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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4262/2022

ATA/1151/2024 du 01.10.2024 sur JTAPI/263/2024 ( ICCIFD ) , REJETE

Descripteurs : OBJET DU LITIGE;DROIT FISCAL;IMPÔT;IMPÔT CANTONAL ET COMMUNAL;PRÉTENTION DE DROIT PUBLIC;IMPOSITION DANS LE TEMPS;IMPÔT SUR LE REVENU;REVENU DE LA FORTUNE IMMOBILIÈRE(DROIT FISCAL);DÉDUCTION DU REVENU(DROIT FISCAL);DÉDUCTION DES FRAIS D'ACQUISITION(DROIT FISCAL);PROCÉDURE FISCALE;PRESCRIPTION;ASSUJETTISSEMENT(IMPÔT);DÉCLARATION D'IMPÔT;TAXATION CONSÉCUTIVE À UNE PROCÉDURE;OUVERTURE DE LA PROCÉDURE;FARDEAU DE LA PREUVE;SOUSTRACTION D'IMPÔT;AMENDE;GARANTIE DE PROCÉDURE
Normes : Cst.29.al2; aLIFD.137; aLIFD.138; aLIFD.91; aLIFD.120; aLIFD.99; aLHID.47; aLHID.32; aLHID.35; aLHID.33; OIS.15; OIS.16; LIPP.60.al2; LPFisc.22; LPFisc.55; LPFisc.38E; LIFD.83; LIFD.147; LIFD.124.al1; LISP.21; LISP.23
Résumé : Recours d’un contribuable soumis à l’impôt à la source contre le refus de l’AFC-GE de le taxer de manière ordinaire pour les années fiscales 2015 et 2019, au motif qu’il n’avait pas déposé de demande avant le délai légal prévu au 31 mars de l’année fiscale suivante, sa demande visant à une taxation ordinaire en raison de l’existence d’une fortune non déclarée datant de décembre 2020. Confirmation du jugement du TAPI qui a considéré que le recourant était forclos à demander une taxation ordinaire. Le nouveau droit, prévoyant une taxation ordinaire ultérieure obligatoire dans certains, entré en vigueur au 1er janvier 2021, ne s’applique pas aux années fiscales considérées. Enfin, la demande de déductions supplémentaires qui s’écartent du forfait prévu par l’impôt à la source était soumise au même délai fixé au 31 mars, non respecté non plus en l’espèce. Rejet du recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4262/2022-ICCIFD ATA/1151/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er octobre 2024

4ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Andrio ORLER, avocat

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE intimée

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 25 mars 2024 (JTAPI/263/2024)


EN FAIT

A. a. Le litige concerne l’imposition à la source de A______ pour les années 2015 et 2019.

b. Selon le registre de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM), A______ est arrivé à Genève le 24 septembre 2008 et y a résidé jusqu’au 21 mai 2023 (excepté du 13 juillet 2012 au 11 mars 2013).

Au bénéfice d’une autorisation de séjour annuelle (permis B), il a été soumis au régime d’impôt à la source (ci-après : IS) sur son activité salariée.

c. Pour les années 2014 à 2020, il n’a demandé aucune rectification de l’assujettissement ou des retenues de cet impôt.

B. a. Le 5 décembre 2019, l'administration fiscale cantonale (ci-après : l'AFC-GE) a informé le contribuable de l'ouverture à son encontre de procédures en rappel et en soustraction d'impôt pour les années 2009 à 2018. Dans le cadre de l'échange automatique de renseignements, elle avait eu connaissance d’éléments permettant d'envisager que ses déclarations fiscales pour ces années étaient inexactes ou incomplètes, notamment en ce qui concernait sa fortune mobilière détenue auprès d’une banque située au Royaume-Uni (ci-après : compte UBS-UK). Il était invité à fournir divers documents.

b. Le 2 décembre 2020, le contribuable a remis à l'AFC-GE les documents requis, soit ses déclarations fiscales 2014 à 2018, un courrier du 16 juillet 2020 de la filiale britannique de l'UBS, plusieurs documents d'ouverture du compte UBS-UK et des relevés 2014 à 2018 y relatifs, des relevés 2009 à 2018 de ses comptes bancaires auprès de la BCGE, des relevés 2014 à 2018 de plusieurs comptes UBS, ses certificats de salaire 2014 à 2018, des attestations du Groupe Mutuel de 2014 à 2018, des factures médicales pour l'année 2015, des relevés des rendements bruts 2014 à 2018 du compte UBS-UK et une lettre de ses parents datée du 5 novembre 2020 confirmant leurs donations en sa faveur (USD 1'000'000.- en 2014 et USD 1'896'196.- en 2017).

Entre 2009 et 2013, sa fortune n'avait jamais dépassé le montant de la déduction sociale y relative. Les procédures de contrôles devaient être clôturées sans reprises pour ces périodes. S'agissant des années 2014 à 2018, le 17 mars 2014, il avait ouvert conjointement avec sa mère le compte UBS-UK. Il détenait la moitié des avoirs y relatifs. En 2015, il avait suivi de lourds traitements médicaux aux États‑Unis, dont les frais (USD 212'506.-) n’avaient été pris en charge par aucune assurance. À ces frais s’ajoutaient ceux encourus en Suisse (CHF 388.-). Une déduction pour ces dépenses aurait dû être admise dans le cadre d'une taxation ordinaire. L’IS retenu pour l’année 2015 étant supérieur à celui qui aurait dû être payé en taxation ordinaire, compte tenu de cette déduction, aucun supplément d'impôt n'était dû pour la période 2015. Au contraire, en raison des déductions liées à cette période, il avait payé, dans le cadre de l’IS, plus d'impôts qu'il ne devait. En conséquence, il concluait à la clôture de la procédure sans supplément d'impôts et au remboursement de tout solde pour les années 2014 à 2018.

Concernant les amendes, seule une tentative de soustraction pouvait être retenue, le droit de taxer n’étant pas prescrit. Imposé à la source, il n’était pas conscient de son obligation de déclarer l’ensemble de son patrimoine. Son comportement relevait tout au plus de la négligence. En effet, étant désavantagé dans le cadre de la taxation à la source, il était évident que c'était par négligence qu'il ne s'était pas soumis à une taxation ordinaire. En conséquence, aucune amende ne pouvait lui être infligée.

c. Le 21 mai 2021, l'AFC-GE a étendu les procédures aux années fiscales 2019 et 2020 et demandé au contribuable de remplir les déclarations fiscales correspondantes et de fournir toute pièce justifiant des revenus et/ou de fortune réalisés durant ces périodes.

d. Le 20 décembre 2021, le contribuable a remis à l'AFC-GE les documents requis, sollicitant une déduction pour ses frais médicaux de 2019 (CHF 155'527.74) et une imputation de l’IS prélevé en 2019 et 2020 sur l’impôt dû selon la taxation ordinaire.

e. Le 9 août 2022, l'AFC-GE a notifié au contribuable les bordereaux de « rappel d’impôt » et d’amende pour les impôts cantonaux et communaux (ci-après : ICC) et les impôts fédéraux (ci-après : IFD) 2014, 2016, 2017, 2018 et 2020, calculés sur l’ensemble des revenus (y compris ceux ayant fait l’objet de l’IS) et de la fortune (ICC). À teneur des décomptes, les montants des IS versés étaient soustraits de ceux des ICC et IFD dus. La quotité des amendes était fixée à 0.75 fois les impôts soustraits, compte tenu de la faute intentionnelle (dol éventuel) et de la bonne collaboration du contribuable. Pour 2015 et 2019, tout comme pour 2009 à 2013, les procédures s’étaient terminées sans supplément d’impôt et sans amende.

f. Le 7 septembre 2022, A______ a formé réclamation contre ces bordereaux, faisant valoir que les conditions de l’ouverture d’une procédure de rappel d’impôt n’étaient pas données, que les périodes fiscales en cause devaient faire l’objet de la taxation ordinaire et que les amendes étaient infondées tant dans leur principe que dans leur quotité.

g. Par décision sur réclamation du 10 novembre 2022, l'AFC-GE a admis partiellement cette réclamation, en réduisant la quotité des amendes à 0.5 fois les impôts soustraits, car le contribuable avait fait preuve de négligence. Elle l’a rejetée pour le surplus.

Dans la mesure où il disposait d’une fortune, A______ aurait dû déposer spontanément ses déclarations fiscales, sans quoi elle n’était pas en mesure d’en avoir connaissance. Les taxations à la source concernées étant entrées en force, seule la procédure de rappel d’impôt entrait en ligne de compte pour récupérer les impôts dus.

Les périodes 2015 et 2019 n’ayant pas fait l’objet des bordereaux de rappel d’impôt, les taxations y relatives ne pouvaient pas être réexaminées.

C. a. Par acte du 14 décembre 2022, A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et celle des bordereaux y relatifs, à ce qu’il soit taxé de manière ordinaire pour les périodes 2014 à 2020 et à ce que les IS déjà prélevés soient imputés sur les impôts finalement dus et leurs excédents éventuels reportés sur « d’autres périodes fiscales », le tout sous suite de frais et dépens.

Par ses courriers des 5 décembre 2019 et 21 mai 2021, l'AFC-GE avait en effet interrompu la prescription du droit de taxer. Un nouveau délai de prescription avait commencé à courir dès ces dates. En conséquence, les bordereaux de rappel d’impôt devaient être annulés et des décisions de taxation ordinaires devaient être prononcées. Par ailleurs, dans ces conditions, seule une tentative de soustraction entrait en ligne de compte. Or, l'AFC-GE avait admis que sa faute relevait de la négligence, laquelle n’était pas punissable. Dès lors, aucune amende ne pouvait être prononcée en l’espèce.

Il n’avait jamais requis la rectification des IS des années en cause et il ne contestait pas devoir être soumis à cet impôt. Cela étant, dans la mesure où il disposait d’une fortune et de revenus non soumis à l’IS, il devait être assujetti à une taxation ordinaire « ultérieure/complémentaire » pour ces périodes, ce que l'AFC-GE avait d’ailleurs admis, en lui demandant de remplir les déclarations fiscales y relatives. Elle avait par ailleurs admis le report des IS prélevés pour les années 2014, 2016 à 2018 et 2020. Elle avait pourtant refusé, à tort, d’effectuer la procédure de taxation ordinaire pour les années 2014 à 2020, d’imputer ou de reporter les IS retenus pour 2015 et 2019 et d’admettre les frais médicaux pour ces deux années. Il n’avait fait l’objet d’aucune décision de taxation « valable » pour les années 2015 et 2019, de sorte que des « décisions formelles de taxation » devaient impérativement être prononcées, afin de fixer sa situation fiscale pour ces périodes également, sur la base des déclarations fiscales qu’il avait déposées en décembre 2020 et 2021, prenant en considération ses frais médicaux.

b. Le 22 mai 2023, l'AFC-GE a conclu à l’annulation des amendes et au rejet du recours pour le surplus.

Le droit de taxer pour les années 2014 à 2020 n'était en effet pas prescrit lors de l’envoi de ses courriers des 2 décembre 2020 et 21 mai 2021. C’était donc à tort que les bordereaux du 9 août 2022 comportaient la mention « rappel d’impôt ». Cela ne portait toutefois pas à conséquence, s’agissant des taxations effectuées. Concernant les amendes en revanche, comme elle avait retenu la négligence, qui n’était pas punissable en cas de tentative de la soustraction, elle concluait à leur annulation.

La demande tendant à la déduction des frais médicaux (années 2015 et 2019) était sans objet, étant donné qu’elle n’avait notifié aucun bordereau de taxation pour ces deux périodes. De plus, cette déduction n’était pas admissible dans le cadre d’une taxation complémentaire des revenus non soumis à l’IS.

Enfin, il appartenait au contribuable de demander son assujettissement à l'impôt ordinaire dès lors qu’il disposait d'une fortune imposable, fortune qu’elle avait découverte de manière fortuite. Il pouvait faire valoir cet assujettissement au cours de la procédure ordinaire, et non dans le cadre d'une procédure complémentaire, si bien que les conditions d'une révision n’étaient pas réalisées en l'espèce.

c. Par réplique du 28 juin 2023, A______ a maintenu ses conclusions, relevant en particulier que pour les périodes 2014, 2016, 2017, 2018 et 2020,
l'AFC-GE l’avait taxé de manière ordinaire, alors qu’elle refusait de le faire pour les années 2015 et 2019. Dès lors qu’il n’était pas assujetti à l’IS, en raison de sa fortune, il devait être taxé de manière ordinaire pour toutes les années en cause.

d. Par duplique du 2 novembre 2023, l'AFC-GE a persisté dans ses conclusions et explications.

e. Par jugement du 25 mars 2024, le TAPI a très partiellement admis le recours de A______ et annulé les bordereaux d’amende ICC et IFD 2014, 2016, 2017, 2018 et 2020, conformément aux conclusions de l’AFC-GE.

Il a donné acte à l’AFC-GE de l’annulation des bordereaux d’amende, retenant que seule une tentative de soustraction pouvait être reprochée à l’intéressé, et que celui-ci avait agi par négligence.

En annonçant les 5 décembre 2019 et 21 mai 2021 l’ouverture d’une procédure en rappel et en soustraction d’impôts, la prescription relative (cinq ans) du droit de taxer pour les périodes de 2014 à 2020 n’était pas atteinte. A______ concluait également à la taxation ordinaire aussi pour 2015 et 2019. Le droit de taxer n’était pas prescrit pour ces années-là non plus. Le contribuable n’avait pas requis de décision constatatoire avant le 31 mars de l’année suivant l’échéance de la prestation. Il n’était pas en droit de réclamer le montant de l’IS qui aurait été indûment retenu. Le droit à une taxation ordinaire ultérieur n’était entré en vigueur que le 1er janvier 2021. Elle ne s’appliquait pas aux périodes fiscales concernées et le recourant n’avait requis la taxation ordinaire qu’en décembre 2020. A______ ne pouvait être suivi quand il estimait que la loi excluait l’IS puisqu’il disposait d’une fortune, non déclarée. Il n’avait pas acquitté d’impôt sur la fortune, ni déclaré celle-ci d’ailleurs. En outre, l’AFC-GE ne lui avait encore notifié aucun impôt sur sa fortune pour 2015 et 2019. Enfin, il n’avait pas sollicité en temps utile la déduction pour ses frais médicaux. Manifestement tardive, sa demande devait être rejetée. C’était à bon droit que l’AFC-GE avait refusé d’entrer en matière sur cette déduction. Le recours était admis dans la mesure très partielle reconnue par l’AFC‑GE et rejeté pour le surplus.

D. a. Par acte du 25 avril 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) à l’encontre du jugement précité, concluant principalement à son annulation et au renvoi de la cause à l’AFC-GE pour nouvelles décisions avec instructions de prononcer « des décision formelles de taxation, selon la procédure de taxation ordinaire pour le revenu et la fortune ICC et IFD, pour chacune des périodes fiscales 2015 et 2019 » en imputant l’impôt à la source prélevé sur les impôts dus en taxation ordinaire ICC et IFD et en déduisant les frais médicaux de ces périodes.

Le litige ne portait plus que sur les impôts à la source 2015 et 2019, ses revendications ayant été entièrement admises s’agissant de l’interruption des délais de prescription par les demandes de rappels d’impôt, de la déduction des impôts à la source prélevés sur les années 2014, 2016, 2017, 2018 et 2020 et de l’annulation des amendes émises par l’AFC-GE.

Aucune décision de taxation n’était entrée en force pour les années 2015 et 2019. Il était d’avis qu’il était cependant « correct de soumettre les revenus des années 2015 et 2019 issus de l’activité de salarié à une imposition à la source ». Toutefois, il avait durant ces années également une fortune imposable. Il devait donc faire l’objet d’une taxation ordinaire « sur l’ensemble de ses revenus et fortune ». Une telle imposition avait été faite pour les années 2014, 2016 à 2018 et 2020. Le délai au 31 mars prévu par l’art. 137 aLIFD n’était pas applicable car c’était un délai relatif à l’IS. Or, il était soumis à l’impôt ordinaire. La seule contrainte pour émettre une décision de taxation résidait dans la prescription, qui avait été interrompue par les courriers de rappels d’impôts du 5 décembre 2019 et 21 mai 2021. L’autorité était donc obligée d’émettre une décision de taxation ordinaire pour ces deux années. Il convenait enfin d’imputer les montants des impôts à la source prélevés pour les périodes fiscales 2015 et 2019.

Finalement, il convenait d’admettre les déductions pour les frais médicaux, les années contestées relevant désormais d’une taxation ordinaire, comme il l’avait démontré.

b. Dans ses observations du 31 juillet 2024, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours, s’en remettant à justice s’agissant de la recevabilité de ce dernier. Aucun argument nouveau susceptible d'influer sur le sort du présente n'était avancé. Afin d’éviter d’inutiles redites, elle renvoyait à sa réponse devant le TAPI du 22 mai 2023.

c. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA -E 5 10).

2.             Conformément aux conclusions du recourant, le litige porte seulement sur son imposition à la source pour les années 2015 et 2019, le traitement fiscal des périodes 2014, 2016, 2017, 2018 et 2020 n’étant plus contesté. Le recourant ne conteste pas non plus l’annulation des amendes, requise par l’AFC-GE, dont le TAPI a pris acte ni l’interruption des délais de prescription par les demandes de l’AFC-GE de décembre 2019 et mai 2021.

Le recourant considère ne pas être soumis à l’impôt à la source. Il devait être imposé de manière ordinaire pour les années 2015 et 2019.

2.1 La prescription ou la péremption sont des questions de droit matériel que la chambre administrative examine d'office (ATF 138 II 169 consid. 3.2 ; ATA/259/2024 du 27 février 2024 consid. 3.1 et l'arrêt cité) tant pour l'IFD que les ICC, lorsque celles-ci se fondent sur le droit fédéral (ATF 138 II 169 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 4).

2.2 Le droit de procéder à la taxation se prescrit par cinq ans à compter de la fin de la période fiscale (art. 120 al. 1 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11, 47 al. 1 de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 - LHID - RS 642.14 et 22 al. 1 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17). Pour les personnes physiques, la période fiscale correspond à l’année civile (art. 40 al. 1 LIFD et 60 al. 2 de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 - LIPP - D 3 08). La prescription ne court pas ou est suspendue pendant les procédures de réclamation, de recours ou de révision (art. 120 al. 2 let. a LIFD et 22 al. 2 let. a LPFisc).

2.3 Un nouveau délai de prescription commence à courir notamment lorsque l’autorité prend une mesure tendant à fixer ou faire valoir la créance d’impôt et en informe le contribuable ou une personne solidairement responsable avec lui du paiement de l’impôt (art. 120 al. 3 let. a LIFD et 22 al. 3 let. a LPFisc). La prescription du droit de procéder à la taxation est acquise dans tous les cas quinze ans après la fin de la période fiscale (art. 120 al. 4 LIFD et art. 22 al. 4 LIFD).

2.4 Il convient tout d’abord de constater que le droit de taxer n’est pas prescrit pour cette période, l’AFC-GE ayant visé, par ses courriers des 5 décembre 2019 et 21 mai 2021, également les années 2015 et 2019, de sorte que le délai de prescription a recommencé à courir à compter de ces dates. Le délai de prescription absolu de quinze ans n’est quant à lui pas encore atteint. Le recourant ne le conteste d’ailleurs pas.

2.5 En droit fédéral, l'impôt à la source est régi dans la LIFD et la LHID, qui sont applicables en l'espèce dans leur teneur en vigueur durant les périodes fiscales litigieuses (arrêts du Tribunal fédéral 9C_689/2022 du 12 avril 2023 consid. 4.1 ; 2C_60/2020 du 27 avril 2021 consid. 3 et 4). Certaines des dispositions de ces lois ont été modifiées par la loi fédérale sur la révision de l'imposition à la source du revenu de l'activité lucrative du 16 décembre 2016 et sont entrées en vigueur le 1er janvier 2021 (RO 2018 1813; FF 2015 625). Les périodes fiscales litigieuses étant antérieures à ces modifications, il sera fait référence à l'aLIFD et à l'aLHID pour mentionner les dispositions de ces lois dont la teneur a été modifiée au 1er janvier 2021.

2.6 En droit cantonal genevois, l'ancienne loi genevoise du 23 septembre 1994 sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales (ci-après: aLISP) est applicable, de même que l'ancien règlement y relatif, du 12 décembre 1994 (ci‑après: aRISP), ainsi que, pour les questions de l'assujettissement fiscal, les dispositions de la LIPP.

2.7 Les travailleurs étrangers qui, sans être au bénéfice d'un permis d'établissement, sont, au regard du droit fiscal, domiciliés ou en séjour en Suisse, sont assujettis à un impôt perçu à la source sur le revenu de leur activité lucrative dépendante effectuée en Suisse, respectivement dans le canton (art. 83 al. 1 1e phrase aLIFD; art. 32 al. 1 1e phrase aLHID; art. 1 al. 1 1e phrase aLISP).

2.8 L'impôt à la source des travailleurs est calculé sur le revenu brut, lequel comprend tous les revenus provenant de l'activité pour le compte d'autrui
(art. 84 al. 1 et 2 aLIFD; art. 32 al. 1 et 3 aLHID; art. 2 al. 1 et 2 aLISP). Il se substitue à l'impôt fédéral direct, et à l'impôt cantonal et communal perçus selon la procédure ordinaire (art. 87 et 99 aLIFD; art. 32 al. 1 et 35 al. 2 aLHID; art. 17 aLISP). La retenue comprend par conséquent l’impôt fédéral, cantonal et communal (art. 33 al. 1 aLHID; art. 3 al. 2 aLISP).

2.9 Alors que l'impôt sur le revenu est perçu selon une procédure de taxation mixte, laquelle implique le dépôt d'une déclaration d'impôt par le contribuable, l'impôt à la source repose sur le principe de l'auto-taxation (ATF 135 II 274 consid. 3.3). Il est perçu par le débiteur de la prestation imposable (à savoir, lorsqu'il concerne le revenu du travail, l'employeur du contribuable; arrêt du Tribunal fédéral 2C_60/2020 du 27 avril 2021 consid. 6.1), lequel a notamment l'obligation de retenir l'impôt dû, de le verser périodiquement à l'autorité fiscale compétente, d'établir à son intention les relevés y relatifs et de lui permettre de consulter tous les documents utiles au contrôle de la perception de l'impôt (art. 100 al. 1 let. a et c aLIFD; art. 37 al. 1 let. a et c aLHID; art. 18 al. 1 let. a et c aLISP). Malgré cette substitution, le contribuable conserve certaines obligations de procédure, telle celle de donner des renseignements sur les éléments déterminants pour la perception de l'impôt à la source (art. 136 aLIFD ; art. 49 al. 1 aLHID et 31 LPFisc auquel se réfère l'art. 22 LISP). Ainsi, l’IS se substitue à l'impôt fédéral direct et à l'impôt cantonal et communal perçus selon la procédure ordinaire. Aucune déduction ultérieure supplémentaire n’est accordée (art. 99 al. 1 aLIFD ; art. 5 al. 4 aLISP).

2.10 Selon l’art. 137 aLIFD, lorsque le contribuable ou le débiteur d’une prestation imposable conteste le principe même ou le montant de la retenue d’impôt, il peut, jusqu’à la fin mars de l’année qui suit l’échéance de la prestation, exiger que l’autorité de taxation rende une décision relative à l’existence et l’étendue de l’assujettissement.

2.11 Dans le canton de Genève, des règles en grande partie similaires à celles figurant aux art. 137 à 139 LIFD avaient été adoptées dans la aLISP, conformément à l'art. 49 al. 2 LHID. Ainsi, l'art. 23 al. 1 aLISP obligeait le contribuable qui conteste son assujettissement à requérir une décision de l'autorité fiscale à ce propos dans le même délai que celui imposé par l'art. 137 al. 1 aLIFD.

Le droit cantonal connaît actuellement une disposition similaire à l’art. 137 LIFD. Selon l’art. 38E al. 1 LPFisc, qui a remplacé l’ancien art. 23 al. 1 aLISP, applicable en vertu de l’art. 86 LPFisc à toutes les causes encore pendantes au moment de son entrée en vigueur le 1er janvier 2021, le contribuable peut, jusqu’au 31 mars de l’année fiscale qui suit l’échéance de la prestation, exiger que l’autorité fiscale rende une décision relative à l’existence et l’étendue de l’assujettissement : a) s’il conteste l’impôt à la source indiqué sur l’attestation mentionnée à l’art. 38A al. 1 let. b LPFisc ou b) si l’employeur ne lui a pas remis l’attestation mentionnée à l’art. 38A al. 1 let. b LPFisc. Pour rappel, l'art. 23 al. 1 aLISP prévoyait le même délai.

Il appartient au contribuable qui dispose des informations lui permettant d'intervenir auprès de l'autorité de demander à cette dernière, dans le délai fixé par les art. 137 al. 1 aLIFD et 23 al. 1 aLISP, une décision sur l'étendue de son assujettissement. S'il omet de le faire, il ne peut pas se prévaloir de la voie de la révision au sens des art. 147 LIFD et 55 LPFisc (ATA/1100/2015 du 13 octobre 2015 consid. 9 et 10).

La décision à requérir par le contribuable constitue une décision en constatation, qui vise à renseigner l'administré, de manière obligatoire pour l'autorité, sur une situation de droit ou une interprétation ou une application éventuelle du droit. Le mécanisme de l'imposition à la source étant fondé sur le régime de l'auto-taxation, les art. 23 LISP et 137 LIFD ont pour objectif de faire surgir rapidement les contestations éventuelles de sur le principe de l'assujettissement à l'IS (Andrea PEDROLI, in Yves NOËL/Florence AUBRY GIRARDIN [éd.], Commentaire romand, LIFD, 2e éd., 2017, p. 1749 n. 3 et 4).

2.12 Les dispositions précitées doivent être interprétées en ce sens qu'après l'échéance du délai à fin mars, il n'est plus possible de soulever des contestations sur le principe de l'assujettissement fiscal, mais que seule demeure la possibilité de critiquer la somme de la retenue d'impôt et cela soit en faveur du fisc, soit en faveur du contribuable (ATF 144 II 313 consid. 6.2 in fine ; 135 II 274 consid. 5.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1017/2015 du 9 mars 2017 consid. 2.1 ; 2C_168/2014 du 29 octobre 2014 consid. 4.2 ; 2C_684/2012 du 5 mars 2013 consid. 5.2).

2.13 Il convient enfin de rappeler que le contribuable qui n'a pas reçu la formule de déclaration fiscale à remplir, pour quelque motif que ce soit, n'est pas dispensé de l'obligation de déposer celle-ci (art. 28 al. 1 LPFisc et 124 al. 1 LIFD) et doit s'en procurer une auprès de l'autorité de taxation (Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 5e éd., 2021, p. 629 n. 41). L'autorité fiscale procède chaque année à au moins une publication officielle rappelant l'obligation de remplir la déclaration d'impôt, la date de remise et d'éventuelles sanctions (art. 28 al. 2 LPFisc, qui ajoute que les contribuables tenus de faire une déclaration, mais qui n'ont pas reçu de formule, doivent la retirer auprès du département ; dans le même sens, art. 124 al. 1 LIFD). Cette publication dispense l'autorité de taxation de prouver qu'elle a effectivement adressé au contribuable le formulaire lui permettant de satisfaire à ses obligations fiscales. Elle sert aussi à assurer que chacun ait connaissance de ses obligations envers l'autorité fiscale, ce qui facilite l'application de l'art. 175 LIFD, relatif à la soustraction, lorsqu'un contribuable non inscrit au rôle – et qui n'a donc pas pu se voir signifier une sommation au sens de l'art. 174 LIFD pour violation de ses obligations de procédure – s'abstient de s'annoncer à l'autorité de taxation (Isabelle ALTHAUS-HOURIET, in Yves NOËL/Florence AUBRY GIRARDIN [éd.], Commentaire romand, Impôt fédéral direct, 2017, n. 1 ad art. 124 LIFD, p. 1674 s.).

2.14 Les délais fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public et ne sont donc en principe pas susceptibles d'être prolongés, restitués ou suspendus, si ce n'est par le législateur lui-même (ATA/286/2020 du 10 mars 2020 ; ATA/1157/2019 du 19 juillet 2019 consid. 2a). Ainsi, celui qui n'agit pas dans un délai prescrit est forclos (cf. ATA/286/2020 du 10 mars 2020 ; ATA/1157/2019 du 19 juillet 2019 consid. 2a).

Les règles relatives à ce type de délais nécessitent une stricte application, ceci pour des motifs d'égalité de traitement et d'intérêt public lié à une bonne administration de la justice et à la sécurité du droit. Ainsi, l'irrecevabilité qui sanctionne le non‑respect d'un délai n'est en principe pas constitutive d'un formalisme excessif prohibé par l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) (cf. not. ATF 142 V 152 consid. 4.2 in fine ; 125 V 65 consid. 1 ; ATA/286/2020 du 10 mars 2020)

2.15 Selon la jurisprudence, le délai de l'art. 137 al. 1 aLIFD s'applique pleinement au contribuable qui entend faire valoir des déductions supplémentaires qui dépassent les montants forfaitairement inclus (art. 86 al. 1 aLIFD) dans le barème d'imposition (ATF 135 II 274 consid. 5.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_684/2012 du 5 mars 2013 ;) ».

Lorsque le contribuable entend réclamer le bénéfice d'une déduction supplémentaire en application des art. 2 let. e OIS et 4 RISP, il doit obligatoirement le faire dans le délai fixé aux art. 137 al. 1 LIFD et 23 al. 2 LISP, soit au plus tard au 31 mars de l’année qui suit celle pour laquelle l’impôt est dû (ATF 135 II 274 consid. 5.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_360/2015 du 13 mai 2015 consid. 6.1 ; 2C_684/2012 du 5 mars 2013 consid. 5.4).

2.16 Le Tribunal fédéral dans l'ATF 135 II 274 précité a explicité les rapports existant entre les art. 137 et 138 LIFD, ainsi que les art. 32 et ss LHID, et les dispositions de droit cantonal les mettant en application de manière harmonisée (en l'occurrence, il s'agissait des art. 209 et ss de la loi fiscale du canton du Tessin du 21 juin 1994, dont la teneur des arts. 210 à 212 était calquée sur celle des arts. 137 à 139 LIFD). Lesdits rapports devaient être interprétés de la manière suivante : le système de l'impôt à la source différait de celui de l'impôt ordinaire sur le revenu et la fortune par la mesure où il se fondait exclusivement sur une procédure d'auto‑taxation. Le législateur avait imposé le respect d'un délai au 31 mars de l'année suivante pour requérir la décision de constatation de l'art. 137 al. 1 LIFD au cours des travaux législatifs, mais n'avait rien prévu à ce sujet, que ce soit à l'article 138 LIFD à l'art. 49 al. 1 LHID ou à l'art. 49 al. 2 LHID (consid. 4.2).

Il était nécessaire d'examiner les conséquences dérivant de l'écoulement du délai prévu à l'art. 137 al. 1 LIFD ou par le droit cantonal appliquant l'art. 49 LHID, en distinguant les cas où une décision avait été rendue par l'autorité fiscale de ceux où aucun acte formel de ce genre n'avait eu lieu (consid. 4.2).

Si une telle décision avait été requise dans le délai, le prononcé y relatif, dans la mesure où il n'était pas attaqué, entrait en force. Cette décision pouvait concerner le principe même de l'assujettissement ou le montant de celui-ci, comme par exemple la question de savoir si un impôt perçu à la source sur la base du droit interne était légitime sous l'angle d'un accord de double imposition (consid. 5.1 et doctrines citées). Dans une telle situation, la chose jugée étant intervenue, les questions réglées dans la décision ne pouvaient plus être examinées que si les conditions d'une révision au sens des art. 147 et suivants LIFD ou au sens du droit cantonal étaient réalisées, respectivement celle d'un rappel d'impôt (consid. 5.1).

Dans l'hypothèse où le contribuable ou le débiteur de la prestation imposable n'avait pas demandé une telle décision dans le délai prescrit, soit avant la fin du mois de mars suivant l'échéance des prestations, tant l'un que l'autre ne pouvait plus émettre de contestation sur le principe de l'assujettissement fiscal. En revanche, il leur restait la possibilité de critiquer la somme de la retenue d'impôt. Une telle solution s'imposait dans la mesure où il n'était pas justifié, en matière d'impôt à la source, d'assimiler le taux de la taxation à une décision entrée en force (consid.5.3.3). Il n'y avait pas lieu de traiter plus favorablement le fisc que le contribuable. En l'absence de décision fondée sur l'art. 137 LIFD ou sur la disposition similaire de droit cantonal, il demeurait ainsi la possibilité de critiquer la somme de la retenue d'impôt, et cela soit en faveur du fisc, soit en faveur du contribuable. L'art. 138 LIFD ou la disposition de droit cantonal correspondante devaient ainsi être considéré comme des lex specialis par rapport à l'art. 137 LIFD ou à la disposition de droit cantonal qui en reprenait la teneur limitée aux problèmes qui se posaient dans le cas d'une retenue excessive ou insuffisante (consid 5.4). L'art. 138 al. 2 LIFD ou une disposition équivalente du droit cantonal permettait à l'administration et au contribuable d'exiger de manière simplifiée, même après l'échéance du délai, le paiement, ou la restitution des impôts à la source retenus. Cette interprétation s'imposait au regard du titre marginal de l'art. 138 LIFD (« paiement complémentaire et restitution d'impôt ») et au regard du contenu de l'art. 16 de l'ordonnance sur l'imposition à la source du 19 octobre 1993 (OIS - RS 642.118.2) (consid. 6. 3).

Le Tribunal fédéral a confirmé le principe précité dans plusieurs arrêts ultérieurs (voir par exemple arrêts du Tribunal fédéral 2C_168/2014 du 29 octobre 2014 consid. 4.2 ; 2C_684/2012 du 5 mai 2013 consid. 5.1 ; 2C_601/2010 du 21 décembre 2010 consid. 2.2).

2.17 Dans un arrêt de 2015 (2C_360/2015 du 13 mai 2015), le Tribunal fédéral, après avoir rappelé l’obligation du débiteur de la prestation imposable de retenir l'IS et de remettre au contribuable un relevé ou une attestation indiquant le montant de l'IS, a précisé que ladite attestation avait pour but de renseigner celui-ci sur le montant de l’IS et de lui permettre, en cas de contestation, d'exiger jusqu'à la fin mars de l'année qui suit l'échéance de la prestation que l'autorité de taxation rende une décision relative à l'existence et l'étendue de l'assujettissement selon l'art. 137 al. 1 LIFD. Il a ensuite considéré que « du moment que, selon l'art. 138 al. 1 LIFD, l'autorité fiscale a la faculté d'exiger de manière simplifiée, même après l'échéance du délai de l'art. 137 al. 1 LIFD, le paiement des impôts à la source insuffisamment retenus, on doit reconnaître la même faculté en faveur du contribuable, fondée sur l'art. 138 al. 2 LIFD, qui se voit appliquer un barème ou un taux d'imposition erroné par son employeur, débiteur de l'impôt, et est en quelque sorte une victime du système de l'auto-taxation. En revanche, selon la jurisprudence, le délai de l'art. 137 al. 1 LIFD s'applique pleinement au contribuable qui entend faire valoir des déductions supplémentaires qui dépassent les montants forfaitairement inclus (art. 86 al. 1 LIFD) dans le barème d'imposition (cf. arrêt 2C_684/2012 du 5 mars 2013 consid. 5.4 in Archives 82, p. 153 ; ATF 135 II 274 consid. 5.4) ».

2.18 La chambre de céans a récemment retenu (ATA/549/2024 du 30 avril 2024) que les travaux préparatoires relatifs à la révision du droit cantonal, notamment de l’art. 38F LPFisc, indiquaient clairement qu’il appartenait au contribuable de se manifester en demandant une rectification de l’IS ou le passage à une taxation ordinaire avant le 31 mars suivant l’année fiscale visée pour l’ensemble des éléments déterminants. En d’autres termes, passé le délai du 31 mars, le contribuable était forclos à remettre en cause les éléments de taxation.

3.             En l’espèce, il ressort du dossier que ce n'est que dans le cadre de son courrier du 2 décembre 2020 au plus tôt que le recourant s'est prévalu d'un assujettissement à une taxation ordinaire au regard de l’existence d’une fortune imposable. Force est de constater, avec l'autorité intimée et l’instance précédente, que cette requête était manifestement tardive. Le fait que l’AFC-GE ait requis du recourant des éléments complémentaires en 2019 et 2021 concernant également ces années-là est à cet égard sans portée, puisque cela ne l’empêchait en rien de demander, en temps utile, de l’imposer au régime ordinaire, ce qu’il n’a pas fait.

Le recourant ne se plaint en effet pas de ce que son employeur aurait appliqué un faux barème ou un taux inexact, mais d'avoir fait l'objet de l’impôt à la source alors qu’il bénéficiait d’une fortune, qu’il n’avait pas déclarée. La chambre administrative observe, comme le TAPI, que la problématique exposée relève d'une question d'assujettissement fiscal. Or à teneur tant de l'art. 137 al. 1 aLIFD que de l'art. 23 al. 1 aLISP et 38E LPFisc, pour régler une question de cette nature, tout contribuable soumis à l'impôt à la source se doit de solliciter une décision constatatoire tranchant la question de cet assujettissement avant le 31 mars de l'année suivant l'échéance de la prestation. N'ayant pas accompli cette démarche dans le délai précité, pour les années 2015 et 2019, le contribuable n'est plus en droit de réclamer le passage à une imposition ordinaire.

La chambre de céans a récemment rappelé qu’il appartenait au contribuable de se manifester en demandant une rectification de l’IS ou une taxation ordinaire avant le 31 mars suivant l’année fiscale visée pour l’ensemble des éléments déterminants. En d’autres termes, passé le délai du 31 mars, le contribuable est forclos pour remettre en cause les éléments de taxation. La solution inverse consistant à admettre que les contribuables taxés à la source pourraient contester leur taxation alors que celle-ci est entrée en force, créerait une inégalité de traitement avec les contribuables imposés de manière ordinaire, qui ne peuvent contester leur bordereau de taxation après l’échéance du délai de réclamation.

Par ailleurs, les art. 138 LIFD et 38F LPFisc visent spécifiquement des situations particulières, à savoir le paiement complémentaire à l’IS par le débiteur de la prestation imposable et la restitution d’un trop-perçu. Ces dispositions n’ont pas pour but de permettre au contribuable de remédier à son inaction dans le délai prescrit par les art. 137 LIFD et 38E LPFisc.

Au vu de la jurisprudence exposée ci-dessus, c'est à juste titre que l'instance précédente a jugé que, pour faire valoir des déductions supplémentaires équivalentes à celles du régime de taxation ordinaire, le recourant devait respecter le délai des art. 137 al. 1 aLIFD, ce qu'il n'a pas fait, puisqu'il n'en a demandé la prise en compte que le 20 décembre 2020 pour la période fiscale 2015 et 2019. Rien ne l'empêchait cependant de se plaindre dans les délais applicables à la période fiscale 2015 et 2019 du régime des déductions sur son revenu imposable à la source.

Il sera souligné que le nouveau droit à une taxation ordinaire ultérieure n’est entré en vigueur que le 1er janvier 2021. Il ne s’applique pas aux périodes fiscales concernées et le recourant n’a d’ailleurs requis sa taxation ordinaire qu’en décembre 2020, soit tardivement par rapport au délai prévu à cet effet.

C'est dès lors à juste titre que l'AFC-GE, puis le TAPI, ont considéré que la demande de concernant l'IS 2015 et 2019 du recourant était tardive et ont refusé d'entrer en matière sur ce point.

Enfin, la démarche du contribuable ne peut être considérée comme une demande de révision car à teneur de la jurisprudence fédérale, la voie de la révision n’est pas ouverte pour remettre en question la portée d’un assujettissement à l’impôt à la source pour lequel aucune décision n’a été requise dans le délai légal imparti (ATF  135 II 274 précité ; ATA/1164/2015 du 27 octobre 2015).

Il s'ensuit que la décision contestée, tout comme le jugement du TAPI le constatant, ne prête pas le flanc à la critique. Le recours doit ainsi être rejeté.

4.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 700.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 25 avril 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 25 mars 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de A______ un émolument de CHF 700.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la demanderesse, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Andrio ORLER, avocat du recourant, à l'administration fiscale cantonale, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'à l’administration fédérale des contributions.

Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. MARMY

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. KRAUSKOPF

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :