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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2883/2019

ATAS/784/2021 du 29.07.2021 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2883/2019 ATAS/784/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 juillet 2021

10ème Chambre

 

En la cause

HOIRIE de feu A______, soit Madame B______, et Messieurs C______ et D______, représentée par Madame B______, domiciliée à LE LIGNON

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Feu A______ – décédé à Genève le ______ 2020 - (ci-après : le bénéficiaire ou le recourant), né le _______ 1934, d'origine roumaine, avait une formation d'ingénieur diplômé de l'École Polytechnique en Roumanie. Il était arrivé en Suisse (Genève) le 15 septembre 1990 dans la perspective de son mariage, le mois suivant, avec Madame B______ (B______) E______ (ci-après : l'épouse), née le ______ 1954, d'origine roumaine également, laquelle vivait déjà en Suisse depuis 1982 au bénéfice d'un permis d'établissement. Les époux avaient acquis la nationalité suisse par naturalisation le ______ 1998.

2.        Le bénéficiaire avait, pour la première fois au début 2007, sollicité des prestations complémentaires à l'AVS/AI (ci-après : PC) auprès de l'office cantonal des personnes âgées (ci-après : OCPA), devenu par la suite le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC ou l'intimé), et régulièrement bénéficié de telles prestations depuis lors, y compris des subsides pour l'assurance-maladie, pour lui-même et son épouse à certaines périodes. Le montant des PC était régulièrement réajusté, en fonction des variations du taux d'activité professionnelle de l'épouse. Pendant toutes ces années, le bénéficiaire avait régulièrement été invité à vérifier les plans de calcul que lui adressait le SPC, son attention étant attirée sur son obligation de signaler tout élément des plans de calcul ne correspondant pas à sa situation actuelle, et de signaler sans délai tout changement dans sa situation financière et/ou personnelle; en cas d'omission ou de retard dans la transmission d'informations susceptibles de modifier son droit aux prestations, il s'exposerait à une demande de restitution des prestations versées indûment, voire à une poursuite pénale.

3.        a. Au début octobre 2016, à l'occasion de l'entrée en vigueur de dispositions pénales durcissant la répression des fraudeurs bénéficiaires de PC et d'aide sociale, le conseiller d'État Mauro POGGIA, en charge du domaine des PC, avait lancé une campagne, en incitant ceux qui n'avaient pas déclaré des avoirs à le faire dans le délai au 31 décembre 2016, pour, le cas échéant, éviter de tomber sous le coup des nouvelles dispositions pénales entrées en vigueur au début octobre 2016.

b. Dans ce contexte, par courrier du 6 décembre 2016, le bénéficiaire s'était adressé au SPC pour lui indiquer qu'il était propriétaire à Bucarest (Roumanie) d'un appartement de deux pièces qu'il occupait personnellement pendant ses séjours dans son pays d'origine; il ne l'avait jamais loué en son absence, et il s'acquittait sur place des impôts y relatifs. Par courrier du même jour, l'épouse du bénéficiaire avait également indiqué au SPC qu'elle disposait d'un compte bancaire à Bucarest (Roumanie), dont elle a produit un extrait du solde.

4.        Par courrier du 2 février 2017, la directrice du SPC avait accusé réception de la correspondance du 6 décembre 2016. Elle précisait notamment : « Aussi, si d'aventure les nouveaux éléments portés à notre connaissance ont un impact sur le recalcul des prestations que vous percevez, nous vous confirmons qu'il sera renoncé à une dénonciation pénale à votre encontre et ce dans la mesure où vous vous êtes annoncé dans le délai prescrit et qu'un accord raisonnable ait été trouvé avec notre service quant au remboursement d'éventuelles prestations sociales indûment perçues ». Le bénéficiaire était en outre invité (courrier du 30 janvier 2017) à remettre, d'ici au 1er mars 2017, une série de documents relatifs à l'appartement sis en Roumanie (notamment une évaluation de la valeur locative actuelle de ce bien, par un architecte, un notaire ou un agent immobilier, ainsi que l'estimation officielle de la valeur vénale dudit bien), et une série de documents relatifs à ses avoirs bancaires dans ce pays, pour les années 2009 à 2016 inclusivement.

5.        Par courrier du 14 avril 2017, le bénéficiaire avait indiqué au SPC qu'avec la production des derniers documents requis, soit le rapport d'évaluation de son appartement de Bucarest, indiquant notamment les valeurs vénale et locative, il considérait avoir fourni tous les documents sollicités pour la vérification de son dossier. Il tenait en outre à observer que cet appartement, pour lequel il payait chaque mois des charges et chaque année des impôts, et qu'il habitait pendant ses séjours à Bucarest, devait bénéficier d'une franchise selon la brochure « Prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI ». En conclusion, ses revenus pris en compte jusqu'à présent pour sa PC resteraient les mêmes. Une réduction des prestations compliquerait ses efforts à maintenir un équilibre financier et pourrait avoir les plus graves conséquences pour lui, allant jusqu'à la décision de renoncer à sa résidence en Suisse. Il sollicitait un entretien pour lui permettre de présenter tout complément d'information utile, de vive voix.

6.        a. Par courrier recommandé du 12 septembre 2017, auquel étaient annexées trois décisions formelles, toutes datées du 6 septembre 2017, comportant des demandes de restitution de prestations indûment versées, le SPC rappelait au bénéficiaire que dans le cadre de l'annonce spontanée faisant suite au courrier du 7 octobre 2016 du conseiller d'État, il avait informé le SPC de l'existence de certains éléments de ressources et/ou de fortune non déclarés au service. Après examen des pièces reçues, le SPC avait repris le calcul de ses PC, rétroactivement au 1er octobre 2010 (rappelant les dispositions légales applicables), et précisait tenir compte dès cette date de son bien immobilier en Roumanie et du produit y relatif ainsi que de son épargne et des intérêts y relatifs. Il résultait du recalcul un montant en faveur du SPC s'élevant à CHF 34'362.80 réparti comme suit :

-       prestations complémentaires : CHF 33'196.-

-       subsides d'assurance-maladie : CHF 772.-

-       frais médicaux : CHF 394.80

Ce montant devait être remboursé dans les trente jours dès l'entrée en force des décisions de restitution. Toute demande relative aux modalités de remboursement devait être formulée par écrit à la division financière du SPC dans le même délai. S'il n'avait pas encore déclaré ces éléments à l'administration fiscale cantonale, il était invité à le faire dans les meilleurs délais.

Avec les décisions du 6 septembre 2017 susmentionnées, figuraient le détail des montants ainsi que les plans de calcul, par période concernée.

b. Par courrier recommandé du 6 novembre 2017, le bénéficiaire avait formé opposition aux décisions susmentionnées. Il indiquait en substance avoir reçu, en toute bonne foi, les prestations qui lui étaient réclamées, les ayant sollicitées afin de faire face aux besoins impératifs de la vie courante, et n'avoir aucun moyen d'effectuer ce remboursement. Il sollicitait donc la remise pour les sommes (réclamées), qu'il ne pourrait jamais restituer. S'agissant du bien immobilier en Roumanie, il expliquait avoir occupé cet appartement de façon continue jusqu'en 1990 lors de sa venue en Suisse, et de façon aléatoire jusqu'en 2007, lorsqu'il a réduit ses déplacements à 80-85 jours par année, autorisés par le règlement de l'OCPA. Il avait de la famille proche en Roumanie; ce bien immobilier lui servait toujours d'habitation et il ne l'avait jamais loué. Il espérait continuer à l'utiliser encore un peu de temps, vu son âge. Il rappelait que ses revenus actuels à Genève étaient réduits à CHF 242.- (par mois), et en Roumanie à presque l'équivalent de CHF 400.- de rente, après une vie de labeur comme ingénieur hautement qualifié mais ayant, « par les aléas de la chance », vécu sous le régime communiste. Il concluait à ce que le SPC considère son appartement « comme ce qu'il était, à savoir son habitation, et de bien vouloir revoir les calculs dans cette optique ». Il regrettait de ne pas avoir mentionné ce bien dès sa demande de prestations initiale. Il suggérait qu'il s'agissait peut-être d'une interprétation erronée de sa part, basée sur les éléments suivants : 1. Cet appartement correspondait à l'exemple retenu dans la brochure (de l'OCPA) de l'époque, pour lequel un abattement de CHF 75'000.- pouvait être accordé; 2. Il ne lui avait jamais apporté de revenus, et il payait des impôts sur place; 3. Sa valeur tant en 2008 qu'actuellement était très loin de l'estimation arbitraire qu'il avait dû fournir au SPC à la hâte. Il n'y avait pas eu de mauvaise foi de sa part.

7.        a. Par courrier B du 11 décembre 2017, le SPC avait indiqué au bénéficiaire avoir recalculé le montant de ses prestations valables dès le 1er janvier 2018; l'établissement de son droit à venir s'établissait à hauteur de CHF 80.- par mois (prestations complémentaires cantonales [ci-après : PCC] uniquement). Il était invité à contrôler attentivement les montants indiqués dans les plans de calcul annexés, pour s'assurer qu'ils correspondaient bien à sa situation actuelle, l'obligation de renseigner lui étant en outre rappelée. Une opposition pouvait être formée contre cette décision.

b. Par courrier du 2 janvier 2018, le bénéficiaire avait formé opposition contre cette décision, pour les motifs déjà présentés dans son courrier du 1er (recte : 6) novembre 2017, soit le fait qu'il habite son appartement de Roumanie et qu'il ne lui rapporte aucun revenu. Il annexait à son courrier une photocopie du plan de calcul annexé à la décision entreprise, dont il avait corrigé à la main certains montants, après avoir effacé (au Tipp-Ex) les chiffres contestés. Il attendait toujours la convocation du SPC pour une discussion consignée dans un procès-verbal, selon les termes énoncés dans leur courrier.

8.        En date du 15 novembre 2018, le SPC avait rendu deux décisions sur opposition :

-          l'une déclarant irrecevable (faute d'avoir été déposée dans le délai légal de trente jours) l'opposition formée par le bénéficiaire le 6 novembre 2017 contre les trois décisions du 6 septembre 2017, contenant les demandes de remboursement respectives de PC, de subsides de l'assurance-maladie et pour frais médicaux remboursés à tort (selon ch. 6 a ci-dessus);

-          l'autre répondant à l'opposition formée le 3 janvier 2018 contre la décision de prestations complémentaires à l'AVS du 11 décembre 2017, fixant les PC auxquelles il avait droit dès le 1er janvier 2018 : l'opposition était recevable, et était partiellement admise. Fort des dispositions applicables et des principes régissant la prise en compte des biens immobiliers, le SPC indiquait au bénéficiaire que la franchise qu'il évoquait (actuellement de CHF 112'500.-), s'appliquait uniquement aux résidences principales (art. 11 al. 1 let. c LPC). L'absence de location d'un bien constituait un dessaisissement de revenus, raison pour laquelle un montant avait été pris en compte à titre de produit hypothétique de la fortune immobilière. Toutefois, la décision entreprise avait omis de tenir compte des frais d'entretien. Selon un nouveau plan de calcul, rétroagissant au 1er janvier 2018, le montant retenu à titre de frais d'entretien correspondait à 20 % du produit hypothétique de la fortune immobilière, et déterminait ainsi des arriérés de prestations complémentaires en sa faveur de CHF 594.- (du 1er janvier au 30 novembre 2018 inclusivement). Compte tenu de la dette ouverte au SPC, ces arriérés étaient retenus jusqu'à fixation des modalités de remboursement de la dette. Enfin, dès décembre 2018, la PC courante s'élèverait à CHF 134.-.

9.        Par un seul courrier recommandé du 12 décembre 2018, le bénéficiaire avait saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice d'un recours contre les (deux) décisions sur opposition du SPC du 15 novembre 2018 :

-          sous la désignation de « décision N° 1 » (fixant le montant des prestations dès le 1er janvier 2018), il concluait à son annulation. Il reprenait son argumentation sur opposition, considérant en substance que son appartement (en Roumanie) lui servait d'habitation au même titre que son habitation de Suisse où il était locataire; il revendiquait dès lors, au nom de ce qu'il considérait comme « l'esprit autant que la lettre de la loi » que seule la valeur supérieure à CHF 112'500.- entre en considération dans la prise en compte de ce bien immobilier. Il contestait les calculs du SPC, car il n'était selon lui pas possible de parler de dessaisissement dans son cas, pour les motifs suivants : cet appartement ne se prêtait pas à la location touristique, et ne lui avait jamais procuré de revenus; il constituait sa seule opportunité d'habiter sur place, ses moyens ne lui permettant pas de loger à l'hôtel; ce bien avait été évalué à la hâte et de façon arbitraire, car il était sous pression de fournir le renseignement; cette valeur ne correspondait pas à la réalité du marché, le taux de change « CHF/€ » ayant également été retenu de façon arbitraire, vu la fluctuation des cotations. Par son application rigide des dispositions légales, le SPC prenait en compte, dans ses calculs, des revenus que le recourant n'avait pas, et qu'il n'était pas en mesure d'obtenir. Enfin les calculs reconnaissaient des frais d'entretien, mais n'appliquaient pas la correction à toute la durée considérée (2007 à 2017), mais seulement à la période du 1er janvier au 30 novembre 2018. Il se plaignait encore que cette décision ne réponde pas à sa demande de remise de la dette qu'il contestait. Ce recours avait donné lieu à l'ouverture de la procédure A/4387/2018;

-       sous la désignation de « décision N° 2 » (déclarant son opposition irrecevable), il concluait à son annulation. Il avait fait valoir les motifs pour lesquels il estimait avoir valablement formé opposition, et concluait (sur le fond) à la prise en compte, pour sa résidence secondaire de Bucarest, d'une franchise de CHF 112'500.-, et en conséquence à ce que ne soient pas pris en compte des gains de fortune qui n'existaient pas; il devait en outre être procédé à la révision de la décision établissant sa dette supposée, en annulant celle-ci, ainsi qu'au recalcul de ses droits à partir de 2007 et à venir. Ce recours avait donné lieu à l'ouverture de la procédure A/4388/2018.

10.    Dans les deux procédures, le SPC avait conclu, par courrier du 17 janvier 2019, au rejet du recours, le recourant n'invoquant aucun argument susceptible de conduire à une appréciation différente du cas.

11.    La chambre de céans avait entendu les parties en comparution personnelle, le 25 mars 2019, évoquant les deux causes, sans les joindre. À l'issue de l'audience, les parties s'étaient mises d'accord sur la suspension de la cause A/4387/2018 jusqu'à droit jugé sur le fond en ce qui concerne les demandes de restitution évoquées dans le cadre de la procédure A/4388/2018, cette cause étant gardée à juger.

12.    Par ordonnance du 29 mars 2019, la chambre de céans avait ainsi suspendu l'instruction de la cause A/4387/2018 en application de l'art.78 let. a LPA.

13.    Par arrêt du 8 avril 2019 (ATAS/294/2019 dans la cause A/4388/2018), la chambre de céans avait annulé la décision sur opposition du 15 novembre 2018 déclarant l'(les) opposition(s) irrecevable(s), et renvoyé la cause à l'intimé pour qu'il statue sur le fond de l'opposition interjetée par le bénéficiaire en date du 6 novembre 2017, contre les décisions de restitution du 6 septembre 2017.

14.    Suite à l'arrêt susmentionné, par décision sur opposition du 21 juin 2019, le SPC a partiellement admis l'opposition formée par le bénéficiaire le 6 novembre 2017 contre les trois décisions du 6 septembre 2017 comportant respectivement les demandes de restitution de CHF 33'196.- (PC) pour la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2017, de CHF 772.- (subsides d'assurance-maladie) pour février 2011 et de CHF 394.80 (frais médicaux) remboursés à tort en février 2011. En substance, les montants réclamés au titre de subsides d'assurance-maladie versés à tort, et de frais médicaux remboursés à tort étaient confirmés, seul le montant des PC versées à tort étant ramené de CHF 33'196.- à CHF 32'292.-. Le SPC énonçait les dispositions légales pertinentes applicables; les revenus déterminants comprenaient notamment le produit de la fortune mobilière et immobilière; dans le cas où il n'était tiré d'un bien immobilier aucun produit réel ou que ce produit était difficilement déterminable, il y avait lieu de tenir compte d'un taux forfaitaire de 4.5 % de la valeur vénale du bien (taux maintes fois confirmé par la jurisprudence fédérale et cantonale); il y avait lieu de tenir compte d'un montant à titre de frais d'entretien de l'immeuble correspondant à 20 % de la valeur locative, si l'immeuble datait de plus de 20 ans; les frais effectifs ne pouvaient être retenus. S'agissant des taux de conversion des devises, le SPC appliquait par analogie à la fortune sise à l'étranger ceux prévus par les Directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS/AI (ci-après : DPC) pour les rentes étrangères, à savoir les taux fixés par la Commission administrative des communautés européennes pour la sécurité sociale des travailleurs migrants, publiés au journal officiel de l'Union européenne jusqu'au 31 décembre 2012, et ceux publiés par la Banque centrale européenne dès le 1er janvier 2013 (N° 3452.01 DPC). Pour toute la période concernée, le SPC avait établi un tableau comportant : par année (2010 à 2017 inclusivement) le taux de conversion appliqué (€/CHF), la valeur vénale en euros - déterminée par l'expertise particulièrement fouillée, établie en avril 2017 par l'ingénieure F______, mandatée par le bénéficiaire (€ 64'000.- constant pour toutes les années concernées) et, pour chacune des années, la contre-valeur en francs suisses de la valeur vénale, la valeur locative et les frais d'entretien, en fonction du taux de conversion appliqué. Il avait en outre intégré à la décision entreprise un tableau récapitulatif des nouveaux plans de calcul, déterminant les prestations dues (prestations complémentaires fédérales [ci-après : PCF] et/ou PCC), soit pour la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2017 un montant total CHF 7'666.- qui, déduit des prestations déjà versées (CHF 39'958.- pour la même période) déterminait un solde en faveur du SPC de CHF 32'292.-. Enfin, le SPC observait que la demande de remboursement d'un montant total de CHF 33'458.80 était justifiée; toute autre était la question de déterminer si le remboursement total de ce montant lui serait effectivement réclamé. En effet, son courrier du 6 novembre 2017 contenait une demande de remise de l'obligation de restituer les prestations indues. Le SPC se déterminerait à ce sujet, par décision séparée, dès l'entrée en force de la présente décision sur opposition (art. 4 al. 5 OPGA).

15.    On relèvera que par courrier séparé du 21 janvier 2019, le SPC avait rendu une décision (susceptible d'opposition) portant sur la période du 1er octobre au 31 décembre 2017. Le SPC avait recalculé le droit aux PC du bénéficiaire : il résultait des nouveaux plans de calcul (annexés) pour la période en cause, un solde d'arriérés de PC de CHF 408.- en faveur du bénéficiaire. Compte tenu de la dette encore ouverte au SPC, ces arriérés seraient retenus jusqu'à ce que les modalités du remboursement de celle-ci soient établies.

16.    Par courrier du 21 juillet 2019, le bénéficiaire avait recouru contre la décision sur opposition du 21 juin 2019, reprenant pour l'essentiel les conclusions qu'il avait déjà prises sur le fond et les motifs qu'il avait développés contre la décision sur opposition précédente (laquelle ne statuait pas sur le fond, mais seulement sur la tardiveté de l'opposition). Ainsi concluait-t-il à l'annulation de la décision entreprise, à l'application d'une franchise de CHF 112'500.- pour la prise en compte de son bien immobilier en Roumanie, et en conséquence à l'exclusion de tout revenu de fortune; à ce que la décision entreprise soit révisée et qu'ainsi cette dette soit annulée. Il demandait encore que ses droits soient recalculés sur ces bases, à partir de 2007, et pour l'avenir.

17.    L'intimé avait conclu au rejet du recours, ne pouvant que confirmer sa position déjà exprimée dans la décision entreprise, le recourant n'invoquant dans son recours aucun argument susceptible de conduire à une appréciation différente du cas. Il rappelait en outre l'ordonnance de suspension du 29 mars 2019 concernant la procédure A/4387/2018, la décision entreprise dans le cadre de ce recours-là concernant la période valable dès le 1er janvier 2018.

18.    Par ordonnance du 10 septembre 2019, la chambre de céans avait repris l'instruction de la procédure A/4387/2018, et ordonné la jonction de celle-ci avec la présente procédure, sous le N° A/2883/2019, la problématique litigieuse étant identique dans les deux causes; cette dernière, formellement plus récente, portant toutefois sur une période antérieure à celle concernée par la procédure de 2018. Cette ordonnance impartissait en outre un délai au recourant pour répliquer.

19.    Le recourant avait brièvement répliqué par courrier du 4 novembre 2019 : comme l'écrivait l'intimé dans sa réponse du 4 septembre 2019, il ne pouvait effectivement invoquer aucune disposition légale ou jurisprudence à sa décharge. Il déplorait toutefois qu'en dépit de ses nombreuses demandes, le SPC n'ait jamais accédé à sa demande de le rencontrer pour examiner avec lui sa situation, qu'il considérait comme exceptionnelle. Selon lui, en appliquant la loi de manière rigide, sans tenir compte de son esprit, le SPC s'arrêtait à sa prétendue « fortune », qui n'en était pas une car, réalisée, elle représenterait le budget annuel d'un ménage suisse; mais sans elle (son appartement à Bucarest), sa situation ne lui permettrait pas de revoir sa famille : même avec les PC, il ne pourrait pas vivre à l'hôtel trois mois par année. Au lieu de le recevoir, le SPC avait pris plus de deux ans à traiter une situation urgente vu son âge avancé et ses moyens financiers. Il avait sollicité l'annulation de sa dette (ndr : en d'autres termes sa remise) car il n'avait aucune possibilité de remboursement, mais il restait sans réponse à ce jour à ce sujet.

20.    Par courrier du 25 novembre 2019, le SPC avait indiqué n'avoir aucune observation nouvelle à formuler. Il persistait dans ses conclusions en rejet du recours.

21.    Par courrier du 27 novembre 2019, la chambre de céans a informé les parties de ce que la cause était gardée à juger.

22.    Par courrier du 23 janvier 2020, l'épouse du recourant a informé la chambre de céans du décès de son époux, survenu à Genève le 14 janvier 2020.

23.    Par ordonnance du 28 janvier 2020, au vu de cette information, la chambre de céans a prononcé la suspension de l'instruction de la cause en application de l'art. 78 let. b LPA.

24.    La chambre de céans ayant interpellé la Justice de paix sur l'existence d'une hoirie et, dans l'affirmative, sur l'identité des héritiers éventuels, le greffier de cette juridiction a indiqué, par courrier du 12 juin 2020, que les seules coordonnées en leur possession étaient celles de l'épouse du défunt.

25.    Par courrier du 13 juin 2020, la veuve du défunt a donné à la chambre de céans les informations suivantes : l'hoirie, qui avait décidé de respecter les décisions et obligations du défunt, était composée de trois héritiers, à savoir : les fils de ce dernier, C______ et D______, tous deux domiciliés à Bucarest, et elle-même. L'héritage de son époux ne comportait aucun bien mobilier ou immobilier en Suisse. En Roumanie, il ne laissait que l'appartement litigieux, sans fortune mobilière. Au vu de la pandémie, la succession n'avait pas encore été traitée par un notaire. Une évaluation actualisée dudit bien immobilier était prévue sur place et l'hoirie souhaitait pouvoir la présenter à la juridiction de céans. En raison du Covid-19 et se trouvant dans la tranche d'âge dite « à risque », elle était dans l'impossibilité de se rendre à Bucarest avant fin septembre 2020, pour effectuer les démarches évoquées. Elle sollicitait un délai dans ce sens. Ses deux beaux-fils avaient choisi, par souci de simplification, d'élire domicile à son adresse, pour toute correspondance. Enfin, sur le fond du litige, les arguments développés par son défunt mari étaient toujours valables : en effet, de son vivant - aujourd'hui pour elle seule -, l'appartement litigieux était leur seule possibilité d'hébergement en Roumanie, leur pays d'origine.

26.    Par courrier du 26 juin 2020, la chambre de céans a notamment indiqué à la veuve du recourant qu'a priori, vu le lieu du décès de son mari, la succession devait s'ouvrir en Suisse (art. 538 CC); dès lors, si l'intention des héritiers était de mandater un notaire pour la liquidation de cette succession, il serait utile de faire établir un acte de notoriété ou un certificat d'héritiers et de le produire auprès de cette juridiction. Il conviendrait aussi qu'elle fasse établir des procurations formelles, par ses beaux-fils en sa faveur, si ces derniers souhaitaient qu'elle les représente. Le cas échéant, elle pouvait également en établir une en faveur de ces derniers, pour les démarches à entreprendre en Roumanie (évaluation actualisée de l'appartement). Un délai lui était enfin octroyé pour fournir les renseignements et justificatifs sollicités, ainsi que pour que les trois héritiers indiquent formellement à la chambre de céans s'ils entendaient reprendre la procédure.

27.    Par courrier du 13 août 2020, la veuve du recourant a sollicité la reprise de la procédure et a adressé à la chambre de céans les procurations de ses beaux-fils l'habilitant à les représenter. S'agissant de l'évaluation récente de l'appartement, cette démarche s'était avérée impossible à réaliser, la pandémie actuelle ayant provoqué beaucoup de problèmes dans l'administration et les services, en Roumanie. Les héritiers étaient malheureusement tenus de se rapporter à l'évaluation se trouvant au dossier. Comme le soutenait son époux, cette évaluation dépassait toutefois de beaucoup la réalité, ce qui avait induit des calculs erronés de la part de l'intimé. Elle produisait, pour information, copie d'annonces de biens immobiliers semblables au leur, voire en meilleur état, selon elle, proposés à la vente à des prix variant entre € 37'000.- et € 50'000.-. Pour le surplus, elle reprenait au compte des héritiers l'intégralité de l'argumentation soutenue par feu son époux. Enfin, les héritiers n'étaient pas en mesure de faire appel à un notaire genevois, dont les honoraires dépassaient leurs moyens financiers, de sorte qu'ils n'étaient pas en mesure de produire un certificat d'héritiers.

28.    Par ordonnance du 21 août 2020, la chambre de céans a ordonné la reprise de l'instruction de la cause (art. 79 LPA), transmis copie de l'écriture susmentionnée et de ses annexes (toutes en langue roumaine et non traduites) à l'intimé, et ordonné la comparution personnelle des parties.

29.    Dans la perspective de l'audience de comparution personnelle, la représentante de l'hoirie a, à nouveau, persisté dans les termes et conclusions des recours interjetés en son temps par son époux, dans les deux procédures jointes. Elle en a pour l'essentiel fait la synthèse et le résumé.

30.    La chambre de céans a entendu les parties, lors d'une audience du 7 septembre 2020.

La représentante de l'hoirie a déclaré ce qui suit : « J'aimerais relever que mon mari était un homme d'honneur. Dans ce contexte, il a été convaincu jusqu'à son décès qu'il avait le droit de prétendre à la déduction forfaitaire de CHF 112'000.- environ sur la valeur du bien immobilier roumain, avec pour conséquence que la déduction autorisée revenait à supprimer toute valeur du bien immobilier concerné, raison pour laquelle il ne l'a jamais déclaré avant de recevoir la lettre du Conseiller d'État d'octobre 2016. Là, il a eu un doute, raison pour laquelle il a signalé l'existence de ce bien, toujours convaincu que cette valeur n'aurait pas d'incidence sur les calculs. Je relève aussi qu'à plusieurs reprises, mon mari a sollicité, en tout cas depuis 2017, d'être reçu par un gestionnaire du SPC pour qu'il puisse exprimer verbalement ses certitudes, et recevoir toute explication, ce qui aurait permis sans doute de ne pas en arriver là où nous en sommes aujourd'hui. Je relève également et rappelle que ce bien n'a jamais rapporté quoi que ce soit à mon mari. Il n'a jamais pu être loué, d'autant que c'est le seul endroit où nous pouvions vivre quand nous allions en Roumanie. Je relève également que c'est pour honorer la mémoire et les qualités de mon mari que malgré les sommes qui nous sont réclamées, nous avons, ses fils et moi, décidé d'accepter la succession et concrètement de poursuivre cette procédure.

Pour répondre à votre question, en ce qui me concerne, je suis retraitée depuis l'année dernière. Mes ressources financières consistent en tout et pour tout dans un montant de CHF 4'159.-, soit une rente AVS à laquelle s'ajoute la rente LPP. Mon loyer est de CHF 1'111.-; à cela s'ajoutent mes charges habituelles, notamment CHF 335.- de caisse-maladie, après déduction des subsides de CHF 200.-.

S'agissant de mes beaux-fils, le plus jeune réalise un revenu mensuel de CHF 940.- (contre-valeur de la monnaie roumaine au cours du jour), l'autre beau-fils réalise un salaire de CHF 1'560.-. Ils sont tous les deux ingénieurs : l'un dans la logistique dans la Police, et l'autre dans une entreprise d'électricité nucléaire. Ils sont tous les deux divorcés, et chacun père d'un enfant. Je confirme qu'hormis nous trois, il n'y a aucun héritier faisant partie de l'hoirie ».

Monsieur G______, pour l'intimé, a indiqué que le SPC persistait dans ses conclusions et rendrait la décision adéquate sur la demande de remise, au moment où l'arrêt à rendre serait entré en force.

31.    À l'issue de l'audience, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.         Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.         Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 82a LPGA; RO 2020 5137; FF 2018 1597; erratum de la CdR de l’Ass. féd. du 19 mai 2021, publié le 18 juin 2021 in RO 2021 358).

Dans la mesure où elle porte sur les prestations perçues à tort entre le 1er octobre 2010 et le 30 septembre 2017, et sur les PC 2018 soit sur une période antérieure à l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2021, des modifications des 22 mars, 20 décembre 2019 et 14 octobre 2020, la demande de restitution est soumise à l'ancien droit, en l'absence de dispositions transitoires prévoyant une application rétroactive du nouveau droit. Les dispositions légales seront donc citées ci-après dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020.

3.         Le délai de recours est de trente jours (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA [loi applicable par renvoi de l'art. 1 LPC pour les PCF et l'art. 1A al. 1 let. b LPCC pour les PCC]; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l'assurance-invalidité [LPFC - J 4 20]; art. 43 LPCC). La forme de son introduction est régie par l'art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). Au vu des dispositions qui précèdent, les recours, désormais joints en une même procédure, sont recevables.

4.         Le litige porte sur le calcul rétroactif des prestations complémentaires fédérales et/ou cantonales, de feu le recourant, pour la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2017, ayant engendré des demandes de restitution de PC versées indûment, pendant cette période, respectivement de subsides d'assurance-maladie et de remboursement de frais médicaux en février 2011, et sur le calcul des PC dès le 1er janvier 2018, - respectivement sur le refus d'une demande de remise des montants réclamés, ce calcul prenant en compte un bien immobilier, sis à Bucarest, qui appartenait au bénéficiaire, de son vivant.

5.         a. Pour l’établissement des faits pertinents, il y a lieu d’appliquer les principes ordinaires régissant la procédure en matière d’assurances sociales, à savoir, en particulier, la maxime inquisitoire, ainsi que les règles sur l’appréciation des preuves et le degré de la preuve.

b. La maxime inquisitoire signifie que l’assureur social et, en cas de litige, le juge, établissent d’office les faits déterminants, avec la collaboration des parties, sans être liés par les faits allégués et les preuves offertes par les parties, en s’attachant à le faire de manière correcte, complète et objective afin de découvrir la réalité matérielle (art. 43 LPGA; art. 19 s., 22 ss, 76 et 89A LPA; Ghislaine FRÉSARD-FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, Droit suisse de la sécurité sociale, vol. II, 2015, p. 499 s.). Les parties ont l’obligation d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués; à défaut, elles s’exposent à devoir supporter les conséquences de l’absence de preuve (art. 28 LPGA; ATF 125 V 193 consid. 2; 122 V 157 consid. 1a; 117 V 261 consid. 3b et les références).

c. Comme l’administration, le juge apprécie librement les preuves administrées, sans être lié par des règles formelles (art. 61 let. c LPGA). Il lui faut examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les pièces du dossier et autres preuves recueillies permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Il lui est loisible, sur la base d’une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles, de refuser l’administration d’une preuve supplémentaire au motif qu’il la tient pour impropre à modifier sa conviction (ATF 131 III 222 consid. 4.3; ATF 129 III 18 consid. 2.6; arrêt du Tribunal fédéral 4A_5/2011 du 24 mars 2011 consid. 3.1).

d. Une preuve absolue n’est pas requise en matière d’assurances sociales. L’administration et le juge fondent leur décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; 126 V 353 consid. 5b; 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n’existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a; Ghislaine FRÉSARD- FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, op. cit., p. 517 s.). Reste réservé le degré de preuve requis pour la notification de décisions, l’exercice d’un moyen de droit, le contenu d’une communication dont la notification est établie (ATF 124 V 400; 121 V 5 consid. 3b; 119 V 7 consid. 3c/bb; ATAS/286/2018 du 3 avril 2018 consid. 3; ATAS/763/2016 du 27 septembre 2016 consid. 4 et 5c).

6.         a. S'agissant des prestations complémentaires fédérales, selon l'art. 25 al. 1 1ère phrase LPGA, en relation avec l'art. 2 al. 1 let. a de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11), les prestations indûment touchées doivent être restituées par le bénéficiaire ou par ses héritiers.

L'obligation de restituer suppose aujourd'hui encore, conformément à la jurisprudence rendue à propos des anciens art. 47 al. 1 de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10) ou 95 de la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0) (p. ex. ATF 129 V 110 consid. 1.1; ATF 126 V 23 consid. 4b et ATF 122 V 19 consid. 3a), que soient remplies les conditions d'une reconsidération ou d'une révision procédurale de la décision - formelle ou non - par laquelle les prestations en cause ont été allouées (ATF 130 V 318 consid. 5.2; arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 32/06 du 14 novembre 2006 consid. 3 et les références). Ceci est confirmé sous l'empire de la LPGA (arrêt du Tribunal fédéral 8C_512/2008 du 4 janvier 2009 consid. 4). À cet égard, la jurisprudence constante distingue la révision d'une décision entrée en force formelle, à laquelle l'administration est tenue de procéder lorsque sont découverts des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve susceptibles de conduire à une appréciation juridique différente (ATF 122 V 19 consid. 3a; ATF 122 V 134 consid. 2c; ATF 122 V 169 V consid. 4a; ATF 121 V 1 consid. 6), de la reconsidération d'une décision formellement passée en force de chose décidée sur laquelle une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée quant au fond, à laquelle l'administration peut procéder pour autant que la décision soit sans nul doute erronée et que sa rectification revête une importance notable (ATF 122 V 19 consid. 3a; ATF 122 V 169 consid. 4a; ATF 121 V 1 consid. 6). En ce qui concerne plus particulièrement la révision, l'obligation de restituer des prestations complémentaires indûment touchées et son étendue dans le temps n’est pas liée à une violation de l'obligation de renseigner (ATF 122 V 134 consid. 2e). Il s'agit simplement de rétablir l'ordre légal après la découverte du fait nouveau (arrêt du Tribunal fédéral 8C_120/2008 du 4 septembre 2008 consid. 3.1).

Selon l'art. 3 al. 1 OPGA, l’étendue de l’obligation de restituer est fixée par une décision.

Selon l'art. 2 al. 1 OPGA, sont soumis à l'obligation de restituer le bénéficiaire des prestations allouées indûment ou ses héritiers (let. a), les tiers ou les autorités à qui ont été versées des prestations en espèces pour qu'elles soient utilisées conformément à leur but, au sens de l'art. 20 LPGA ou des dispositions des lois spéciales, à l'exception du tuteur (let. b) et les tiers ou les autorités à qui ont été versées après coup des prestations indues, à l'exception du tuteur (let. c).

b. Au niveau cantonal, l'art. 24 al. 1 1ère phrase LPCC prévoit que les prestations indûment touchées doivent être restituées.

L'art. 14 du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI - J 4 25.03) précise que le SPC doit demander la restitution des prestations indûment touchées au bénéficiaire, à ses héritiers ou aux autres personnes mentionnées à l'art. 2 OPGA appliqué par analogie (al. 1). Il fixe l'étendue de l'obligation de restituer par décision (al. 2).

c. En vertu de l'art. 25 al. 2 1ère phrase LPGA, le droit de demander la restitution s'éteint un an après le moment où l'institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.

Les délais de l’art. 25 al. 2 LPGA sont des délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d'office (ATF 133 V 579 consid. 4; ATF 128 V 10 consid. 1).

Le délai de péremption relatif d'une année commence à courir dès le moment où l'administration aurait dû connaître les faits fondant l'obligation de restituer, en faisant preuve de l'attention que l'on pouvait raisonnablement exiger d'elle (ATF 122 V 270 consid. 5a). L'administration doit disposer de tous les éléments qui sont décisifs dans le cas concret et dont la connaissance fonde - quant à son principe et à son étendue - la créance en restitution à l'encontre de la personne tenue à restitution (ATF 111 V 14 consid. 3). Si l'administration dispose d'indices laissant supposer l'existence d'une créance en restitution, mais que les éléments disponibles ne suffisent pas encore à en établir le bien-fondé, elle doit procéder, dans un délai raisonnable, aux investigations nécessaires (ATF 133 V 579 consid. 5.1 non publié). À titre d'exemple, le Tribunal fédéral a considéré dans le cas de la modification des bases de calcul d'une rente par une caisse de compensation à la suite d'un divorce qu'un délai d'un mois pour rassembler les comptes individuels de l'épouse était largement suffisant (SVR 2004 IV N°41, consid. 4.3). À défaut de mise en œuvre des investigations, le début du délai de péremption doit être fixé au moment où l’administration aurait été en mesure de rendre une décision de restitution si elle avait fait preuve de l'attention que l'on pouvait raisonnablement exiger d'elle. Dans tous les cas, le délai de péremption commence à courir immédiatement s'il s'avère que les prestations en question étaient clairement indues (ATF 133 V 579 consid. 5.1. non publié).

Contrairement à la prescription, la péremption prévue à l’art. 25 al. 2 LPGA ne peut être ni suspendue ni interrompue et lorsque s’accomplit l’acte conservatoire que prescrit la loi, comme la prise d’une décision, le délai se trouve sauvegardé une fois pour toutes (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 271/04 du 21 mars 2006 consid. 2.5).

d. En vertu de l'art. 25 al. 2 LPGA, le droit de demander la restitution s'éteint un an après le moment où l'institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. Si la créance naît d'un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est déterminant.

Lorsqu'il statue sur la créance de l'intimé en restitution de prestations indûment versées, le juge peut examiner, à titre préjudiciel, si les circonstances correspondant à une infraction pénale sont réunies et, partant, si un délai de prescription plus long que les délais relatifs et absolus prévus par l'art. 25 al. 2 LPGA est applicable. Dans un tel cas, les exigences constitutionnelles en matière d'appréciation des preuves en procédure pénale s'appliquent (ATF 138 V 74 consid. 7; arrêt du Tribunal fédéral 8C_592/2007 du 10 août 2008 consid. 5.3).

Pour que le délai de prescription plus long prévu par le droit pénal s'applique, il n'est pas nécessaire que l'auteur de l'infraction ait été condamné (ATF 118 V 193 consid. 4a; ATF 113 V 256 consid. 4a; voir également ATF 122 III 225 consid. 4).

En matière de prestations complémentaires, ce sont principalement les art. 31 LPC (art. 16 aLPC), 146 et 148a du Code pénal du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) qui entrent en considération lorsqu’il y a lieu de déterminer si le délai pénal doit trouver application.

L'art. 31 LPC - également applicable en matière de prestations complémentaires cantonales conformément à l’art. 1A LPCC - est subsidiaire aux crimes et délits de droit commun (arrêt du Tribunal fédéral 6S.288/2000 du 28 septembre 2000 consid. 2) et prévoit une peine pécuniaire n'excédant pas 180 jours-amendes en cas de violation du devoir d’informer. L’art. 146 al. 1 CP sanctionne l’infraction d’escroquerie d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire. Quant à l’art. 148a CP, qui vise l’obtention illicite de prestations d’une assurance sociale ou de l’aide sociale, il prévoit une peine privative de liberté d’un an au plus ou une peine pécuniaire (al. 1). Dans les cas de peu de gravité, la peine est l’amende (al. 2).

Selon l'art. 97 al. 1 CP (art. 70 aCP dans sa teneur entrée en vigueur depuis le 1er octobre 2002), l'action pénale se prescrit par trente ans si l'infraction était passible d'une peine privative de liberté à vie, par quinze ans si elle était passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans, et par sept ans si elle était passible d'une autre peine. Le délai de prescription de l'action pénale pour une infraction telle que celle décrite aux art. 31 LPC et 148a CP est donc de sept ans, celui de l’infraction visée à l'art. 146 al. 1 CP de quinze ans.

Lorsque le délai de prescription de plus longue durée prévu par le droit pénal s’applique, le point de savoir si l’administration a agi dans le délai relatif d’une année peut rester ouvert (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_400/2016 du 2 novembre 2016 consid. 4.1 et 5.2).

7.         En l'espèce, l'intimé n'a à juste titre pas retenu que les faits reprochés au recourant et donnant lieu à une demande de restitution des prestations touchées indûment seraient constitutifs d'escroquerie au sens de l'art. 146 CP, les conditions n'en étant manifestement pas réalisées en l'occurrence. Il a retenu en revanche la réalisation des conditions de l’art. 148a CP, entré en vigueur le 1er octobre 2016, qui sanctionne celui qui, par des déclarations fausses ou incomplètes, en passant des faits sous silence ou de toute autre façon, induit une personne en erreur ou la conforte dans son erreur, et obtient de la sorte pour lui-même ou pour un tiers des prestations indues d’une assurance sociale ou de l’aide sociale.

Cette infraction constitue une clause générale de l’escroquerie (art. 146 CP). Cette dernière peut aussi punir l’obtention illicite de prestations sociales. L’art. 146 CP suppose que l’auteur induit astucieusement en erreur une personne ou qu’il la conforte astucieusement dans son erreur. Si l’énoncé de fait légal (plus grave) définissant l’escroquerie n’est pas réalisé, parce que l’astuce fait défaut, c’est la clause générale qui s’applique. Pour que la nouvelle infraction soit réalisée, il n’est pas nécessaire que l’auteur agisse astucieusement lorsqu’il induit une personne en erreur ou qu’il la conforte dans son erreur. L’art. 148a CP vise les comportements délictueux en matière d’obtention illicite de prestations d’une assurance sociale ou de l’aide sociale qui ne seraient pas déjà couverts par les éléments constitutifs de l’escroquerie (Message du Conseil fédéral concernant une modification du code pénal et du code pénal militaire 13.056 - FF 2013 5431).

L’art. 148a CP fonde une punissabilité de l’omission. La réalisation de l’infraction n’est pas subordonnée à l’existence d’une position de garant, et ne suppose pas une demande de renseignements de l’administration (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1015/2019 du 4 décembre 2019 consid. 4).

À supposer d'ailleurs que les conditions de l'art. 148a CP n'aient pas été réalisées, le comportement du recourant serait quoi qu'il en soit tombé sous le coup de l'art. 31 al. 1 let. d LPC, disposition qui punit, à moins qu'il ne s'agisse d'un crime ou d'un délit frappé d'une peine plus élevée par le CP, d'une peine pécuniaire n'excédant pas 180 jours-amende celui qui manque à son obligation de communiquer au sens de l'art. 31 al. 1 LPGA. Ainsi, au niveau de la prescription de l'action pénale, c'est également un délai de sept ans qui entrerait en ligne de compte.

8.         Il résulte donc de ce qui précède que les principes régissant la révision procédurale ont dument été respectés par l'intimé, qui était fondé à revoir la situation du recourant, et à procéder à l'élaboration de nouveaux plans de calcul, dès lors que le fait nouveau de l'existence du bien immobilier de Bucarest aurait conduit, s'il avait été annoncé d'emblée au SPC, à des résultats sensiblement différents au niveau des plans de calcul et de la détermination des droits du recourant. C'est à juste titre, et le recourant ne le contestait du reste pas, que le SPC a retenu une prescription plus longue en raison de la prise en compte d'un état de fait ayant un caractère pénal (148a CP), l'action pénale se prescrivant dans le cas d'espèce par un délai de sept ans.

9.         L'opposition du bénéficiaire portait d’abord sur la contestation des valeurs retenues pour évaluer la fortune immobilière, griefs identiques pour toute la période concernée (de 2010 à 2017, d'une part, et dès le 1er janvier 2018, d'autre part), soit :

a.       la valeur de l'appartement était, tant en 2008 qu'actuellement, très loin de l'estimation arbitraire retenue par l'intimé;

b.      le SPC aurait dû tenir compte d'une franchise de CHF 112'500.- pour son appartement de Bucarest, pour fixer le montant de sa fortune immobilière, avec pour conséquence, l'annulation de la fortune immobilière prise en compte et donc la suppression du revenu d'une fortune inexistante;

c.       la valeur de cet appartement ne correspondait pas à la réalité du marché, le taux de change « CHF/€ » ayant également été retenu de façon arbitraire, vu la fluctuation des cotations.

Il convient dès lors d'examiner ci-après la pertinence de chacun de ces griefs, en fonction de la législation et des principes de jurisprudence applicables.

10.     Les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui perçoivent une rente de vieillesse de l'assurance-vieillesse et survivants, conformément à l'art. 4 al. 1 let. a LPC.

a. Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d’invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L’art. 9 al. 1 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

Selon l’art. 11 al. 1 LPC, les revenus déterminants comprennent notamment deux tiers des ressources en espèces ou en nature provenant de l’exercice d’une activité lucrative, pour autant qu’elles excèdent annuellement CHF 1'000.- pour les personnes seules et CHF 1’500.- pour les couples et les personnes qui ont des enfants ayant droit à une rente d’orphelin ou donnant droit à une rente pour enfant de l’AVS ou de l’AI; pour les personnes invalides ayant droit à une indemnité journalière de l’AI, le revenu de l’activité lucrative est intégralement pris en compte (let. a); le produit de la fortune mobilière et immobilière (let. b); un quinzième de la fortune nette, un dixième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, dans la mesure où elle dépasse CHF 25'000.- pour les personnes seules, (CHF 37’500.- dès le 1er janvier 2011), CHF 40’000.- pour les couples (CHF 60'000.- dès le 1er janvier 2011) et CHF 15’000.- pour les orphelins et les enfants donnant droit à des rentes pour enfants de l’AVS ou de l’AI; si le bénéficiaire de prestations complémentaires ou une autre personne comprise dans le calcul de ces prestations est propriétaire d’un immeuble qui sert d’habitation à l’une de ces personnes au moins, seule la valeur de l’immeuble supérieure à CHF 112’500.- entre en considération au titre de la fortune (let. c); les rentes, pensions et autres prestations périodiques, y compris les rentes de l’AVS et de l’AI (let. d); les prestations touchées en vertu d’un contrat d’entretien viager ou de toute autre convention analogue (let. e); les allocations familiales (let. f); les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s’est dessaisi (let. g); les pensions alimentaires prévues par le droit de la famille (let. h).

Selon l'art. 17 al. 4 de l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301), dans sa version antérieure au 1er janvier 2021, applicable à l'époque où a été rendue la décision litigieuse, lorsque des immeubles ne servent pas d’habitation au requérant ou à une personne comprise dans le calcul de la prestation complémentaire, ils seront pris en compte à la valeur vénale.

Dès lors que les revenus déterminants comprennent notamment le produit de la fortune mobilière et immobilière (art. 11 al. 1 let. b LPC), dans le cas où il n'est tiré d'un bien immobilier aucun produit réel, on applique le principe du dessaisissement (art. 11 al. 1 let. g LPC), et dans ce contexte, selon la jurisprudence, il y a lieu de tenir compte d'un taux forfaitaire de 4.5 % de la valeur vénale du bien (voir notamment arrêt du Tribunal fédéral P/57/05 du 29 août 2006, ATAS/43/2010 du 19 janvier 2010).

En outre, il convient de tenir compte d'un montant à titre de frais d'entretien correspondant à 20 % de la valeur locative car l'immeuble date de plus de vingt ans (art. 10 al. 3 let. b LPC; art. 16 OPC-AVS/AI et art. 2 de l'ordonnance sur la déduction des frais relatifs aux immeubles privés dans le cadre de l'impôt fédéral direct du 24 août 1992 - RS 642.116, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2019 et art. 5 de la même ordonnance modifiée le 9 mars 2018 entrée en vigueur le 1er janvier 2020); les frais effectifs ne peuvent être retenus (RCC 1987 328).

b. Ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes qui remplissent les conditions de l’art. 2 LPCC et dont le revenu annuel déterminant n'atteint pas le revenu minimum cantonal d'aide sociale applicable (art. 4 LPCC).

Le montant de la prestation complémentaire correspond à la différence entre les dépenses reconnues et le revenu déterminant du requérant (art. 15 al. 1 LPCC).

Aux termes de l’art. 5 al. 1 LPCC, le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, moyennant certaines adaptations, notamment : les prestations complémentaires fédérales sont ajoutées au revenu déterminant (let. a) et en dérogation à l'article 11, alinéa 1, lettre c, de la loi fédérale, la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant est d'un huitième, respectivement d'un cinquième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, et ce après déduction des franchises prévues par cette disposition (let. c).

Pour le calcul de la prestation complémentaire fédérale annuelle, sont pris en compte en règle générale les revenus déterminants obtenus au cours de l’année civile précédente et l’état de la fortune le 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (al. 1). Pour les assurés dont la fortune et les revenus déterminants à prendre en compte au sens de la LPC peuvent être établis à l'aide d'une taxation fiscale, les organes cantonaux d'exécution sont autorisés à retenir, comme période de calcul, celle sur laquelle se fonde la dernière taxation fiscale, si aucune modification de la situation économique de l'assuré n'est intervenue entre-temps (al. 2). La prestation complémentaire annuelle doit toujours être calculée compte tenu des rentes, pensions et autres prestations périodiques en cours (al. 3 de l'art. 23 aOPC-AVS/AI et OPC-AVS/AI).

Pour la fixation des prestations complémentaires cantonales, sont déterminantes, les rentes, pensions et autres prestations périodiques de l'année civile en cours (let. a), la fortune au 1er janvier de l'année pour laquelle la prestation est demandée (let. b de l'art. 9 al. 1 aLPCC et LPCC). En cas de modification importante des ressources ou de la fortune du bénéficiaire, la prestation est fixée conformément à la situation nouvelle (art. 9 al. 3 aLPCC et LPCC).

Cela étant, selon l’art. 25 al. 1 aOPC-AVS/AI et OPC-AVS/AI, la prestation complémentaire annuelle doit être augmentée, réduite ou supprimée, notamment pour la situation litigieuse en l'espèce :

- lors d’un contrôle périodique, si l’on constate un changement des dépenses reconnues, des revenus déterminants et de la fortune; on pourra renoncer à rectifier la prestation complémentaire annuelle, lorsque la modification est inférieure à CHF 120.- par an (let. d).

- dans les cas prévus par l’al. 1 let. d, dès le début du mois au cours duquel le changement a été annoncé, mais au plus tôt à partir du mois dans lequel celui-ci est survenu et au plus tard dès le début du mois qui suit celui au cours duquel la nouvelle décision a été rendue. La créance en restitution est réservée lorsque l’obligation de renseigner a été violée (let. d).

c. Le Tribunal fédéral des assurances a eu l’occasion de préciser que lorsqu’un nouveau calcul des prestations complémentaires est effectué dans le cadre de la révision impliquant une demande de restitution, il y a lieu de partir des faits tels qu’ils existaient réellement durant la période de restitution déterminante. Dans ce sens, on tiendra compte de toutes les modifications intervenues, peu importe qu’elles influencent le revenu déterminant à la hausse ou à la baisse. Ainsi, le montant de la restitution est fixé sans égard à la manière dont le bénéficiaire des prestations complémentaires assume son obligation d’annoncer les changements et indépendamment du fait que l’administration ait pris connaissance ou non des nouveaux éléments déterminants au gré du seul hasard. Il serait choquant, lors du nouveau calcul de la prestation complémentaire destiné à établir le montant de la restitution, de ne tenir compte que des facteurs défavorables au bénéficiaire de la prestation complémentaire. Le Tribunal fédéral a alors précisé que seul un paiement d’arriérés est exclu (ATF 122 V 19 consid. 5c, VSI 1996 p. 212). Dans un récent arrêt de principe, le Tribunal fédéral a indiqué qu'à défaut d'une disposition d'exécution s'écartant de l'art. 24 al. 1 LPGA, dans le cadre d'une demande de restitution, la règle jurisprudentielle prévue par l'ATF 122 V 19, selon laquelle le paiement d'arriérés est exclu, est contraire au droit (ATF 138 V 298 consid. 5.2.2).

11.     Le recourant considère que l'intimé a retenu dans ses plans de calcul une valeur de l'appartement arbitraire : selon lui, cette valeur résultait d'une estimation largement supérieure à la réalité, qu'il avait dû fournir au SPC à la hâte.

Déférant à la demande de renseignements du SPC, le bénéficiaire avait produit, par courrier du 14 avril 2017 (pièce 97 dossier SPC), un rapport détaillé d'évaluation de son appartement de Bucarest, établi par l'ingénieure F______, spécialiste en matière d'expertise immobilière, membre de l'ANEVAR (Association Nationale d'Experts Agréés de Roumanie [traduction libre]) : au terme d'un rapport très détaillé (comportant plus de 20 pages), elle avait abouti à la conclusion que la valeur de rendement de cet appartement était de € 63'500.- et sa valeur vénale de € 64'000.- . Quoi qu'en dise le recourant, cette expertise apparaît convaincante, établie par une spécialiste reconnue, qui a pris en compte tous les paramètres nécessaires pour aboutir à une conclusion qui paraît parfaitement crédible. L'experte a d'ailleurs été mandatée par le recourant. Le fait qu'il n'ait pas pu se déplacer en Roumanie pour la mandater, le cas échéant après l'avoir rencontrée, ne permet toutefois pas de remettre en cause le résultat de l'expertise. Le recourant n'a pas précisé comment il avait fait son choix; mais il est vraisemblable qu'il n'ait pas choisi cette experte au hasard : certes n'était-il pas sur place; il est toutefois vraisemblable, mais quoi qu'il en soit non déterminant, qu'il ait sollicité ses deux fils, ou l'un d'eux, ces derniers vivant tous deux à Bucarest, étant tous deux ingénieurs, et disposant a priori des capacités et ressources nécessaires pour trouver assez rapidement une personne compétente dans le domaine. Il ne faut pas non plus oublier que la demande de renseignements portant précisément sur l'évaluation du bien immobilier sis à Bucarest a été adressée au recourant le 30 janvier 2017 déjà, le rapport ayant été établi le 10 avril 2017; dans ces circonstances, on ne peut guère suivre le recourant lorsqu'il attribue à la « hâte » une évaluation (par l'experte) qui, selon lui, ne correspondait pas à la réalité. Ce document n'a certes pas été traduit en français dans son intégralité, mais le recourant en a cependant traduit les termes techniques et particuliers, permettant d'en comprendre le sens, et en tout état, les conclusions. Quoi qu'il en soit et comme relevé précédemment, rien ne permet de remettre en cause de façon objective les conclusions de l'experte; le recourant s'étant contenté d'affirmer que cette valeur ne correspondrait pas à la réalité, mais sans donner le moindre élément susceptible de susciter un doute sur la crédibilité de ce rapport. Certes, en dernier lieu, les héritiers du recourant qui, par ailleurs, ont intégralement repris à leur compte les griefs et l'argumentation développés par le recourant, ont-ils produit à titre exemplatif des annonces, publiées sur Internet, d'appartements proposés à la vente, pour des prix variant entre € 37'000.- et € 50'000.-, indiquant qu'il s'agissait d'objets comparables à celui dont le recourant était propriétaire de son vivant. On ne connaît certes pas le descriptif précis de ces exemples, pour pouvoir véritablement les comparer à l'appartement litigieux, mais il n'en reste pas moins que l'ordre de grandeur des prix auxquels ces objets étaient actuellement mis en vente ne permet pas de remettre sérieusement en question l'évaluation faite en 2017. Ainsi, on ne saurait faire grief à l'intimé d'avoir pris l'expertise produite par le recourant comme base de l'évaluation de la fortune immobilière roumaine dans ses nouveaux plans de calcul. Certes, pourrait-on se demander si le raisonnement de l'intimé fondant ses calculs sur une valeur vénale de € 64'000.- constante pour toutes les années concernées constituait une base fiable, ne serait-ce que par rapport à une variation des cours de change des devises concernées. La chambre de céans est toutefois d'avis que la question peut rester ouverte, car il est vraisemblable que cela ne changerait pas grand-chose aux résultats, et en tout cas dans la phase des conversions « €/CHF », dans la mesure où, depuis 2010 et jusqu'à 2017, selon les tableaux établis par l'intimé dans la décision entreprise, le taux de conversion €/CHF n'a cessé de diminuer, pour pratiquement atteindre en 2017, époque de l'évaluation litigieuse, un niveau proche de la parité. Ainsi, la chambre de céans constate que le SPC a établi les plans de calcul litigieux ayant abouti à la demande de restitution querellée dans le respect des règles et principes énoncés précédemment. Ce grief doit dès lors être rejeté.

12.     Dans un deuxième grief, le recourant faisait valoir que le SPC aurait dû considérer son appartement « comme ce qu'il était », à savoir son habitation, qu'il occupait lors de ses séjours en Roumanie au même titre que l'appartement qu'il loue à Genève; en d'autres termes, il estimait que dans la mesure où cet appartement constituait pour lui (et son épouse) le seul moyen de se loger en Roumanie, n'ayant pas les moyens de payer un hôtel, et qu'il ne l'avait jamais loué à des tiers, il devait être considéré comme étant occupé par son propriétaire, et donc se voir appliquer la franchise de CHF 112'500.- avec pour conséquence que, dans la mesure où l'appartement de Bucarest avait une valeur inférieure à la franchise, le SPC aurait dû réduire à zéro la fortune prise en compte dans ses plans de calcul, et annuler la prise en compte d'une valeur locative.

Destinées à assurer l'application uniforme des prescriptions légales, les directives de l'administration n'ont pas force de loi et, par voie de conséquence, ne lient ni les administrés ni les tribunaux; elles ne constituent pas des normes de droit fédéral au sens de l'art. 95 let. a de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) et n'ont pas à être suivies par le juge. Elles servent tout au plus à créer une pratique administrative uniforme et présentent à ce titre une certaine utilité; elles ne peuvent en revanche sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu'elles sont censées concrétiser. En d'autres termes, à défaut de lacune, les directives ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 132 V 121 consid. 4.4 et les références; ATF 131 V 42 consid. 2.3 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 9C_283/2010 du 17 décembre 2010 consid. 4.1).

En matière de prestations complémentaires, l'administration fédérale a ainsi émis les DPC.

Le droit à une PC est subordonné à la condition que l'intéressé ait son domicile civil en Suisse et qu'il y réside habituellement (2310.01 DPC). Le domicile de toute personne est au lieu dont elle a fait le centre de ses relations personnelles et vitales et où elle réside avec l'intention de s'y établir (1210.02 DPC). Cette notion se rapporte à la définition du domicile au sens de l'art. 23 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), dont l'al. 2 précise que nul ne peut avoir en même temps plusieurs domiciles. Selon le texte clair de l'art. 11 al. 1 let. c in fine LPC, si le bénéficiaire de prestations complémentaires ou une autre personne comprise dans le calcul de ses prestations est propriétaire d'un immeuble qui sert d'habitation à l'une de ces personnes au moins, seule la valeur de l'immeuble supérieure à CHF 112'500.- entre en considération au titre de la fortune. Il tombe dès lors sous le sens que la notion d'habitation d'un logement se rapporte directement à la notion de résidence habituelle, laquelle est une fois encore une condition pour pouvoir bénéficier d'une PC. D'ailleurs, le recourant en était parfaitement conscient, puisque d'emblée, lorsqu'il a évoqué l'appartement dont il était propriétaire en Roumanie, il a pris soin de préciser (lettre du 6 décembre 2016) qu'il occupait personnellement ce logement lors de ses séjours en Roumanie « (sans dépasser les trois mois annuels autorisés) » (2330.01 DPC). On ne saurait dès lors suivre son raisonnement, lorsqu'il soutient que le SPC devrait considérer son appartement en Roumanie, au même titre que l'appartement (qu'il loue) à Genève où il a sa résidence habituelle, au seul motif que lorsqu'il se rend en Roumanie, il occuperait son logement, sans que ce dernier soit occupé par un tiers en son absence (de la même manière que lorsqu'il se rend en Roumanie, son logement genevois n'est pas occupé par des tiers). Cela reviendrait à admettre qu'il puisse simultanément avoir deux domiciles, et cela reviendrait à vider de tout son sens la distinction existant entre un bien immobilier occupé par son propriétaire, et celui qui ne servirait pas d'habitation à son propriétaire, avec la différence de traitement au niveau de la prise en compte de la fortune et du produit de celle-ci, comme on l'a vu. On peut également relever que selon la doctrine et la jurisprudence, le but de la réglementation qui favorise le bénéficiaire de PC qui habite son propre immeuble - qui est doublement favorisé par la législation applicable, d'une part par la prise en compte d'une franchise plus élevée et d'autre part, parce que seule la valeur fiscale (en principe largement inférieure à la valeur vénale) de son habitation est prise en considération -, est d'encourager les assurés à continuer de vivre dans leur milieu habituel (ATF 125 V p. 69 consid. 3b cité par Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, Schulthess Éditions romandes 2015 ad art. 11 note 49 p. 146).

Ainsi l'on ne saurait faire de reproche à l'intimé dans la manière dont il a pris en compte le bien immobilier sis en Roumanie en tant que fortune; il y a ensuite appliqué un produit de la fortune immobilière sous forme de valeur locative calculée à 4.5 % selon les principes énoncés précédemment, en prenant également en compte au titre de dépenses reconnues les frais d'entretien de cet appartement, calculés sur la base d'un forfait de 20 %, conforme aux principes rappelés ci-dessus.

Ce second grief doit dès lors être rejeté.

13.     Dans un troisième grief, le recourant estimait que la valeur de l'appartement, prise en compte dans les plans de calcul ne correspondait pas à la réalité du marché, le taux de change « CHF/€ » ayant également été retenu de façon arbitraire, vu la fluctuation des cotations.

S'agissant du taux de conversion applicable pour le calcul de la fortune immobilière et de la valeur locative y relative, il y a lieu d'appliquer les DPC. Le ch. 2087.1 DPC prévoyait, dans sa version 2010, que pour les rentes et pensions versées en devises d'États parties à la Convention de libre passage CH-UE et à l'Accord de l'AELE, les taux de conversion applicables étaient ceux fixés par la Commission administrative des communautés européennes pour la sécurité sociale des travailleurs migrants et publiés au Journal officiel de l'Union européenne (JOUE). Le cours de conversion applicable était le cours déterminant du début de l'année correspondante.

Depuis le 1er janvier 2013, le taux de conversion, selon le chiffre 3452.01 DPC, correspond au cours du jour fixé par la Banque centrale européenne. À cet égard, est déterminant le dernier cours du jour disponible du mois qui précède immédiatement le début du droit à la prestation. Bien que ces directives concernent les rentes servies, elles sont applicables par analogie aux autres éléments composant les revenus déterminants tels que la fortune immobilière (cf. notamment ATAS/325/2021 du 12 avril 2021; ATAS/1146/2019 du 9 décembre 2019).

De ce point de vue, la décision entreprise n'est pas critiquable, dès lors qu'elle respecte pleinement les dispositions légales, les principes et la jurisprudence qui viennent d'être rappelés.

Il résulte de ce qui précède que ce grief doit également être écarté.

14.     Enfin, le recourant reprochait à l’intimé de ne pas s’être prononcé, à ce stade, sur la demande de remise du montant qui lui était réclamé.

Selon l’art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile.

L’art. 4 OPGA précise que la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l’intéressé se trouve dans une situation difficile (al. 1). Est déterminant, pour apprécier s’il y a une situation difficile, le moment où la décision de restitution est exécutoire (al. 2). Les autorités auxquelles les prestations ont été versées en vertu de l’art. 20 LPGA ou des dispositions des lois spéciales ne peuvent invoquer le fait qu’elles seraient mises dans une situation difficile (al. 3). La demande de remise doit être présentée par écrit. Elle doit être motivée, accompagnée des pièces nécessaires et déposée au plus tard trente jours à compter de l’entrée en force de la décision de restitution (al. 4). La remise fait l’objet d’une décision (al. 5).

Dans la mesure où la demande de remise ne peut être traitée sur le fond que si la décision de restitution est entrée en force, la remise et son étendue font l'objet d'une procédure distincte. Intrinsèquement, une remise de l'obligation de restituer n'a de sens que pour la personne tenue à restitution (arrêt du Tribunal fédéral 9C_211/2009 du 26 février 2010 consid. 3.1).

C'est ainsi à juste titre que l'intimé a relevé, dans la décision entreprise, que l'opposition du recourant contenait une demande de remise de l'obligation de restituer les prestations indues. Il a précisé à ce sujet qu'il se déterminerait par décision séparée, dès l'entrée en force de cette décision sur opposition (art. 4 al. 5 OPGA). Cette décision examinerait les critères de la bonne foi (au sens juridique) et de la situation financière difficile, et indiquerait enfin à l'intéressé s'il était dispensé de rembourser au SPC le montant réclamé.

Au vu de ce qui précède, ce grief doit lui aussi être écarté.

15.     En tous points mal fondé, le recours est rejeté.

16.     Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Mario-Dominique TORELLO

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le nom