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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/840/2016

ATA/1502/2017 du 21.11.2017 ( DIV ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : DÉCISION ; DÉCISION D'IRRECEVABILITÉ ; ACTION DE DROIT ADMINISTRATIF CANTONALE
Normes : LPA.4; LPA.65.al1; LPA.65.al2; LOJ.132.al3
Résumé : irrecevabilité d'un recours contre une lettre du Conseil d'État adressée à la Ville de Genève et portant sur la compétence en matière de gestion des horodateurs sur le territoire de la Ville de Genève. La lettre n'étant que la dernière en date dans un échange de courriers ayant le même contenu, portant sur le même sujet, entre les parties, le recours est tardif, même dans le cas où la lettre devait être qualifiée de décision, question qui a été laissée ouverte. Irrecevabilité de l'action de droit administratif, l'acte déposé auprès de la chambre administrative ne contenant pas de conclusions motivées.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/840/2016-DIV ATA/1502/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 novembre 2017

 

dans la cause

 

VILLE DE GENÈVE

contre

CONSEIL D'ÉTAT
représenté par Me Yvan Jeanneret, avocat



EN FAIT

1) Le 15 décembre 2015, la Ville de Genève (ci-après : la ville) a dénoncé l’accord qui la liait à l’État de Genève en matière de stationnement et d’horodateurs, avec effet au 29 février 2016.

Cet accord du 9 juin 2009, prévoyait des versements d’une compensation financière à la ville à hauteur de CHF 5 millions pour l’année 2010, payables au 31 décembre 2010 ; CHF 3 millions pour l’année 2011, payables au 31 décembre 2011 ; CHF 1 million pour l’année 2012, payables au 31 décembre 2012 (art. 1 de l’accord) ainsi qu’une renonciation à des sommes supplémentaires en relation avec le manque à gagner résultant de la reprise par l’État du contrôle du stationnement sur le territoire de la ville confié jusqu’à présent aux agents municipaux (art. 2 de l’accord).

La ville exposait au Conseil d’État que cet accord, par laquelle elle avait renoncé au contrôle du stationnement sur son territoire, n’était pas irrévocable ou d’une durée illimitée. La composante domaniale des taxes de stationnement perçues sur le territoire de la ville devait revenir à la commune. Un accord devait être trouvé et des discussions être engagées.

2) Par lettre du 10 février 2016, le Conseil d’État a répondu à la ville.

Au vu de la compétence de l’État en matière de gestion de la circulation au sens large et de l’historique détaillé, la ville avait renoncé au contrôle du stationnement sur son territoire, et ceci sans limite de temps et sans clause de dénonciation. Un accord tripartite avait été signé le 9 juin 2009 par les parties avec la Fondation des parkings (ci-après : FPark) à qui l’État avait confié le contrôle du stationnement par le biais d’un contrat de prestations ayant fait l’objet d’une loi de ratification adoptée par le Grand Conseil.

La ville avait renoncé au contrôle sur son territoire en juin 2009, soit antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi sur les agents de police municipale, les contrôleurs municipaux du stationnement et les gardes auxiliaires de communes du 20 février 2009 (LAPM - F 1 07), si bien que la compétence donnée par cette loi aux communes, entrée en vigueur le 1er janvier 2010, ne s’appliquait pas dans son cas.

Les taxes horodateurs ne pouvaient être qualifiées de taxe d’usage du domaine public et la commune n’avait strictement aucun droit sur leur perception.

3) Par acte mis à la poste le 14 mars 2016, la ville a interjeté recours à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la lettre du Conseil d’État du 10 février 2016, en concluant à l’annulation de la décision prise, à la reconnaissance du droit de la ville d’exercer elle-même le contrôle du stationnement sur son territoire et à celle que l’accord de la ville était nécessaire pour que la FPark puisse poursuivre ses activités de contrôle du stationnement sur son territoire.

Alors que la ville effectuait le contrôle du stationnement sur son territoire avec ses propres agents, elle avait conclu une première convention du 4 août 2003 avec le canton de Genève qui prévoyait que la FPark était habilitée à exercer le contrôle des places de stationnement soumises à paiement sur le territoire de la ville, concurremment avec les différents corps compétents.

Le canton ayant dénoncé cette convention avec effet au 31 décembre 2009, deux conventions portant sur le transfert à la FPark du contrôle du stationnement sur le territoire de la commune avaient été conclues les 9 juin 2009, l’une entre l’État de Genève, la ville et la FPark et l’autre entre l’État de Genève et la ville.

Ces conventions encadraient la réorientation des agents de la police municipale vers d’autres missions que le seul contrôle du stationnement sans qu’ils ne délaissent complètement cette tâche. La convention bilatérale avait pour objet de régler pour une période limitée de trois ans la phase transitoire liée à l’arrivée de la FPark en prévoyant un dédommagement de la ville. La convention tripartite tendait à gérer concrètement l’arrivée des agents de la FPark et comprenait l’accord de la ville quant à l’action de ceux-ci. Cet accord ne s’entendait pas pour une durée éternelle mais devait être redéfini dans le cadre d’une nouvelle négociation conventionnelle.

La ville s’était donc étonnée en 2014 que le Conseil d’État procède au renouvellement de textes bilatéraux avec la FPark, concernant le territoire de la commune sans la consulter. À la suite de plusieurs échanges de lettres avec le Conseil d’État entre le 18 février et le 11 novembre 2015 et à la position inamovible du canton déniant toute compétence ou intérêt à la ville sur cette question, elle avait formellement dénoncé les conventions de 2009, le 15 décembre 2015 pour le 29 février 2016, pour autant qu’elles déploient encore des effets.

Le 22 décembre 2015, la FPark avait pris acte de la dénonciation et le canton avait maintenu sa position le 10 février 2016, soutenant que la ville avait renoncé de manière définitive et intemporelle à exercer le contrôle du stationnement sur son territoire.

Dans la mesure où la théorie du contrat de droit administratif n’excluait pas catégoriquement qu’une des parties puisse se déterminer par voie décisionnelle, elle interjetait recours en posant l’hypothèse que le courrier du 10 février 2016 valait décision au sens de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). Elle invoquait son autonomie, ce qui lui conférait la qualité pour recourir.

La décision n’était pas motivée mais elle était illégale car elle niait à la ville le droit d’exercer une tâche que la loi lui reconnaissait sans condition. Il n’y avait pas eu de renonciation définitive mais une renonciation temporaire à exercer ses compétences en application du principe de la proportionnalité.

La gestion par la FPark supposait l’aval de la commune concernée à teneur du texte légal clair.

4) Le 26 avril 2016, le Conseil d’État a répondu au recours en concluant à son irrecevabilité et subsidiairement à son rejet.

La première convention entre les parties, qui avait été signée le 10 mai 1982 et était entrée en vigueur le 1er janvier 1983, portait sur la délégation de compétence de l’État en faveur de la ville.

La seconde convention des 15 juillet et 4 août 2003 portait sur la délégation à la FPark du contrôle des places de stationnement soumises à paiement en ville, concurremment avec les différents corps compétents. La coordination entre ces différents corps était assurée par l’ancien département de justice, police et sécurité. Le produit des amendes d’ordre qui étaient perçues par la FPark devait être partagé par moitié entre la ville et l’État de Genève. La dénonciation au 31 décembre de l’année suivante était prévue.

Le 18 décembre 2008, le Conseil d’État avait dénoncé la convention de 2003 pour le 1er janvier 2010 et informé la ville que les modalités de la reprise du contrôle du stationnement par l’État sur le territoire de la commune ainsi que sa délégation à la FPark allaient faire l’objet de discussions entre les parties.

Le 9 juin 2009 un accord avait été trouvé entre les parties et la FPark et deux conventions signées. Puisque les agents municipaux étaient affectés à d’autres tâches et que la ville ne bénéficierait plus des recettes liées à l’activité de contrôle du stationnement, les parties avaient convenu une compensation financière dégressive pour un total de CHF 9 millions en faveur de la ville.

Le Conseil d’État et la FPark avaient mis en place un premier contrat de prestation pour l’année 2010, ayant fait l’objet d’une loi de ratification du 18 novembre 2010 ; un deuxième contrat de prestations portant sur la période 2011 à 2013 puis un troisième pour la période 2014 à 2016, avaient fait l’objet de lois de ratification subséquemment.

La lettre querellée était la dernière d’une longue série de lettres échangées entre les parties ayant toutes pour objet la question de la compétence du contrôle du stationnement en ville. Bien que plus détaillée, la lettre du 10 février 2016 n’apportait aucun élément nouveau permettant de considérer qu’elle remplirait les critères d’une décision au sens de la LPA. La première lettre ayant un contenu similaire à celle du 10 février 2016 datait du 23 juillet 2014 et répondait à une lettre de la ville du 30 avril 2014, de sorte que le recours était tardif.

Sur le fond, la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01) prévoyait que les cantons étaient compétents en matière de stationnement. L’une des mesures pouvant être envisagée dans le contexte des dispositions de la LCR était celle du parcage contre paiement. Le canton de Genève avait décidé de garder une compétence exclusive en la matière. L’autonomie des communes ne s’exerçait que dans les limites de l’ordre juridique. Les recettes des horodateurs lui revenaient de plein droit.

Pour le surplus, le Conseil d’État répondait point par point à l’argumentation de la ville.

5) Le 18 mai 2016, la ville a répliqué.

Si l’affaire ne se prêtait pas à être tranchée par une décision administrative unilatérale du canton à l’égard de la commune, il fallait subsidiairement envisager de la traiter par la voie d’une action de droit public. Le litige porterait alors sur la question de savoir si les accords de 2009 liaient encore la ville et correspondaient à une renonciation définitive et irrévocable de l’exercice des compétences de contrôle du stationnement. Dans cette perspective, la cause devrait être traitée par la chambre administrative en tant qu’action pécuniaire de droit public.

La ville développait encore la portée des différents accords signés qui prouvaient que la législation cantonale ne laissait pas de place au Conseil d’État pour distribuer aux communes selon son bon vouloir le droit de percevoir le revenu des horodateurs.

6) Le 13 juin 2017, la ville s’est déterminée suite à la communication de l’arrêt du 19 mai 2017 de la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : chambre constitutionnelle ; ACST/6/2017) rendu dans la cause opposant dix-huit communes genevoises, dont la ville, au Conseil d’État et portant sur un arrêté du 10 février 2016 intitulé « concernant les horodateurs et les parcomètres conformément à la loi d’application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 (LaLCR - H 1 05) ». Dans cet arrêt, la chambre constitutionnelle a retenu que l’arrêté attaqué constituait un acte normatif qui aurait dû revêtir la forme d’un règlement. Dans le canton de Genève la taxe de parcomètre avait une nature mixte, combinant une taxe de contrôle et une taxe d’usage accru du domaine public. La loi attribuait ou co-attribuait aux communes et au canton la compétence du contrôle du stationnement. Il n’y avait pas de disposition légale dérogeant à l’affectation à la ville de Genève de la part domaniale de la taxe de parcomètre et une loi ratifiant le contrat de prestations passé entre l’État et la FPark ne pouvait se voir reconnaître le sens et l’effet de valider sa pleine dévolution à l’État. En conséquence, l’arrêté enfreignait le principe de la légalité, aucune disposition ne permettait d’apporter une modification significative aux rapports entre l’État et les communes en matière de stationnement sur la voie publique contre paiement. Les dispositions de l’arrêté ne constituaient pas des normes d’exécution et ne reposaient pas sur une clause de délégation législative. Les dispositions de l’arrêté étaient dépourvues de validité et l’arrêté était annulé.

La ville ne souhaitait pas modifier les conclusions prises dans son recours, l’arrêt de la chambre constitutionnelle la confortait dans son raisonnement.

Le 12 mai 2017, le Grand Conseil avait adopté une loi de ratification du contrat de prestations conclu entre l’État et la FPark, accordant une indemnité de CHF 28'331'637.- à la FPark pour les années 2017 à 2019 pour la prestation de contrôle du stationnement en ville (Loi 11'923). Celle-ci contenait une disposition prévoyant que, selon le principe de l’égalité de traitement, et pour autant que la ville ait contesté la convention de 2009, le Conseil d’État veillait à ce qu’une nouvelle convention soit négociée avant l’échéance du contrat de prestations avec la FPark (art. 10A Loi 11'923). Le Conseil d’État devait se déterminer à ce sujet pour savoir si le recours conservait encore un intérêt concret.

7) Le 26 juin 2017, le Conseil d’État a maintenu ses conclusions en irrecevabilité du recours. L’action de droit public n’était pas non plus recevable, l’objet du contentieux ne découlait pas d’un contrat de droit public et pouvait faire l’objet de décisions.

8) Le 10 juillet 2017, la ville a transmis une lettre du Conseil d’État adressée à l’association des communes genevoises du 28 juin 2017, concernant un avant-projet de loi modifiant tant la LaLCR que la loi cantonale sur la FPark, dans le but de supprimer l’accord des communes lorsque le Conseil d’État fixait par convention les conditions dans lesquelles la FPark pouvait exercer un contrôle du stationnement.

EN DROIT

1) Le recours à la chambre administrative est ouvert contre les décisions au sens des art. 4, 4A et 57 LPA prises par des autorités ou des juridictions administratives visées aux art. 5, respectivement 6 al. 1 let. a à e LPA (art. 132 al. 2 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). En outre, la chambre administrative connaît en instance cantonale unique des actions fondées sur le droit public qui ne peuvent pas faire l’objet d’une décision et qui découlent d’un contrat de droit public (art. 132 al. 3 LOJ).

2) La recourante considère que le courrier de l’intimé du 10 février 2016 est une décision lui déniant tout droit sur les revenus liés au contrôle des places de parcage munis d’horodateurs sur son territoire.

3) a. Au sens de l’art. 4 al. 1 LPA, sont considérées comme des décisions les mesures individuelles et concrètes prises par l’autorité dans les cas d’espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal ou communal et ayant pour objet de créer, de modifier ou d’annuler des droits et des obligations (let. a), de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits, d’obligations ou de faits (let. b), de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou des obligations (let. c). Selon l’art. 4 al. 4 LPA, lorsqu’une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision.

b. En droit genevois, la notion de décision est calquée sur le droit fédéral (art. 5 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 -
PA - RS 172.021 ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2015, p. 101), ce qui est également valable pour les cas limites, ou plus exactement pour les actes dont l’adoption n’ouvre pas de voie de recours. Ainsi, de manière générale, les communications, opinions, recommandations et renseignements ne déploient aucun effet juridique et ne sont pas assimilables à des décisions, de même que les avertissements ou certaines mises en demeure (arrêts du Tribunal fédéral
1C_593/2016 du 11 septembre 2017 consid. 2.2 ; 8C_220/2011 du 2 mars 2012 consid. 4.1.2 in SJ 2013 I 18 ; ATA/76/2017 du 31 janvier 2017 ; ATA/946/2016 du 8 novembre 2016 ; Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 7ème éd., 2016, p. 195 n. 874 ss ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 269 ss n. 783 ss ; Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, pp. 179 ss n. 2.1.2.1 ss et 245 n. 2.2.3.3). La confirmation d’une décision antérieure ne constitue pas une décision (Benoît BOVAY, op. cit., p. 349).

c. Toute décision administrative au sens de l’art. 4 LPA doit avoir un fondement de droit public. Il ne peut en effet y avoir décision que s’il y a application, au travers de celle-ci, de normes de droit public (Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, p. 314 n. 857 ; Pierre MOOR/Etienne POLTIER, op. cit., p. 194 n. 2.1.1.1). De nature unilatérale, une décision se réfère à la loi dont elle reproduit le contenu normatif de la règle (Pierre MOOR/Etienne POLTIER, op. cit., p. 174 n. 2.1.1.1 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., p. 274 n. 798). Une décision tend à modifier une situation juridique préexistante. Il ne suffit pas que l’acte visé ait des effets juridiques, encore faut-il que celui-ci vise des effets juridiques. Sa caractéristique en tant qu’acte juridique unilatéral tend à modifier la situation juridique de l’administré par la volonté de l’autorité, mais sur la base et conformément à la loi (ATA/766/2016 du 13 septembre 2016 ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, op. cit. p. 320 n. 876).

 4) En l’espèce, en date du 23 juillet 2014, le Conseil d’État a répondu à la ville qui lui avait demandé, le 30 avril 2014, selon quelles modalités l’État entendait rétrocéder à la ville une partie des recettes générées par l’activité de la FPark sur son territoire. Aucune rétrocession n’était envisageable en raison de la compétence exclusive de l’État en matière de gestion de la circulation au sens large.

Dans plusieurs lettres, notamment celles du 18 février 2015, 10 juin 2015 et 11 novembre 2015, le Conseil d’État n’a fait que répéter que les recettes des horodateurs devaient revenir à l’autorité qui détenait la compétence en matière de gestion de la circulation, y compris du stationnement, sur le territoire cantonal.

En conséquence, il apparaît que la lettre du 10 février 2016 ne contient aucun élément nouveau, si ce n’est l’annonce de l’adoption de l’arrêté sur les horodateurs du même jour contre lequel la ville a par ailleurs interjeté recours et que la chambre constitutionnelle a qualifié d’acte normatif qui aurait dû revêtir la forme d’un règlement, voire d’une loi (ACST/6/2017 précité consid. 1d).

Il faut dès lors conclure que, même si le contenu des différents courriers susmentionnés était susceptible de répondre à la définition d’une décision au sens donné ci-dessus, question qui sera laissée ouverte, la lettre du 10 février 2016 ne constitue que la confirmation de la position inchangée de l’intimé, qu’il a exprimée à nombreuses reprises dans des actes similaires adressés à la recourante depuis le 23 juillet 2014 et, en conséquence, le recours serait tardif.

5) De surcroît, le Conseil d’État a adressé le 10 février 2016 l’arrêté sur les horodateurs, accompagné d’un courrier, à toutes les communes concernées par la mise en place d’une politique de stationnement contre paiement, ainsi qu’à l’association des communes genevoises. Celui adressé à la ville ne diffère pas des autres, dans la mesure où il ne fait qu’exposer la volonté du Conseil d’État de transférer à l’État, ou de maintenir un transfert antérieur dans le cas de la ville, tant les horodateurs et parcomètres que les recettes et charges correspondantes.

Dans son arrêt, la chambre constitutionnelle a retenu que rien ne permettait de considérer que la ville n’entrerait pas dans le champ d’application de l’arrêté entrepris qui lui déniait à elle aussi la compétence d’acquérir, installer et exploiter des parcomètres et horodateurs sur le domaine public, à ses frais mais aussi à son profit (ACST/7/2017 consid. 4 c.).

Le courrier accompagnant l’envoi de l’arrêté à la ville et répondant à une lettre de celle-ci, ne constitue donc pas une décision distincte dans la mesure où, rien ne différencie le contenu de la lettre de celui de l’arrêté pris par le Conseil d’État qui règle déjà la question en matière de gestion des horodateurs pour la ville.

À ceci s’ajoute que l’objet central et essentiel du contentieux concerne un conflit de compétences opposant la recourante au Conseil d’État qui, en tant que tel, relève de la compétence de la chambre constitutionnelle et non de la chambre administrative (art. 130B al. 2 LOJ).

En conséquence, en tant qu’il est déposé contre le courrier du 10 février 2016 du Conseil d’État, le recours est irrecevable.

6) Reste à examiner si, comme le requiert la recourante, une action fondée sur l’art. 132 al. 3 LOJ est recevable, la ville fondant son action sur l’accord de 2009 conclu avec le Conseil d’État.

a. La chambre administrative connaît en instance cantonale unique fondées sur le droit public qui ne peuvent pas faire l’objet d’une décision et qui découlent d’un contrat de droit public (art. 132 al. 3 LOJ).

b. La ville a dénoncé elle-même l’accord qui la liait au Conseil d’État. Elle ne peut ainsi se fonder sur cet accord pour intenter une action de droit administratif, sauf à violer les règles de la bonne foi. Il n’est dès lors pas nécessaire non plus d’examiner si cet accord avait déjà pris fin le 31 décembre 2012 et ne portait que sur les trois années de compensation.

De surcroît, l’action de droit répond aux mêmes exigences formelles que le recours (art. 132 al. 3 dernière phrase LOJ) et doit donc contenir des conclusions motivées (art. 65 al. 1 et 2 LPA), ce que l’acte déposé auprès de la chambre administrative ne contient pas.

En conséquence, l’action de droit administratif fondée sur l’art. 132
al. 3 LOJ est également irrecevable.

En outre, la loi 11'923 adoptée le 12 mai 2017 par le Grand Conseil et promulguée le 26 juillet 2017 prévoit que le Conseil d’État négocie une nouvelle convention avec la ville.

7) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la ville (art. 87 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à l’intimé qui dispose de son propre service juridique (art. 87 al. 2 LPA ; ATA/753/2016 du 6 septembre 2016 et les références citées).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 14 mars 2016 par la Ville de Genève contre la lettre du Conseil d’État du 10 février 2016 ;

déclare irrecevable l’action de droit administratif du 14 mars 2016 de la Ville de Genève contre l’État de Genève ;

met à la charge de la Ville de Genève un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à de la Ville de Genève, ainsi qu'à Me Yvan Jeanneret, avocat du Conseil d'État.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Junod, MM. Pagan et Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le

 

la greffière :