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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1883/2021

ATA/274/2023 du 21.03.2023 sur JTAPI/1184/2022 ( PE ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1883/2021-PE ATA/274/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 mars 2023

 

dans la cause

 

M. A______ recourant
représenté par Me Gian Luigi Berardi, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


 

Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 novembre 2022 (JTAPI/1184/2022)


EN FAIT

A. Par jugement du 7 novembre 2022, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a partiellement admis le recours formé le 31 mai 2021 par M. A______ contre la décision du 28 avril 2021 – par laquelle l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) avait refusé de soumettre son dossier au secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) avec un préavis favorable à la délivrance d’une autorisation de séjour et avait ordonné son renvoi de Suisse. Il a confirmé le refus de soumettre le dossier pour délivrance d’une autorisation, mais annulé la décision en tant qu’elle prononçait le renvoi et renvoyé le dossier à l’OCPM afin le soumette au SEM avec un préavis favorable à une admission provisoire.

Né le ______ 1986, arrivé en Suisse à l’âge de 11 ans en 1997, M. A______ séjournait en Suisse depuis 25 ans, d’abord au bénéfice d’un livret N puis d’une admission provisoire (permis F) dont la validité avait été prolongée jusqu’au 12 mai 2005. Il avait ensuite été tenu compte de sa paternité sur un enfant né le 11 janvier 2004 et possédant la nationalité suisse, sans pour autant que l’OCPM formalise son statut par une décision jusqu’au 28 avril 2021, de sorte qu’il pouvait se prévaloir d’un long séjour en Suisse.

Il avait travaillé dans la restauration et des demandes d’autorisation provisoire avaient été déposées en 2004 puis en 2007. Les engagements n’avaient jamais duré longtemps. Il n’avait pas non plus pu achever une formation. Il émargeait de manière continue à l’Hospice général (ci-après : l’hospice) depuis au moins octobre 2016, faisait l’objet de poursuites et d’actes de défaut de biens pour CHF 7'700.- respectivement CHF 15'705.-. Aucun certificat n’attestait son incapacité de travail et aucune demande de rente de l’assurance-invalidité (ci-après : AI) n’avait été déposée.

Son intégration sociale était pour ainsi dire inexistante. La détérioration de son état de santé avait entraîné son retrait voire son exclusion sociale. Il avait fait l’objet de huit condamnations pénales entre 2009 et 2017, dont deux peines privatives de liberté de six mois en 2013 et 2014 respectivement pour lésions corporelles simples, et pour escroquerie, recel et infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121). Ses problèmes de santé n’expliquaient que partiellement cette absence d’intégration.

Il avait quitté l’B______ à l’âge de 4 ou 5 ans avec sa mère pour aller vivre en C______. Il ne parlait pas B______ et n’avait pas de famille en B______. Aucun document d’identité B______ à son nom ne figurait au dossier et il se disait apatride, ce qui était confirmé par l’ambassade d’B______ en Suisse.

Les pathologies psychiques dont il souffrait étaient sérieuses, avaient un impact important sur sa qualité de vie, évoluaient depuis des années et étaient difficiles à traiter. Le seul membre de sa famille connu, soit sa mère, vivait en Suisse. Son suivi et son encadrement nécessités par ses pathologies serait difficilement envisageables en B______, pays dans lequel il n’était plus retourné depuis 30 ans, dans lequel il n’avait aucune attache et dont il ne parlait pas la langue.

Son état de santé ne nécessitait pas une prise en charge constante qui le placerait dans une situation de dépendance par rapport à sa mère ou sa fille. Cette dernière était devenue majeure et il n’avait avec elle que des contacts sporadiques. Il bénéficiait depuis juillet 2021 d’une curatelle de gestion et de représentation. L’encadrement mis en place lui permettait d’évoluer dans son quotidien avec l’assistance nécessaire.

Il ne remplissait pas les conditions pour l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur et ce refus ne portait aucune atteinte à son droit à la vie privée et familiale.

Par contre, l’exécution de son renvoi en B______ ne pouvait raisonnablement être exigée, l’encadrement administratif et médical qu’il nécessitait ne paraissant pas envisageable en B______, une appréciation que semblait partager l’OCPM.

B. a. Par acte remis à la poste le 15 décembre 2022, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à ce que l’OCPM soit invité à soumettre son dossier au SEM avec un préavis positif à l’octroi d’une autorisation de séjour.

Il était éligible à une rente AI. Son curateur avait déposé une demande le 25 octobre 2022 et il pensait bénéficier d’une rente entière qui lui permettrait de ne plus émarger à l’hospice. L’OCPM avait jugé important de savoir s’il pourrait bénéficier d’une telle rente.

Son admission provisoire avait été maintenue par le SEM à sa majorité malgré son implication dans une affaire de brigandage et malgré le fait qu’il était déjà sans formation et totalement dépendant de l’assistance de l’hospice. Il avait alors vécu sept ans au bénéfice d’une admission provisoire et disposait d’un véritable droit de séjour en Suisse, lequel ne pouvait s’éteindre du jour au lendemain. Le SEM aurait d’ailleurs dû le maintenir aussi longtemps que l’OCPM ne lui avait pas délivré d’autorisation de séjour.

Il aurait dû continuer de bénéficier d’une admission provisoire, si bien que son séjour serait resté légal et il pourrait se prévaloir de l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) vu la durée de celui-ci.

L’OCPM avait commis un déni de justice en ne statuant pas durant 16 ans et ne pouvait lui opposer le caractère illégal de son séjour ou la seule existence d’une tolérance.

Son incapacité à maintenir un emploi, puis à travailler ne lui était pas imputable. Ses dettes n’étaient pas importantes. Ses condamnations pouvaient en partie être expliquées par ses troubles de santé et ne revêtaient pas un degré de gravité suffisant pour contrebalancer son intérêt à se voir délivrer une autorisation de séjour durable plutôt qu’une admission provisoire. Le refus de préaviser favorablement la délivrance d’une autorisation de séjour était disproportionné.

b. Le 5 janvier 2023, M. A______ a produit un certificat de la Dre C______, psychiatre et psychothérapeute, du 13 décembre 2022 confirmant qu’il était dans l’incapacité d’exercer une activité professionnelle en raison de troubles psychiques chroniques et incapacitants qui ne s’amélioreraient pas avec le temps.

Selon un rapport médical détaillé établi le même jour par la Dre C______, il avait commencé à consommer de l’alcool et des stupéfiants à l’âge de 12 ans et avait fort probablement présenté des troubles de la conduite s’accompagnant de bagarres, ainsi qu’un comportement oppositionnel avec des provocations envers sa mère et des perturbations des relations avec son entourage familial, une fréquentation irrégulière de l’école et un échec scolaire suivi d’une déscolarisation et d’un placement en foyer. Il était depuis l’adolescence dans l’incapacité d’accomplir une activité professionnelle en raison de ses troubles psychiques. Il souffrait d’un trouble dépressif moyen et de troubles mentaux et troubles du comportement liés à l’utilisation de substances psychoactives et d’un syndrome de dépendance par utilisation continue. Une demande d’AI était en cours.

c. Le 24 janvier 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

M. A______ ne remplissait pas les conditions du cas de rigueur.

Il était prêt à soumettre son dossier au SEM en vue d’une admission provisoire.

d. Le 13 février 2023, M. A______ a persisté dans ses conclusions.

e. Le 15 février 2021, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

C. Il ressort de la procédure les faits pertinents suivants :

a. Le recourant est arrivé en Suisse en provenance d’B______ le 15 août 1997. Il a déposé une demande d’asile le 17 septembre 1997. Il ignorait l’identité de son père. Il avait quitté l’B______ avec sa mère, Mme D______, à l’âge de 4 ans, soit vers 1990-1991, pour aller vivre en C______, car celle-ci ne trouvait pas de travail dans son pays et voulait une vie meilleure. Son appartenance ethnique était B______, sa langue maternelle était l’C______ et il parlait un peu l’B______ et l’anglais. Il n’avait aucune famille en B______. Sa mère, sa grand-mère et sa tante vivaient en C______ et son grand-père, titulaire d’une autorisation d’établissement, vivait à Genève. Il était venu en Suisse car sa mère souffrait de troubles psychiques et le maltraitait. Son grand-père, qui vivait en Suisse, était venu le chercher en C______ en août 1997. Il était déjà venu auparavant en Suisse, en 1994, pour rendre visite à son grand-père, puis était resté à E______ durant six mois avec sa mère.

b. Le 25 septembre 1997, le SEM a affecté le recourant au canton de Genève. Le 6 octobre 1997, le grand-père de M. A______ a notamment déclaré que ce dernier vivait en C______ depuis août 1991. Il avait quitté ce pays car sa mère, qui souffrait de troubles psychiques, séjournait dans un hôpital psychiatrique C______. Elle ne travaillait plus et allait devoir quitter son logement en C______, étant en outre précisé qu’elle battait souvent son fils. La grand-mère du recourant, qui vivait en C______, était hébergée dans la famille pour laquelle elle travaillait comme femme de ménage, de sorte qu’elle ne pouvait loger le recourant. Ce dernier vivait légalement en C______, tout comme sa mère. Il ne possédait toutefois pas de passeport mais figurait sur celui de sa mère. Le grand-père l’avait fait entrer sans autorisation en Suisse afin qu’il ne soit pas seul en C______. Il devait obtenir le statut de réfugié car il avait été persécuté en B______ à cause de celui-ci. Sa mère avait quitté l’B______ pour des motifs politiques et économiques également.

c. Le recourant s’est vu délivrer un livret N valable jusqu’au 17 mars 2000, puis, le 12 mai 2000, un livret F (admission provisoire), dont la validité a été régulièrement renouvelée jusqu’au 12 mai 2005.

Il ressort de la base de données de l’OCPM que sa mère a obtenu la nationalité suisse le 26 novembre 2019.

d. Le 12 mai 2000, le SEM a refusé d’entrer en matière sur la demande d’asile du recourant et a prononcé son renvoi de Suisse, tout en l’admettant provisoirement, compte tenu du fait que l’exécution du renvoi vers l’B______ n’était alors pas raisonnablement exigible. L’admission provisoire était valable pour une durée de douze mois et il devrait quitter la Suisse lors de la levée de l’admission provisoire. En juin 1993, sa mère avait déposé pour leur compte une demande d’asile en Suisse, laquelle avait été rejetée par le SEM le 24 août 1993, décision confirmée par la Commission suisse de recours en matière d’asile en novembre 1993. Elle avait disparu avec lui le 15 décembre 1993, probablement pour retourner en C______. L’B______ était un pays libre de persécution et le SEM n’entrait pas en matière sur les demandes d’asile de ressortissants B______, sauf existence d’indices de persécution, absents en l’espèce. L’B______ n’était pas le théâtre d’une guerre ni de violences généralisées et aucun risque de persécution n’avait été démontré. Cependant, au vu notamment de son âge et de l’absence de proches susceptibles et disposés à l’encadrer dans son pays d’origine ou en C______, l’exécution de son renvoi vers l’B______ ou vers un autre pays tiers n’était pas raisonnablement exigible. Cela étant, si sa mère devait un jour être apte à s’occuper de lui, le renvoi serait alors licite, raisonnablement exigible et possible en B______ ou vers un pays tiers. Il était admis provisoirement en Suisse, étant précisé que les conditions de cette admission provisoire et sa prolongation étaient de la compétence du canton de résidence.

e. Le ______ 2004 est née F______, de nationalité suisse, fille du recourant et de Mme G______, de nationalité suisse également. Le recourant a reconnu sa paternité le 29 octobre 2004.

f. Le 12 mars 2004, le SEM a rappelé au recourant qu’il faisait l’objet d’une décision de renvoi. Toutefois, au vu de son inexigibilité, son admission provisoire avait été prononcée le 12 mai 2000, en raison notamment de son jeune âge. Cependant, eu égard à l’existence d’un « rapport de police concernant [sa] complicité dans une affaire de brigandage », une levée de son admission provisoire pourrait être envisagée, ce qui entraînerait l’exécution de son renvoi. Il renonçait à prononcer une levée de l’admission provisoire, compte tenu de sa situation personnelle et familiale, mais pourrait être amené à modifier son point de vue si de nouveaux faits portant atteinte à l’organisation et au fonctionnement des pouvoirs publics devaient se reproduire.

g. En mai 2004 l’OCPM a délivré une autorisation de travail valable deux mois et révocable en tout temps en faveur du recourant. L’employeur a mis fin au contrat avec effet au 13 juin 2004.

h. Le 29 novembre 2004, le SEM a informé le recourant avoir eu connaissance du fait qu’il avait officiellement reconnu sa fille, de nationalité suisse. Conformément à l’art. 8 CEDH, le droit à la protection de sa vie familiale impliquait un empêchement au renvoi. Compte tenu du fait qu’il vivait avec son enfant, il pouvait bénéficier de la protection de cette disposition réglementaire. « En raison de l’existence de cet empêchement au renvoi, la décision de renvoi existante n’[était] plus valable et l’admission provisoire [prenait] fin ». Le règlement de ses conditions de séjour ou le prononcé éventuel d’un renvoi de Suisse relevait désormais de la compétence des autorités de police des étrangers, le courrier étant sans préjudice de la décision de ces dernières. Le recourant n’avait déposé aucun document d’identité auprès du SEM.

i. Le 9 décembre 2004, l’OCPM a convoqué le recourant pour un entretien le 20 décembre 2004.

j. Le recourant été entendu par la police genevoise à plusieurs reprises, en qualité de prévenu de diverses infractions, entre 2002 et 2020. Le 19 décembre 2005, il a indiqué qu’il était titulaire d’un diplôme d’informaticien et sans emploi depuis une semaine, étant précisé qu’il travaillait auparavant comme cuisinier dans un restaurant, moyennant un salaire mensuel brut de CHF 3'400.-. Il percevait une aide mensuelle de CHF 496.- de l’hospice mais n’avait aucune dette. Il était sans domicile fixe depuis un an et demi et logeait chez des amis la plupart du temps. Le 3 février 2009, il a expliqué qu’il était titulaire d’un diplôme « ECDL Full (IFAGE) ». Entretenu financièrement par sa mère, avec laquelle il vivait, il effectuait parfois des travaux dans la restauration ou des dépannages informatiques pour gagner un peu d’argent. Il ne s’acquittait d’aucune pension alimentaire en faveur de sa fille mais bénéficiait d’un droit de visite la concernant. Le 9 septembre 2010, il a indiqué qu’en raison d’une relation très conflictuelle avec sa mère, il avait vécu dans la rue pendant près de dix-huit mois et n’avait jamais pu terminer un apprentissage. Sa situation administrative en Suisse avait toujours été compliquée. Arrivé en Suisse via un regroupement familial effectué par son grand-père, son statut de requérant d’asile avait prétérité la suite des procédures administratives. Après l’échéance de la validité de son admission provisoire, il était resté sur le sol helvétique sans autorisation. Les démarches entreprises par ses soins étant toutes restées vaines, il vivait grâce à l’aide sociale. Sa fille n’était pas à sa charge et vivait avec sa mère. Le 2 mai 2014, il a déclaré qu’il était arrivé en Suisse pour la première fois en 1991. Les deux demandes d’asile déposées par ses soins, en 1993 et en 1997, avaient été rejetées. Depuis son arrivée en Suisse, il s’était rendu plusieurs fois en C______ et en H______. Il ne parlait pas l’B______ et n’était pas B______, étant précisé que ses parents avaient fui ce pays et qu’il avait grandi en C______. Le 18 février 2001, il a indiqué qu’il avait été élevé par « toute [s]a famille qui réside en Suisse », soit son grand-père et sa mère, étant précisé qu’il les fréquentait quotidiennement, tout comme sa fille. Il avait suivi en Suisse sa scolarité obligatoire, effectué un apprentissage en informatique et avait travaillé pour divers employeurs. Il vivait séparé de la mère de sa fille, qui en avait la garde. Il n’était titulaire d’aucun document d’identité B______, pays dont il ne parlait pas la langue. Le 7 janvier 2020, il a indiqué que sa fille n’était pas à sa charge et vivait avec sa mère. Il voyait sa propre mère, son grand-père et sa fille, tous de nationalité suisse, chaque semaine et vivait avec sa mère.

k. Le 29 mars 2005, M. A______ a sollicité la délivrance d’un titre de séjour. Il était de nationalité « B______/SPN », « Pizzaiolo/aide cuisine/cuisinier polyvalent » et était arrivé en Suisse en juin 1997.

l. Les 5 et 22 avril 2005, l’OCPM, constatant qu’une procédure en vue du mariage avait été engagée par le recourant et Mme G______, a imparti un délai de trente jours à cette dernière pour lui indiquer où en était cette procédure, si son fiancé faisait ménage commun avec elle et quelles relations celui-ci entretenait avec leur fille. Le 7 juin 2005, le recourant a indiqué qu’il ne résidait pas avec Mme G______ mais utilisait son adresse pour recevoir sa correspondance. Leur projet de mariage n’était plus d’actualité et il logeait chez différentes personnes et n’avait pas de domicile fixe. Le 6 juillet 2005, Mme G______ a déclaré qu’elle n’avait aucun projet de mariage avec le recourant, même si elle l’aimait et qu’il résidait chez elle. Le 4 mars 2005, la garde de sa fille lui avait été retirée par le TPAE, en raison de négligences et carences, cette autorité ayant estimé que ses horaires de vendeuse dans une station-service ne lui permettaient pas de s’occuper de son enfant. Le TPAE avait exigé, comme condition de retour à son domicile de sa fille, le départ du recourant de cet appartement, en raison du fait que, lors de la visite d’une assistante sociale à leur domicile, ce dernier avait les yeux rouges et qu’il y avait une forte odeur de cannabis dans l’appartement. Après la naissance de leur fille, ils avaient vécu durant environ six mois chez la mère du recourant, avant d’aller vivre à l’hôtel. Lorsqu’elle avait trouvé un emploi, le recourant s’était occupé avec soin de leur fille. Il n’avait pas les moyens de lui verser une pension alimentaire mais l’avait aidée financièrement chaque fois qu’il avait perçu un peu d’argent. Par correspondance reçue le 7 novembre 2005, Mme G______ a informé l’OCPM que le recourant ne vivait plus chez elle et qu’elle ne souhaitait plus que son adresse soit utilisée comme adresse de correspondance en sa faveur.

m. Selon le rapport d’évaluation sociale établi le 9 février 2006 par le service de protection de la jeunesse, la garde de F______ avait été retirée à sa mère du 16 mars au 10 novembre 2005 suite aux graves négligences des deux parents, et cette dernière placée en foyer avant d’être confiée aux grands-parents maternels. Selon les déclarations de Mme G______ et du recourant, la rupture momentanée du lien entre père et fille était la conséquence des interdictions mises en place par l’autorité tutélaire et non d’un désintérêt du père. Il était notoire que le père et son enfant entretenaient, grâce à la maman, des relations personnelles et il conviendrait d’évaluer sur le long terme l’intérêt réel du recourant pour l’enfant et la qualité du lien créé. Il paraissait conforme à l’intérêt de l’enfant que le recourant soit autorisé à demeurer à Genève assez de temps pour démontrer ses capacités parentales et son intérêt pour lui.

n. Le 5 mars 2007, la mère du recourant a indiqué à l’OCPM qu’elle hébergeait son fils dans le canton depuis le 1er février 2007.

o. Le 29 mars 2007 puis les 22 août et 9 octobre 2007, l’OCPM a sollicité du recourant et de Mme G______ la transmission de renseignements s’agissant notamment des rapports affectifs et financiers de celui-ci avec sa fille.

p. Le 19 avril 2007, I______ SA a obtenu de l’OCPM l’autorisation, révocable en tout temps et délivrée jusqu’à droit connu sur sa demande d’autorisation de séjour, d’employer le recourant à compter du 1er mai 2007 pour une durée indéterminée en qualité d’aide de cuisine, moyennant un salaire mensuel brut de CHF 3'894.-.

Par requête du 4 juillet 2007, J______ SA a sollicité de l’OCPM la délivrance d’une autorisation de séjour avec activité lucrative en faveur du recourant pour l’engager dès le 26 juin 2007 comme manutentionnaire. Était notamment joint un document en C______ intitulé « Permesso di soggiorno per stranieri » émis par le Ministero dell’Interno de la ville de K______ (C______) le 28 octobre 1996 en faveur de Mme D______, indiquant le 10 août 1995 comme date d’entrée en C______ et précisant que la nationalité de Mme D______ était « B______ ». Était également mentionné le fait que la précitée était « in possesso di passaporto nr. 0452833, ril. il 23.09.96 valido sino al 23.09.2001. Bri, li 20.01.96. » et que le recourant était une « persona a carico conviventi » de la précitée. Par formulaire du 25 juillet 2007, J______ SA a annoncé à l’OCPM la fin des rapports de travail au 13 juillet 2007.

q. Le 22 novembre 2007, Mme G______ a déclaré à l’OCPM que la relation du recourant avec leur fille était très bonne, même s’il ne bénéficiait d’aucun droit de visite ni de droit de garde. Malgré leur séparation, tous deux étaient restés en bons termes. Compte tenu du fait qu’il ne travaillait pas, il ne payait aucune pension alimentaire. Elle hébergeait le recourant depuis mai 2007 et elle lui avait imparti un délai à août 2007 pour trouver un logement et un emploi, faute de quoi il devrait quitter son domicile.

Le 6 avril 2008, le recourant a précisé à l’OCPM qu’il avait été aux côtés de sa fille depuis sa naissance jusqu’au 4 mars 2008, vivant même dans le même appartement que cette dernière. Il n’avait jamais pu contribuer financièrement à son entretien, en raison du fait qu’aucun employeur n’acceptait de l’engager compte tenu de sa situation administrative. Entièrement dépendant de l’aide sociale, il était « en recherche de formation » et avait déjà effectué des tests d’aptitude pour les métiers de l’électronique, de l’électricité et de l’informatique afin de débuter un apprentissage. Il bénéficiait d’une chambre dans un foyer genevois mais il lui était impossible d’y accueillir sa fille, de sorte qu’il recherchait un logement plus grand. Il avait également sollicité, par le biais d’un avocat, l’octroi d’un droit de visite élargi par rapport aux six heures par mois auxquelles il avait droit. Il joignait une attestation signée par sa mère du 10 février 2009 sollicitant la clôture de son dossier à l’aide sociale dès le 1er mars 2009 dès lors qu’elle l’accueillait à titre gratuit dans son appartement et qu’elle était en mesure d’assumer ses cotisations d’assurance-maladie et d’assurance-accident ; une convocation du 1er avril 2008 à un test théorique pour la profession d’électronicien en multimédia ; le calendrier des visites établi le 31 mars 2008 par le service de la protection des mineurs (ci-après : SPMi), à teneur duquel il bénéficierait d’un droit de visite en faveur de sa fille de trois heures deux fois par mois, d’avril à décembre 2008, dans un point de rencontre.

r. Le 8 janvier 2009, l’OCPM a informé le recourant de son intention de rejeter sa demande de titre de séjour. Les conditions d’admission n’étaient pas remplies. Il résidait sur le sol helvétique depuis le 15 août 1997, il avait été titulaire d’une autorisation de séjour provisoire échue le 12 mai 2005, il n’avait toujours pas acquis de formation, dépendait de l’aide sociale et ne disposait pas d’un logement approprié. Il ne contribuait pas financièrement à l’entretien de sa fille et était défavorablement connu des services de police.

s. Le 2 février 2009, le recourant a indiqué n’avoir terminé aucune formation. Il participait depuis le 30 septembre 2008 au semestre de motivation organisé par L______ (ci-après : SEMO). Il n’avait pas d’activité rémunérée mais mettait toutes les chances de son côté pour trouver un apprentissage. Il avait toujours tenté de subvenir à ses besoins mais n’avait été engagé que pour des missions temporaires en raison de sa situation administrative. Il habitait chez sa mère, où il disposait d’une chambre. Il voyait sa fille dans un lieu de rencontre une fois toutes les deux semaines et partageait avec cette dernière un lien privilégié, important tant pour lui que pour elle. Il faisait de son mieux pour s’intégrer et avoir une meilleure situation personnelle, professionnelle et sociale. Il joignait entre autres les calendriers des visites bimensuelles à sa fille pour les mois d’avril 2008 à juin 2009 ; une attestation de stage élogieuse établie le 3 février 2009 par le M______, selon laquelle il avait les capacités d’entreprendre une formation de cuisinier et qui le recommandait pour toutes démarches effectuées afin de lui permettre de s’établir en Suisse ; une attestation de l’hospice selon laquelle il percevait depuis le 1er août 2005 un montant mensuel de CHF 496.- hors suppléments d’intégration, loyer, assurance-maladie et autres prestations circonstancielles ; un certificat médical établi le 15 décembre 2008 par son médecin traitant selon lequel il importait qu’il puisse bénéficier d’un logement dans lequel il vivrait seul afin de poursuivre ses études avec succès et de pouvoir y recevoir sa fille dans des conditions adaptées ; un rapport Evascol rédigé le 2 décembre 2008 par un conseiller en orientation de l’office pour l’orientation, la formation professionnelle et continue, selon lequel son projet de formation dans le domaine de l’informatique était en parfaite adéquation avec ses acquis scolaires et ses aptitudes, le principal problème potentiel étant son absence de statut stable en Suisse ; un avis de sortie de foyer de l’hospice du 18 novembre 2018 pour aller vivre chez sa mère.

t. Selon l’attestation de l’office des poursuites du 5 mai 2009, le recourant faisait l’objet de plusieurs poursuites, pour un montant total d’environ CHF 14'285.-.

u. Le 22 juillet 2009 le recourant a indiqué à l’OCPM que ses démarches auprès du SEMO n’ayant pas abouti, il s’était inscrit auprès de l’N______ en vue d’effectuer une formation en un an.

Le 3 août 2009, il a indiqué que son contrat SEMO avait pris fin le 3 janvier 2009 car il ne disposait pas d’un permis de séjour valable, lequel était indispensable pour obtenir une place d’apprentissage. Il joignait une attestation de participation au SEMO du 16 avril 2009 selon laquelle, du 30 septembre 2008 au 3 janvier 2009, il avait suivi des ateliers avec assiduité, entamé un travail d’orientation professionnelle et avait effectué des recherches de stages ; un rapport relatif au stage d’électronicien en multimédia effectué du 3 au 7 novembre 2008 à satisfaction ainsi qu’un contrat de stage portant sur une journée de stage le 17 novembre 2008 dans une société d’informatique, tous deux organisés dans le cadre du SEMO ; une attestation de Mme G______ du 27 avril 2007 selon laquelle il entretenait une excellente relation avec leur fille, tous deux étant très attachés l’un à l’autre – elle était tout à fait d’accord que leur fille et son père se voient régulièrement et demandait que ce dernier soit autorisé à rester en Suisse ; le recourant et elle-même seraient bientôt convoqués par le SPMi afin de fixer ensemble une contribution d’entretien en faveur de leur fille, étant précisé qu’elle serait toujours favorable à l’octroi d’un large droit de visite en sa faveur, à la condition que sa mère ne soit pas présente.

v. Le dossier de l’OCPM contient une décision datée du 18 novembre 2009, non signée et dont il n’apparaît pas qu’elle aurait été notifiée à M. A______, refusant de lui délivrer une autorisation de séjour en sa faveur et lui impartissant un délai au 19 décembre 2009 pour quitter la Suisse. Les conditions essentielles d’admission n’étaient pas remplies. En outre, les contacts maintenus avec sa fille ne suffisaient pas, à eux seuls, à conférer un caractère prépondérant à cette relation familiale. Nonobstant le fait qu’il avait vécu une adolescence difficile en Suisse, notamment sans encadrement familial convenable, il n’avait pas réussi à s’y intégrer comme les membres de sa famille proche, ses attaches familiales n’étant, en tout état, pas suffisantes à elles seules pour justifier l’octroi d’une autorisation de séjour. Aucun obstacle majeur ne s’opposait à son retour dans son pays d’origine, son renvoi apparaissant possible, licite et raisonnablement exigible.

w. Le recourant a été condamné : par ordonnance de condamnation du Juge d’instruction du 5 février 2009, à du travail d’intérêt général (ci-après : TIG) de trente-deux heures en raison de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires et obtention frauduleuse d’une prestation ; par ordonnance de condamnation du 21 octobre 2009 du Juge d’instruction, à un TIG de deux cent quarante heures en raison d’appropriation illégitime et infraction aux art. 19 ch. 1 et 19a ch. 1 de la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) ; par ordonnance de condamnation du 1er novembre 2010 du Procureur général, à un TIG de quarante heures pour lésions corporelles simples et menaces ; par ordonnance pénale du Ministère public du 19 janvier 2011, à une peine privative de liberté d’un mois pour appropriation illégitime commise à réitérées reprises et infraction à l’art. 19a ch. 1 LStup ; par ordonnance pénale du Ministère public du 3 juin 2013, à une peine privative de liberté de six mois pour lésions corporelles simples et violation des art. 19 al. 1 et 19a LStup ; par jugement sur opposition du Tribunal de police du 5 août 2014 annulant et remplaçant l’ordonnance pénale du Ministère public du 26 juin 2014, à une peine privative de liberté de six mois pour escroquerie, recel et violation des art. 19 al. 1 et 19a LStup ; par ordonnance pénale du Ministère public du 30 octobre 2015, à une peine privative de liberté d’ensemble, comportant la révocation de la libération conditionnelle accordée dès le 3 décembre 2014, de cent quarante jours pour appropriation illégitime et conduite sous retrait, refus ou interdiction d’utilisation du permis de conduire ; par ordonnance pénale du Ministère public du 23 février 2017, à une peine privative de liberté de soixante jours pour conduite en état d’ébriété avec un taux d’alcool qualifié, vol d’usage d’un véhicule automobile, conduite sans permis de conduire et infraction à l’art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20).

En lien avec ces condamnations, le recourant a été placé en détention du 28 mars au 4 mai 2012, du 3 mai au 14 décembre 2014, du 2 mai au 18 septembre 2016 et du 21 février au 21 avril 2018.

x. À teneur du rapport d’enquête de l’OCPM du 1er juin 2010, le recourant vivait seul à l’adresse de sa mère depuis quelques mois.

Selon le constat médical établi le 9 septembre 2010, la mère du recourant, examinée le jour même, déclarait avoir été agressée à son domicile par un membre de sa famille de sexe masculin à 16h30. L’individu concerné lui aurait donné un coup d’épaule au niveau de son épaule droite, suite auquel elle aurait perdu l’équilibre et tapé sa nuque contre un téléviseur, suivi d’un coup de pied dans la cuisse gauche. Un hématome de 10 cm de diamètre avait été constaté sur la face latérale de sa cuisse gauche.

Par courrier du 19 janvier 2011, Mme D______ a informé l’OCPM qu’elle avait décidé que son fils quittait définitivement son domicile et qu’elle ne voulait rien savoir à son sujet.

y. Faisant suite à une demande de renseignements, l’OCPM a indiqué au service d’application des peines et des mesures (ci-après : SAPEM), par courriel du 26 novembre 2014, que le recourant, qui vivait en Suisse depuis le 15 août 1997, avait bénéficié d’une autorisation de séjour provisoire (permis F) jusqu’au 12 mai 2005. Suite au dépôt par ses soins d’une demande d’autorisation de séjour le 4 juillet 2007, il avait été informé, le 8 janvier 2009, de l’intention de l’OCPM de refuser sa demande. Le 3 août 2009, il avait invoqué les liens entretenus avec sa fille de nationalité suisse. Aucune décision n’avait été prise depuis lors. Toutefois, l’instruction de cette demande devait être réactualisée au plus vite afin qu’une décision puisse être rendue en toute connaissance de cause.

z. Par courrier du 20 janvier 2015, l’OCPM a imparti à Mme G______ un délai de quinze jours pour lui transmettre des renseignements s’agissant des relations entre le recourant et leur fille.

aa. Le 18 février 2015, Mme G______ a répondu à l’OCPM que le recourant n’entretenait plus aucune relation avec leur fille depuis 2008. Ce dernier avait la possibilité de rencontrer l’enfant dans un lieu précis sous surveillance, compte tenu du fait qu’il avait été violent avec elle-même devant leur fille à plusieurs reprises. Elle avait amené cette dernière à chaque rendez-vous mais sa fille, qui n’était très souvent pas prévenue de l’absence de son père, avait fait une dépression, qui avait nécessité un long suivi par un psychologue afin d’accepter que son père l’ait délaissée et qu’il ne donne plus de nouvelles. Le recourant ne contribuait pas financièrement à l’entretien de leur fille et elle ne comptait pas lui réclamer de pension, dès lors que, depuis leur séparation, l’enfant précitée allait beaucoup mieux et avait une vie stable, ce qui n’avait pas de prix.

bb. Faisant suite à la demande de renseignements de l’OCPM du 17 juin 2015, Mme D______ a informé l’OCPM, par pli du 27 juin 2015, que son fils résidait chez elle, boulevard O______ ______, depuis le 10 juin 2012.

À teneur du formulaire d’annonce de changement d’adresse dans le canton daté du 31 août 2012, le recourant était domicilié, depuis juin 2012, chez sa mère, boulevard O______ n° ______. Était joint un contrat de sous-location du 4 mai 2012 entre le recourant et sa mère, qui était locataire de cet appartement.

cc. Le 23 juillet 2015, le recourant a interpellé l’OCPM sur l’avancement de la procédure, qui avait débuté en 2009. Arrivé en Suisse à l’âge de 11 ans, il avait suivi sa scolarité dans ce pays et avait effectué, de 2002 à 2005, un apprentissage au « centre de formation de l’État de Genève ». Parlant parfaitement le français, il souhaitait poursuivre son existence à Genève et se tenait à disposition pour produire tout renseignement ou document utile.

dd. Faisant suite à une demande de renseignements quant à la situation du recourant, l’OCPM a indiqué au SAPEM, par courriel du 30 juin 2016, qu’une nouvelle intention de refus d’octroi d’une autorisation de séjour allait lui être adressée à brève échéance.

L’OCPM a précisé à ce même service, par courriel du 14 septembre 2016, qu’un courrier serait adressé au recourant quant à la suite qui serait donnée à sa demande, dès que ce dernier lui aurait communiqué sa nouvelle adresse, au terme de sa détention.

ee. Par attestation du 21 septembre 2016, Mme D______ a confirmé qu’elle sous-louait son logement sis boulevard O______ n° ______ à son fils.

ff. À teneur de la traduction française – effectuée par une traductrice-jurée dont la signature avait été authentifiée par un notaire B______ – du certificat de famille établi le 27 octobre 2016 par la mairie de P______ (B______), le recourant ainsi que sa mère étaient apatrides. Était précisé que « ce certificat est délivré pour obtention de la citoyenneté. D______ et A______ ont renoncé à la citoyenneté B______ avec Décret du Président N° 6 du 20.06.1991 ».

gg. À teneur des attestations établies les 23 juillet 2012, 18 octobre 2012 et 25 février 2013 par l’hospice, le recourant était totalement aidé financièrement depuis le 1er janvier 2011.

Selon les attestations rédigées par l’hospice les 25 juin 2013, 23 septembre 2013 et 29 janvier 2014, le recourant était totalement soutenu financièrement depuis le 1er août 2005.

Il ressort des attestations de l’hospice des 25 janvier 2017, 26 avril 2017, 22 novembre 2017, 23 avril 2018, 21 juin 2018, 26 septembre 2018, 27 mars 2019, 23 octobre 2019, 22 janvier 2020, 29 juin 2020 et 7 janvier 2021 que le recourant était totalement aidé financièrement depuis le 1er octobre 2016.

hh. Par pli des 4 mars, 30 avril et 28 août 2020, l’OCPM a requis la transmission de renseignements auprès de Mme G______ s’agissant des liens affectifs et financiers entre le recourant et leur fille.

ii. Selon l’extrait du registre des poursuites établi le 5 mars 2020, le recourant faisait l’objet de poursuites à hauteur d’environ CHF 7'800.- et d’actes de défaut de biens pour un montant total de CHF 14'404.-.

jj. Il ressort de l’attestation établie par l’hospice le 31 mars 2020 que le recourant avait bénéficié de prestations financières du 1er janvier 2001 au 28 février 2005 et percevait des prestations financières depuis le 1er octobre 2016. À ce titre, les sommes totales versées à ce dernier étaient de CHF 5'809.40 pour 2016, de CHF 16'559.40 pour 2017, de CHF 15'811.- pour 2018, de CHF 17'233.55 pour 2019 et de CHF 4'482.40 pour 2020. Il n’avait réalisé aucun revenu durant ces années et n’avait aucune dette envers l’hospice.

kk. Faisant suite à une demande de renseignements, le SPMi a indiqué à l’OCPM, par pli du 18 décembre 2020, que F______ n’entretenait pas de contacts réguliers avec son père. Elle n’avait plus eu de contacts physiques avec ce dernier depuis janvier 2020. Elle avait échangé quelques contacts téléphoniques avec son père mais ceux-ci étaient « extrêmement rares à ce jour ». Le précité n’avait « pas participé à l’éducation de sa fille, raison pour laquelle le lien entre eux [était] si ténu aujourd’hui ». Cette enfant était placée en foyer depuis décembre 2019.

ll. À teneur de l’extrait du registre des poursuites établi le 3 mars 2021, le recourant faisait l’objet de poursuites à hauteur d’environ CHF 7'800.- et d’actes de défaut de biens pour un montant total de CHF 14'404.-.

mm. Le 11 mars 2021, l’OCPM a informé le recourant de son intention de refuser de lui délivrer une autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse.

Les conditions du cas de rigueur, tout comme celles du regroupement familial, n’étaient pas remplies, compte tenu notamment du fait qu’il n’y avait aucun lien économique entre lui-même et sa fille et que le lien affectif existant entre eux était extrêmement ténu.

nn. Par décision du 28 avril 2021, l’OCPM a refusé de délivrer une autorisation de séjour en faveur du recourant, a prononcé son renvoi et lui a imparti un délai au 28 juin 2021 pour quitter la Suisse.

Il ne pouvait se prévaloir de son droit à la vie familiale. Il n’avait jamais contribué financièrement à l’entretien de sa fille et le lien affectif existant entre eux était extrêmement ténu, de sorte que sa relation avec sa fille ne pouvait être qualifiée d’étroite et de particulièrement forte.

Les conditions du cas de rigueur n’étaient pas davantage remplies. Dès lors qu’il ne générait aucun revenu et dépendait de l’assistance publique, son absence quasi-totale d’intégration professionnelle pouvait être relevée. Il était défavorablement connu des services de police en raison de multiples infractions commises entre 2003 et 2018, avait été condamné à cinq reprises entre janvier 2011 et février 2017. Il faisait l’objet d’une procédure pendante devant le Ministère public pour des lésions corporelles simples. De plus, il était connu de l’office des poursuites, en raison notamment de quinze actes de défaut de biens pour un montant total de CHF 14'404.- au 3 mars 2021. Son renvoi apparaissait possible, licite et raisonnablement exigible.

oo. Par acte du 31 mai 2021, M. A______ a interjeté recours devant le TAPI contre cette décision, concluant, préalablement, à l’octroi d’un délai pour compléter son recours et à la suspension de la présente cause jusqu’au prononcé d’une mesure de protection par le TPAE, principalement, à l’annulation de la décision attaquée et à ce que l’autorité intimée soit invitée à préaviser favorablement auprès du SEM la délivrance d’un titre de séjour en sa faveur, subsidiairement, à ce que l’OCPM soit invité à proposer au SEM l’octroi d’une admission provisoire, sous suite de frais et dépens.

Né le ______ 1986 à P______ (B______), son père présumé l’avait abandonné peu après sa naissance. Ses parents avaient divorcé début 1987 et suite à l’annulation de la paternité de cet homme en 1988, il ne portait pas le nom de ce dernier. En août 1991, sa mère s’était rendue à K______ (C______) pour y trouver du travail et l’avait emmené avec elle. Suite à de graves problèmes de santé ayant entraîné une longue hospitalisation de sa mère, le père de cette dernière – qui avait lui-même obtenu le statut de réfugié en Suisse en raison de son opposition notoire aux régimes politiques des villes de Q______ et de P______ (B______) – était allé le chercher en C______ pour l’emmener à Genève. Arrivé en Suisse en août 1997, il avait déposé, par l’intermédiaire de son grand-père, une demande d’asile le 17 septembre 1997. Le 7 octobre 1997, il s’était vu désigner un curateur, dès lors qu’il séjournait en Suisse sans représentant légal et il avait rapidement été placé en foyer pour requérants d’asile mineurs non accompagnés car la femme de son grand-père ne le tolérait pas. En février 1998, sa mère l’avait rejoint en Suisse, sans être au bénéfice d’un titre de séjour. Au vu des particularités du cas d’espèce, notamment de la fragilité psychologique de Mme D______, cette dernière avait été autorisée à l’héberger mais la mesure de représentation légale en sa faveur avait été maintenue. En novembre 2001, sa mère avait déposé une demande d’autorisation de séjour à titre humanitaire et s’était vue délivrer le titre requis le 6 juillet 2004. En décembre 2019, elle avait obtenu la nationalité suisse par naturalisation, étant précisé qu’en raison en particulier du statut politique de son père, elle était apatride. Après que le SEM lui ait indiqué, le 29 novembre 2004, qu’il pouvait désormais se prévaloir de son droit au respect de sa vie familiale eu égard au fait qu’il vivait avec son enfant qu’il avait reconnu, de sorte que le règlement de ses conditions de séjour relevait désormais de la police des étrangers, il avait déposé, en mars 2005, une demande d’autorisation de séjour. Il n’avait pas donné suite au délai qui lui avait été imparti pour faire usage de son droit d’être entendu dans le courrier d’intention de l’OCPM du 11 mars 2021 car il n’imaginait pas pouvoir être renvoyé après tout le temps passé en Suisse.

La décision attaquée violait son droit au respect de sa vie privée. S’il était vrai que son intégration laissait malheureusement à désirer, cette situation était toutefois due à son parcours de vie difficile. Devenu père alors qu’il n’était pas encore majeur, sans formation et sans revenu, il n’avait pas pu vivre avec sa fille et la mère de cette dernière. Durant toute ces années, il n’avait jamais bénéficié d’un titre de séjour, ce qui avait sensiblement entravé ses recherches d’emploi. L’OCPM n’avait donné suite à sa demande d’autorisation de séjour du 29 mars 2005 que le 8 janvier 2009, date à laquelle cette autorité lui avait accordé un premier droit d’être entendu. Suite à cela, l’OCPM s’était gardé de se prononcer durant onze années supplémentaires, avant de lui accorder un second droit d’être entendu. S’il ne remplissait pas, en 2005, les conditions du cas de rigueur, l’OCPM aurait à tout le moins pu proposer son admission provisoire au SEM, cas échéant. Il était également étonnant que le SEM ait levé sans autre son admission provisoire alors qu’il ne bénéficiait pas d’une autorisation de séjour. Il présentait une problématique psychiatrique, a priori invalidante, qui avait justifié une demande de mesure de protection auprès du TPAE et qui expliquait, du moins en partie, sa consommation de cannabis. Les infractions pénales qui lui étaient reprochées ne revêtaient pas une gravité telle que l’intérêt public à son renvoi primait sur son intérêt à poursuivre son séjour en Suisse, où vivaient sa fille et sa mère. Pour le surplus, conformément à la jurisprudence fédérale, la « longueur extrême » de la procédure devant l’OCPM était constitutive d’un cas d’extrême gravité. Pour une raison inexpliquée, aucune démarche n’avait été effectuée auprès du SEM en vue de faire reconnaître, à l’instar de sa mère, son statut d’apatride, de sorte qu’il se trouvait de facto privé d’un tel statut depuis sa naissance, alors que la reconnaissance du statut d’apatride lui aurait conféré le droit d’obtenir un permis de séjour, respectivement un permis d’établissement après cinq ans, selon l’art. 34 LEI dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2018. Enfin, il n’avait plus aucune attache en B______, pays qu’il avait quitté en 1991 à l’âge d’à peine cinq ans.

Au regard de son « statut (potentiel) d’apatride », l’exécution de son renvoi en B______ était impossible, voire illicite, car contraire à la Convention relative au statut des apatrides du 28 septembre 1954, entrée en vigueur, pour la Suisse, le 1er octobre 1972 (RS 0.142.40) (ci-après : la Convention relative au statut des apatrides). En tout état, cette mesure était inexigible, compte tenu notamment de son état de santé, de son absence de formation professionnelle et de l’inexistence d’un réseau familial sur place.

Plusieurs pièces étaient jointes à ce recours, notamment :

-          un document daté du 2 décembre 2016 rédigé en anglais par le consul de l’ambassade d’B______ en Suisse et intitulé « Notarized Declaration », à teneur duquel s’était présentée devant lui ce jour-là Mme D______, née en B______ ; était précisé que « The Consul, based on the documents issued by the B______ authorities declares that D______, with Decree No. 6 dated 20.06.1991, is stateless » ;

-          une attestation établie le 26 mai 2021 par la Dre C______, selon laquelle elle suivait le recourant depuis mai 2021 pour une prise en charge psychiatrique et psychothérapeutique en raison de ses troubles psychiatriques devenant de plus en plus sévères ; le patient avait un besoin intense de poursuivre sa prise en charge en Suisse ;

-          un certificat médical du 26 mai 2021 rédigé par le Dr R______ selon lequel le recourant « constitu[ait] un problème très particulier » ; ce dernier, qu’il suivait depuis trois ans, n’avait « plus la faculté de discernement à cause des problèmes médicaux/sociaux. Il a un dossier au SPA pour être mis sous tutelle » ; par conséquent, le médecin précité priait « d’accorder [au recourant] de continuer à vivre en Suisse pour recevoir toutes les aides nécessaires (soins médicaux/psychiatriques/sociaux/administratifs) », étant précisé que l’intéressé avait « des problèmes psychiatriques dus à des circonstances très particulières et exceptionnelles » ;

-          un certificat du Dr R______ du 17 mai 2021 indiquant qu’au vu de la détérioration de l’état psychique et cognitif du recourant, qui « risqu[ait] de lui donner des séquelles importantes dans sa vie quotidienne et, donc, pour qu’il puisse avoir les bénéfices de sécurité et un soutien régulier », il incombait à ce dernier de « notifier le service de protection de l’adulte de son cas » ; il avait vu le recourant quatre ou cinq fois au total depuis dix-huit mois, étant précisé que ce dernier ne « s’engage[ait] pas avec des médecins » et n’avait été suivi ni par des généralistes, ni par des psychiatres, de sorte qu’aucun « diagnostic précis » n’avait été posé, mais il s’agissait d’une personnalité borderline avec troubles anxio-dépressifs. Il fumait régulièrement du cannabis, habitait à l’hôtel et avait « des difficultés à s’engager avec les dossiers, factures et procédures similaires ». Ainsi, il ne s’acquittait plus de ses factures depuis longtemps et avait vraisemblablement été « rejeté de son hôtel ». Les vêtements du patient étaient « sales et rustiques ». Il mangeait de manière déséquilibrée et n’avait vraisemblablement jamais travaillé. Le médecin précité avait l’impression que le recourant ne « sort[ait] pas de ses logements, n’a[vait] pas d’amis (contacts sociaux) et fum[ait] du cannabis toute la journée » ; le recourant avait besoin d’un soutien régulier pour être « engagé auprès de cette société » et le médecin précité avait « l’impression q[‘il] [était] assez intelligent, un contrôle de QI et/ou un contrôle en psychologie [pourrait] être intéressant mais pas durant la période où il serait sous effets des drogues » ; avec un sevrage du cannabis, un contrôle en psychiatrie, un soutien dans le « traitement de ses papiers » et une aide pour trouver un logement, une « bonne réhabilitation [était] envisageable », étant précisé que, dans le contexte actuel, « une réhabilitation [était] en ce moment impossible » ;

-          un extrait établi le 25 mai 2021 à teneur duquel le recourant faisait l’objet de poursuites à hauteur de plus de CHF 7'700.- et d’actes de défaut de biens, pour un montant total de plus de CHF 15'705.- ;

-          l’attestation fiscale émise le 11 février 2021 par l’hospice indiquant qu’il avait perçu, au 31 décembre 2020, un montant total de CHF 15'998.05 au titre de prestations. Le solde de sa dette se montait à CHF 11'988.15 et aucune recette tierce n’avait été réalisée ;

-          un courrier de soutien de Mme D______ du 26 mai 2021, par le biais duquel elle sollicitait le réexamen de la position de l’OCPM afin que son fils soit autorisé à rester en Suisse pour qu’il puisse se soigner ; ce dernier, qui était apatride, avait connu les souffrances de la dictature, raison pour laquelle elle avait dû fuir l’B______, et en était resté véritablement traumatisé ; il avait eu des difficultés à s’intégrer à Genève à cause de ses séquelles du passé » et, lorsqu’il était profondément bon, s’était laissé entraîner par des « jeunes plus malins ou plus âgés » ; son fils ayant des problèmes de santé importants, il était indispensable qu’elle soit près de lui pour le rassurer, le soutenir moralement et l’aider dans sa vie quotidienne ; il adorait sa fille et ce sentiment était réciproque ; lorsqu’ils s’étaient tous trois réunis deux ans plus tôt, ils étaient tombés dans les bras l’un de l’autre avec beaucoup d’émotion, étant précisé qu’ils se réunissaient depuis lors régulièrement en famille ; son fils était « [s]on oxygène, [s]on pilier » et tous deux ne pouvaient vivre l’un sans l’autre ; il n’avait nulle part où aller et aucune attache avec quelque autre pays que ce soit ; en outre, elle ne survivrait pas à un éloignement de ce dernier et cette mesure serait également fatale pour lui ;

-          un courrier adressé le 6 juillet 2004 au conseil de Mme D______ par l’OCPM, indiquant que la demande d’autorisation de séjour déposée par la précitée avait été acceptée ; cette correspondance indique, sous concerne, que la précitée est « ressortissante d’B______ ».

pp. À teneur de l’attestation établie le 9 juin 2021 par l’hospice, le recourant était financièrement soutenu à hauteur d’un montant mensuel de CHF 1'472.50.

qq. Le 30 juillet 2021, l’OCPM a conclu au rejet du recours par le TAPI, les conditions de reconnaissance d’un cas de rigueur n’étant pas remplies.

rr. Le 20 septembre 2021, le recourant a persisté dans ses conclusions devant le TAPI.

Il ressortait du courriel de l’ambassade d’B______ – joint – du 17 septembre 2021 que, selon la législation B______ applicable, il était apatride, à l’instar de sa mère. Un éventuel renvoi ne serait pas licite, dès lors qu’une telle mesure serait contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international, notamment à la Convention relative au statut des apatrides. Alternativement, il conviendrait d’inviter l’OCPM à préaviser favorablement auprès du SEM l’octroi d’une autorisation de séjour en application de l’art. 31 al. 1 LEI, étant précisé qu’il séjournait légalement en Suisse depuis le dépôt de sa demande de titre de séjour en mars 2005. En outre, le SEM avait constaté, par décision du 29 novembre 2004, qu’il pouvait se prévaloir de l’art. 8 CEDH, étant donné qu’il vivait avec son enfant qu’il avait reconnu. Toutefois, jusqu’au prononcé de la décision attaquée le 28 avril 2021, l’OCPM n’avait pris aucune décision le concernant. La décision du SEM précitée apparaissait prématurée, dès lors que cette autorité n’aurait pas dû constater la caducité de l’admission provisoire – formellement valable jusqu’au 12 mai 2005 – tant que l’OCPM ne s’était pas prononcé en l’espèce. En effet, si un examen préjudiciel pouvait amener le SEM à constater qu’il pouvait faire valoir en Suisse un droit à une autorisation de séjour au titre de regroupement familial inversé, cela ne signifiait pas encore que toutes les exigences légales et jurisprudentielles requises étaient effectivement remplies. Ainsi, en agissant de la sorte, le SEM avait pris le risque de le laisser sans aucun statut administratif pendant toute la durée de sa procédure de police des étrangers, soit in casu durant plus de quinze ans. Ce défaut de coordination entre les autorités fédérales et cantonales avait contribué à précariser sa situation et il ne pouvait donc lui être reproché de ne pas avoir trouvé d’emploi fixe. De plus, l’OCPM n’avait pas rendu de décision après le « premier droit d’être entendu octroyé le 8 janvier 2009 », dès lors que, pour une raison inexpliquée, cet office ne lui avait finalement pas notifié la décision du 18 novembre 2009.

Compte tenu de la longue durée de la procédure, il convenait d’admettre l’existence d’un cas de rigueur, conformément à la jurisprudence fédérale. En outre, même si ses liens avec sa fille étaient désormais ténus, ils n’étaient pas pour autant inexistants. Pour le surplus, il avait régulièrement maintenu des liens affectifs étroits avec sa mère, qu’il voyait trois fois par semaine et avec laquelle il mangeait tous les week-ends depuis des années. De ce point de vue, un renvoi serait également constitutif d’une violation de l’art. 8 CEDH, compte tenu de la longue durée de son séjour en Suisse et de l’absence de lien avec son pays d’origine. Enfin, son état de santé psychique fragile, qui avait nécessité une hospitalisation du 26 juillet au 9 août 2021, ne lui permettait a priori plus d’exercer une activité lucrative ni de gérer ses affaires personnelles, raison pour laquelle une procédure de protection avait récemment été ouverte devant le TPAE.

Étaient joints :

-          un courriel en anglais du 17 septembre 2021 adressé par l’ambassade de la république d’B______ à Berne au conseil du recourant – suite à la demande de renseignements de ce dernier quant au fait de savoir si le recourant, qui n’avait apparemment jamais bénéficié de la nationalité B______, était également apatride selon le droit B______ et s’il serait, cas échéant, susceptible d’obtenir la nationalité B______ –, selon lequel « The Embassy confirms that as stated in the document issued for Mrs. D______ (the only legally known parent of A______) by the Consul Mrs. S______, he A______, born in P______ on ______1986, is also stateless, based of the Presidential Decree N0 : 6, of 20.06.1991 » ;

-          un courrier adressé le 10 août 2021 par le Dr T______ du département de médecine de premier recours des Hôpitaux universitaires de Genève à U______ à la Dre C______ relatif à un séjour du 26 juillet au 9 août 2021, effectué par le recourant dans un but de « soutien psychologique et éloignement des facteurs de stress, sevrage – traitement de dépendances, suite de traitement médical impossible en ambulatoire, réadaptation musculo-squelettique, réadaptation aux AVQ, reconditionnement ». Le diagnostic principal était un épisode dépressif de date inconnue et les diagnostics secondaires étaient carence en folate et hématurie microscopique ; une polytoxicomanie, un trouble mixte de la personnalité, un trouble dépressif et un sinus pilonidal sacré avec écoulement, tous de date inconnue, ainsi que des douleurs articulaires persistantes au genou droit, post contusion, et à la cheville droite post entorse en date du 23 mai 2021 ; des vitamines ainsi qu’un anxiolytique (Oxazépam Anxiolit cp 15 mg 3 fois par jour) lui étaient prescrits ; quant au suivi à la sortie, le patient s’engageait à prendre rendez-vous à la consultation spécialisée de la Dre C______ pour suite de prise en charge psychiatrique et il était proposé à cette praticienne de discuter avec lui d’une institutionnalisation dans une structure de soin adaptée ; la physiothérapie se poursuivrait en ambulatoire et il était suggéré au médecin précité de poursuivre les investigations par rapport aux douleurs persistantes post-traumatique du MID pour lesquelles une fracture avait été exclue par radiographies en mai 2021.

ss. Le 21 septembre 2021, le recourant a produit devant le TAPI une ordonnance rendue le 5 juillet 2021 par le TPAE, à teneur de laquelle une curatelle de représentation et de gestion était instituée en sa faveur. Les curateurs désignés avaient pour tâche de le représenter dans ses rapports avec les tiers, notamment en matière administrative et juridique, de gérer ses revenus, ses biens et ses affaires courantes, de veiller à son bien-être social et de le représenter pour tous les actes nécessaires dans ce cadre et enfin de veiller à son état de santé et à mettre en place les soins nécessaires et, en cas d’incapacité de discernement, de le représenter dans le domaine médical. L’exercice de ses droits civils en matière contractuelle était limité. Il était également privé de l’accès à toute relation bancaire en son nom ou dont il était l’ayant droit économique. Enfin, les curateurs désignés étaient autorisés à prendre connaissance de sa correspondance dans les limites de leur mandat et, si nécessaire, à pénétrer dans son logement.

Cette mesure tendait à confirmer qu’il ne serait pas en mesure de subvenir seul à son entretien en cas de renvoi en B______.

tt. Le 18 octobre 2021, l’OCPM a persisté dans ses conclusions.

Le recourant n’avait pas démontré qu’en dépit de son apparente absence de nationalité, il lui serait impossible d’obtenir la nationalité B______ par le biais des démarches idoines dans son pays d’origine, étant précisé que l’ambassade d’B______ n’avait pas mentionné cette impossibilité dans son courriel du 17 septembre 2021. En tout état, cette potentielle apatridie ne constituait pas un motif suffisant pour fonder un cas de rigueur, ni même une illicéité du renvoi, ladite apatridie n’ayant pas été formellement reconnue par la Suisse. Le cas échéant, il incomberait au recourant d’engager auprès du SEM une procédure de reconnaissance du statut d’apatride en vertu de la Convention relative au statut des apatrides afin d’obtenir une autorisation de séjour sur cette base.

uu. Le 31 janvier 2022, le recourant a indiqué que, malgré une relance, l’Ambassade d’B______ ne s’était pas encore déterminée suite à son interpellation, de sorte qu’une prolongation de délai pour obtenir une réponse sur ce point était requise.

Indépendamment d’un droit potentiel à la reconnaissance du statut d’apatride, il convenait de constater qu’il ne possédait pas, en l’état, la nationalité B______. Ainsi, son renvoi dans ce pays ne serait pas raisonnablement exigible. En outre, il n’y était pas retourné depuis 1991 en n’en maîtrisait pas la langue, étant précisé que sa mère communiquait avec lui en C______ ou en français, comme cette dernière l’avait confirmé à son conseil par téléphone le 17 janvier 2022. Enfin, il faisait l’objet d’une curatelle de représentation. Ainsi, il serait difficilement en mesure de subvenir seul à son entretien en cas de renvoi en B______ et d’entreprendre les démarches administratives nécessaires afin d’obtenir, cas échéant, la nationalité B______, respectivement d’intégrer rapidement le dispositif de protection et le système de santé B______, ce d’autant qu’aucun membre de sa famille ne se trouvait en B______.

vv. Le 23 février 2022, le recourant a produit un courriel de l’ambassade d’B______ en Suisse du 17 février 2022, tout en confirmant que, dès lors qu’il ne possédait actuellement pas la nationalité B______, l’exécution de son renvoi apparaissait impossible. Selon le courriel de l’ambassade d’B______ en Suisse, « With reference to the right of your client to apply for the B______ citizenship, please be informed that based on the B______ Law of citizenship, No. 113/2020, as any person wishing to apply for the B______ citizenship, he has the right to apply for it. However, the decision on granting and or refusing the citizenship to a given person, depends on that given person fulfilling the criteria as prescribed for in the relevant B______ legislation, namely Law on citizenship No. 113/2020 ». L’Ambassade n’était pas compétente pour décider de l’octroi ou non de la nationalité B______, étant précisé que les autorités compétentes seraient, « after having thoroughly considered all the documentation of the applicant [ ] in a position to give you an answer. If that decision won’t be satisfactory, it can be challenged subsequently in the B______ courts ».

ww. Une audience d’enquêtes s’est tenue le 5 septembre 2022 devant le TAPI.

Le Dr R______ a indiqué suivre le recourant depuis quatre à cinq ans. Celui-ci avait des problèmes pour s’organiser, prendre soin de sa personne, se lever et se motiver. Il l’avait vu environ quatre fois en consultation depuis une année, essentiellement pour des problèmes somatiques, vraisemblablement davantage liés à sa personnalité qu’à une pathologie. Sa consommation importante de cannabis avait pu avoir un impact sur son énergie générale. La demande de mise sous curatelle du patient était liée au fait qu’il s’était rendu compte en 2019, en parlant notamment avec lui et sa mère, de l’importance de ses difficultés à s’intégrer et à se prendre en charge. Le recourant était perdu dans sa vie, restait prostré des journées entières dans son appartement, n’arrivait pas à se prendre en charge personnellement et sur le plan administratif et commençait à accumuler les dettes. Cette situation stressait énormément sa mère, qui l’aidait notamment sur le plan administratif. Il avait donc alerté le service de protection de l'adulte (ci-après : SPAd) afin qu’il bénéficie d’un soutien et pour soulager sa mère, qui était sur le point de décompenser. La mise sous curatelle du recourant avait été bénéfique pour cette dernière, qui avait pu se décharger d’une importante responsabilité, et pour le recourant, même si ce dernier était un peu frustré que les changements dans sa vie ne soient pas plus rapides et plus importants. Il avait pu observer une amélioration dans son interactivité et dans son autonomie. Il prenait mieux soin de lui-même et venait le voir lorsqu’il avait un souci de santé, ce qu’il n’aurait pas fait auparavant. À sa connaissance, le recourant ne prenait aucun traitement médicamenteux. Il lui était difficile de se prononcer sur sa capacité de travail. Le recourant était intelligent et avait de bonnes capacités intellectuelles mais sans direction. Il lui était ainsi difficile de se discipliner et de se lever, par exemple, tous les matins pour se rendre au travail, ce qui était la cause de ses échecs professionnels. Ses problèmes étaient vraisemblablement liés à son enfance difficile. Son absence de titre de séjour avait clairement pesé sur son intégration et avait pu déclencher un blocage émotionnel. Le patient ne lui avait pas parlé dans le détail de son histoire mais il en avait eu connaissance à travers sa mère. Il lui avait en revanche parlé de son immense frustration du fait de sa situation, de son incapacité de s’intégrer et de se construire une vie normale. C’était probablement en raison de cette frustration qu’il avait baissé les bras et s’était laissé aller. Son absence de titre de séjour lui causait des problèmes administratifs au quotidien (impossibilité de conclure un abonnement téléphonique par exemple) et avait également compliqué ses recherches d’emploi. L’usage du cannabis était probablement au départ une béquille, qui était ensuite devenue un problème. Ces quatre ou cinq dernières années, le recourant était en « fuite », se cachant du monde et ayant cessé tous contacts sociaux. Cela avait clairement eu un impact sur les contacts avec sa fille. Durant ces années, sa mère était restée son seul contact avec le monde réel. La situation est devenue toutefois trop difficile pour elle, y compris sur le plan financier. La mise sous curatelle avait heureusement permis de les soulager tous deux. C’était la dernière option pour sauver sa vie et, par ricochet, celle de sa mère. Il était véritablement en train de sombrer. Le diagnostic de dépression pouvait être posé, mais la problématique était plus complexe. Il était possible que le recourant ait une personnalité borderline, exacerbée par sa situation difficile.

Le curateur du recourant, qui avait repris le dossier en juillet 2022, a précisé que des démarches auprès de l’AI étaient souhaitées par le SPAd, mais avaient été bloquées du fait de son statut administratif. Il était en train de mettre de l’ordre, notamment auprès de l’AVS, afin que le recourant puisse bénéficier de prestations AI. Il était actuellement au bénéfice de l’aide d’urgence aux migrants, très limitée. Aucune démarche n’avait été entreprise s’agissant de la nationalité du recourant, étant précisé qu’à sa connaissance, c’était le conseil du précité qui s’occupait de ce volet. Concrètement, il administrait les finances du recourant. Il lui versait CHF 460.- par mois en deux fois, soit CHF 230.- tous les quinze jours, avec lesquels il devait régler ses factures téléphoniques, se nourrir, se vêtir, et acheter tous ses biens de première nécessité. Ses contacts avec le recourant étaient bons. Il ignorait s’il arrivait à s’en sortir avec ce montant, mais avoir si peu d’argent à disposition créait chez lui de la frustration. L’impossibilité de bénéficier de plus de prestations sociales était liée à sa situation administrative. Le recourant était également suivi par une assistante sociale de l’hospice. Avec un titre de séjour, il bénéficierait de davantage de prestations de la part du SPAd et de l’hospice. Il s’engageait à fournir, dans un délai de quinze jours, toute explication utile en lien avec une éventuelle demande AI.

La représentante de l’OCPM a indiqué qu’il serait important de savoir si le recourant pourrait bénéficier d’une rente AI, étant précisé que cela était possible pour des personnes en séjour illégal. La situation administrative du recourant était restée « en rade » près de quinze ans, vraisemblablement en raison de la naissance de sa fille et de l’éventuelle possibilité de lui octroyer un permis dans ce cadre, de sa collaboration pas toujours optimale et de ses condamnations pénales. Compte tenu des problèmes de santé attestés du recourant, et de sa mise sous curatelle, l’OCPM pourrait être amené à réexaminer la situation. Il serait intéressant d’entendre le psychiatre du recourant. Il était nécessaire de connaître les aspects financiers liés à sa situation (capacité de travail ou prise en charge AI) et ses liens avec sa mère. S’agissant de son statut d’apatride, l’OCPM n’était pas compétent pour statuer, contrairement au SEM.

Le conseil du recourant a précisé que ce dernier n’était pas éligible administrativement à une rente AI, du fait de l’absence du titre de séjour et de cotisations.

Mme D______ a indiqué que son fils, avec lequel elle avait un lien très fort, était la lumière de ses yeux. Elle n’avait pas encore coupé le cordon ombilical et il serait toujours son enfant. Tous deux vivaient dans des logements distincts car ce dernier la tirait vers le bas, du fait de ses difficultés, quand ils habitaient ensemble. Ils s’appelaient quotidiennement et si elle ne l’entendait pas un jour, elle s’inquiétait. L’enfance de son fils avait été compliquée. Peu après sa naissance, elle s’était séparée du père de ce dernier, qui avait refusé de lui verser une pension alimentaire. Son propre père, prisonnier politique, avait pu trouver refuge en Suisse par la suite et y avait fait venir le recourant en 1997, car elle avait des problèmes de santé. Elle n’avait jamais quitté son fils depuis lors, sauf en raison de problème de santé, quand bien même son père l’avait dénoncée, ce qui avait conduit à son renvoi de Suisse. Son fils avait été placé en foyer pendant cinq ans. Sa vie à ce moment-là était très compliquée, car elle devait se cacher de son père. Ce dernier lui reprochait d’abandonner son fils, ce qu’elle n’avait jamais fait, hormis lorsqu’elle avait été hospitalisée. Elle avait eu de très bons contacts avec sa petite-fille et celle-ci venait la voir quand elle le souhaitait. Elle ne donnait pas d’argent à son fils parce qu’il le dépensait pour s’acheter du cannabis mais il lui arrivait de l’inviter au restaurant et de lui faire des cadeaux. Son père était décédé le 11 août 2022 et elle n’avait pas de contacts avec son demi-frère, qui vivait à Genève. Elle avait fait des démarches en lien avec son statut d’apatride, sans toutefois s’en occuper pour son fils lorsqu’il était mineur car il avait un tuteur. Ensuite, lorsqu’il est devenu majeur, elle n’en avait plus la responsabilité. En cas de renvoi en B______, elle craignait pour la vie de son fils, du fait du passé de son grand-père.

Le recourant a expliqué que, lors de son arrivée en Suisse à l’âge de 11 ans, son grand-père n’avait pas demandé le regroupement familial en sa faveur mais avait déposé une demande d’asile. Il n’avait pas proposé de le loger chez lui, de sorte qu’il avait été placé dans un foyer. Il avait fréquenté plusieurs foyers successifs, dans le cadre desquels il avait fait des mauvaises rencontres. Il s’était mis à fumer et boire dès l’âge de 12 ans. À 15 ans, il avait été placé au foyer V______. Sa mère, constatant que les conditions de séjour y étaient terribles, l’en avait sorti et il avait vécu avec elle, sur son lieu de travail, lorsqu’elle travaillait comme gouvernante. Il avait ensuite pu poursuivre une formation et avait rencontré la mère de sa fille.

xx. Le 12 septembre 2022, le curateur du recourant a indiqué qu’une demande AI serait déposée en faveur du précité dès que la cotisation AVS/AI pour les années 2016 à 2022 serait totalement réglée. Dès réception, l’accusé de réception de cette demande AI serait versé au dossier.

yy. Une seconde audience d’enquêtes a eu lieu le 27 septembre 2022.

La Dre C______ a déclaré suivre le recourant depuis mai 2021 pour des troubles dépressifs récurrents, un syndrome de dépendance aux substances toxiques et un problème d'exclusion sociale. Ces troubles chroniques, qui avaient évolué depuis de nombreuses années, étaient difficiles à traiter. Ils se manifestaient par une baisse de moral, de la tristesse, un état dépressif, un sentiment d'impuissance, d'injustice et de ne pas exister, de la nervosité, de l'irritabilité, de la fatigue, une intolérance à la frustration, des difficultés à s'engager dans l'action et/ou une activité et des difficultés à interagir avec des tiers. Le recourant se sentait étranger à lui-même. Dès lors que ce dernier ne disposait pas d'assurance-maladie du fait de sa situation administrative, la mise en place d’un traitement n’avait pas été possible, ses ordonnances étant refusées à la pharmacie. Hormis un soutien psychologique, le recourant n'avait ainsi pas bénéficié de traitement médicamenteux. Il souffrait d'une dépendance épisodique à l'alcool et au cannabis, en réponse à une frustration et/ou pour se soulager. L'hospitalisation du recourant à Montana avait eu lieu d'un commun accord, en raison de l'aggravation de son état anxio-dépressif. Il lui avait indiqué qu’il se sentait dépassé par la situation et souhaitait se mettre à l'abri, démarche qu’elle avait appuyée. Dans le cadre de son hospitalisation, un traitement avec des anxiolytiques avait été proposé, lequel n'avait pu être poursuivi à sa sortie en raison de son absence d'assurance maladie. Le recourant avait toutefois pris contact avec elle pour une reprise du suivi psychiatrique. Au départ, elle le voyait une fois par semaine, puis une fois par quinzaine et enfin une à trois fois par mois. Leurs contacts avaient lieu au travers d'entretiens téléphoniques ou en présentiel, parfois en présence de sa mère. Depuis mai 2021, il y avait une continuité dans le suivi. À son retour de U______, elle lui avait proposé une prise en charge par le service d'addictologie des HUG, ainsi qu'un entretien avec un nutritionniste pour ses troubles alimentaires (obésité). Cela ne s'était toutefois pas concrétisé. En raison de ses difficultés à interagir avec les autres, il était également très difficile pour le patient d'accepter et/ou de mettre en place un suivi spécialisé. Dans le cadre de son suivi, elle avait été beaucoup aidée par sa mère. Ils travaillaient actuellement sur cette problématique d'interactions sociales. S'agissant de sa prise en charge au quotidien, il y avait du progrès. Le recourant était désormais à même de s'occuper de sa personne et vivait de manière autonome dans son studio. Si un traitement médicamenteux devait être mis en place, ce qui semblait possible vu la couverture d'assurance dont il bénéficiait désormais, elle n’était pas certaine qu'il serait à même de le prendre seul et régulièrement. Il faudrait mettre en place un service d'infirmier-ère à domicile, qui passerait le voir une fois par semaine ou par quinzaine, afin de s'assurer qu’il avait bien pris ses médicaments et lui préparer son semainier. Un renvoi en B______ serait une catastrophe. Le recourant se sentait déjà étranger à lui-même en Suisse et ce sentiment serait encore exacerbé en cas de retour dans un pays qu'il ne connaissait pas et dont il ne parlait pas la langue. Aujourd'hui, le recourant n'était pas apte à travailler. Le dépôt d’une demande AI avait même été envisagé. Il en remplissait à son avis les conditions médicales, mais cela n'avait pas été possible, du fait de sa situation administrative. Pour l'avenir, elle ne pouvait pas se prononcer. Il ne retrouverait en tout cas pas une pleine capacité de travail à brève échéance. Elle avait constaté cette incapacité de travail en mai 2021, mais pensait qu'elle existait déjà avant. Vu son anamnèse, elle pensait que le recourant était en incapacité de travail depuis l'adolescence déjà, eu égard à ses problèmes d'interactions sociales. Elle ignorait quel était son suivi médical avant mai 2021. Elle pensait qu'il voyait de temps en temps un généraliste, mais ne bénéficiait en tous les cas pas de suivi psychiatrique. La relation du recourant avec sa mère était positive et nécessaire. Jusqu'à sa mise sous curatelle, c’était elle qui s'occupait de toutes ses affaires administratives. La mise en place d'un petit réseau, dont la curatelle, autour du recourant avait toutefois été un soulagement tant pour lui que pour sa mère. Le recourant lui parlait beaucoup de sa fille, avec laquelle il souhaitait pouvoir maintenir des liens. Elle avait constaté un léger progrès s'agissant des interactions du recourant avec l'extérieur, même s’il y avait encore beaucoup de travail.

Elle appuierait la demande AI déposée par le SPAd, cas échéant. Si un traitement médicamenteux était mis en place, il faudrait travailler avec le recourant sur son acceptation, ceci faisant partie de sa pathologie. Il lui était en effet difficile d'accepter qu'il souffrait de troubles psychiatriques nécessitant la prise de médicaments.

Le curateur du recourant a précisé que, depuis sa mise sous curatelle, ce dernier bénéficiait d'une couverture d'assurance maladie prise en charge par l'hospice. Cela était vraisemblablement également le cas auparavant. Il ignorait si le recourant avait des arriérés de paiement de primes. Renseignements pris, le remboursement des cotisations AVS/AI n'était pas nécessaire, la durée de résidence du recourant sur le territoire étant suffisante, de sorte qu’il pourrait déposer une demande AI immédiatement. Il fallait toutefois encore que le recourant dispose d'une pièce d'identité. Il avait également déposé une demande de fonds pour régler ses cotisations, même si cette démarche n'était pas nécessaire. Il était conscient qu'il serait utile de pouvoir régler la situation administrative du recourant dans les meilleurs délais.

Le recourant a précisé avoir toujours eu une assurance médicale, toutefois très limitée. Ainsi, deux fois sur trois, il n’avait pas pu obtenir les médicaments prescrits, car ils n'étaient pas pris en charge par son assurance maladie et il n'avait pas les moyens d’en supporter le coût. Son conseil a précisé qu’il allait investiguer la problématique de sa nationalité.

zz. Par courrier du 11 octobre 2022, l’OCPM a confirmé le refus d’octroi d’un titre de séjour pour cas de rigueur en faveur du recourant. S’agissant du renvoi de ce dernier, au vu notamment de sa situation médicale, il s’en rapportait à justice.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Est litigieuse la question de savoir si le refus de l'OCPM d'octroyer au recourant une autorisation de séjour et de transmettre son dossier au SEM avec un préavis positif est fondé.

2.1.1 Les dérogations aux prescriptions générales d'admission sont énoncées de manière exhaustive à l'art. 30 al. 1 LEI ; il est notamment possible de déroger aux conditions d'admission dans le but de tenir compte des cas individuels d'extrême gravité (let. b). En vertu de l'art. 30 al. 2 LEI, le Conseil fédéral en a fixé les conditions et la procédure dans l'OASA.

L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 137 II 345 consid. 3.2.1).

2.1.2 La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Ses conditions de vie et d'existence doivent ainsi être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. En d'autres termes, le refus de le soustraire à la réglementation ordinaire en matière d'admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il y soit bien intégré, tant socialement que professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger qu'il vive dans un autre pays, notamment celui dont il est originaire. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que l'intéressé a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3 ; 124 II 110 consid. 3).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable ou encore que la personne étrangère possède des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 et les références citées).

La notion mentionnée à l'art. 84 al. 5 LEI d'exigibilité d'un retour dans son pays de provenance d'un étranger admis provisoirement n'est pas identique à la notion d'exigibilité de l'exécution du renvoi telle qu'elle apparaît à l'art. 83 LEI. Il faut, en effet, distinguer les personnes visées par l'art. 84 al. 5 LEI – qui sont par essence au bénéfice d'une admission provisoire, c'est-à-dire d'une mesure qui suspend, du moins temporairement, l'exécution du renvoi pour l'un des motifs relevant de l'art. 83 LEI, y compris celui relatif à l'inexigibilité de l'exécution du renvoi – et celles visées par l'art. 83 LEI, dont l'examen du cas déterminera précisément si elles doivent ou peuvent être mises au bénéfice d'une admission provisoire. On ne saurait partir du principe que la question de l'exigibilité du retour dans le pays de provenance ne se pose par définition pas s'agissant d'une personne admise provisoirement. Même si le cas d'espèce n'est pas exemplatif à ce titre, puisqu'aucun élément du dossier permet de considérer que le recourant pourrait prochainement faire l'objet d'une procédure relative à la levée de son admission provisoire, il ne peut pas pour autant être totalement exclu qu'une telle procédure soit intentée un jour, compte tenu des motifs pour lesquels il a été admis provisoirement en Suisse (ATAF C-1136/2013 du 24 septembre 2013 consid. 6.3.2).

2.1.3 Sous l'angle étroit de la protection de la vie privée, l'art. 8 CEDH ouvre le droit à une autorisation de séjour, mais à des conditions restrictives, l'étranger devant établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire (ATF 130 II 281 consid. 3.2.1). Lorsque l'étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l'idée que les liens sociaux qu'il y a développés sont suffisamment étroits pour qu'il bénéficie d'un droit au respect de sa vie privée. Lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l'étranger fait preuve d'une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l'autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266). Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance ne sont pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3).

Selon la jurisprudence, un étranger peut, en fonction des circonstances, se prévaloir du droit au respect de sa vie familiale garanti par l'art. 8 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) pour s'opposer à une éventuelle séparation de sa famille, à condition qu'il entretienne une relation étroite et effective avec un membre de celle-ci ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 137 I 284 consid. 1.3 ; 136 II 177 consid. 1.2). Les relations visées concernent en premier lieu la famille dite nucléaire, c'est-à-dire la communauté formée par les parents et leurs enfants mineurs (ATF 140 I 77 consid. 5.2 ; 137 I 113 consid. 6.1).

L’examen de la proportionnalité de la mesure, imposé par l’art. 96 LEI, se confond avec celui qui est prévu à l’art. 8 § 2 CEDH (ATF 139 I 31 consid. 2.3.2 ; 139 I 145 consid. 2.2).

2.1.4 Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

2.1.5 L'autorité cantonale compétente dispose d'un large pouvoir d'appréciation, l'étranger ne bénéficiant pas d'un droit de séjour en Suisse fondé sur l'art. 84 al. 5 LEI (arrêts du Tribunal fédéral 2C_276/2017 du 4 avril 2017 consid. 2.1 ; 2D_67/2015 du 3 novembre 2015 consid. 3.2). Les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son intégration (art. 96 al. 1 LEI).

2.1.6 À teneur de l'art. 1 al. 1 de la Convention relative au statut des apatrides, conclue à New-York le 28 septembre 1954 et entrée en vigueur, pour la Suisse, le 1er octobre 1972 (Convention relative au statut des apatrides - RS 0.142.40), le terme « apatride » désigne une personne qu'aucun État ne considère comme son ressortissant par application de sa législation.

2.1.7 Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, par apatrides, il faut entendre les personnes qui, sans intervention de leur part, ont été privées de leur nationalité et n'ont aucune possibilité de la recouvrer. Cette convention ne s'applique qu'aux apatrides de jure, à savoir aux personnes qui ne possèdent formellement pas de nationalité, à l'exclusion des apatrides de facto qui, sans avoir été privés ou déchus de leur nationalité, ne sont plus reconnus par leur pays d'origine et ne peuvent faire appel à sa protection (arrêt du Tribunal fédéral 2C_661/2015 du 12 novembre 2015 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral [TAF] ATAF/2014/5 consid. 4.1 ; C-2135/2014 du 9 février 2016 consid. 3.2 et 3.3).

Les autorités administratives suisses ne reconnaissent pas le statut d'apatride au sens de la Convention relative au statut des apatrides aux personnes qui se laissent sciemment déchoir de leur nationalité ou qui ne font pas tout ce qui peut être attendu d'elles pour la conserver ou la regagner. La communauté internationale s'efforce en effet depuis longtemps de réduire à un minimum les cas d’apatridie. La Convention relative au statut des apatrides sert au premier chef à aider les personnes défavorisées par le sort et qui, sans législation topique, seraient dans la détresse. Elle n'a pas pour but de permettre à toute personne qui le désire de bénéficier du statut d'apatride qui est, à certains égards, plus favorable que celui accordé à d'autres étrangers. Reconnaître ainsi la qualité d'apatride à tout individu qui se laisserait déchoir de sa nationalité pour des raisons de convenance personnelle contreviendrait au but poursuivi par la communauté internationale. Cela équivaudrait, en outre, à favoriser un comportement abusif (arrêts du Tribunal fédéral 2C_661/2015 du 12 novembre 2015 consid. 3.1 et 2C_621/2011 du 6 décembre 2011 consid. 4.2 ; l'arrêt du TAF F-584/2016 du 25 janvier 2018 consid. 3.2).

C’est ainsi que la jurisprudence se montre exigeante au sujet des démarches pouvant être attendues d’un candidat à la reconnaissance de l’apatridie pour établir que sa nationalité ne peut être obtenue. Le Tribunal administratif fédéral a par exemple confirmé le refus de reconnaissance du statut d’apatride dans le cas d’un étranger qui n’avait pas accompli toutes les démarches en vue d’obtenir la nationalité arménienne (ATAF F-6008/2019 du 7 octobre 2019 consid. 4).

2.2 En l’espèce, la TAPI a retenu que l’absence d’intégration sociale du recourant ne pouvait s’expliquer qu’en partie par ses problèmes de santé. Aucun élément ne s’opposait catégoriquement à son retour en B______, si ce n’était sa situation sociale. La problématique médicale ne pouvait à elle seule fonder l’octroi d’une autorisation de séjour. Le recourant ne nécessitait pas une prise en charge permanente qui le placerait dans la dépendance d’un membre de sa famille. La longue durée de son séjour en Suisse s’était faite en majorité au bénéfice d’une tolérance. Son intégration ne pouvait être qualifiée de bonne, compte tenu de sa dépendance à l’aide sociale, des condamnations pénales, des dettes et des actes de défaut de biens, et ce même si une partie des éléments pouvait être mis en lien avec sa situation médicale.

Le recourant fait valoir qu’il est éligible à une rente de l’AI et à des prestations complémentaires, dont l’octroi mettra fin à la dépendance à l’aide sociale, et que son curateur a formé une demande le 25 octobre 2022. Une autorisation de séjour aurait dû lui être délivrée en 2004 déjà, mais l’OCPM n’avait pris aucune décision depuis 16 ans.

Il est âgé de 37 ans et séjourne en Suisse depuis bientôt 26 ans. Il est entré en Suisse à l’âge de 11 ans et a passé dans ce pays une partie de son enfance, son adolescence – soit la période déterminante pour la formation de sa personnalité – ainsi que tout son âge adulte jusqu’à ce jour.

Il a quitté l’B______ à 4 ans pour suivre sa mère en C______. Dans ce pays, celle-ci a souffert de troubles dans sa santé psychique et a été hospitalisée. Sa grand-mère, qui vivait en C______, n’a pu l’accueillir. Son grand-père est venu le chercher depuis la Suisse pour le prendre en charge. Toutefois, l’épouse de celui-ci n’a pas toléré sa présence au domicile, de sorte qu’il a été placé en foyer. Sa mère est alors venue d’C______ pour s’occuper de lui, puis a disparu avec lui à la fin de l’année 1993. Une curatelle a été instituée en sa faveur dès 1997 et jusqu’à sa majorité et il a été placé en foyer. Lorsque l’asile lui a été refusé, en 2000, le SEM a relevé que qu’aucun proche n’était ni susceptible ni disposé à le prendre en charge dans son pays d’origine ou en C______, et que sa mère n’était pas apte à s’occuper de lui. En 2004, alors qu’il n’était pas encore majeur, il est devenu père, et la relation avec son enfant et la mère de celui-ci a traversé de grandes turbulences. Il est ainsi établi, et personne ne le conteste, que le recourant a connu une enfance et une jeunesse passablement chaotiques, émaillées de grandes difficultés et de troubles dont la responsabilité ne peut lui être imputée.

Sa santé psychique s’est progressivement détériorée. Il a souffert dès l’âge de 12 ans de problèmes d’abus de substances. Il n’a vraisemblablement pas bénéficié, des années durant, d’un suivi médical adapté. Ses médecins attestent qu’il souffre de troubles psychiques chroniques et incapacitants qui ne s’amélioreront pas avec le temps et qui justifient l’octroi d’une rente AI.

Au plan professionnel, il n’a pas pu achever de formation et ses tentatives répétées de travailler jusqu’en 2007 puis de se réinsérer ou d’accomplir des activités bénévoles jusqu’en 2009 se sont soldées par des échecs, nonobstant les qualités et les capacités que lui avaient reconnues plusieurs employeurs et institutions. Selon la Dre C______, il était dès l’adolescence incapable d’accomplir une activité professionnelle en raison de ses troubles psychiques. Il ne peut ainsi être conclu avec l’OCPM et le TAPI qu’il serait en partie responsable de son défaut d’intégration professionnelle. La chambre de céans retiendra que l’échec de son intégration professionnelle ne lui est pas imputable.

Au plan social, durant la même période, ses tentatives de vivre avec son enfant et la mère de celui-ci, puis avec sa propre mère, ont échoué. Il ressort du dossier que le recourant était encore enthousiaste et volontaire à sa majorité, et désireux de travailler, de se marier et de s’occuper de sa fille, ce qu’avaient reconnu des employeurs ainsi que le SPMi. Ses troubles psychiques semblent toutefois avoir eu raison par la suite de sa volonté, ainsi qu’il ressort des explications du Dr R______. Le recourant s’est peu à peu complètement isolé socialement et vit seul depuis des années. Après qu’un signalement lui fut parvenu tardivement, soit en mai 2021, le TPAE a prononcé une curatelle d’assistance et a réduit en conséquence son autonomie juridique. La chambre de céans retiendra que le défaut d’intégration sociale n’est pas imputable au recourant.

Le suivi médical et la curatelle semblent avoir permis une stabilisation de la santé du recourant et une amélioration de son autonomie.

Le recourant n’a pas toujours été dépendant de l’hospice et sa dépendance continue, que le TAPI fait remonter à 2016, résulte de ses troubles psychiques. Il rend cependant vraisemblable qu’il pourrait à terme, compte tenu de la durée habituelle d’une procédure d’invalidité, bénéficier de prestations de l’AI et de prestations complémentaires qui pourraient mettre fin à sa dépendance de l’aide sociale. Au moment où le TAPI a statué, la demande AI n’avait pas encore été déposée.

Les poursuites et les actes de défaut de biens du recourant, pour des totaux de CHF 1'700.- et CHF 15'705.-, ne sont pas particulièrement élevés si l’on tient compte de la longue période durant laquelle sa situation sociale s’est dégradée.

Le recourant a, certes, été condamné à plusieurs reprises, pour violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires et obtention frauduleuse d’une prestation, pour lésions corporelles simples et menaces, pour appropriation illégitime et infraction à l’art. 19a ch. 1 LStup, pour lésions corporelles simples et violation des art. 19 al. 1 et 19a LStup, pour escroquerie, recel et violation des art. 19 al. 1 et 19a LStup, pour appropriation illégitime et conduite sous retrait, refus ou interdiction d’utilisation du permis de conduire, pour conduite en état d’ébriété avec un taux d’alcool qualifié, vol d’usage d’un véhicule automobile, conduite sans permis de conduire et infraction à l’art. 115 al. 1 let. b LEI. Il ressort toutefois du certificat de sa psychiatre que ses démêlés avec la justice pénale sont en lien avec l’apparition de troubles psychiques dès son jeune âge et la détérioration progressive de son état de santé, ce que pourrait corroborer la répétition d’infractions à la LStup ainsi que la conduite en état d’ébriété. Enfin, la dernière condamnation remonte à six ans environ et le recourant ne constitue pas ou plus une menace pour l’ordre public.

Le recourant ne parle pas B______, n’est jamais retourné en B______ depuis trente ans et n’a aucune parenté ni aucune connaissance dans ce pays. Il est établi qu’il ne possède pas la nationalité B______. L’absence de citoyenneté B______ du recourant constitue actuellement un obstacle dirimant à son retour en B______, de sorte qu’il ne peut être simplement constaté qu’aucun élément hormis sa situation sociale ne s’opposerait catégoriquement à son retour dans ce pays (ACEDH Hoti c. Croatie, n° 63311/14 du 16 juillet 2018 § 138).

La question de savoir si, sous l’angle de la reconnaissance de l’apatridie, il pourrait être exigé de lui qu’il accomplisse des procédures pour reprendre la citoyenneté B______ est exorbitante au présent litige. La chambre de céans observe à ce propos qu’il ne peut très vraisemblablement pas être reproché au recourant d’avoir renoncé à sa nationalité B______ du moment qu’il l’a perdue par décret du 20 juin1991, soit à l’âge de cinq ans. En toute hypothèse, son état de santé, sa situation sociale et son défaut de compétences linguistiques et de relais dans le pays paraissent rendre illusoire toute démarche en vue d’obtenir la citoyenneté B______ ou même un droit de séjour en B______.

Le grand-père du recourant est décédé. Les relations du recourant avec sa fille et la mère de celle-ci ont souffert de la dégradation de sa santé psychique. La seule parente – et apparemment la seule personne – sur laquelle celui-ci puisse compter est sa mère, ce que le TAPI a retenu à bon droit. Le recourant a suivi durant sa minorité le statut de sa mère, également apatride, mais celle-ci a obtenu par la suite la citoyenneté suisse.

S’agissant enfin de la durée du séjour du recourant en Suisse, soit bientôt 26 ans, le TAPI a relevé qu’elle était certes supérieure à dix ans mais que le séjour s’était déroulé au bénéfice d’une tolérance suite au dépôt d’une demande d’autorisation de séjour. Or, le recourant a formé une demande d’autorisation de séjour le 19 mars 2005. Jusque-là, il avait séjourné en Suisse, depuis son entrée en août 1997, au bénéfice d’un livret N valable jusqu’au 17 mars 2000, puis, dès le 12 mai 2000, d’un livret F, soit une admission provisoire, dont la validité avait été régulièrement renouvelée jusqu’au 12 mai 2005. À partir de 2005, et parce qu’il était devenu père d’une enfant suisse, l’OCPM a instruit une demande d’autorisation de séjour. Il ressort du dossier que jusqu’en 2008 en tout cas, et en dépit d’une situation instable, si le projet de mariage avait été abandonné, le recourant tentait de travailler, vivait régulièrement avec la mère de son enfant et entretenait avec celui-ci une relation suivie et investie. C’est ainsi non sans raison que celui-ci fait valoir qu’il aurait pu remplir déjà à l’époque les conditions à la délivrance d’une autorisation de séjour.

Il n’est cependant pas nécessaire de se prononcer rétrospectivement sur l’existence d’un tel droit. En effet, l’OCPM n’a finalement statué que le 28 avril 2021, soit plus de seize ans après le dépôt de la demande, alors même que le dossier contient un projet de décision de refus daté du 18 novembre 2009, non signé et qui n’a apparemment jamais été notifié, et que le recourant avait de son côté relancé l’OCPM en 2015.

La durée particulièrement longue de la procédure d’instruction ne saurait être opposée au recourant avec l’effet qu’il n’aurait durant celle-ci bénéficié que d’une tolérance, laquelle relativiserait la durée totale de son séjour en Suisse. L’importance de cette durée, en chiffres absolus et à l’échelle de l’existence du recourant, a en effet maintenu celui-ci dans une incertitude sur son statut légal et a produit des conséquences négatives sur sa vie privée sous l’angle de l’art. 8 CEDH (ACEDH Sudita Keita v. Hongrie, n° 43215/15 du 12 août 2020 § 34).

La chambre de céans parvient ainsi à la conclusion qu’au terme de bientôt 26 ans de séjour, le recourant s’est en réalité durablement et profondément intégré en Suisse, où il a ses seuls liens familiaux et sociaux, même si ceux-ci sont ténus, et où sa prise en charge médicale, sociale et assécurologique est assurée, de sorte qu’une réintégration en B______ constituerait un déracinement et ne pourrait être exigée.

Ainsi, au vu de l’ensemble des éléments développés ci-avant, la chambre de céans ne voit pas quel intérêt public de droit des étrangers serait compromis en octroyant au recourant une autorisation de séjour, dès lors que celui-ci demeurerait, comme l’admet l’OCPM, en toute hypothèse au bénéfice d'une admission provisoire et pourrait ainsi rester sur le territoire suisse, sans qu'un renvoi apparaisse envisageable, même à long terme, compte tenu que sa santé est durablement dégradée et que sa prise en charge n’apparait pas envisageable en B______.

Il suit de là que l'intimé a abusé de son pouvoir d'appréciation en refusant de reconnaître en l'espèce un cas individuel d'extrême gravité. Le recours sera ainsi admis et le jugement querellé ainsi que la décision de l'OCPM seront annulés. Les critères des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 al. 1 OASA impliquant une situation représentant un cas individuel d'extrême gravité étant remplis, le dossier sera renvoyé à l'OCPM pour suite de la procédure (art. 99 al. 1 et 2 LEI ; art. 85 al. 1 OASA ; art. 5 let. d de l'ordonnance du département fédéral de justice et police relative aux autorisations soumises à la procédure d'approbation et aux décisions préalables dans le domaine du droit des étrangers du 13 août 2015 (RS 142.201.1).

3.             Vu l'issue du litige, il ne sera pas perçu d'émolument et une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée au recourant (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 décembre 2022 par M. A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 novembre 2022 ;

au fond :

l’admet ;

annule le jugement précité ainsi que la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 28 avril 2021 ;

renvoie la cause à l'office cantonal de la population et des migrations pour nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à M. A______, à la charge de l’État de Genève (OCPM) ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Gian Luigi Berardi, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mmes Payot Zen-Ruffinen et Lauber, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.