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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2565/2020

ATAS/1014/2021 du 30.09.2021 ( AVS ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2565/2020 ATAS/1014/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 septembre 2021

5ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée p.a. Mme B______, au PETIT-LANCY, représentée par C______ Sàrl

 

 

recourante

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION, Service juridique, sise 12, rue des Gares, GENÈVE

 

 

intimée

 


EN FAIT

A.      Madame A______ (ci-après : l'intéressée ou la recourante), née en ______1963, a transmis, par courriel du 29 mars 2020, à l’office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS), une demande d’affiliation en tant qu’indépendante, précisant exercer la profession de coiffeuse, depuis le 6 janvier 2020, à D______. Elle a, par la suite, complété un questionnaire d’affiliation pour personnes de condition indépendante, daté du 8 avril 2020, dans lequel elle exposait exercer une activité de coiffeuse depuis le 6 mars 2020, raison pour laquelle elle souhaitait être affiliée, auprès de la caisse cantonale genevoise de compensation (ci-après : la caisse ou l’intimée).

B.       a. L’intéressée a fait parvenir à la caisse différentes pièces, notamment des factures pour des produits de coiffure livrés à l’enseigne « Coiffure E______ » à D______ datées, respectivement, du 10 février, du 20 février, du 28 février et du 5 mars 2020, ainsi que des reçus, signés par l’intéressée, pour des montants perçus auprès de clientes, en échange de coupes de cheveux et de soins capillaires dispensés aux mois de février et mars 2020. Un extrait du registre du commerce, daté du 28 mars 2020 mais avec inscription au journal dès le 6 janvier 2020, faisait état de l’entreprise individuelle, sous raison de commerce « F______, Coiffure E______ », ayant pour but social la coiffure pour hommes et femmes.

b. En date du 30 avril 2020, l’intéressée a déposé auprès de la caisse une demande d’allocations pour perte de gain due au COVID-19.

c. Par décision du 19 mai 2020, la caisse a confirmé à l’intéressée qu’elle avait procédé à son affiliation, au 1er janvier 2020, comme personne de condition indépendante. La « Décision de cotisations personnelles pour personnes exerçant une activité lucrative indépendante » était valable du 1er janvier au 31 décembre 2020 et retenait un revenu déterminant de CHF 42'700.-, entraînant une fixation du montant des cotisations par CHF 4'328.65. Un relevé du montant des cotisations personnelles était joint en annexe, s’élevant à CHF 1'082.15 pour la période allant du 1er janvier au 31 mars 2020, avec un BVR destiné au paiement.

d. Par décision séparée du 19 mai 2020, la caisse a refusé à l’intéressée le droit à des allocations pour perte de gain (ci-après : APG) en cas de coronavirus. La caisse expliquait que l’intéressée n’était pas en droit de percevoir des APG, dès lors qu’elle avait sollicité son affiliation, en qualité d’indépendante, postérieurement aux mesures prises par le Conseil fédéral en raison de la pandémie liée au COVID-19, soit après la date du 17 mars 2020. Pour cette raison, l'intéressée ne pouvait pas bénéficier des mesures destinées à lutter contre le coronavirus, dès lors qu’il n’y avait pas une perte de revenus due au COVID-19 en raison de l’interruption d’une activité indépendante.

e. Par courrier du 24 mai 2020, le représentant de l’intéressée s’est opposé à la décision de refus des APG, faisant valoir que l’intéressée avait travaillé comme coiffeuse salariée jusqu’au 31 décembre 2019, date à laquelle elle avait été licenciée en raison de la cessation d’exploitation de son employeur. Il était allégué qu’elle s’était inscrite au registre du commerce, en qualité de coiffeuse indépendante, dès le 6 janvier 2020. S’il était exact que l’intéressée avait demandé son inscription comme indépendante après le 17 mars 2020, il n’en restait pas moins que la date effective de début de son activité indépendante était le 6 janvier 2020. Pour cette raison, la décision de refus d’APG devait être annulée.

f. Par décision du 27 juillet 2020, la caisse a écarté l’opposition du 24 mai 2020 et confirmé la décision du 19 mai 2020. Il était rappelé que l’intéressée avait pris contact avec l’OCAS, par email, le 29 mars 2020, puis qu’elle avait remis son questionnaire d’affiliation à la caisse le 8 avril 2020 et fait parvenir les justificatifs de son activité indépendante le 5 mai 2020. Son statut d’indépendante avait été reconnu par décision du 19 mai 2020. L’intéressée reconnaissait qu’elle avait tardé dans ses démarches et la caisse ne disposait pas d’une marge d’appréciation lui permettant de s’écarter des prescriptions fédérales édictées par le Conseil fédéral et par l’office fédéral des assurances sociales (ci-après : l’OFAS) relatives aux APG en cas de coronavirus. Par conséquent, la caisse n’avait d’autre choix que de rejeter la demande de l’intéressée et de maintenir la décision de refus des APG.

C.       a. Par écriture du 27 août 2020, postée le jour même, l’intéressée a interjeté recours contre la décision du 27 juillet 2020 auprès de la chambre de céans. Elle reconnaissait que l’exposé des faits de la caisse était correct, mais demandait que l’on prenne en compte la date de commencement de l’activité indépendante et non pas celle de réception de la demande d’affiliation auprès de la caisse et concluait à l’annulation de la décision.

b. La caisse a répondu en date du 21 septembre 2020 ; elle a conclu au rejet du recours, expliquant que la personne qui souhaitait avoir droit aux APG devait avoir été affiliée comme indépendante avant la crise du coronavirus ou (interprétation plus large) la procédure d’affiliation comme indépendante devait avoir été initiée avant le 17 mars 2020. Tel n’était pas le cas puisqu’en date du 17 mars 2020, l’intéressée ne s’était pas encore manifestée auprès de la caisse.

c. Par courrier du 2 novembre 2020, l’intéressée a renoncé à répliquer, renvoyant la chambre de céans à la motivation figurant dans son acte de recours.

d. À la demande de la chambre de céans, la recourante a transmis, en date du 2 août 2021, différentes pièces, notamment :

-     des factures pour des produits de coiffure livrés en février et mars 2020 ;

-     un contrat de bail de salon de coiffure conclu avec la Fondation pour le logement de personnes âgées de Dardagny, Russin, Satigny, faisant état de l’exploitation, par la recourante, d’un salon de coiffure à la Résidence G______ et prenant effet dès le 20 décembre 2019 ;

-     un décompte produits/dépenses pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2020, faisant notamment état de recettes du salon de coiffure pour les mois de janvier, février et mars 2020.

e. Par duplique du 16 août 2021, l’intimée a admis que la recourante pouvait, dans les faits, avoir déployé une activité indépendante avant le 17 mars 2020, mais ladite activité n’avait pas été reconnue par la caisse, dès lors que la demande d’affiliation n’avait été déposée qu’ultérieurement, à savoir le 29 mars 2020. Par conséquent, considérant que la demande d’affiliation n’avait pas été initiée par la recourante, ni reconnue par la caisse, avant le 17 mars 2020, la décision querellée était bien fondée et devait être confirmée.

f. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Les dispositions de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA – RS 830.1) s'appliquent aux allocations pertes de gain en lien avec le coronavirus, sous réserve de dérogations expresses (art. 1 de l’ordonnance du 20 mars 2020 sur les mesures en cas de pertes de gain en lien avec le coronavirus [ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 – RS 830.31]). Les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l’opposition n'est pas ouverte sont sujettes à recours auprès du tribunal des assurances compétent (art. 56 LPGA). La chambre de céans est ainsi compétente pour connaître du présent recours (cf. ATAS/1208/2020 du 10 décembre 2020).

2.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA – E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais entre le 15 juillet et le 15 août, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

3.        Le litige porte sur le droit de l’intéressée à des APG en cas de coronavirus, singulièrement sur le point de savoir s’il est nécessaire que son statut d’indépendante ait été reconnu formellement au moment de l’entrée en vigueur de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19.

4.        a. Selon l’art. 185 al. 3 de la Constitution fédérale (Cst. – RS 101), le Conseil fédéral peut s’appuyer directement sur cet article pour édicter des ordonnances et prendre des décisions, en vue de parer à des troubles existants ou imminents menaçant gravement l’ordre public, la sécurité extérieure ou la sécurité intérieure. Ces ordonnances doivent être limitées dans le temps (soit à une durée maximale de six mois ; cf. art. 7d al. 2 let. a de la loi sur l’organisation du gouvernement et de l’administration du 21 mars 1997 [LOGA – RS 172.010]).

En application de l’art. 185 al. 3 Cst., le Conseil fédéral a édicté, le 20 mars 2020,
l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19. Entrée en vigueur avec effet rétroactif au 17 mars 2020 et déployant ses effets pendant six mois à compter de son entrée en vigueur (art. 11), cette ordonnance a subi, au cours de sa durée de validité, des modifications les 16 avril, 19 juin et 1er juillet 2020 (déployant toutes des effets rétroactifs au 17 mars 2020), avant de voir sa durée de validité prolongée du 17 septembre 2020 au 31 décembre 2021, à la faveur de la modification du 11 septembre 2020 (art. 11 al. 4). Par l’adoption de la loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l’épidémie de COVID-19, du 25 septembre 2020 (loi COVID-19 – RS 818.102), entrée en vigueur le 26 septembre 2020 (mais le 17 septembre 2020 pour les mesures en cas de perte de gain), le législateur a conféré a posteriori une base légale à l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 (cf. art. 15 et 21 de la loi COVID-19).

b. Sur le plan matériel, il convient d’appliquer les règles de droit en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 129 V 1 consid. 1 ; ATF 127 V 467 consid. 1 et les références) ; le juge des assurances sociales doit se fonder sur l’état de fait tel qu’il se présente jusqu’à la date de la décision litigieuse, soit dans le cas d’espèce jusqu’au 27 juillet 2020 (cf. ATF 121 V 366 consid. 1b). Il convient donc d’appliquer les dispositions de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 dans leur teneur en vigueur à ce moment précis (cf. ATF 132 V 215 consid. 3.1.2), ce qui revient, en l’occurrence, à appliquer l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 dans son état suite aux modifications entrées en vigueur au 1er juillet 2020. Aussi la chambre de céans citera-t-elle les dispositions matérielles de cette ordonnance telles qu’elles se présentaient à cette date.

5.        Entre le 13 mars 2020, date de son entrée en vigueur et le 22 juin 2020, date de son abrogation, l’ordonnance 2 du 13 mars 2020 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (ordonnance 2 COVID-19 – RS 818.101.24), a connu diverses modifications de son article 6, disposition fixant un cadre aux manifestations et établissements, soit en les frappant d’une interdiction (ou fermeture) pure et simple
(al. 1 et 2), soit en les autorisant à certaines conditions (al. 3 et 4).

À ces restrictions découlant du droit fédéral, s’ajoutaient également celles – cas échéant plus étendues – mises en place par les cantons en cas de risque spécifique, et qui étaient soumises à l’approbation du Conseil fédéral (art. 7e de l’ordonnance 2 COVID-19).

6.        Aux termes de l’art. 2 al. 3 de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 (état au 1er juillet 2020), ont droit à l’allocation les personnes considérées comme indépendantes au sens de l’art. 12 LPGA qui subissent une perte de gain en raison d’une mesure prévue à l’art. 6 al. 1 et 2 de l’ordonnance 2 COVID-19. La condition prévue à l’al. 1bis let. c s’applique aussi à ces personnes.

Selon l’art. 2 al. 3bis de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, les personnes considérées comme indépendantes au sens de l’art. 12 LPGA qui ne sont pas concernées par l’al. 3 ont droit à l’allocation pour autant qu’elles subissent une perte de gain en raison des mesures prises par le Conseil fédéral afin de lutter contre le coronavirus et que leur revenu déterminant pour le calcul des cotisations AVS de l’année 2019 se situe entre CHF 10'000.- et
CHF 90'000.- ; l’art. 5 al. 2, 2ème phrase, s’applique par analogie au calcul déterminant de l’année 2019. La condition prévue à l’al. 1bis let. c s’applique aussi à ces personnes.

À teneur de l’art. 5 de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, l’indemnité journalière est égale à 80% du revenu moyen de l’activité lucrative obtenu avant le début du droit à l’allocation (al. 1). Pour déterminer le montant du revenu, l’art. 11 al. 1 LAPG s’applique par analogie. Après la fixation du montant de l’allocation, cette dernière ne peut faire l’objet d’un nouveau calcul que si une taxation fiscale plus récente est envoyée à l’ayant droit d’ici au 16 septembre 2020 et que celui-ci dépose une demande de nouveau calcul d’ici cette date (al. 2).

Conformément à l’art. 11 al. 1, première phrase, LAPG, le revenu moyen acquis avant l’entrée en service est le revenu déterminant pour le calcul des cotisations dues conformément à la LAVS.

7.        a. L’OFAS a émis, dès le 17 mars 2020, des directives sur l’application de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19. À cet effet, il a rédigé une circulaire sur l’allocation pour perte de gain en cas de mesures destinées à lutter contre le coronavirus – Corona-perte de gain (ci-après : CCPG). Cette circulaire, qui compte onze versions à ce jour, sera citée dans sa teneur au 3 juillet 2020 (version 6) pour les raisons évoquées supra.

Ont droit à l’allocation les personnes qui, au moment de l’interruption de leur activité lucrative sont salariées au sens de l’art. 10 LPGA, ou exercent une activité lucrative indépendante au sens de l’art. 12 LPGA et sont assurées à titre obligatoire en vertu de la LAVS (ch. 1019 CCPG).

Sont considérées comme exerçant une activité indépendante les personnes qui perçoivent des revenus non obtenus dans le cadre d’une activité salariée (ch. 1024 CCPG).

L’élément déterminant est que la caisse de compensation ait reconnu à ces personnes le statut d’indépendant. Le fait qu’elles soient affiliées à la caisse de compensation en qualité d’indépendant suffit en principe pour que ce statut leur soit reconnu (ch. 1025 CCPG).

Ont droit à l’allocation les personnes exerçant une activité lucrative indépendante qui, en raison d’une mesure prise en vertu de l’art. 6 al. 2 de l’ordonnance 2 COVID-19 ont subi une perte de gain à la suite d’une fermeture d’entreprise décidée au niveau fédéral. Sont assimilés à cette catégorie les indépendants qui ne peuvent pas reprendre leur activité pour cause d’absence ou d’insuffisance du plan de protection (ch. 1041 CCPG).

Le ch. 1041 CCPG s’applique par analogie aux personnes exerçant une activité indépendante qui subissent une perte de revenu en raison d’une mesure prise en vertu de l’art. 7e de l’ordonnance 2 COVID-19 visant la restriction ou l’arrêt des activités dans certaines branches de l’économie ordonnés par le canton et autorisés par le Conseil fédéral (ch. 1041.1 CCPG).

Ont droit à l’allocation les personnes ayant une activité indépendante dont le revenu soumis à l’AVS se situe entre CHF 10'000.- et CHF 90'000.-, et dont l’entreprise n’a certes pas été fermée en vertu de l’art. 6 al. 2 de l’ordonnance 2 COVID-19, mais qui ont subi une perte de gain directe ou indirecte en raison des mesures prises par la Confédération ou des mesures prises par un canton et approuvées par le Conseil fédéral (ch. 1041.2 CCPG).

b. Destinées à assurer l’application uniforme des prescriptions légales, les directives de l’administration n’ont pas force de loi et, par voie de conséquence, ne lient ni les administrés ni les tribunaux ; elles ne constituent pas des normes de droit fédéral au sens de l’art. 95 let. a LTF et n’ont pas à être suivies par le juge. Elles servent tout au plus à créer une pratique administrative uniforme et présentent à ce titre une certaine utilité ; elles ne peuvent en revanche sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu’elles sont censées concrétiser. En d’autres termes, à défaut de lacune, les directives ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 132 V 121 consid. 4.4 et les références ; ATF 131 V 42 consid. 2.3 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_283/2010 du 17 décembre 2010 consid. 4.1).

8.        Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l’exactitude d’une allégation, sans que d’autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n’entrent raisonnablement en considération (ATF 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

9.        Par décision du 19 mai 2020, l’intimée a considéré que la recourante remplissait les conditions d’une affiliation en qualité d’indépendante avec effet au 1er janvier 2020. Aussi lui a-t-elle adressé, le jour de cette décision, une facture destinée au paiement des cotisations pour la période allant du 1er janvier 2020 au 31 mars 2020.

L’intimée, dans sa décision du 19 mai 2020 confirmée sur opposition le 27 juillet 2020, refuse à l’intéressée l’octroi d’allocations pour perte de gain en cas de coronavirus au seul motif que la reconnaissance du statut d’indépendante de la recourante n’est intervenue qu’après le 17 mars 2020, soit postérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19.

Pour sa part, la recourante fait valoir, en substance que s’il est exact que la demande d’affiliation a été transmise à la caisse postérieurement au 17 mars 2020, il n’en reste pas moins que l’affiliation en tant qu’indépendante a été admise par la caisse, avec effet au 1er janvier 2020 et qu’il serait donc logique de considérer que la recourante exerçait une activité indépendante le 17 mars 2020, lui ouvrant ainsi le droit à des APG en cas de coronavirus.

La chambre de céans constate que, dans la mesure où la décision d’affiliation du
19 mai 2020 n’a fait l’objet, ni d’une contestation de la part de la recourante, ni d’une reconsidération de la part de l’intimée, les parties à la procédure s’accordent à admettre, sur la base des pièces produites par la recourante à l’appui de sa demande d’affiliation - qui comprennent notamment un contrat de bail à loyer prenant effet le 20 décembre 2019, en vue de l’ouverture d’un salon de coiffure, de factures de produits destinés à la coiffure, datant du mois de février 2020 et enfin de reçus de montants payés pour des coupes de cheveux aux mois de février et mars 2020 - que la recourante exerçait déjà une activité indépendante, au moment de l’entrée en vigueur de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19.

Il s’ensuit que la recourante remplit la condition de l’activité indépendante prévue par l’art. 2 al. 3 et 3bis de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19.

S’agissant de la condition prévoyant la soumission obligatoire de la recourante à la LAVS (art. 2 al. 1bis de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, applicable par renvoi des al. 3 et 3bis), il n’est pas contesté que la recourante la remplit.

Concernant enfin la condition d’une perte de gain – découlant soit d’une fermeture ordonnée en vertu de l’art. 6 al. 2 de l’ordonnance 2 COVID-19 (art. 2 al. 3 de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19), soit directement ou indirectement des mesures prises par la Confédération ou des mesures prises par un canton et approuvées par le Conseil fédéral (art. 2 al. 3bis de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 et ch. 1041.2 CCPG) –, l’intimée ne s’est pas prononcée sur cet élément, fondant sa décision uniquement sur la condition du dépôt de la demande d’affiliation avant le 17 mars 2020.

Comme cela ressort de l’arrêt du 4 mars 2021 (ATAS/177/2021), la chambre de céans considère, pour sa part, qu’en tant que le ch. 1025 CCPG prévoit qu’il est nécessaire que la caisse de compensation ait reconnu le statut d’indépendant, cette disposition de la circulaire sert à concrétiser la condition de l’exercice d’une activité indépendante au moment de l’entrée en vigueur de l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19, ce de manière à exclure du bénéfice des allocations une activité indépendante qui aurait démarré après le 17 mars 2020 et qui, par ce biais, aurait éventuellement vu son commencement motivé par l’expectative de percevoir des allocations pour compenser les mesures sanitaires restreignant ou empêchant cette activité d’entrée de cause.

En l’espèce, la situation est différente, l’intimée admet – au plus tard depuis la décision d’affiliation du 19 mai 2020 – que la recourante exerçait une activité indépendante depuis le mois de janvier 2020. Il s’ensuit que la question d’un éventuel abus – tel qu’il découle de l’hypothèse décrite supra – ne se pose pas. Dans ces conditions, le fait que la décision attaquée ne se limite pas à reconnaître le début de cette activité au 1er janvier 2020, mais fasse, en outre, dépendre le droit à l’allocation d’une décision d’affiliation ou du dépôt d’une demande d’affiliation comme indépendante antérieure au 17 mars 2020 équivaut à introduire une condition supplémentaire que l’ordonnance sur les pertes de gain COVID-19 ne prévoit pas. Une telle application extensive du ch. 1025 CCPG n’est pas admissible.

10.    Le recours sera donc admis, la décision litigieuse annulée et la cause renvoyée à l’intimée pour qu’elle reprenne l’examen de la demande d’allocation du 30 avril 2020 à la lumière des considérants qui précèdent et détermine la perte de gain et le montant des APG en cas de coronavirus dues à la recourante.

11.    Obtenant gain de cause et étant représentée par un mandataire professionnellement qualifié, la recourante se verra accorder une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]), arrêtée en l’espèce à CHF 800.-.

12.    Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Annule la décision sur opposition du 27 juillet 2020 et renvoie la cause à la caisse cantonale genevoise de compensation pour établir la perte de gain et le montant des allocations pour perte de gains due au coronavirus, au sens des considérants.

4.        Alloue à la recourante une indemnité de CHF 800.- aux frais de l’intimé.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie LOCHER

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le