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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2550/2022

ATA/918/2022 du 13.09.2022 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2550/2022-FORMA ATA/918/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 septembre 2022

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______

contre


DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE



EN FAIT

1) Madame A______, née le ______ 2003, a entrepris en août 2019 une formation à l’école de culture générale (ci-après : ECG) B______.

Elle a été promue au terme de la première année, avec une moyenne générale de 4,5, une seule moyenne insuffisante en français (3,8) et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 0,2 et a entrepris à la rentrée d’août 2020 la deuxième année à l’ECG C______.

Selon le bulletin scolaire annuel du 22 juin 2021, Mme A______ avait obtenu une moyenne générale de 4,1, mais cinq moyennes de discipline insuffisantes, en mathématiques (2,3), en allemand (3,9), en anglais (3,2), en biologie (3,9) et en éducation physique (3,7), et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 3,0. Elle était non promue mais le redoublement lui avait été accordé et elle a entrepris à la rentrée d’août 2021 sa seconde deuxième année à l’ECG.

2) Au cours de l’année scolaire 2021-2022, Mme A______ a connu des problèmes de santé et bénéficié d’aménagements.

Le 1er septembre 2021, ses enseignants ont été informés qu’en raison de crises d’angoisse, Mme A______, dont la situation était suivie par la direction et le réseau médical, psychologique et social (ci-après : MPS), était autorisée à sortir de la classe à tout moment et souhaitait en telle hypothèse que dans la mesure du possible la porte de la classe restât ouverte durant le cours.

Le 28 septembre 2021, Madame D______, psychologue psychothérapeute FSP, a attesté qu’elle suivait Mme A______ en raison d’un trouble anxieux important qui pouvait avoir des répercussions sur sa vie scolaire. Sa patiente peinait énormément à se confronter au regard des autres, ce qui était particulièrement anxiogène dans un environnement scolaire (« professeur, exposé devant la classe, répondre devant la classe à une question, etc. »). Elle sollicitait en sa faveur un aménagement exceptionnel lui permettant d’éviter dans la mesure du possible ces situations de stress.

Le 15 novembre 2021, la Docteure E______. spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a dispensé Mme A______ des cours d’environnement et de biologie la semaine du 12 et 13 novembre 2021 pour raisons médicales.

Le 10 décembre 2021, Mme A______ a été autorisée à suivre les cours de biologie et d’environnement à distance, via une plateforme de travail, tout en faisant ses épreuves en classe. La mesure d’aménagement exceptionnel était autorisée jusqu’à la fin du premier semestre et serait réévaluée au second semestre.

Le 11 décembre 2021, Mme A______ a été autorisée à se présenter au rattrapage d’une épreuve de génétique le 15 décembre 2021. Elle était invitée à se documenter via des liens fournis par son enseignant, lequel se tenait à sa disposition à l’école en cas de difficultés.

3) Le 23 février 2022, l’ECG a informé Madame F______, mère de Mme A______, que sa fille était en situation de non promotion, ses notes étant insuffisantes dans plusieurs disciplines, et a invité celle-ci à fournir les efforts nécessaires qui lui permettraient de réussir son année scolaire et d’être promue. Le redoublement était conditionné au parcours scolaire. Si Mme A______ ne pouvait y prétendre, elle devait initier une démarche de réorientation sans tarder.

4) Le 17 mars 2022, Monsieur A______, père de Mme A______, a demandé à l’ECG que soit exceptionnellement validée pour l’année en cours sa note de biologie de l’année précédente. Sa fille traversait une crise et cela lui permettrait, moyennant un effort important dans d’autres matières, de valider son année. Il la savait extrêmement motivée à cette idée et très heureuse dans ce qu’elle préparait à l’ECG.

5) Le 21 mars 2022, Mme D______ a attesté que le trouble anxieux de Mme A______ avait des répercussions sur son parcours scolaire. La Dre E______ lui avait proposé un traitement médicamenteux, mais l’anxiété sociale de Mme A______ l’avait empêchée de se rendre au cours de biologie. Elle demandait que la note de biologie de l’année précédente soit validée en faveur de sa patiente pour l’année en cours.

6) Le 22 mars 2022, Mme F______ a également saisi l’ECG d’une demande de validation exceptionnelle de la note de biologie de l’année précédente en faveur de sa fille pour l’année en cours. Celle-ci traversait une période difficile depuis plus d’un an. Malgré le suivi régulier avec la psychiatre et la psychothérapeute pour soigner les crises d’angoisse et les solutions mises en place par l’école, et bien qu’elles fussent sur la bonne voie, ses notes restaient insuffisantes et son avenir dans l’école était compromis.

7) Par courrier du 4 avril 2022 à Mme F______, l’ECG a rejeté la demande. La non-promotion de Mme A______ ne reposait pas que sur la biologie : trois moyennes étaient insuffisantes avec un écart négatif cumulé de 2,2. La situation était problématique s’agissant d’une élève en redoublement et permettait d’émettre des réserves quant au pronostic de réussite en fin d’année scolaire. La moyenne de biologie obtenue en juin 2021 était de 3,8 et n’apporterait pas de solution à la non-promotion. Le conseil de direction estimait qu’il était dans l’intérêt de Mme A______ de songer à une réorientation vers une autre voie de formation.

8) Selon un compte rendu d’entretien du 7 avril 2022, Mme A______ s’est vue diagnostiquer un trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité et impulsivité marquée aussi dans la régulation des émotions.

Les observations cliniques relevaient la difficulté à maintenir son attention sur une tâche, la rapide distraction interne et externe, des erreurs d’étourderie dans le travail scolaire, de la difficulté à terminer les tâches, des retards réguliers, une gestion du temps difficile avec procrastination, notamment dans les devoirs scolaires, une perte régulière des affaires d’école, un besoin de stimulation constante, une impulsivité verbale très marquée, un manque de tact et une grande impatience.

9) Le 19 mai 2022, l’ECG a informé Mme F______ que sa fille cumulait quarante-cinq heures d’absences non excusées et aurait pour ce motif dû être exclue de la session d’épreuves de fin d’année. Elle pourrait toutefois, considérant la proximité de la fin des cours, se présenter « à titre tout à fait exceptionnel » à celle-ci. L’absentéisme amenait à une perte des connaissances à acquérir pour réussir l’année et pourrait influer sur les décisions prises en fin d’année en cas de demande de dérogation ou de redoublement.

10) Il résulte d’une « attestation élève à besoins spécifiques » que Mme A______ s’est vu octroyer des aménagements sous forme d’un tiers environ de temps supplémentaire pour les examens écrits et pour les examens oraux de 2ème année, et d’un supplément de temps de 50 % pour les examens oraux de certificat de 3ème année.

11) Selon le bulletin scolaire annuel du 20 juin 2022, Mme A______ avait obtenu une moyenne générale de 4.5, mais avec trois moyennes de discipline insuffisantes, en mathématiques (3.5), en allemand (3.5) et en biologie (2.9) et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 2.1.

Elle était non promue au terme d’une année redoublée et devait quitter l’école comme le voulait le règlement. Les enseignants relevaient néanmoins sa grande persévérance malgré ses difficultés personnelles et saluaient sa progression dans de nombreuses disciplines et ses compétences indéniables en disciplines musicales.

12) Le 20 juin 2022 également, l’ECG a transmis à M. A______, à sa demande, le courrier qui aurait dû lui parvenir dans le courant du mois d’avril 2022 et qui répondait à sa demande de faire valider pour l’année en cours la moyenne de biologie obtenue par sa fille l’année précédente, le priant de bien vouloir excuser ce manquement.

13) Le 21 juin 2022, M. A______ a accusé réception de cette communication tardive, contre laquelle il ne pouvait plus recourir, si le recours était possible.

Les faits entre-temps connus démontraient qu’une prise en considération de la demande aurait suffi à sa fille pour valider son année scolaire.

Si la demande pouvait être réévaluée, s’agissant d’un malheureux concours de circonstances qui ne leur aurait pas permis de recourir dans les délais, il serait disposé à le faire.

14) Le 22 juin 2022, Mme D______ a établi une attestation.

Elle suivait Mme A______ depuis une peu plus d’un an pour une symptomatologie anxio-dépressive importante et invalidante, se traduisant notamment par une peur massive du jugement des autres, de la claustrophobie, des moments de grande tristesse et une fragilité de son estime d’elle-même, soit autant de symptômes ayant un impact sur sa scolarité.

Un antidépresseur avait pu être introduit dans le traitement, lequel avait pu être suspendu.

Les notes de Mme A______ attestaient de son engagement. Elle avait remonté toutes ses moyennes excepté la biologie (2,9), laquelle empêchait sa promotion. Malgré tous ses efforts, des attaques de panique et des crises d’angoisse l’avaient empêchée de suivre sereinement cet enseignement.

Elle comprenait bien qu’avec un écart de 0,6 Mme A______ ne remplissait pas les conditions pour être promue, mais au regard de ses excellents résultats de fin d’année, et sachant qu’il n’y aurait plus de biologie en troisième année, elle appuyait son recours.

15) Le 26 juin 2022, Mme A______ a formé un « recours » et une demande de dérogation exceptionnelle auprès de la direction générale de l’enseignement secondaire II (ci-après : DGES II) du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP) contre sa non-promotion.

Elle savait qu’en sa qualité de redoublante elle n’avait droit « à rien ». Cependant, ses crises avaient été un obstacle durant l’année, particulièrement au cours de biologie, où elle ne parvenait pas à retourner. Sa demande de validation de sa note de biologie de l’année précédente avait été refusée. Malgré ce refus, elle n’avait pas lâché et avait continué de se battre pour passer l’année. Elle avait essayé de retourner le plus possible en biologie pour rattraper les évaluations. Sa moyenne était passée de 2,6 au premier semestre à 3,2 au deuxième. Elle avait eu 3,5 en histoire au premier semestre mais 5,6 au deuxième. Ses angoisses lui avaient également posé problème pour le cours d’environnement, auquel elle ne parvenait pas à se rendre, mais elle avait tout donné au deuxième semestre et fait passer sa moyenne de 3,8 (premier semestre) à 4,5. Elle avait eu 2,5 en maths au premier semestre, 3,5 au deuxième et 4,5. à l’examen final, pour lequel elle avait vraiment beaucoup travaillé. Sur sept notes, une seule était en dessous de la moyenne, à 3,5.

Elle était déterminée à réussir l’ECG pour devenir enseignante de musique dans l’enseignement secondaire II. Si sa moyenne de biologie de l’année précédente avait été comptée, elle serait promue avec un écart de 1,2 à la moyenne, soit dans la marge admise de 1,5.

Sa situation psychologique était allée en s’améliorant vers la fin de l’année et elle sentait qu’elle pouvait à nouveau penser pleinement à ses études.

16) Par décision du 14 juillet 2022, la DGES II a rejeté la demande de dérogation de Mme A______.

Ayant redoublé la deuxième année, elle ne pouvait pas bénéficier réglementairement d’une dérogation.

Une dérogation n’était accordée que si l’élève obtenait des résultats se rapprochant fortement des normes de promotion et qu’un pronostic de réussite favorable pouvait être établi. Or, sa situation ne se rapprochait pas fortement des normes de promotion. Entre le premier et le deuxième semestre, elle avait certes progressé dans six disciplines, mais régressé dans cinq autres. Elle avait bénéficié d’aménagements pour contenir ses crises d’angoisse, sans que ceux-ci ne lui permettent d’être promue en troisième année. Elle avait cumulé quarante-quatre heures d’absences non excusées. Ces éléments mettaient en évidence des fragilités et des lacunes trop importantes et ne permettaient pas de conclure à un pronostic favorable quant à la réussite de la troisième année.

Elle était contrainte de quitter l’ECG.

17) Par acte remis à la poste le 12 août 2022, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation et à l’admission de sa requête de dérogation exceptionnelle pour accomplir la troisième année d’ECG. Subsidiairement, le dossier devait être renvoyé au DIP pour nouvelle décision. Préalablement, le DIP devait être enjoint de produire l’intégralité de son dossier scolaire et les parties ainsi que des témoins (son père, sa mère, la Dre E______ et le directeur de l’ECG, Monsieur G______) devaient être entendus. L’effet suspensif devait être restitué au recours.

Ses demandes de validation exceptionnelle de sa note de biologie de l’année précédente étaient restées sans réponse par courrier officiel. Ses parents et elle avaient été informés oralement de la décision par le directeur de l’ECG. Sa mère avait informé ce dernier qu’elle recourrait contre cette décision, et celui-ci lui avait conseillé d’attendre une réponse officielle pour ce faire.

Au terme de l’année scolaire, cette demande apparaissait sensée et son admission lui aurait permis d’être promue par tolérance avec une somme d’écarts moyens admissible de 1,2.

Un élève de sa volée avait vu sa demande de dérogation admise alors qu’il présentait le même écart négatif. Elle produisait une copie caviardée de la décision.

C’étaient les notes de biologie et d’allemand qui avaient « impacté » sa moyenne alors même que son orientation était arts-musique. Malgré ses problèmes de santé, elle avait consenti des efforts considérables, et obtenu une moyenne d’examens de 4,7 aux examens finaux et une seule note en-dessous de 4, soit un 3,5 au deuxième semestre.

Elle avait pris le temps de se soigner. Elle avait commencé à surmonter ses difficultés et vivait de manière plus « pérenne » et linéaire. Sa motivation était intacte, elle était passionnée de musique et souhaitait terminer sa formation. Elle était entourée par des professionnels de la santé et par sa famille. Elle demanderait un répétiteur pour la philosophie et les mathématiques en troisième année.

18) Le 23 août 2022, le DIP a conclu au rejet du recours.

Il s’était prononcé le 4 avril 2022 sur la demande de validation et avait transmis copie de ce courrier au père de la recourante le 20 juin 2022. La recourante avait bénéficié de mesures d’aménagement et pu suivre les cours de biologie à distance. Elle s’était présentée aux examens et avait obtenu des notes insuffisantes. La DGES II ne pouvait invalider une note au profit d’une note obtenue l’année précédente au prétexte qu’elle lui était plus favorable.

Redoublante, la recourante n’avait pas droit à une dérogation. Elle ne remplissait par ailleurs pas les conditions d’une dérogation. L’écart négatif de 2,1 était éloigné du seuil de tolérance. Les résultats ne permettaient pas de poser un pronostic de réussite en troisième année, en raison des importantes lacunes de la recourante.

L’élève auquel se référait la recourante était promu à l’année, soit avant les examens finaux, avait dû faire face à des événements extraordinaires et inattendus juste avant les examens finaux et n’avait pas bénéficié d’aménagements ni d’aides.

19) Le 1er septembre 2022, Mme A______ a persisté dans ses conclusions.

La décision du 4 avril 2022 n’avait pas été communiquée par voie postale, alors qu’elle avait l’intention de recourir contre elle. Si elle avait pu recourir, cela lui aurait permis d’être promue. La décision avait été adressée à sa mère et non à elle-même, alors qu’elle était majeure.

20) Le 6 septembre 2022, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 40 du règlement de l’enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 - REST - C 1 10.31 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La recourante conclut préalablement à son audition, celle de ses parents, du directeur de l’ECG et de sa psychiatre, ainsi qu’à la production par le DIP de l’intégralité de son dossier scolaire.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). La procédure administrative est en principe écrite, toutefois si le règlement et la nature de l'affaire le requièrent, l'autorité peut procéder oralement (art. 18 LPA). Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit à une audition orale (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_51/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1 ; ATA/1173/2020 du 24 novembre 2020 consid. 3a).

b. En l’espèce, la recourante a eu l’occasion de s’exprimer par écrit devant la DGES II et le chambre de céans et de produire toute pièce utile, dont la correspondance de ses parents et une attestation de sa psychiatre. Elle n’indique pas quels éléments supplémentaires les auditions apporteraient à la procédure. Les pièces versées au dossier apparaissent par ailleurs suffisantes pour la solution du litige, sans qu’il y ait lieu d’ordonner la production du dossier de la recourante, étant observé que cette dernière n’indique pas quels éléments pertinents s’y trouveraient.

Il ne sera pas donné suite aux actes d’instruction.

3) La recourante se plaint d’une violation de son droit d’être entendue, faute pour l’ECG de lui avoir notifié la décision du 4 avril 2022 refusant une dérogation relative à la moyenne de biologie.

a. Le droit d'être entendu comprend le droit pour l'intéressé de prendre connaissance du dossier, de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique et de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat (ATF 143 III 65 consid. 3.2 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_42/2019 du 25 mars 2020 consid. 3.1). Il constitue une garantie de nature formelle dont la violation doit en principe entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances du recourant sur le fond. Selon la jurisprudence, une telle violation peut néanmoins être considérée comme réparée lorsque l'intéressé jouit de la possibilité de s'exprimer librement devant une autorité de recours disposant du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure et pouvant ainsi contrôler librement l'état de fait et les considérations juridiques de la décision attaquée (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; 142 II 218 consid. 2.8.1 ; 137 I 195 consid. 2.3.2). Une telle réparation doit, toutefois, rester l'exception et n'est admissible, en principe, que dans l'hypothèse d'une atteinte aux droits procéduraux de la partie lésée qui n'est pas particulièrement grave (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; 135 I 276 consid. 2.6.1). Elle peut également se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure, ce qui serait incompatible avec l'intérêt de la partie concernée à ce que sa cause soit tranchée dans un délai raisonnable (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; 137 I 195 consid. 2.3.2 ; 136 V 117 consid. 4.2.2.2).

b. En l’espèce, la recourante affirme dans son recours n’avoir eu connaissance du refus d’avril 2022 que par téléphone. Le DIP mentionne un envoi postal du 4 avril 2022 à la mère de la recourante puis un envoi du 20 juin 2022 au père de celle-ci. Dans sa réclamation du 26 juin 2022, la recourante indique que sa demande lui avait été refusée, la direction de l’école pensant que valider sa note en biologie obtenue en juin 2021 ne lui permettrait pas d’obtenir une promotion en fin d’année scolaire 2022.

La question de savoir si le courrier du 4 avril 2022 a bien été reçu par la mère de la recourante et s’il constitue une décision souffrira de rester indécise. En effet, il était loisible à la recourante de réclamer une décision écrite en avril ou en mai 2022 si elle ne recevait aucun courrier après l’entretien téléphonique, et quoi qu’il en soit le DIP a adressé à son père le 20 juin 2022 le refus motivé du 4 avril 2022, que la recourante a eu l’occasion de critiquer aussi bien dans son opposition que dans son recours devant la chambre de céans. Il sera vu plus loin que la décision du 4 avril 2022 est fondée, si bien qu’un éventuel recours formé en avril 2022 n’aurait pas eu d’influence sur la promotion de la recourante.

Le grief sera écarté.

4) Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n’ont pas la compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée dans le cas d’espèce.

5) a. L’art. 29 REST indique que les conditions de promotion sont déterminées par les règlements de chaque filière (al. 1). Il précise que l’orientation des élèves constitue une part importante de la mission de l’école et, dans cette optique, lors de l’analyse de l’octroi d’une promotion par dérogation ou d’un redoublement ou lors d’une réorientation, il doit être tenu compte des aptitudes de l’élève à mener à bien son projet de formation (al. 2). Sont également prises en considération les circonstances ayant entraîné l’échec, les progrès accomplis, la fréquentation régulière des cours et le comportement de l’élève (al. 3).

b. Aux termes de l’art. 27 du règlement relatif à l’école de culture générale du 29 juin 2016 (RECG – C 1 10.70), est promu de 2ème en 3ème année, l’élève qui obtient la note annuelle de 4,0 au moins pour chacune des disciplines communes d’enseignement décrites à l'art. 21 et pour chacune des disciplines de l'option spécifique préprofessionnelle choisie décrites aux art. 22 à 25 (al. 1).

Est promu par tolérance l’élève dont les résultats satisfont aux conditions suivantes : a) une moyenne générale égale ou supérieure à 4,0 pour l'ensemble des disciplines décrites aux art. 21 à 25 ; b) au maximum trois notes inférieures à 4,0 ; c) la somme des écarts à 4,0 des notes insuffisantes ne doit pas dépasser 1,5 (art. 27 al. 2 RECG).

Restent réservées les dispositions concernant la promotion par dérogation, définies à l'art. 30 REST (art. 20 al. 3 RECG).

c. La direction d’un établissement, sur proposition de la conférence des maîtres de la classe ou du groupe ou, dans des cas exceptionnels, de sa propre initiative, peut accorder la promotion à des élèves qui ne remplissent pas complètement les conditions de promotion et qui semblent présenter les aptitudes nécessaires pour suivre l’enseignement de l’année suivante avec succès (art. 30 al. 1 REST). Un élève ne peut pas bénéficier de cette mesure plus d'une fois par filière (art. 30 al. 2 REST). Un élève ne peut bénéficier d'une dérogation à l'issue d'une année répétée (art. 30 al. 3 REST).

d. La promotion par dérogation, prévue par l’art. 30 al. 1 REST, prévoit deux conditions, la première étant que l’élève ne remplisse pas complètement les conditions de promotion.

Selon la jurisprudence de la chambre de céans, un écart à la moyenne de 1,2 n’est pas de peu d’importance puisqu’il dépasse de 20 % le maximum de l’écart négatif autorisant d’entrer en matière sur une promotion par tolérance (ATA/776/2016 du 13 septembre 2016 concernant l’ancienne version de la disposition non modifiée sur ce point).

La deuxième condition prévue pour l’octroi d’une promotion par dérogation est celle qui concerne les aptitudes que semble avoir l’élève et qui sont nécessaires pour suivre l’enseignement de l’année suivante avec succès en dépit de son échec.

e. Dans ce cadre, l’autorité scolaire bénéfice d’un très large pouvoir d’appréciation, dont la chambre de céans ne censure que l'abus ou l'excès. Ainsi, alors même que l’autorité resterait dans le cadre de ses pouvoirs, quelques principes juridiques les restreignent, dont la violation constitue un abus de ce pouvoir : elle doit exercer sa liberté conformément au droit. Elle doit respecter le but dans lequel un tel pouvoir lui a été conféré, procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d’inégalité de traitement et appliquer le principe de la proportionnalité (ATA/1697/2019 du 19 novembre 2019 consid. 4d et les références citées).

6) a. En l’espèce, la recourante a obtenu en fin de redoublement de sa deuxième année une moyenne générale de 4,5, mais trois moyennes de discipline insuffisantes, en mathématiques (3,5), en allemand (3,5) et en biologie (2,9) ainsi qu’une somme des écarts négatifs à la moyenne de 2,1.

La recourante ne remplit par ailleurs pas les conditions de l’art. 27 al. 2 let. b et c RECG et ne peut pas être promue par tolérance, ses résultats présentant une somme des écarts négatifs à la moyenne de 2.1.

Elle ne conteste pas se trouver en situation d’échec.

Il s’ensuit que la DGES II était fondée à constater celui-ci et à exclure la recourante de l’ECG s’agissant d’un redoublement.

b. La recourante soutient que l’ECG lui a refusé à tort la prise en compte de sa moyenne de biologie de l’année précédente.

Elle ne saurait être suivie. Les résultats de l’année en cours déterminent les capacités réelles et actuelles de l’élève et permettent d’établir un pronostic pour la suite de sa formation. Remplacer la moyenne de l’année par celle, plus favorable, de l’année précédente avec le but de satisfaire à une condition de dérogation compromettrait l’évaluation objective de l’élève.

La recourante a par ailleurs bénéficié de plusieurs aménagements pour l’apprentissage de la biologie, dont elle soutient qu’il aurait particulièrement souffert de ses troubles psychiques.

c. La recourante soutient qu’elle remplirait les conditions d’une promotion par dérogation.

Elle perd de vue que selon l’art. 30 al. 3 REST, un élève ne peut par principe pas bénéficier d'une dérogation à l'issue d'une année répétée.

Cela étant, elle ne remplirait par les deux conditions de la promotion par dérogation. L’ECG pouvait en effet, sans excès ni abus de son pouvoir d’appréciation, inférer des trois moyennes insuffisantes et de l’écart de 2,1, au terme d’un redoublement, ainsi que de la baisse d’autres moyennes que nonobstant les efforts consentis par la recourante et les améliorations dans certaines branches, les facilités accordées et le suivi médico-psychologique mis en place, un pronostic de réussite ne pouvait être établi pour la troisième et dernière année. Par ailleurs, l’ECG pouvait, toujours sans excès ni abus de son pouvoir d’appréciation, considérer que l’écart de 2,1, par ailleurs éloigné de l’écart maximum admissible, ne constituait pas en lui-même un écart minime avec les normes de promotion.

7) La recourante se plaint d’une inégalité de traitement. L’ECG aurait accordé une dérogation à un camarade de volée dans une situation semblable.

a. Une décision ou un arrêté viole le principe de l’égalité de traitement consacré à l’art. 8 al. 1 Cst. lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 142 I 195 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_178/2022 du 16 mars 2022 consid. 5.1).

b. En l’espèce, le DIP a expliqué, sans être contredit par la recourante, que le camarade auquel celle-ci se référait était promu à l’année avant les examens finaux, avait dû faire face à des événements extraordinaires et inattendus juste avant ceux-ci et n’avait bénéficié ni d’aménagements ni d’aides. La copie caviardée de la décision produite par la recourante mentionne une promotion au deuxième semestre avec deux moyennes insuffisantes et un écart négatif de 1.5, et justifie la dérogation par les bons résultats annuels qui auraient permis la promotion en troisième année, et la soudaine hospitalisation du grand-père à la veille des examens finaux dont les résultats étaient insuffisants.

Les situations ne sont ainsi pas semblables.

Le grief sera écarté.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

8) Vu les circonstances particulières, aucun émolument ne sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 août 2022 par Madame A______ contre le la décision du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 14 juillet 2022 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s’il porte sur le résultat d’examens ou d’autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d’exercice d’une profession ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :