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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1118/2022

ATA/809/2022 du 15.08.2022 ( EXPLOI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1118/2022-EXPLOI ATA/809/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 15 août 2022

2ème section

 

dans la cause

 

Mme A______

contre

DÉPARTEMENT DE L'ÉCONOMIE ET DE L'EMPLOI



EN FAIT

1) Par décision du 10 mars 2022, le département de l’économie et de l’emploi (ci-après : DEE) a déclaré irrecevable la réclamation formée par Mme A______ contre la décision qu’il avait rendue le 10 janvier 2022 au sujet de la restitution d’une indemnisation indûment perçue.

La décision du 10 janvier 2022 avait été notifiée à Mme A______ le 12 janvier 2022, de sorte que le délai de trente jours pour former opposition était arrivé à échéance le 11 février 2022 et que sa réclamation, mise à la poste le 16 février 2022, était tardive.

2) Par acte remis à la poste le 7 avril 2022, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation et à ce que le DEE soit invité à examiner sa réclamation.

Elle était en déplacement à l’étranger durant cette période et avait été atteinte par le Covid-19 le 5 janvier 2022. Elle avait dû rester dix jours en quarantaine, conformément aux règles établies par la Confédération. Elle avait souffert d’un Covid long, dont les symptômes, notamment la toux, avaient perduré. Elle n’était sortie de quarantaine que le 18 janvier 2022 et était immédiatement rentrée en Suisse. Elle n’avait trouvé le courrier dans la boîte aux lettres de son institut de beauté que le 20 janvier 2022.

Elle produisait un test PCR du 5 janvier 2022 et des cartes d’embarquement des 31 décembre 2021 et 18 janvier 2022.

3) Le 23 mai 2022, le DEE a conclu au rejet du recours.

La décision avait été notifiée par courrier A+ le 12 janvier 2022 à 10h01 ainsi qu’il ressortait de l’application de suivi des envois de la poste, dont un extrait était produit.

Le courrier de réclamation de Mme A______ portait la date du 11 février 2022, soit le dernier jour du délai de recours, mais avait été expédié par pli recommandé le 16 février 2022. La recourante avait disposé de vingt et un jours depuis son retour en Suisse pour recourir. Elle ne pouvait se prévaloir d’un cas de force majeure.

4) Le 23 juin 2022, Mme A______ a persisté dans ses conclusions.

Elle n’avait pas seulement été retenue à l’étranger mais « touchée par la maladie la plus dangereuse du 22ème siècle », avait eu le Covid et une dépression aiguë. Il était injuste et inhumain de rejeter sa requête. Elle a repris ses arguments à l’appui de l’admission de son recours.

5) Le 24 juin 2022, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Selon l’art. 51 LPA, la réclamation est formée par écrit avec indication des motifs ainsi que des moyens de preuves éventuels (al. 1), elle a effet suspensif (al. 2), peut être formée par celui qui a qualité pour recourir (al. 3) et doit être formée dans les trente jours dès la notification de la décision, les dispositions des art. 62, al. 2 à 5, et 63 étant applicables par analogie (al. 4).

b. Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d’être prolongés (art. 16 al. 1 1ère phr. LPA), restitués ou suspendus, si ce n’est par le législateur lui-même. Celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (SJ 2000 I 22 ; ATA/1240/2019 du 13 août 2019). Le strict respect des délais légaux se justifie pour des raisons d’égalité de traitement et n’est pas constitutif de formalisme excessif (ATF 125 V 65 consid. 1).

c. Les cas de force majeure demeurent réservés (art. 16 al. 1, 2ème phr. LPA). À cet égard, il y a lieu de préciser que tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’activité de l’intéressé et qui s’imposent à lui de façon irrésistible et sans sa faute (SJ 1999 I 119 ; RDAF 1991 p. 45 ; ATA/1595/2017 du 12 décembre 2017 consid. 3 ; ATA/261/2016 du 22 mars 2016). Les conditions pour admettre un empêchement de procéder à temps sont très strictes. Celui-ci peut résulter d’une impossibilité objective ou subjective. L’empêchement doit être de nature telle que le respect des délais aurait impliqué la prise de dispositions que l’on ne peut raisonnablement attendre de la part d’une personne avisée (ATA/1373/2018 du 18 décembre 2018 consid. 8 ; ATA/1595/2017 précité consid. 3).

3) En l’espèce, la recourante ne conteste pas que la décision a été notifiée à l’adresse qu’elle avait indiquée le 12 janvier 2022 et que le délai de trente jours pour former réclamation a expiré le 11 février 2022.

Elle fait valoir qu’elle a souffert du Covid et n’a pu rentrer de Nice que le 18 janvier 2022 et produit un rapport d’analyse du 5 janvier 2022 attestant de son infection par le variant Omicron. Dans sa réplique, elle allègue également une dépression nerveuse « aiguë ».

Elle ne documente toutefois pas sa dépression ni les éventuels effets que
celle-ci et le « covid long », au sujet duquel elle ne mentionne qu’une toux persistante, auraient eu sur sa capacité à accomplir des formalités administratives.

Elle n’a pas fait valoir ces circonstances dans sa réclamation. Le fait que
celle-ci soit datée du 11 février 2022 porte à conclure qu’elle était capable de déployer des arguments et de produire des pièces en temps utile pour contester la décision du DEE. La recourante ne se prononce pas sur cette circonstance relevée par l’intimé et n’explique pas pourquoi elle n’a expédié sa réclamation que le 16 février 2022.

Elle échoue ainsi à établir un cas de force majeure aux conditions strictes posées par la jurisprudence.

Au vu de ce qui précède, le DEE était fondé à constater la tardiveté de sa réclamation et à la déclarer irrecevable.

Mal fondé, le recours devant la chambre de céans sera rejeté.

4) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 avril 2022 par Mme A______ contre la décision du département de l’économie et de l’emploi du 10 mars 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de Mme A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Mme A______ ainsi qu'au département de l'économie et de l'emploi.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

B. Specker

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :