertes par l'existence etc.) subi par la personne atteinte, qui perdure au-delà de la phase du traitement médical et dont il y a lieu d'admettre qu'il subsistera la vie durant. Elle n'a pas pour but d'indemniser les souffrances physiques ou psychiques de l'assuré pendant le traitement, ni le tort moral subi par les proches en cas de décès. L'indemnité pour atteinte à l'intégrité se caractérise par le fait qu'elle est exclusivement fixée en fonction de facteurs médicaux objectifs, valables pour tous les assurés, et sans égard à des considérations d'ordre subjectif ou personnel (arrêt du Tribunal fédéral 8C_703/2008 du 25 septembre 2009 consid. 5.1 et les références). En cela, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité se distingue de la réparation morale selon le droit civil, qui n'implique pas une atteinte durable et qui vise toutes les souffrances graves liées à une lésion corporelle (ATF 133 V 224 consid. 5.1 et les références). Contrairement à l’évaluation du tort moral, la fixation de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité peut se fonder sur des critères médicaux d’ordre général, résultant de la comparaison de séquelles similaires d’origine accidentelle, sans qu’il soit nécessaire de tenir compte des inconvénients spécifiques qu’une atteinte entraîne pour l’assuré concerné. En d’autres termes, le montant de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité ne dépend pas des circonstances particulières du cas concret, mais d’une évaluation médico-théorique de l’atteinte physique ou mentale, abstraction faite des facteurs subjectifs (ATF 115 V 147 consid. 1; ATF 113 V 218 consid. 4b et les références; voir aussi ATF 125 II 169 consid. 2d).

13.         Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, les autorités administratives et les juges des assurances sociales doivent procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raison pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Ils ne peuvent ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, ils doivent mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 283 consid. 4a; RAMA 1985 p. 240 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151 consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

14.         En l’espèce, il convient tout d’abord d’évaluer la capacité de travail du recourant. Or, si les parties s’accordent quant au fait qu’elle est nulle dans son activité habituelle, elles s’opposent sur son taux dans une activité adaptée. Elles sont également en désaccord pour ce qui est d’une éventuelle diminution de rendement ainsi que sur le lien de causalité entre l’accident et certaines atteintes alléguées incapacitantes, à savoir les gonalgies, les lombalgies et l’état variqueux du membre inférieur gauche.

14.1 L’intimée retient ainsi, une capacité de 100% sans baisse de rendement dans une activité sédentaire. Elle se base pour l’essentiel sur l’examen du Dr G______ du 1er décembre 2020 dont les résultats sont, selon les dires du médecin, superposables, à ceux du Dr C______ du 30 janvier 2017. L’état serait donc stabilisé depuis lors et les nouveaux documents versés à la procédure n’apporteraient aucun élément permettant d’évaluer la situation différemment.

14.2 Le recourant considère en revanche que sa capacité de travail est de 50% dans une activité sédentaire. Il se fonde notamment sur l’expertise judiciaire du Pr F______ du 7 février 2020 et sur différents certificats médicaux de la Dresse I______. Selon cette dernière, le rendement serait par ailleurs réduit de 10% du fait des douleurs et surtout du traitement y relatif. Enfin, à teneur du rapport médical du Dr J______ du 14 avril 2021 qu’il a également produit, son état de santé ne serait pas stabilisé, le CRPS connaissant une évolution longue et difficile.

15.         Il appartient à la chambre de céans d’évaluer la valeur probante des rapports produits.

15.1 Concernant tout d’abord le rapport du Dr G______ du 1er décembre 2020, s’il liste bel et bien les documents médicaux figurant au dossier, il ne les prend visiblement pas en compte lors de l’élaboration de son évaluation finale qui renvoie pour l’essentiel à celle que son prédécesseur, le Dr C______, a effectuée près de quatre ans auparavant. Ce procédé n’est guère satisfaisant, si l’on rappelle que le rapport de janvier 2017 était d’ores et déjà peu argumenté et que, dans l’intervalle, de nombreux éléments nouveaux ont été portés au dossier, soit notamment l’expertise judiciaire du Pr F______ aboutissant à des conclusions divergentes. Cette expertise considérée comme probante par le Tribunal de première instance dans le cadre de la procédure civile, ainsi que tous les rapports médicaux de la médecin traitante attestant d’une capacité de travail à 50% dans une activité sédentaire sont écartés par le médecin d’arrondissement au seul motif qu’ils « ne contiennent pas d’éléments médicaux susceptibles de faire modifier l’appréciation médicale finale du 30.01.2017 ».

La chambre de céans considère pourtant que ces éléments génèrent, pour le moins, un doute raisonnable quant à la capacité de travail effective du recourant dans une activité adaptée, ainsi que concernant son rendement, de sorte qu’un examen approfondi de ces aspects était justifié. Tel est d’autant plus le cas que le Dr J______ semble indiquer que la situation se détériore et qu’elle ne serait donc pas superposable, au moment de la décision sur opposition, avec celle qui prévalait en janvier 2017. Au vu notamment de ces divergences, l’argumentaire du Dr G______ sur lequel se fonde essentiellement l’intimée est insuffisamment motivé et ne prend pas assez en compte les éléments médicaux figurant au dossier pour pouvoir être considéré comme convaincant. De manière générale, force est de constater que l’instruction médicale est lacunaire et que l’intimée n’a pas même sollicité de rapports complets et détaillés émanant des médecins traitants. Le fait que l’OAI arrive à des conclusions médicales proches de celles de l’intimée pour ce qui est de la capacité de travail ne modifie pas l’appréciation de la situation, l’analyse du dossier de l’assurance-invalidité laissant apparaître que dites conclusions sont elles-mêmes largement fondées sur l’instruction des médecins de la SUVA, considérée comme lacunaire par la chambre de céans.

15.2 Pour autant la chambre de céans relève que, si les rapports des médecins traitants génèrent un doute relativement aux aspects précités, ils ne suffisent pas non plus à les trancher, faute de contenir tous les éléments formels nécessaires pour se voir reconnaître valeur probante selon la jurisprudence, eu égard notamment à leur faible densité de motivation et à plusieurs contradictions entre eux.

16.         Dans ces circonstances, l’intimée n’ayant pas suffisamment instruit la situation médicale du recourant depuis janvier 2017, il conviendra de lui renvoyer la cause, afin qu’elle mette en œuvre une expertise portant notamment sur les atteintes à la santé qu’il présente, leurs éventuelles répercussions sur sa capacité de travail dans une activité sédentaire, les éventuelles limitations fonctionnelles et diminution de rendement y relatives (y compris celles qui découleraient de la prise de médicaments par le recourant), ainsi que sur le lien de causalité entre l’accident du 24 novembre 2014 et chacune des atteintes retenues, dont le CRPS. Il conviendra que l’expertise soit effectuée par un spécialiste en orthopédie, qui pourra requérir, cas échéant, l’assistance d’autres spécialistes pour les questions éventuelles ne relevant pas de son champ de compétence. Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, la désignation de l’expert devra se faire de manière consensuelle (Arrêt du Tribunal fédéral 9C_908/2012 du 22 février 2013 consid. 5.1, ATF 137 V 210 consid. 3.4.2.6).

16.1 Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis, la décision sur opposition du 12 mai 2021 sera annulée et la cause renvoyée à l’intimée pour instruction complémentaire et nouvelle décision. Celle-ci devra également porter sur la question de l’IPAI, dans la mesure où les résultats de l’expertise auront potentiellement une incidence sur son taux (détermination de la nature précise et l’intensité de l’atteinte à prendre en compte).

16.2 Vu le renvoi de la cause à l’intimée pour instruction complémentaire, les griefs relatifs au calcul des revenus avec et sans invalidité, ainsi qu’à l’évaluation de l’IPAI ne seront pas examinés.

16.3 Le recourant obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 2'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

16.4 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.             Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.             L’admet partiellement.

3.             Annule la décision de l’intimée du 12 mai 2021.

4.             Renvoie la cause à l’intimée pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

5.             Alloue au recourant, à charge de l’intimée, une indemnité de CHF 2’500.- à titre de participation à ses frais et dépens.

6.             Dit que la procédure est gratuite.

7.             Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le