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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4272/2020

ATAS/1142/2021 du 11.11.2021 ( CHOMAG ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4272/2020 ATAS1142/2021/

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 11 novembre 2021

3ème Chambre

En la cause

Madame A______, domiciliée à BELLEVUE

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, Service juridique, rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


 

 

EN FAIT

 

A.      a. Le 10 août 2020, Madame A______ (ci-après : l’assurée), née en 1995, s'est inscrite à l'office cantonal de l'emploi (ci-après : l'OCE). Elle a déclaré rechercher un emploi à un taux d'activité de 63% dès le 25 août 2020.

Le 24 août 2020, l'assurée a commencé sa deuxième année de formation auprès de l'Institut universitaire de formation des enseignants (ci-après : IUFE) de l'Université de Genève (ci-après : UNIGE) pour l'obtention de la maîtrise universitaire avancée en enseignement secondaire I et II (ci-après : MASE).

b. Interpellée par l'OCE qui examinait la question de son aptitude au placement, l'assurée a produit : son horaire en MASE pour l'année académique 2020-2021, une lettre d'attribution de stage en accompagnement pour l'année scolaire 2020-2021 au Collège B______, l'horaire des cours de son enseignante d'accueil de stage pour l'année scolaire 2020-2021 et des échanges de courriels avec la directrice du Collège B______ pour la période courant de juin à août 2020.

Elle a expliqué participer, dans le cadre de sa formation, à des ateliers (le vendredi, de 8h00 à 12h00), à des cours (le mercredi, de 15h15 à 17h00) et à un stage non rémunéré, consistant essentiellement à assister aux classes de son enseignante d'accueil au Collège Voltaire (les mardi, jeudi et vendredi). En fonction de ses cours à l'IUFE, elle devrait parfois suivre d'autres classes avec son enseignante d'accueil pour obtenir le nombre d'heures attendu.

B.       Par décision du 28 août 2020, confirmée sur opposition le 14 décembre 2020, l'OCE a reconnu l'assurée apte au placement à raison d'une disponibilité maximale de 50% dès le 25 août 2020. Sa formation, l'occupant à mi-temps, ne lui laissait aucune disponibilité pour prendre un emploi les mardi et mercredi après-midi, le jeudi matin et le vendredi toute la journée.

C.       a. Le 16 décembre 2020, l'assurée a interjeté recours auprès de la Cour de céans en concluant, en substance, à ce qu'il soit constaté qu'elle est disponible à l'emploi à hauteur de 65.99%.

b. À l'appui de sa position, la recourante produit : son contrat de stage en responsabilité pour l'année 2019-2020, ses fiches de salaire de juin et août 2020, des décomptes d'activités ponctuelles de mai et juin 2020, ses horaires de cours de première et deuxième année en MASE, l'horaire de son enseignante d'accueil pour son stage en accompagnement avec ses notes manuscrites, une fiche informative sur les « sources de revenu et aides financières disponibles pour les enseignants en formation à l'IUFE », son nouveau contrat pour remplacement de longue durée (du 25 janvier au 2 juillet 2021) et l'horaire des cours en remplacement, ainsi que des décomptes de prestations de sa caisse de chômage.

c. Invité à se déterminer, l'intimé conclut au rejet du recours.

EN DROIT

 

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        En vertu de l'art. 1 al. 1 et 2 LACI, les dispositions de la LPGA, à l'exclusion de ses art. 21 et 24 al. 1, s'appliquent à l'assurance-chômage obligatoire et à l'indemnité en cas d'insolvabilité.

3.        Interjeté dans les formes et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 à 60 LPGA ; art. 89 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10]).

4.        Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de l’intimé de déclarer la recourante apte au placement à hauteur d'une disponibilité maximale de 50%.

Dans ses dernières déterminations, la recourante évoque également la question de l'annulation de son dossier de demandeuse d'emploi, qu'elle indique ne pas comprendre.

C'est le lieu de rappeler qu'en procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l'autorité administrative compétente s'est prononcée préalablement, d'une manière qui la lie sous la forme d'une décision. Dans cette mesure, la décision détermine l'objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de recours. En revanche, dans la mesure où aucune décision n'a été rendue, la contestation n'a pas d'objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être prononcé (ATF 131 V 164 consid. 2.1; ATF 125 V 413 consid. 1a; arrêt du Tribunal fédéral des assurances K 126/06 du 15 juillet 2007 consid. 3.1). Le juge n'entre donc pas en matière, en règle générale, sur des conclusions qui vont au-delà de l'objet de la contestation (ATF 125 V 413 consid. 1a; arrêt du Tribunal fédéral 8C_164/2009 du 18 mars 2010 consid. 2.1).

En l'espèce, la décision d'annulation de dossier à laquelle se réfère la recourante n'a pas été versée à la procédure et la Cour de céans ne dispose d'aucune information sur ce point. Cette annulation ne fait pas l'objet de la décision litigieuse. Dès lors, cette question excède l'objet du litige et ne sera pas abordée ici.

5.        L'assuré a droit aux indemnités de chômage s'il remplit un certain nombre de conditions cumulatives, dont en particulier celle d'être apte au placement (art. 8 al. 1 let. f LACI).

6.        Selon l'art. 24 al. 1 et 2 de l’ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02), si l’office compétent considère que l’assuré n’est pas apte au placement ou ne l’est que partiellement, il en informe la caisse (al. 1) et rend une décision sur l’étendue de l’aptitude au placement (al. 2).

7.        Est réputé apte à être placé le chômeur qui est disposé à accepter un travail convenable et à participer à des mesures d'intégration et qui est en mesure et en droit de le faire (art. 15 al. 1 LACI).

L'aptitude au placement comprend ainsi deux éléments : la capacité de travail d'une part, c'est-à-dire la faculté de fournir un travail - plus précisément d'exercer une activité lucrative salariée - sans que l'assuré en soit empêché pour des causes inhérentes à sa personne, et, d'autre part, la disposition à accepter un travail convenable au sens de l'art. 16 LACI - ce qui implique non seulement la volonté de prendre un tel travail s'il se présente, mais aussi une disponibilité suffisante quant au temps que l'assuré peut consacrer à un emploi et quant au nombre des employeurs potentiels (ATF 125 V 58 consid. 6a; ATF 123 V 216 consid. 3 et la référence).

8.        L'aptitude au placement n'est pas sujette à fractionnement, en ce sens qu'il existerait des situations intermédiaires entre l'aptitude et l'inaptitude au placement (par exemple une inaptitude "partielle"), auxquelles la loi attacherait des conséquences particulières. Lorsqu'un assuré est disposé à n'accepter qu'un travail à temps partiel - jusqu'à concurrence au moins de 20% d'un horaire de travail complet (cf. art. 5 OACI [RS 837.02]), il convient non pas d'admettre une aptitude au placement partielle pour une perte de travail de 100%, mais, à l'inverse, d'admettre purement et simplement l'aptitude au placement de l'intéressé dans le cadre d'une perte de travail partielle (ATF 136 V 95 consid. 5.1 p. 97; 126 V 124 consid. 2 p. 126; 125 V 51 consid. 6a p. 58). C'est sous l'angle de la perte de travail à prendre en considération qu'il faut, le cas échéant, tenir compte du fait qu'un assuré au chômage ne peut ou ne veut pas travailler à plein temps (ATF 126 V 124 consid. 2 p.126 précité). 

9.        La perte de travail constitue d'une part une condition du droit à l'indemnité de chômage (art. 8 al. 1 let. b LACI) qui est remplie lorsque la perte de travail se traduit par un manque à gagner et dure au moins deux journées de travail consécutives (art. 11 al. 1 LACI). Elle détermine d'autre part l'étendue de l'indemnisation, en ce que la durée et l'importance de la perte de travail se répercutent sur l'ampleur du droit à l'indemnité journalière (ATF 125 V 59 consid. 6c/aa). 

10.    En l'espèce, l'intimé a reconnu la recourante apte au placement à hauteur d'une disponibilité maximale de 50%, en raison de la formation qui l'occupe déjà à mi-temps.

La recourante conteste ce taux. Elle argue que, durant l'année scolaire 2019-2020, elle a pu enseigner au taux de 65,99% – correspondant à seize heures d'enseignement par semaine –, effectuer des remplacements ponctuels, tout en suivant ses cours de première année. Elle comptait faire de même durant sa deuxième année de formation, mais n'a pu obtenir les heures d'enseignement attendues, raison pour laquelle elle s'est annoncée au chômage, tout en recherchant un poste pour l'année en cours.

Par la production de l'horaire de son enseignante d'accueil, elle entend démontrer que son stage dure six heures par semaine, les mardi (de 12h40 à 17h00) et jeudi (de 9h00 à 10h00).

Elle se réfère à une fiche informative transmise par l'association des étudiants en formation dans l'enseignement secondaire qui indique que les heures dédiées aux études sont prises en compte et que le taux d'employabilité se situe autour de 60%.

Enfin, elle allègue que, depuis novembre, elle effectue des remplacements ponctuels dans différents établissements scolaires, qu'elle a récemment signé un contrat pour un remplacement de longue durée à un taux de 43,3% et que, malgré cela, elle dispose encore de temps libre pour travailler les lundi (toute la journée), les jeudi après-midi et les weekends, raison pour laquelle elle essaie d'augmenter son taux à 70%.

11.    Il convient de déterminer, sous l'angle de la perte de travail à prendre en considération, quelle a été la disponibilité de la recourante depuis le 25 août 2020, compte tenu du temps consacré à sa formation.

Le programme de deuxième année en MASE prévoit des cours, séminaires et ateliers hebdomadaires, dispensés les mercredi (de 15h15 à 17h00) et vendredi (de 8h00 à 12h00), de sorte qu'ils occupent la recourante deux demi-journées par semaine.

S'y ajoute le stage de 160 heures prévu par le plan d'études (cf. site internet de l'IUFE). Dans le cas de la recourante, il s'agit d'un stage en accompagnement auprès d'une enseignante d'accueil au Collège B______, qui porte sur six périodes de cours hebdomadaires (cf. lettre d'attribution de stage) : la recourante assiste aux cours les mardi (de 12h40 à 17h00) et jeudi (de 9h00 à 10h00), ce qui représente six heures réparties sur deux demi-journées par semaine.

Force est ainsi de constater que, malgré ses heures de cours et de stage, la recourante dispose encore des lundi (toute la journée), des mardi et mercredi matin et des jeudi et vendredi après-midi, ce qui représente six demi-journées, correspondant à une disponibilité au travail de 60%, taux qui correspond d'ailleurs à celui indiqué sur la fiche informative émise par l'association des enseignants en formation MASE concernant l'employabilité des étudiants en parallèle à leurs études.

On rappellera que les heures de travail liées à une formation peuvent être effectuées le soir ou les weekends et n'ont ainsi pas à être déduites du temps disponible pour une activité lucrative (cf. arrêt 8C/14/2015 du 18 mai 2015, consid. 4.3).

C'est donc une disponibilité au travail d'au moins 60% qui doit être reconnue à la recourante.

Se pose la question de savoir si cette disponibilité pourrait être portée à 63.3%, voire 65,99%, comme elle le soutient, arguant que, bien qu'assumant depuis janvier 2021 un remplacement de longue durée à un taux de 43,3%, elle dispose encore de ses lundi (ce qui représente 20% supplémentaires, conduisant à un total disponible de 63,3%, le taux de 65,99% correspondant quant à lui au taux des remplacements qu'elle a pu assumer l'année scolaire précédente, lors de sa première année de formation).

Ce raisonnement ne saurait être suivi. En effet, aux heures de remplacement effectivement dispensées vient sans aucun doute s'ajouter le temps nécessaire à la préparation des cours et aux corrections des travaux des élèves, qui doit être déduit du temps disponible à l'emploi. Le fait que la recourante soit parvenue à assumer un taux légèrement supérieur à 60% l'année précédente ne suffit pas à démontrer qu'elle pourrait en faire de même durant sa seconde année de formation.

Eu égard aux considérations qui précèdent, c'est donc une aptitude au placement à raison d'une disponibilité maximale de 60% dès le 25 août 2020 qui doit être reconnue à l'intéressée depuis août 2020. En ce sens, le recours est partiellement admis et la décision litigieuse annulée.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (61 let. a LPGA).

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition du 14 décembre 2020.

4.        Dit que la recourante est apte au placement à raison d'une disponibilité à l'emploi de 60% depuis le 25 août 2020.

5.        Renvoie la cause à l'intimé pour calcul des prestations dues.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie-Catherine SÉCHAUD

 

La Présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le