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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1594/2021

ATAS/177/2022 du 17.02.2022 ( APG ) , RATIONE LOCI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1594/2021 ATAS/177/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 février 2022

3ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à CHÉSEREX

 

 

recourante

 

contre

CAISSE INTERPROFESSIONNELLE AVS DE LA FÉDÉRATION DES ENTREPRISES ROMANDES FER CIAM 106.1, sise rue de Saint-Jean 98, Genève

 

 

 

intimée

 


 

 

EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après l’assurée), née en 1984, travaille en qualité d’avocate indépendante. Elle est affiliée à ce titre à la CAISSE INTERPROFESSIONNELLE AVS DE LA FÉDÉRATION DES ENTREPRISES ROMANDES FER CIAM 106.1 (ci-après la caisse).

b. La caisse a versé à l’assurée des allocations en cas de perte de gain en lien avec le COVID-19 pendant 29 jours durant la période du 22 mars au 30 avril 2020, puis pendant 10 jours dès le 1er mai 2020, eu égard à l’absence de solution de garde pour les trois enfants de l'intéressée, résultant des mesures instaurées en raison de la pandémie.

c. Le 18 septembre 2020, la caisse, constatant que l'assurée avait été indemnisée à hauteur de dix allocations au lieu d’une seule pour le mois de mai 2020, lui a réclamé la restitution d’un montant de CHF 1'670.90.

d. Saisie d’une nouvelle demande de l’assurée tendant à l’octroi d’une allocation en cas de perte de gain COVID-19 hebdomadaire dès le 13 mai 2020, la caisse l’a rejetée par décision du 21 janvier 2021, au motif que le droit à ces prestations était limité à 30 indemnités pour les indépendants sans solution de garde pour leurs enfants durant la période du 16 mars au 17 septembre 2020, conformément au droit alors en vigueur. La caisse a également requis la restitution du montant de CHF 1'670.90 correspondant aux allocations indûment versées.

e. Saisie d’une opposition de l’assurée du 22 février 2021, la caisse l’a écartée par décision du 23 mars 2021. Il était mentionné qu’un éventuel recours devait être adressé à la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de Genève.

B. a. Par écriture du 7 mai 2021, l’assurée a interjeté recours contre la décision de l’intimée auprès de la Chambre de céans en concluant, sous suite de dépens, à ce que lui soit reconnu le droit aux indemnités journalières pour la période du 17 mars au 11 mai 2020 puis du 11 mai au 30 juin 2020.

b. L’intimée conclut au rejet du recours.

c. Le 18 janvier 2022, la Chambre de céans a demandé à la recourante quels étaient les taux correspondant à son activité d'indépendante, d'une part, à son activité salariée, d'autre part.

d. Un délai lui était imparti pour ce faire.

 

 

 

 

EN DROIT

 

1.             S’agissant de sa compétence à raison du lieu, la Chambre de céans relève ce qui suit.

1.1 Selon l’art. 58 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1), le tribunal des assurances compétent est celui du canton de domicile de l’assuré ou d’une autre partie au moment du dépôt du recours (al. 1). Le tribunal qui décline sa compétence transmet sans délai le recours au tribunal compétent (al. 3).

1.2 La LPGA est applicable aux allocations prévues par l’ordonnance sur les mesures en cas de pertes de gain en lien avec le coronavirus (ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 – RS 830.31), à moins que ses dispositions n’y dérogent expressément (cf. art. 1 de ladite ordonnance).

1.3 En ce qui concerne la compétence territoriale des tribunaux cantonaux des assurances sociales en matière d’allocations en cas de perte de gain COVID-19, la jurisprudence fédérale est la suivante.

1.3.1 Dans un arrêt du 7 juin 2021 (9C_738/2020), le Tribunal fédéral a considéré que si l’on se fonde sur le texte de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, cette question paraît résolue par le renvoi à la LPGA et l'absence de dérogation expresse sur ce point.

Il y a néanmoins lieu de se demander si cette solution correspond également au véritable sens de la réglementation et à la volonté du Conseil fédéral (consid. 3.1). Au premier plan de cette analyse, il faut rappeler que l'indemnisation en vertu de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 ne vise pas à créer un nouveau système pour sa mise en œuvre et la procédure, mais à s’appuyer sur celui prévu par la loi fédérale sur les allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité du 25 septembre 1952 (LAPG - RS 834.1).

Cette circonstance plaide clairement en faveur d'une application par analogie de l'art. 24 al. 1 LAPG, lequel dispose qu’en dérogation à l’art. 58 al. 1 LPGA, les décisions et les décisions sur opposition prises par les caisses cantonales de compensation peuvent faire l’objet d’un recours au tribunal des assurances du canton où la caisse de compensation a son siège. De plus, l’art. 8 de l’ordonnance prévoit que l’allocation est fixée et versée par la caisse de compensation AVS responsable de la perception des cotisations AVS avant la naissance du droit à l’allocation. Ainsi, en matière de compétence, il existe également un lien avec le système de l’AVS, qui déroge également à la règle instaurée par l’art. 58 al. 1 LPGA en matière de compétence territoriale des tribunaux dans le cadre de recours cantonaux. En effet, l’art. 84 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10) a une teneur identique à l’art. 24 al. 1 LAPG.

Compte tenu de la connexité aux plans matériel et formel des allocations en cas de perte de gain en lien avec le COVID-19 avec la LAPG et la LAVS, il serait contraire à la systématique de s’écarter de ces lois dans l’application de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 (consid. 3.2). Notre Haute Cour en a inféré que, compte tenu de la volonté claire du Conseil fédéral de s’en tenir au for prévu par la LAPG, et de la compétence des caisses de compensation réglée de manière analogue à la LAVS, le renvoi à la LPGA prévu à l’art. 1 de l’ordonnance ne porte pas sur la compétence territoriale des tribunaux cantonaux. Au contraire, le tribunal compétent est – par analogie avec l’art. 24 al. 1 LAPG – celui du canton où la caisse de compensation à son siège. Une telle solution se justifie du reste également par l’intérêt à une jurisprudence uniforme. Il est en effet judicieux que les décisions d’une même caisse de compensation soient examinées par la même instance judiciaire cantonale (consid. 3.3).

1.3.2 Par la suite, dans un arrêt destiné à la publication, après avoir rappelé les principes dégagés dans l’arrêt précité du 7 juin 2021, notre Haute Cour a souligné que l’art. 24 al. 1 LAPG n’était applicable qu’aux caisses cantonales de compensation, conformément à sa lettre. Il ne règle cependant pas a contrario la situation lorsque la décision attaquée émane d’une caisse de compensation professionnelle (Verbandsausgleichskasse). Dans un tel cas, est compétent, selon l’art. 1 LAPG et l’art. 58 al. 1 LPGA, le tribunal des assurances sociales du canton de domicile de l’assuré ou d’une autre partie lors du dépôt du recours. Cette solution correspond à la volonté du législateur, qui lors de l’entrée en vigueur de la LPGA, s’en est volontairement tenu à la réglementation qui prévalait jusqu’alors en matière de for (arrêt du Tribunal fédéral 9C_132/2021 du 15 septembre 2021 consid. 1).

1.3.3 On précisera encore que l’art. 58 al. 1 LPGA est formulé de manière différente en allemand, puisqu’il établit le for au domicile de l’assuré ou d’une autre partie recourante (« Der Beschwerdeführende Dritte »). Cela exclut le for au siège de l’assureur intimé, qui n’est pas un tiers au sens de cette disposition. En outre, les fors institués par cette disposition sont impératifs (Jean MÉTRAL in Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales [LPGA], Basel 2018, nn. 2 et 4 ad art. 58).

1.4 En l’espèce, l’intimée, fondée par la FÉDÉRATION DES ENTREPRISES ROMANDES, n’est pas une caisse de compensation cantonale, mais une caisse de compensation professionnelle. Dès lors que la recourante est domiciliée dans le canton de Vaud, conformément à ce qui précède, la Chambre de céans n’est pas compétente à raison du lieu pour connaître de son recours, qui doit, partant être transmis à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois.

2.             Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

1.      Décline sa compétence ratione loci.

2.      Transmet le recours à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois comme objet de sa compétence.

3.      Dit que la procédure est gratuite.

4.      Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

Marie-Catherine SÉCHAUD

 

La Présidente

 

 

Karine STECK

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le